Géographie et sous
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Géographie et sous
Jean Dresch Géographie et sous-développement In: Annales de Géographie. 1967, t. 76, n°418. pp. 641-643. Citer ce document / Cite this document : Dresch Jean. Géographie et sous-développement. In: Annales de Géographie. 1967, t. 76, n°418. pp. 641-643. doi : 10.3406/geo.1967.15063 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1967_num_76_418_15063 ANNALES DE OGRAPHIE AiS -LXXVI* année Géographie et Novembre-Décembre 190 sons-développement par Jean Dresch Le sous-développement et le développement intéressent de plus en plus les géographes Cet intérêt est pas nouveau puisque dans les pages de cette revue en 1962 Lacoste avait analysé usage des géographes les ouvrages consacrés au sous-développement par des spécialistes autres dis ciplines Et pourtant des géographes regrettent de être laissé distancer par les économistes ou les sociologues.. Ce retard relatif rien de surprenant La notion de développement été définie par des économistes soucieux de préciser des rapports entre la situation et la croissance économiques sociales de pays inégalement évolués ainsi que les conditions dans lesquelles les moins développés pourraient rejoindre ceux qui le sont davantage des critères établis globalement volontiers dans abstrait sont adjoints des programmes des plans projetés dans un avenir plus ou moins lointain et supposant généralement des orien tations des choix doctrinaux et politiques Telle est pas attitude propre du géographe Soucieux de rechercher les relations complexes entre les conditions naturelles et humaines et leur exten sion spatiale il procède plus lentement Il autres exigences celles que suppose une analyse totale et concrète donc patiente et abord limitée Il ne parvient aux idées générales avec une prudence accrue par la cons cience de la complexité des faits car pour persuadé il soit il de science que du général et que hypothèse est une démarche utile et nécessaire AN DE OG LXXVI ANN 41 642 ANNALES DE OGRAPHIE esprit il ressent peut-être plus que autres la fragilité des généralisations dans un monde instable où accélère le rythme du changement Aussi bien aspire-t-il jouer son rôle dans orientation de ce changement mais sachant que sinon élaboration du moins exécution des plans ne sont pas son affaire Si donc les géographes ne sont pas les inventeurs de la notion de dévelop pement il beau temps ils intéressent aux pays dits sous-développés Ils ont consacré des monographies régionales Ils sont même restés fidèles cette orientation de la recherche qui fit la célébrité de ce que on appelé école fran aise fidèles maintenant bien après que la monographie régionale eût été plus ou moins complètement abandonnée en France même Il là rien de surprenant En pays sous-développé une région quelle en soit la définition est moins complexe et plus facile circonscrire Dans leur recherche de généralisations construites sur des notions simples les géographes se sont attachés décrire tour tour des genres de vie tels que les relations entre le milieu naturel et des groupes humains faiblement pour vus de moyens de production permettaient des comparaisons faciles ou bien de vastes fresques de géographie zonale où les milieux bioclimatiques des tropiques exercent sur des distances sans mesures une influence dominante et plutôt déprimante Les tropiques humides ou arides inclinent au déter minisme non sans raisons Là plus encore ailleurs le géographe doit fermement maintenir identité de sa discipline science naturelle et humaine au moment où des erreurs de méthode qui peuvent déterminer des erreurs de jugement risquent soit de rompre son unité soit de la défigurer Mais une claire connaissance des climats des sols de la végétation de processus morphogénétiques si elle permet de peser le poids du milieu en analyser les ressources permet aussi de mesurer action de homme étude du paysage naturel autorise seule celle de sa transformation par homme et une explication du paysage total Or les pays sous-développés et tout particulièrement tropicaux ont été et sont encore plus ou moins soumis aux pays développés et liés par des rapports de type colonial Le sous-dévelop pement est même inséparable de ces relations dans inégalité Il en est la fois la cause et la conséquence Il ne peut se définir que dans la mesure où on le replace dans son cadre historique la phase expansion du capitalisme industriel et financier et les imperialismes coloniaux La pénétration une économie monétaire de nouvelles formes de production et échanges celle de populations étrangères et de nouvelles formes organisations sociales ont eu pour conséquence de rendre archaïques les types antérieurs économie et de société de juxtaposer des paysages contrastés qui concrétisent pour les géographes la notion de sous-développement Encore faut-il expliquer ce sous-développement qui ne se définit que par référence au développement cet égard les géographes semblent avoir sou vent été arrêtés par un excès de scrupules économiste peut manier son aise systèmes et doctrines est son métier Le géographe travaillant en pays colonial fut intégré inévitablement dans le système La documentation OGRAPHIE ET SOUS-D VELOPPEMENT 643 ne pouvait venir que de sources origine officielle ou privée mais toujours de même sens Sur le terrain il était difficile de ne pas être considéré comme un représentant ou une émanation de état colonial Considérer le système colonial comme un facteur géographique une importance majeure pu paraître introduire la politique dans interprétation du moins il était soumis critique Et pourtant ce facteur était essentiel autant que les fac teurs naturels et il est encore dans la mesure où malgré indépendance politique le système pas disparu Le conformisme est pas une attitude favorable emploi une bonne méthode observation géographique En Afrique noire par exemple on peut être surpris que les aspects et consé quences du mercantilisme soient restés si longtemps sinon inaper us du moins passés sous silence alors on ne pouvait débarquer dans un port ou circuler en brousse sans être poursuivi par les initiales des sociétés de traite ni comprendre le sous-développement et ses conséquences géographiques sans analyser le montant et la répartition par secteur des investissements de capitaux Il est donc pas surprenant que les géographes aient pas inventé le sous-développement Ils en ont parlé sans éprouver le besoin de le dénommer Mais ils ont trouvé invention commode et au temps où on se plaît aux applications ils ont éprouvé le besoin légitime de formuler des conclusions et de proposer des programmes comme les économistes ou avec eux Ils peuvent se laisser entraîner ainsi vers des généralisations dans abstrait où le géo graphe risque de perdre pied Or son rôle est de rendre présente et percep tible chacun la complexité la fois de la nature et de oeuvre humaine et aussi de leurs combinaisons spatiales En somme la notion de sous-développement est pas étrangère au géo graphe et il pu utilement contribuer la définir Mais son rôle est plutôt en montrer extrême diversité de persuader on ne peut appliquer les mêmes formules Asie du Sud-Est du Sud au Moyen-Orient Afrique noire ou Amérique latine Il sans doute une géographie du develop ment mais le géographe ne fera son sujet uvre valable et originale que dans la mesure où il établira fermement sur une géographie des pays ou régions sous-développés Régions traditionnelles ou modernisées côtoient en des contrastes plus brutaux en pays développés ils accusent parce que les inégalités de croissance sont aussi plus grandes les unes paraissent de plus en plus archaïques autres se vident de leur population régions arides ou de montagne au moment où la terre semble ne plus pouvoir nourrir ses habitants qui accumulent dans les régions en apparence plus favorisées et les centres urbains Mais nulle région pour sous-développée elle soit est semblable sa voisine Il appartient au géographe en faire la démons tration