Le sort des Juifs de Perse
Transcription
Le sort des Juifs de Perse
fêtes dates Le sort des Juifs de Perse Petit rappel des fondamentaux de Pourim et du livre d’Esther, ou comment le peuple juif a résisté à Aman, Amalek et autres tyrans des temps modernes. Pourim, qui rappelle les événements relatés dans la meguillat Esther/Rouleau d’Esther, est célébré le 14 Adar. Le Chabbat qui précède Pourim est appelé Chabbat Zakhor/Chabbat souviens-toi, car on y lit un passage supplémentaire de la Torah qui commence par ces mots : zakhor èt achèr assa lekha Amalek/souviens-toi de ce que te fit Amalek (Deutéronome 25:17-19). Dans la Tradition, Amalek est identifié à Aman qui symbolise l’ennemi implacable du peuple d’Israël. Sur le fronteau du Mémorial de la Shoah à Paris se trouvent ces mots repris par Schnéour Zalman dans un poème commémorant les victimes de l’ « Amalek des temps modernes », Hitler. A travers son atmosphère joyeuse et carnavalesque, Pourim insiste sur l’un des thèmes principaux de l’histoire juive, celui de la survivance du peuple juif malgré les tentatives d’annihilation fomentées par ses ennemis. Le nom Pourim vient du mot pour/sort car le jour prévu pour l’extermination des Juifs avait été tiré au sort par Aman (Esther 3,7). Il est vrai qu’à plusieurs reprises, notre peuple a vu son sort réduit à peu de choses. La joie de Pourim est un peu celle de l’étonnement devant le miracle de la survie. Le livre d’Esther raconte l’histoire de deux Juifs assimilés qui vivaient dans le royaume de Perse. Ils avaient changé de noms: Mordehaï vient de Mardouk, principale divinité perse et Esther d’Astarté ou Ishtar, c’est-à-dire Vénus. Le fait d’être assimilé ne valut aucune protection aux Juifs de l’époque, phénomène qui devait se répéter par la suite. Une des leçons de ce livre est donc de montrer que des Juifs conscients de leur héritage et de leur identité peuvent mieux servir le monde qui les entoure et mieux s’opposer aux menées irrédentistes de leurs adversaires, puisque la délivrance apparaît dès le moment où Mardochée et Esther affirment leur identité. Il insiste sur la nécessité de ne pas cacher notre identité, de prendre les mesures nécessaires, y compris politiques, pour assurer la défense de notre existence et d’agir avec détermination. La Meguillat Esther nous rappelle que Mardochée, parent d’Esther, refusa de se prosterner devant Aman, le vizir du roi Assuérus. C’est ce refus qui déplut à Aman et lui fournit le prétexte pour essayer de mettre en route le processus d’extermination du peuple juif. L’accusation d’Aman est devenue le paradigme de l’antisémitisme: Il est une nation répandue, disséminée parmi les autres nations dans les provinces du royaume; ces gens ont des lois qui diffèrent de celles de toute autre nation; quant aux lois du roi, ils ne les observent point, il n’est donc pas dans l’intérêt du roi de les conserver (Esther 3,8). L’action volontaire de Mardochée et celle courageuse d’Esther permirent de s’opposer à l’entreprise d’Aman. Pourim rappelle ainsi les dangers qu’affronte toute minorité. Les sentiments de haine sont encore, hélas, très répandus. L’antisémitisme n’a pas disparu et cependant le peuple juif a survécu. C’est pourquoi Pourim est une histoire et une fête joyeuses, et rappelle que l’on peut triompher du mal absolu. René Pfertzel, à partir de l’ouvrage de François Garaï, Le monde des mitzvot, Genève, 1998. ➜ Du 25 février au 2 mars : les jeunes sont en voyage inter-communautés libérales au Pays de Galles. ➜ Vendredi 7 mars à 19h15 : office de Kabbalat Shabbat animé par les jeunes ; parasha Pekoude. ➜ Vendredi 21 mars à 19h15 : office de Kabbalat Shabbat animé par René Pfertzel. ➜ Samedi 22 mars à 10h : office de Shabbat durant laquelle nous lirons la parasha Tsav. ➜ Samedi 22 mars à 18h : fête de pourim, lecture de la Meguila et lectures de contes. ➜ Samedi 29 mars à 19h45 : le CPJL propose un concert de musiques traditionnelles juives : chants judéo-espagnols avec le groupe Presensya et musique klezmer avec le groupe Zemer Vekinor. Le buffet de spécialités variées sera ouvert à partir de 19h. Lieu : salle Espace citoyen, 12 avenue Jean Mermoz (derrière la Maison de la Danse). Tarifs : 18 euros, 10 euros pour les moins de 18 ans, les étudiants et les chômeurs. Réservations