ECole des femmes - Collège Condorcet
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ECole des femmes - Collège Condorcet
Comité des jeunes spectateurs de la Scène Nationale Equinoxe. L’Ecole des femmes De Molière Mise en scène de Jean Liermier Critique du spectacle réalisée par la classe de 3ème C du Collège Condorcet de Levroux Livret mis en forme par les enseignants missionnés au Service Educatif d’Equinoxe, Karine Tanneau et Frédéric Duhon,. Le mercredi 9 novembre 2011, notre classe de 3ème C a assisté à la représentation de L’Ecole des femmes de Molière, mise en scène par Jean Liermier. Nous connaissions l’intrigue de la pièce, mais nous l’avons découverte en tant que spectacle vivant. Pour certains d’entre nous, c’était la première sortie dans un théâtre. Nous étions émerveillés par la salle, la scène, les moyens techniques. Quelques uns ont eu la possibilité d’échanger avec des techniciens comme le régisseur général, le régisseur lumière, le régisseur son qui nous ont aimablement expliqué comment ils travaillaient. C’est grâce à l’un de nos professeurs, M. Duhon, qui contribue au service éducatif de la scène nationale Equinoxe. Et puis les lumières se sont éteintes, le rideau s’est ouvert et Arnolphe, Agnès et tous les autres personnages de la pièce se sont animés. Le lendemain, avec notre professeur de français, Mme Peyronnet, nous avons reparlé de la pièce. Ensemble, nous avons réfléchi aux choix de mise en scène : comment on les comprenait, ce qu’on en pensait. Après avoir dressé la liste des accessoires, des costumes, repensé aux éclairages, à la bande son, on a retenu ces idées : - l’utilisation des clochettes ramène Agnès au rang d’animal dressé, tout en servant d’alarme, comme pour un objet qu’Arnolphe aurait peur qu’on lui vole - les costumes : noir dominant d’Arnolphe et blanc dominant d’Agnès s’opposent et se mettent en valeur. Est-ce le secret d’Arnolphe, ces tourments que le noir symbolise ? Agnès la blanche est candide (nota bene des latinistes de la classe : candidus signifie blanc), elle est la victime sacrifiée par la lubie d’Arnolphe. Est-ce pour cela qu’elle porte aussi un vêtement rouge ? - l’éclairage : on a remarqué beaucoup de jeux sur les ombres (projection de l’échelle au sol, lorsque Chrysale fait la leçon à Arnolphe pendant le repas ; les ombres projetées sur le rideau change l’espace scénique, l’agrandissent). On en conclut que c’était pour souligner toutes les oppositions sur lesquelles la pièce était construite (le geôlier et sa prisonnière, le vice et la vertu, l’expérience pervertie et la jeunesse innocente). A partir de notre connaissance du texte et de la mise en scène, on s’est interrogé sur la pièce et sa signification. On est parti de la mise en avant du destin d’Arnolphe, contenue dans son nom (Saint Arnoul, patron des maris trompés ) et de sa passion destructrice pour Agnès (nota bene des latinistes bis : patiri, en latin, signifie subir, souffrir. Donc la passion, ce n’est ni de l’amour ni de la joie). Les efforts d’Arnolphe pour changer le destin font partie des ressorts comiques de la pièce. Ils lui donnent du dynamisme, font progresser l’action. Mais Arnolphe réagit plus qu’il n’agit face aux initiatives d’Agnès et Horace. Arnolphe est un propriétaire. Il aime posséder (Agnès, son épouse idéale, ses serviteurs, sa cachette). Il veut être le maître des gens, comme pour des objets. Il se prend pour un démiurge qui crée une femme à son goût. Mais sa créature lui échappe, et il ne le supporte pas. En fait, sans Agnès, Arnolphe n’est plus rien : depuis qu’elle est toute petite, sa vie tourne autour d’elle. Son avenir n’existe que grâce à sa créature. S’il la perd, il n’a plus de but, plus de raison d’exister. Il échoue. Son désir de toute puissance est contrarié et il ne vivra pas