Conférence de presse du 22 mars 2013

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Conférence de presse du 22 mars 2013
Conférence de presse du 22 mars 2013
Dossier de presse Hervé de Weck
Jura, Jura bernois… Aviation civile et militaire, guerre aérienne (1910-2012)
Guerre aérienne
1. Le ciel du Jura bernois reste sans défense (1914-1918)
En Suisse, l’aviation militaire naît en 1914. Pendant la Première Guerre mondiale, la Suisse n’a pas
d’avions de combat et les tirs contre avions avec les fusils des fantassins, les mitrailleuses et les pièces
d’artillerie ne sont pas du tout performants. On a autant de chance de toucher un avion que de gagner le
gros lot à la loterie !
L’Ajoie, à l'extrémité du front Ouest, est survolée par des avions belligérants, égarés ou pas, qui lâchent
parfois des bombes. La frontière du saillant de Porrentruy favorise les violations par des pilotes qui ne
connaissent pas forcément la géographie de la région, surtout quand les conditions de visibilité ne sont
pas bonnes. On y compte 68 violations par des avions allemands ou français, sur les 74 qui concernent
le Jura bernois. A deux exceptions près, ces bombardements sont le fait d’avions belligérants plus ou
moins perdus qui se déchargent de leurs munitions. A Porrentruy s’installe pourtant un sentiment
d’insécurité, face à une arme nouvelle contre laquelle l’Armée suisse n’est pas encore équipée.
En Suisse romande et dans le Jura, on sympathise avec le camp français. Le Démocrate et Le Pays
accusent systématiquement l’aviation allemande, alors que les violations sont partagées entre
Allemands et Français. Notables, intellectuels, politiciens, journalistes, très francophiles, publient nombre
d’articles virulents. Tout sert de prétexte pour dénoncer la prétendue germanophilie des autorités
politiques et militaires en majorité alémaniques, leur asservissement aux Empires centraux – elles ne
résisteront pas en cas d’invasion – voire leur trahison. L’écrasante majorité de ces accusations ne
reposent sur rien.
2. Combats aériens au-dessus du Jura bernois (mai-juin 1940)
Depuis le début septembre jusqu’à la fin de l’année 1939, il y a 143 violations de l’espace aérien suisse. La chasse
ne peut pas intervenir, quand celles-ci se produisent de nuit, par mauvais temps, au-dessus de la couche
nuageuse ou dans la zone-frontière interdite de 20 kilomètres bordant la frontière Ouest et Nord-Ouest, qui se
trouve sous la seule responsabilité de la DCA jusqu’à une altitude de 1500 mètres. Au-dessus, la chasse empêche
la pénétration d’avions étrangers dans l’espace aérien suisse. Cette mesure est levée le 10 mai 1940.
En mai et en juin, des avions belligérants violent à 395 reprises l’espace aérien suisse, plus de la moitié étant des
appareils de la Luftwaffe. L’aviation militaire suisse dispose d’une centaine d’avions de combat modernes, et ses
pilotes semblent moins bien formés que leurs homologues allemands. Alors que la Wehrmacht écrase l’Armée
française et que le maréchal Pétain demande un armistice, la chasse suisse se trouve engagée dans des combats
aériens au-dessus de l’arc jurassien contre la Luftwaffe, et elle remporte des victoires!
Le 4 juin, des Messerschmitt-110 allemands multiplient les violations de l’espace aérien suisse. Des formations de
quatre à huit appareils, en route vers leurs objectifs et au retour, passent dès l'aube sur le saillant d’Ajoie. Le matin,
les chasseurs suisses, basés à Olten, Thoune et Dübendorf, ne peuvent intervenir, car les délais sont trop brefs.
L'après-midi, le comportement de la Luftwaffe fait encore monter la tension. Suivant un plan précis, 28
Messerschmitt-l10, plusieurs Heinkel-111, combattus par la chasse française, se dirigent depuis l'espace aérien
français vers La Chaux-de-Fonds et longent la frontière dans les deux sens. Des appareils pénètrent en Suisse,
puis se retirent sur territoire français. Ils veulent attirer les appareils suisses au-delà de la frontière délimitée par le
Doubs. Le secteur est judicieusement choisi!