au 06 78 93 03 39 ➜ Dimanche 30 mars à 11h : assemblée générale. Venez nombreux ! ➜ Vendredi 4 avril à 19h15 : office de Kabbalat Shabbat animé par les jeunes ; parasha Tazria. ➜ Vendredi 11 avril à 19h15 : Nous aurons le plaisir de célébrer la Bat-Mitzvah de Clara Sarrano, qui sera accompagnée du rabbin Daniel Farhi. ➜ Samedi 12 avril à 10h : Clara Sarrano animera l’office du samedi matin. Venez nombreux l’encourager ! ➜ Dimanche 20 avril à 18h00 : Seder communautaire (2e soir Pessah). Réservez votre soirée. ➜ 17 février : Cérémonie Yzkor 1 an depuis le décès d’Elodie Gartner au Cimetière de Cusset à 11h ➜ lundi 10 mars à 20H : Maison du Bnai brith 7 avenue du Général Leclerc 69007 LYON, la WIZO reçoit le Père DESBOIS ➜ Mercredi 12 Mars : Inauguration du Centre Hillel en présence de Shimon Peres horaire à confirmer. Lettre bimestrielle de l’union juive libérale de lyon Ont participé à ce numéro : Danielle Touati, Brigitte Frois, Daniel Farhi, Stephen Berkowitz, Célia Surget, René Pfertzel, Frédéric Zeitoun, Richard et Frédéric Guedj. Courriel rédaction : [email protected] le site de l’UJLL : http://www.ujl-lyon.com le blog d’Itoni : http://blog.itoni.org UJLL : 14 rue Garibaldi, 69006 Lyon (code porte : 5682) 6 Présidente : Daniela Touati,, Secrétaire : Richard Guedj, Tél. : 04 72 82 06 83 - Courriel : [email protected] Prix : 7€ - Abonnement annuel (4 à 5 numéros) : 40€ Lettre bimestrielle de l’union juive libérale de lyon “mon journal” #24 février mars 2008 adar I & 2 nisan 5768 edito Communiquer est un art... UJLL 5 ans déjà sommaire La “street music” juive américaine p. 2 Le cinéma israélien p. 3 Livres p. 4 Judéité, laïcité, citoyenneté p. 5 Pourim p. 6 par daniela touati “Communiquer est un art” me disait une amie récemment pour s’excuser d’avoir oublié de me transmettre une information, alors que nous nous parlons quotidiennement… Bien qu’une multitude d’outils soient à notre disposition (sms, mails, blogs ..etc.), la plupart d’entre eux sont de plus en plus sophistiqués et destinés parfois à un public averti, rien n’empêche les erreurs et les maladresses. À l’UJLL, nous sommes très bien conseillés à cet égard : notre bulletin bimestriel recueille de bons échos, et notre site web ujl-lyon.com, lancé il y a à peine un an, a suscité un grand nombre de visites et de demandes de renseignements, qui aboutissent la plupart du temps à de nouvelles adhésions. Chaque article dans Itoni, ou sur notre site et a fortiori chaque contact avec des personnes qui s’intéressent à notre Communauté est un moyen de communiquer sur ce que nous sommes et sur nos valeurs libérales. Lorsque nous nous retrouvons pour un office, c’est également un moment fort de “communication” et la même authenticité anime ces moments. J’invite vivement nos jeunes amis élèves du Talmud Torah ainsi que leurs parents à venir profiter de ce lieu, de ce moment entre parenthèses, qui nous permet tous les 15 jours, de méditer, de se questionner et de se retrouver dans un moment de simple convivialité. En organisant pour la première fois de son existence, en novembre dernier, son Assemblée Générale en France au MJLF, la European Region (branche de la World Union for Progressive Judaism) a également fait un acte de communication. Nos amis anglais (où siège la European Region) ont ainsi voulu montrer l’intérêt croissant qu’ils portent aux pays francophones et notamment à la France, deuxième pays d’Europe en nombre de juifs libéraux. C’est également une manière d’impliquer davantage les pays non anglophones dans les décisions prises. Au cours de cette réunion, plusieurs projets ont été évoqués afin d’aider les communautés à se développer : ➜ Mettre à disposition du matériel pédagogique pour les enfants des Talmud Torah, en anglais mais aussi en langue locale, ➜ Donner des cours aux enseignants du Talmud Torah, ➜ Créer un système de parrainage entre une communauté anglaise (prospère et mature) et une autre communauté européenne, afin de l’aider dans son développement, ➜ Soutenir les études rabbiniques d’étudiants de jeunes communautés en développement, ➜ Diffuser des informations concernant les rabbins disponibles, prêts à se déplacer en dehors de leur pays (grandes fêtes), ➜ Encourager les échanges entre jeunes des différentes communautés, (organisme