l’apothéose, le couronnement de son succès par un mariage. Il échappe à son destin de cocu, mais en le refusant tout comme il refuse ses faiblesses humaines, il perd Agnès, il perd son identité (il change de nom aussi). On a pensé que ce personnage ressemblait à ceux des mythes grecs que les auteurs du XVIIème siècle reprenaient dans leurs tragédies. Arnolphe veut échapper à son destin, mais comme dans son orgueil il se croit supérieur, il est puni. On a trouvé qu'Agnès était intelligente, sensible, délicate. Elle comprend qu'elle est prisonnière et qu'elle n'a pas d'expérience. Elle se rend compte du mal que lui fait Arnolphe en réfléchissant toute seule. Arnolphe confond le savoir et l'intelligence. D'ailleurs la lettre d'Agnès à Horace est touchante et bien écrite. Elle apparaît d'abord comme une enfant spontannée ( sa gestuelle, ses postures corporelles sans fausse pudeur). Puis elle devient une jeune femme en faisant l'expérience du sentiment amoureux. Pour elle, c'est sa première expérience de la vraie vie, hors de la monotonie et du vide de son quotidien. A la fin, elle est courageuse, fait preuve de droiture et tient même tête à Arnolphe. Horace nous a moins convaincus. D'abord, on a trouvé que la musique rock qui accompagnait ses entrées et ses sorties était inadaptée. Puis on l'a interprété comme une façon de souligner qu'il apportait de l'imprévu dans les plans d'Arnolphe. Mais on n'a pas su décider si on avait raison ou pas. Horace est un jeune homme à la mode, dynamique mais aussi naïf. Il fait penser à un petit garçon enthousiaste qui devient le chevalier ou le héros qui délivre la princesse du donjon où le méchant l'a enfermée. Pourtant, il reste passif lorsque Agnès lui demande de la défendre contre Arnolphe qui l'entraîne. Il vient toujours demander de l'aide. Finalement, il n'est pas indépendant. Agnès, elle, prend des initiatives, des risques. Elle est plus audacieuse qu'Horace. D'ailleurs, elle étonne autant Arnolphe qu'Horace. Les deux hommes la sous-estiment. Est-ce qu'Horace ne serait pas sexiste, finalement? Agnès est l'objet du désir, mais ils ne la considèrent pas comme une égale, capable de penser et d'agir mais la pièce reflète aussi le XVIIème siècle. Agnès déborde d' énergie et de vie. Elle est pleine d'élan lorsqu'elle court et bondit autour de la scène. Mais Arnolphe bride cette vitalité et on a vu la course en rond d'Agnès comme celle d'un cheval fougueux au manège, avec Arnolphe au centre. Pour Arnolphe, Agnès est son bien, un animal à dresser. Son amour et sa soumission sont dus. Il va jusqu'à s'humilier, se rabaisser, jusqu'à s'avilir devant elle quand il la supplie en lui offrant de se faire mal pour son plaisir à elle. Nous avons vu une femme forte, qui s'émancipe. Nous n'imaginons pas qu'elle et Horace forment un couple équilibré car Agnès est devenue autonome, alors que lui n'évolue pas. Aujourd’hui, ils se sépareraient, mais au XVIIème siècle, Agnès ne tromperait-elle pas Horace donnant ainsi raison à Arnolphe ? Comment comprendre une pièce du XVIIème siècle à travers nos mœurs contemporaines ? Pendant notre année de 3ème, nous avons le théâtre au programme. Nous travaillons sur Rhinocéros de Ionesco et nous réfléchissons sur les problèmes de mise en scène. Les latinistes de la classe ont aussi réécrit une pièce de Plaute qu'ils vont jouer pour les 6èmes. Il faut penser à l'intrigue, au public visé, à sa compréhension, à ses réactions. Mettre en scène est difficile car le spectateur doit pouvoir lire nos intentions et chaque choix est une prise de risque. Mais on comprend mieux tout le travail théâtral. Nous remercions Mme Peyronnet, notre professeur de français, qui nous a aidé à rédiger ce texte et nous a apporté du vocabulaire. Les élèves de la classe de 3ème C du Collège Condorcet de Levroux.