Malgré l’absence de centrale d’engagement, près du 20% de la chasse suisse, surtout des Messerschmitt-109,
participe à ces combats. Les pilotes profitent de chaque violation allemande pour attaquer. Pas facile, car les
avions ennemis se couvrent bien! Les premiers duels ont lieu au-dessus du Doubs. Les radios des avions suisses
sont très insuffisantes, la manœuvre d'ensemble suisse se résume à des combats individuels, au cours desquels
l'initiative, l'habileté, le courage et le coup d’œil sont déterminants. Plusieurs avions des deux parties sont
endommagés. La Luftwaffe perd cet après-midi 2 Messerschmitt-l10 qui s’écrasent en France. Le lieutenant Rudolf
Rickenbacher trouve la mort, lors du crash de son Messerschmitt-109 près de Boécourt, la seule perte de la
chasse suisse ce jour-là.
Le 8 juin, la tension atteint son point culminant, avec une véritable bataille aérienne au-dessus de l’Ajoie. Le
Fliegerkorps V lance une opération visant à attirer les chasseurs suisses dans un piège. Pas moins de 113
violations de l’espace aérien suisse se produisent, notamment dans le secteur de Belfort et de Schaffhouse. A 11
heures 25, six Messerschmitt-110 pénètrent dans l’espace aérien du saillant de Porrentruy. Deux d’entre eux
plongent, tandis que les autres continuent à tourner au-dessus de la région. Leur cible, un C-35 suisse, qui vole à
une altitude de 300 mètres. Une proie facile, bien qu’il soit armé et qu’il dispose de sa dotation en munitions! Le
lieutenant-pilote Rodolfo Meuli et son observateur, le premier-lieutenant Emilio Gürtler, partis d’Utzentorf pour une
surveillance de la frontière, sont surpris. Leur avion tombe à Porrentruy près de la route d'Alle, 800 mètres à l'est
de la gare. L’un est tué, son camarade qui s’est éjecté trop tard, décède dans les minutes suivantes. Une douzaine
d’avions suisses affrontent ensuite une trentaine d’appareils de la Luftwaffe, qui débordent dans l’espace aérien
suisse et attendent l’arrivée de chasseurs suisses dont les pilotes veulent venger leurs camarades qui viennent
d’être abattus.
Combats aériens de juin 1940 – Pertes allemandes et suisses
Date
Allemagne
- 1 Heinkel-111 se crashe près de Lignières
01.06
- 1 Heinkel-111 atterrit d’urgence ou se crashe
près d’Oltingue (F)
- 1 Heinkel-111 atterrit d’urgence près d’Ursins
02.06
- 1 Messerschmitt-110 atterrit d’urgence ou se
04.06
crashe près de Maîche (F)
- 1 Messerschmitt-110 atterrit d’urgence près de
Russey (F)
- 1 Heinkel-111 ( ?) se crashe en France
06.06
- 1 Messerschmitt-110 atterrit d’urgence près
08.06
d’Oberkirch – Nunningen
- 1 Messerschmitt-110 se crashe près de
Triengen
- 1 Messerschmitt-110 atterrit d’urgence près de
Réchésy (F)
Suisse
- Crash 1 Messerschmitt-109 près de
Boécourt
- Crash 1 C-35 près de Alle
- Atterrissage d’urgence
1 Messerschmitt-109 à Bözingen
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il y a de très nombreuses violations de l’espace aérien jurassien
par des appareils allemands et surtout alliés, mais seulement 17 attaques ou bombardements, 8 en
Ajoie, 4 dans la vallée de Delémont et aux Franches-Montagnes, 2 dans le Jura bernois et 1 dans le
district de Laufon. Les populations n’ont aucune conscience du danger aérien. Pendant toute la guerre,
elles descendent peu dans les abris lors des alarmes aériennes. On reste dans la rue ou à sa fenêtre
pour regarder le spectacle!
3. Des Jurassiens dans les Forces aériennes suisse
- Le plt Maurice Fleury, instituteur, pilote Messerschmitt-109 et pilote d’essai.
- Le major Yves Maître, le juriste-pilote né à Porrentruy, qui a fait son stage d’avocat à Porrentruy et
carrière à Genève .Il a été un des organisateurs des grands meetings d’aviation à l’aérodrome de
Porrentruy/Courtedoux.
- Le divisionnaire Etienne Primault, né à Cormoret dans le Jura bernois. Il est le premier commandant
des troupes d’aviation à avoir été d’emblée pilote dans l’armée. C’est lui qui introduit dans nos forces
aériennes le Mirage, le meilleur intercepteur de l’époque. Il y a d’importants dépassements de crédits.