Netzer existant en Israël et dans quasi toute l’Europe, sauf en France !) et créer des groupes nationaux. Dans ce cadre, l’initiative réussie de Célia Surget d’animer un camp de vacances intercommunautaires en février, est renouvelée cette année. ➜ Encourager le développement de la nouvelle Yeshiva de Berlin Abraham Geiger College. Enfin une nouvelle qui concerne plus directement l’UJLL : René Pfertzel, au cours de cette réunion, a déposé officiellement sa candidature afin d’entamer des études rabbiniques. Son dossier a été accepté, et dès la rentrée 2008 il démarre son cursus à Paris. Il est disposé à accompagner de plus près encore notre Communauté (offices tous les 15 jours, cours d’initiation, soutien au Talmud Torah…) et nous sommes ravis de la tournure des évènements. Cordial Shalom ! www.ujl-lyon.com CULTURE op... Judaïc hip-h ... ou l’émergence de la “street music” juive américaine Un peu partout dans les rues de Harlem et de Brooklyn apparaît une variante du jazz, plus rythmée, plus répétitive, et ponctuée de couplets parfois chantés, parfois parlés : le hip-hop. U n peu partout dans les rues de Harlem et de Brooklyn apparaît une variante du jazz, plus rythmée, plus répétitive, et ponctuée de couplets parfois chantés, parfois parlés : le hip-hop. Le rap vient quelques années plus tard, et rompt le lien direct avec la musique noire des années 50. C’est avant tout le texte qui prime, et le message qui l’accompagne. Et ce message est clair et incisif, parfois même violent. Il prône l’égalité (si ce n’est la supériorité) des “Noirs” par rapport aux Blancs”, et fait référence aux siècles d’esclavage et d’oppression. Jacques Grober, compositeur-interprète spécialiste du folklore yiddish ne perçoit pas le message de cette manière. Il se considère d’ailleurs lui-même comme un amoureux des arts populaires et de «la culture des pauvres», et de ce fait, il voit dans le rap une autre facette du combat qu’il a toujours mené contre les injustices, contre l’oppression des minorités les plus faibles. Lors de l’une de ces représentations, il tient ce qui va devenir un discours fondateur pour la musique populaire juive américaine : «On entend à Harlem un chant nouveau, le rap. Chaque mot, chaque note est comme un poing qui frappe. Chaque question est comme un coup de griffe. Peut-être le chanteur veut-il briser les chaînes d’un ancêtre lointain, d’un esclave africain ? Peut-être un rap yiddish pourrait-il lui aussi arracher pour toujours les barbelés des camps ?». New York est le coeur de cet heureux mélange, le paradis d’une mixité sociale toujours cachée, souvent pratiquée avec pudeur, derrière de prétendus discours communautaristes. Derrière les guerres de gangs et de communautés, la face non-visible de ces apparents clivages, c’est l’échange culturel. Et le rap, le hip-hop ou le reggae en sont les preuves concrètes. Matthew Paul Miller naît dans ce contexte là. Une fois arrivé à Brooklyn, il fait face à cette effusion inévitable de culture populaire, qui enrichit considérablement son registre musicale. Fan de Bob Marley et de Phish, qu’il accompagne en tournée, il devient un inconditionnel du reggae et de la «roots music». Il se laisse pousser les dread et teste toutes les drogues possibles et imaginables, et finit par ne vivre que pour et par la musique hip-hop et roots, dans laquelle il retrouve une certaine spiritualité, parfois similaire à celle que lui a véhiculé sa famille. Après des échecs scolaires répétitifs, , et après avoir expérimenté différents types d’écoles, des plus strictes aux plus «hippies», il change radicalement de mode de vie et commence à s’intéresser au judaïsme orthodoxe en 2001. Il rejoint ensuite une yeshivah hassidique, et se met à pratiquer le judaïsme à l’extrême, jusqu’à reprendre le nom qu’il a reçu pour sa Brith Milah, Matisyahu. A vrai dire, le chemin qu’il a parcouru sur un plan purement spirituel n’a rien d’original, car les yeshivot hassidique, depuis une dizaine d’années, ont largement recruté chez les jeunes juifs new-yorkais en échec scolaire où à la recherche d’un quelconque environnement idéologique. samedi 22 mars 10 h Dimanche 30 mars 11 h sam 1er mar A D A R sam 8 mar 1 AG sam 15 mar TT samedi 12 avril 10 h office de chabbat office de kabbalat chabbat TT sam 22 mar A D A R office de kabbalat chabbat vend. 4 avril 19 h 15 fête de Pourim TT vend. 11 avril 19 h 15 concert samedi 22 mars 18 h office de kabbalat chabbat TT @ À voir L’incontournable site du label JDub (qui ne compte plus Matisyahu dans ses artistes). www.jdubrecords.org www.myspace.com/socalled/ samedi 29 mars 19 h 45 office de chabbat vend. 7 mars 19 h 15 Richard Guedj vend. 21 mars 19 h 15 office de kabbalat chabbat 2 Mais Matisyahu a gardé en lui quelque chose qui le rend différent de ses camarades étudiants en attente du Messie. Il a gardé la musique, pas celle de Dieu, mais celle de sa jeunesse, celle de la Jamaïque. Et la foi qu’il a rencontré n’a fait que confirmer son amour pour le reggae et pour cette musique rythmée dont il ne peut manifestement pas se passer. Et tant pis s’il n’a pas le profil, l’habit ne fait pas le rappeur. Le label JDub, spécialisé dans la musique juive underground, le repère et le propulse. Si le phénomène intrigue d’abord les autres étudiants de la yeshivah, avec un album discret, il finit par attirer des foules variées, et son album suivant, Live At Stubb’s, est un véritable succès qui le place dans le Top Ten des ventes. Dés lors, il est reconnu dans le milieu reggae comme un artiste à part entière, voire comme un rasta. Son look fait sourire ses fans, son beat box enflamme ses concerts. Jacques Grober peut être content. Matisyahu, le premier rappeur hassidique, est né. sam 29 mar TT sam 5 avr sam 12 avr sam 2 vacan tribune ✡✡✡✡✡ Judéité, citoyenneté Par Daniel Farhi, Stephen Berkowitz et Célia Surget, rabbins du Mouvement Juif Libéral de France. D isons-le d’emblée : malgré les vicissitudes de leur histoire au sein de notre pays (notamment l’antisémitisme de l’affaire Dreyfus et celui des années du nazisme), les juifs ont acquis un statut tout à fait satisfaisant et honorable, à l’égal des autres communautés confessionnelles. Dans le paysage laïc de la France républicaine, ils peuvent concilier, sans problèmes majeurs, leur fidélité à leur foi ancestrale et leur citoyenneté. Les décisions du Grand Sanhédrin de 1807 avaient permis de sauvegarder à la fois la judéité, la laïcité et la citoyenneté de nos ancêtres du XIXe siècle. Aujourd’hui, au nom d’une laïcité mal interprétée, certains de nos coreligionnaires présentent des exigences peu conformes à l’esprit qui animait les rédacteurs du Grand Sanhédrin. Le Talmud lui-même avait déjà énoncé le fameux principe : Dina demalekhouta dina «a loi du royaume (de l’État) est la loi» , au nom duquel le juif est tenu de se soumettre à la loi civile de son pays dans la mesure où elle ne le contraint pas à des actes immoraux (meurtre, adultère, idolâtrie). Mais alors, comment comprendre les demandes de saisine de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), de la part d’associations juives ? Créée en 2004, la Halde a pour mission générale, rappelons-le, de lutter contre les discriminations prohibées par la loi, de fournir toute l’information nécessaire, d’accompagner les victimes, d’identifier et de promouvoir les bonnes pratiques pour faire entrer dans les faits le principe d’égalité. Il ne semble pas a priori que les demandes de saisine enregistrées ces derniers mois, en provenance des dites associations juives, entrent vraiment dans le cadre de discriminations ou d’atteintes à la liberté. En France, chacun peut revendiquer son identité sans oublier sa citoyenneté. Ce qui est demandé à chacun est de s’intégrer à la communauté nationale, non de s’assimiler. Cette nuance est essentielle : elle est de nature à rassurer les membres de toutes les minorités nationales sur le fait que la République ne leur demande pas de disparaître culturellement ou religieusement, mais, tout en conservant leurs laquelle nous sommes très attachés. Quelques exemples recueillis dans le compterendu d’une visite du ministre de l’Intérieur et des Cultes, le 22 novembre dernier au Consistoire de Paris par le mensuel Information juive. Parlant des «préoccupations essentielles [...] pour la communauté juive», un des articles énonce entre autres : «la fiscalité des dons, la cacherout [...], les places dans les carrés confessionnels juifs dans les cimetières [...], le calendrier des examens pour les élèves et les étudiants juifs [...], la nourriture cachère dans