Etienne Primault, véritable bouc émissaire, est limogé. Ultérieurement, le Tribunal fédéral le réhabilitera.
- Le colonel EMG Edgar Primault, son frère, est également pilote militaire. Il sert dans l’aviation comme
officier de milice. Entre 1948 et 1950, il est sous-chef d’état-major des troupes d’aviation et de DCA. Il
exerce les fonctions de directeur général de l’Automobile-Club de Suisse, de président de la
Luftverkehrskonferenz, de la Chambre suisse de l’horlogerie (1945-1966), de vice-président du Conseil
d’administration de Swissair.
- Le brigadier Antoine Triponez naît aux Breuleux. Officier instructeur dans les troupes de DCA, il
termine sa carrière comme commandant de la DCA d’armée et responsable de l’introduction en Suisse
du missile antiaérien guidé Bloohound.
- L’adj sof Alex L’Eplattenier est fils du gérant de la Banque cantonale de Berne à Porrentruy. Recruté
dans l’aviation, il fait ses écoles, alors qu’étudiant marié, il suit les cours de l’Ecole d’ingénieurs de
Lausanne. La solde et les primes que touche un pilote lui permettent d’assurer une partie de ses
charges. Il vole sur Morane, sur Vampire, puis sur Hunter.
- Le cap Gaël Lachat de Vicques, fils de Bernard Lachat, biologiste spécialiste en environnement, est
pilote militaire professionnel. Il vole le F/A-18 mais aussi le Tiger, puisqu’il est membre de la Patrouille
suisse.
4. Des nuages dans le ciel
A la fin des années 1950, les relations entre l'armée et la population du Jura Nord se détériorent. La lutte
séparatiste, des projets successifs de place d'armes aux Franches-Montagnes et à Bure suscitent des
remous. L’aggravation des luttes politiques, 1a guerre des propagandes, la radicalisation des attitudes
modifient pour un temps l’image que les habitants se font de 1'armée et de la défense nationale. Des
mesures de sûreté prises maladroitement par la Confédération, à la suite d'attentats contre des
installations militaires, aggravent la tension et provoquent même la réaction publique d'un certain
nombre d'officiers jurassiens.
Voilà le contexte dans lequel se situent les critiques du journal Le Pays contre l’armée et ses chefs.
Dans la foulée de l’affaire Mirage, son rédacteur en chef, Jean Wilhelm, dénonce à la fin novembre 1964
la simulation d’interrogatoires poussés d’élèves pilotes, supposés abattus en territoire soviétique, par
des militaires suisses figurant des officiers de l’Armée rouge. Les faits se sont déroulés dans la région
du Lac Noir. Il y a eu dans un passé récent des «incidents petits et grands qui ont déjà donné naissance
à un malaise certain à propos de la chose militaire suisse. (…) Une crise aiguë de confiance vient de se
déclencher par le scandale Mirage. (…) Aujourd’hui, (…) l’affaire du Lac Noir, sans parler même de celle
des Franches-Montagnes revêtent un caractère de gravité fort supérieur.»
Date
26.11.1989
Votation
Pour une Suisse sans armée
06.06.1993
Refus acquisition du F/A-18
06.06.1993
40 places d’armes, ça suffit
10.06.2001
Modification Loi militaire
18.05.2003
Loi sur l’Armée
24.02.2008
Contre le bruit des avions dans les
zones touristiques
Oui
CH 35,6%
JU 55,5%
CH 44,7%
JU 73,3%
CH 44,7%
JU 73,3%
CH 51,0%
JU 44,6%
CH 76,0%
JU 74,0%
CH 31,9%
JU 43,0%
Non
CH 64,4%
JU 44,5%
CH 55,3%
JU 26,7%
CH 55,3%
JU 26,7%
CH 49,0%
JU 55,4%
CH 24,0%
JU 26,0%
CH 68,1%
JU 57,0%
A partir de 1979, date de 1'entrée en souveraineté, 1es relations armée-population s'améliorent
progressivement dans le Canton du Jura, pas forcément l’acceptation du bruit des jets à réaction et des
hélicoptères, surtout lorsqu’ils appartiennent à l’armée. A une époque, les journaux de Porrentruy et
Delémont publient des lettres de lecteurs dénonçant les bangs supersoniques des Mirage suisses. En
réalité, il s’agit le plus souvent d’appareils français qui volent à proximité de la frontière.

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