les hôpitaux, les systèmes d’entrée de certains immeubles le shabbat ». Force est de constater, face à cette énumération, que la communauté juive émet là des exigences qui sont des formes de privilèges allant bien au-delà des règles d’une laïcité bien comprise. Si chaque minorité nationale devait s’en inspirer, il est à craindre que la vie du pays serait parcellisée et peu propice à l’intégration tant désirée par les pouvoirs publics. Faut-il rappeler, par exemple, que les carrés confessionnels dans les cimetières municipaux sont des dérogations, non un droit en soi ? Concernant les digicodes en bas des immeubles, il est inadmissible de vouloir en imposer l’arrêt le shabbat au prétexte d’une pratique orthodoxe de certains locataires juifs, et aux dépens de la sécurité et de la tranquillité du reste des occupants de ces immeubles. On peut comprendre le désir de certains de vivre selon toutes les prescriptions de leur religion, mais ils doivent admettre que ce n’est pas possible dans un pays dont les coutumes et les lois ont été façonnées par des siècles de chrétienté et qui, de surcroît, se propose d’intégrer tant d’autres minorités. Il y a deux siècles, en acceptant la devise de la République Liberté, égalité, fraternité les juifs ont aussi implicitement accepté cette autre devise : Judéité, laïcité, citoyenneté. traditions, d’assumer une citoyenneté loyale et raisonnable. C’est, nous semble-t-il, ce qu’avaient bien compris les membres du Grand Sanhédrin de 1807 ; c’est ce que certains ne semblent plus comprendre aujourd’hui, accumulant des exigences de moins en moins compatibles avec une véritable citoyenneté. Leur prise en compte par les pouvoirs publics irait à l’encontre de la laïcité française à L É G E N D E : TT Talmud torah le dimanche matin dim 20 avril 18 h Seder Pessah TT m 19 avr sam 26 avr N I S A N nces scolaires sam 3 mai sam 10 mai 5 TT sam 17 mai sam 24 mai I Y A R sam 31 mai sam 7 juin S I V A cinoche Le renouveau du cinéma israëlien Le cinéma israélien s’est longtemps résumé aux deux noms d’Uri Zohar et Amos Gitaï. Aujourd’hui, il assure une présence constante et remarquée dans tous les grands festivals de cinéma. A insi en 2007, le cinéma israélien Maale, située à deux pas de Mea Sharim, le a-t-il été distingué au festival de quartier ultra-orthodoxe de Jérusalem. L’école Sundance (grande réunion du a produit quelques films remarqués comme cinéma indépendant organisée Esclaves du Seigneur, de la jeune Hadar Friepar Robert Redford) Le Festival de Berlin dlich, présenté à la Quinzaine des réalisateurs a décerné en février 2007 l’Ours d’argent de Cannes en 2003. Les femmes ont largedu meilleur réalisateur à Joseph Cédar pour ment contribué au renouvellement du cinéma Beaufort ; quant à Eytan Fox, il s’est vu gratifier du Prix du public pour La Bulle. A Cannes 2007, trois films ont été présents en Sélection Officielle : Tehilim de Raphaël Nadjari en Compétition, La Visite de la fanfare d’Eran Kolirin dans la section Un certain regard, et Les Méduses de Shira Geffen pour la Semaine de la critique. L’augmenta����������� israélien. Assi Lévy, dans Aviva mon amour tion du budget alloué au cinéma, largement et dans Avanim, ou encore Anat Klausner alimenté par les chaînes privées, et les accords dans Frozen days en sont deux brillantes illusde coproduction signés en 2002 entre l’Etat trations. En remportant en 2004 la Caméra Hébreu et la France ont créé les conditions d’Or au festival de Cannes en 2004 pour propices à ce renouveau. Mais cela ne constiMon Trésor, Keren Yedaya a donné à toutes tue pas la seule explication : les femmes une reconnais« La signature des accords sance à l’étranger qui n’était d’Oslo en 1993 a permis plus accessible : « Israël est de faire souffler un vent J’aimerais juste un lieu douloureux, un pays d’optimisme qui s’est traduit que l’on comprenne qui saigne. Je crois que l’art par la production de films vient de la souffrance ou que notre vie plus personnels, donc plus d’un besoin de crier. Mes intéressants» explique Marek films sont politiques, je quesne se résume pas Rosenbaum, patron de tionne la société, la place de à un reportage Transfax, une des nombreul’autre, de la femme ». Rotélévisé. ses maisons de production nit Elkabetz symbolise aussi, situées à Tel-Aviv. « On a à sa manière, l’évolution du affaire à un cinéma moins cinéma israélien moderne, Ronit Elkabetz monolithique, plus coloré. depuis son premier rôle en L’émergence de cinéastes 1989 dans Le Prédestiné, palestiniens ou arabes-israéliens a aussi permis de Daniel Waschmann, jusqu’à Prendre de libérer les deux parties : les Palestiniens femme : « Nous avons enfin compris qu’il n’ont désormais plus besoin des Israéliens n’est pas plus indispensable de parler de la pour les mettre en scène ; et ces derniers peugrande histoire que d’imiter le cinéma amérivent se concentrer sur leurs propres histoires », cain. Qu’il est plus intéressant de s’interroger ajoute Amir Arel fondateur de Lama Film, sur notre origine pour tenter de comprendre autre maison de production. qui nous sommes. C’est la différence avec le Le cinéma israélien était encore récemment cinéma d’avant. Aujourd’hui, on a une belle dominé par des hommes ashkénazes laïques, matière parce qu’on reste de plus en plus basés à Tel-Aviv. Les oubliés de la société isfidèles à nous-mêmes. On a réussi à enlever raélienne prennent aujourd’hui la caméra. Les le masque. Le cinéma nous donne l’occasion religieux eux-mêmes ont investi le grand d’arrêter de tourner le dos à notre identité. Et, écran. Ils ont leur propre école de cinéma, si l’on parle de la situation, c’est de l’intérieur, “ ” 3 avec un angle personnel ». La « situation » : il en est question dans le dernier film d’Eytan Cohen, La Bulle, histoire de deux homosexuels dont l’un va tomber amoureux d’un palestinien. Né à New York en 1964, Eytan Fox a grandi en Israël. « Je me définis avant tout comme un israélien, juif et homosexuel. Le succès de mes films vient du besoin de pleurer. Longtemps, on a cru que c’était l’histoire d’un petit pays qui doit vaincre ses ennemis et dont le héros est forcément bon et beau. Or, ceux qui ont perdu un proche à la guerre le savent bien : ce n’est pas de ça qu’il s’agit. Ce genre de film a fonctionné comme une thérapie pour une nation qui ne savait pas faire le deuil ». Le cinéma israélien ne se réduit pas à TelAviv. Beersheva ou encore Haïfa ont droit de cité comme dans le film Broken Wings (2002) de Nir Bergman, histoire d’une famille brisée après la mort du père tué par une piqûre d’abeille, et non à la guerre : « la mort reste la mort, peu importe où et comment ». Les références au conflit israélo-palestinien sont de plus en plus rares, preuve que le cinéma israélien existe en dehors et bien au-delà du conflit. Pourtant, tous les artistes israéliens se heurtent à cette difficulté en voyage à l’étranger, où on les somme de s’expliquer sur la politique menée par leurs dirigeants. Ronit Elkabetz résume bien les choses : « j’aimerais juste que l’on comprenne que notre vie ne se résume pas à un reportage télévisé ». Frédéric Zeitoun À lire : Le Cinéma israélien de la modernité d’Ariel Schweitzer, ❦ 2000, L’Harmattan, 276 p, 22,90 euros. préparé par brigitte frois bouquins Noyau d’olive « Erri De Luca fréquente la Bible depuis longtemps. Sa connaissance des Ecritures ne doit pourtant rien à la foi ou à un quelconque sentiment religieux : De Luca se dit noncroyant, incapable de prier ou de pardonner. Il est néanmoins habité par le texte biblique au point de commencer presque chaque journée par la lecture et la traduction d’un passage. Les courts textes rassemblés ici témoignent de ce corps-à-corps quotidien avec la Bible et de ces exercices matinaux qui lui donnent matière à réfléchir, comme un noyau d’olive qu’il retournerait dans la bouche tout au long de la journée. Un ton très personnel caractérise les commentaires de De Luca. Le romancier italien ne cherche pas à s’avancer sur le terrain de la théologie, mais seulement à rendre compte de ses lectures quotidiennes qui résonnent en lui, structurant à la fois sa vie et son écriture. Sa volonté de comprendre le grand texte le conduit la plupart du temps à une attention particulière aux mots hébraïques, à leur sens, oublié ou enfoui par la traduction et la tradition. En reliant à sa vie et à la nôtre des épisodes bibliques souvent connus, il parvient à formuler des observations que le lecteur à son tour n’aura de cesse de retourner dans sa bouche comme un autre noyau d’olive. Par ailleurs, les interrogations nées de ce parcours spirituel exceptionnel contribuent à éclairer toute l’œuvre d’Erri de Luca et confirment sa place comme un des écrivains les plus passionnants de sa génération. » Et bien qu’il soit d’origine chrétienne, tout en affirmant son athéisme, son œuvre est Nuit ouverte « Et je prie. Moi qui ne crois pas » Ainsi s’achève cette Nuit ouverte, laissant le lecteur purifié par tant d’intelligence, tant de confiance dans le doute, tant d’écoute de l’autre. Cette parole de fin, lâchée comme un dernier souffle paisible, sort de la bouche d’Elise, comédienne que la célébrité a rendue lucide sur ses contradictions : « Rêver de gloire est rêver d’équilibre instables et vouloir qu’ils ne le soient pas ». Pour interpréter le rôle de Regina Jonas, première femme rabbin au monde, morte à Auschwitz, l’actrice effectue un voyage chaotique au fond d’elle-même. Elle découvre que « dans nos filiations, ce n’est pas toujours de sang qu’il s’agit et sent vibrer en elle la voix de cette ancêtre d’adoption. Et quelle voix ! Humble, dure, directe, sans « défi ni fierté, juste le ton monocorde de qui dit une évidence » citée dans la passionnante « Anthologie du judaïsme : 3000 ans de culture juive », ouvrage collectif publié sous la direction de Francine Cicurel aux éditions Nathan en novembre 2007. Roman de Erri de Luca, éditions Gallimard Anthologie du judaïsme Le judaïsme et la culture juive sont aujourd’hui mal connus autant en ce qui concerne leurs aspects religieux, que pour ce qui a trait à la littérature et à la philosophie. « L’anthologie du judaïsme » met à la portée de tous les textes fondamentaux qui disent la richesse et la diversité d’une culture plusieurs fois millénaire. Les documents publiés ont été choisis afin d’être une source de connaissance pour les plus exigeants tout en répondant aux questions des néophytes. De Maïmonide à Amos Oz, en passant par Stefan Zweig, Emmanuel Levinas, André Neher ou bien Primo Lévi, les textes de nombreuses figures de la culture juive enrichissent cette anthologie et permettent de multiples éclairages. « Le bonheur de feuilleter une anthologie, c’est aussi de découvrir ou de retrouver le texte d’un auteur qui soudain étonne, éclaire, émeut, ‘donne des ailes’ », écrit Anne-Marie Revcolevschi, directrice générale de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, dans son avant-propos. L’objectif est accompli. A tous ceux qui ont la « passion du savoir », on ne saurait mieux que conseiller la lecture de ce livre à fois éducatif et instructif, enrichissant et passionnant. L’« Anthologie du Judaïsme. 3000 ans de culture juive », dirigée par Francine Cicurel avec la collaboration de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, Nathan, Paris, 2007, 463 p. Clémence Boulouque donne à entendre ce murmure insistant d’une rare profondeur, tout en l’écoutant elle-même. Comme si elle voulait faire partager à son tour cette expérience d’envoûtement philosophique qu’elle a vécue avec cette femme hors du commun, dont l’existence a été redécouverte en 1991, dans les archives de Berlin Est. Au-delà de son intérêt historique, le livre cerne avec finesse les miracles souterrains du métier d’actrice, capable de conduire aux sources de l’identité humaine Roman de Clémence Boulouque, éditions Flammarion. Critique Télérama n° 3015-27 octobre 2007 cinoche Le renouveau du cinéma israëlien Le cinéma israélien s’est longtemps résumé aux deux noms d’Uri Zohar et Amos Gitaï. Aujourd’hui, il assure une présence constante et remarquée dans tous les grands festivals de cinéma. A remarqués comme Esclaves du Seigneur, de la insi en 2007, le cinéma israélien a-t-il jeune Hadar Friedlich, présenté à la Quinzaine des été distingué au festival de Sundance réalisateurs de Cannes en 2003. Les femmes ont (grande réunion du cinéma indépenlargement contribué au renouvellement du cinéma dant organisée par Robert Redford) israélien. Assi Lévy, dans Aviva mon amour et Le Festival de Berlin a décerné en février 2007 dans Avanim, ou encore Anat Klausner dans Frol’Ours d’argent du meilleur réalisateur à Joseph zen days en sont deux brillantes illustrations. En Cédar pour Beaufort ; quant à Eytan Fox, il s’est vu gratifier du Prix du public pour La Bulle. A Cannes 2007, trois films ont été présents en Sélection Officielle : Tehilim de Raphaël Nadjari en Compétition, La Visite de la fanfare d’Eran Kolirin dans la section Un certain regard, et Les Méduses de Shira Geffen pour la Semaine de la critique. L’augmentation du remportant en 2004 la Caméra d’Or au festival de budget alloué au cinéma, largement alimenté par Cannes en 2004 pour Mon Trésor, Keren Yedaya les chaînes privées, et les accords de coproa donné à toutes les femmes une reconnaissance duction signés en 2002 entre l’Etat Hébreu et à l’étranger qui n’était plus accessible : « Israël la France ont créé les conditions propices à ce est un lieu douloureux, un pays qui saigne. Je renouveau. Mais cela ne constitue pas la seule crois que l’art vient de la souffrance ou d’un explication : « La signature des accords d’Oslo en besoin de crier. Mes films sont 1993 a permis de faire souffler politiques, je questionne la un vent d’optimisme qui s’est la place de l’autre, de traduit par la production de J’aimerais juste société, la femme ». Ronit Elkabetz films plus personnels, donc que l’on comprenne symbolise aussi, à sa manière, plus intéressants» explique l’évolution du cinéma israélien que notre vie Marek Rosenbaum, patron de moderne, depuis son premier Transfax, une des nombreuses ne se résume pas rôle en 1989 dans Le Prédesmaisons de production situées à un reportage tiné, de Daniel Waschmann, à Tel-Aviv. « On a affaire à un télévisé. jusqu’à Prendre femme : « cinéma moins monolithique, Nous avons enfin compris qu’il plus coloré. L’émergence de Ronit Elkabetz n’est pas plus indispensable cinéastes palestiniens ou de parler de la grande histoire arabes-israéliens a aussi perque d’imiter le cinéma américain. Qu’il est plus mis de libérer les deux parties : les Palestiniens intéressant de s’interroger sur notre origine pour n’ont désormais plus besoin des Israéliens pour tenter de comprendre qui nous sommes. C’est la les mettre en scène ; et ces derniers peuvent se différence avec le cinéma d’avant. Aujourd’hui, on concentrer sur leurs propres histoires », ajoute a une belle matière parce qu’on reste de plus en Amir Arel fondateur de Lama Film, autre maison plus fidèles à nous-mêmes. On a réussi à enlever de production. le masque. Le cinéma nous donne l’occasion Le cinéma israélien était encore récemment dod’arrêter de tourner le dos à notre identité. Et, miné par des hommes ashkénazes laïques, basés si l’on parle de la situation, c’est de l’intérieur, à Tel-Aviv. Les oubliés de la société israélienne avec un angle personnel ». La « situation » : il en prennent aujourd’hui la caméra. Les religieux est question dans le dernier film d’Eytan Cohen, eux-mêmes ont investi le grand écran. Ils ont leur La Bulle, histoire de deux homosexuels dont propre école de cinéma, Maale, située à deux l’un va tomber amoureux d’un palestinien. Né à pas de Mea Sharim, le quartier ultra-orthodoxe New York en 1964, Eytan Fox a grandi en Israël. de Jérusalem. L’école a produit quelques films “ ” 3 « Je me définis avant tout comme un israélien, juif et homosexuel. Le succès de mes films vient du besoin de pleurer. Longtemps, on a cru que c’était l’histoire d’un petit pays qui doit vaincre ses ennemis et dont le héros est forcément bon et beau. Or, ceux qui ont perdu un proche à la guerre le savent bien : ce n’est pas de ça qu’il s’agit. Ce genre de film a fonctionné comme une thérapie pour une nation qui ne savait pas faire le deuil ». Le cinéma israélien ne se réduit pas à Tel-Aviv. Beersheba ou encore Haïfa ont droit de cité comme dans le film Broken Wings (2002) de Nir Bergman, histoire d’une famille brisée après la mort du père tué par une piqûre d’abeille, et non à la guerre : « la mort reste la mort, peu importe où et comment ». Les références au conflit israélo-palestinien sont de plus en plus rares, preuve que le cinéma israélien existe en dehors et bien au-delà du conflit. Pourtant, tous les artistes israéliens se heurtent à cette difficulté en voyage à l’étranger, où on les somme de s’expliquer sur la politique menée par leurs dirigeants. Ronit Elkabetz résume bien les choses : « j’aimerais juste que l’on comprenne que notre vie ne se résume pas à un reportage télévisé ». Frédéric Zeitoun À lire : Le Cinéma israélien de la modernité d’Ariel Schweitzer, ❦ 2000, L’Harmattan, 276 p, 22,90 euros.