Miliciens en Haute-loire

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Miliciens en Haute-loire
Miliciens en Haute-Loire
Pour une première approche statistique et historique
michel Roux
Prolégomènes
Avant de débuter cette analyse, il me semble nécessaire de présenter un certain nombre
d’éclaircissements :
- L’histoire contemporaine n’est pas ma spécialité et je me tourne d’habitude plus volontiers vers des époques lointaines, des cités aux noms improbables et des personnages
qui vécurent il y a deux millénaires. Si en l’occurrence j’ai abandonné temporairement
ma période favorite, c’est qu’il s’agissait pour moi d’être fidèle à ce fameux « Devoir de
mémoire » dont on nous parle beaucoup (trop ?) ces derniers mois. En effet, les données
que je vais vous présenter ne sont pas le fruit de ma recherche, je ne puis être considéré
les concernant que comme un « metteur en pages », si l’on veut bien me pardonner ce
néologisme. Je les dois aux travaux de mon oncle maternel, le major François Séjalon.
Né en 1925 dans une famille ouvrière très pauvre du Puy-en-Velay, il s’engagea en 1944
dans la 1re armée française et participa aux campagnes d’Alsace et d’Allemagne dans
une unité de choc. Ayant choisi de rejoindre la gendarmerie à l’issue du conflit, il y
effectua une brillante carrière en métropole et en Algérie et termina celle-ci responsable
de l’intendance du fort de Rosny. Revenu à la retraite dans sa ville natale, il se livra à
d’incessantes recherches pour tenter de connaître la personnalité et le sort de ceux qui,
à sa différence, avaient fait le mauvais choix au moment de la Libération. Aujourd’hui
octogénaire, il m’a demandé il y a quelques mois de tenter de valoriser ce véritable
travail de bénédictin, ce que j’ai entrepris bien volontiers. Je signale au demeurant que
je ne peux présenter ici qu’une petite partie du dépouillement des nombreux dossiers,
rigoureusement classés, qu’il a constitués.
- Il est Chevalier dans l’Ordre de la Légion d’Honneur, titulaire de la Médaille militaire, Chevalier
dans l’Ordre national du Mérite, Croix de la Valeur militaire avec citations à l’ordre de la division et de la
gendarmerie.
Domitia, n°11, 2010, p. 109 -138
Michel Roux,
professeur agrégé d’histoire,
directeur du département d’Histoire,
UPVD.
- En second lieu, on pourra m’objecter que la Haute-Loire échappe au caractère méditerranéen de notre Centre de recherches. Je répondrai à cela en signalant tout d’abord
qu’un simple calcul à vol d’oiseau effectué au moyen d’une règle sur une carte prouve
que le Velay est plus proche de la Méditerranée que la Castille. Sur un plan personnel,
j’ajouterai que les accents, les types humains, les caractères de civilisation, les couleurs
même le rapprochent de celle-ci. Mais, puisque nous sommes historiens, je me tournerai
vers notre discipline pour fournir l’argument majeur : mon département natal fut une
création de la Révolution et son intégration à la région Auvergne le fait des décideurs du
XXe siècle ; depuis le rattachement au domaine royal jusqu’en 1789, le Velay fit toujours
partie du Languedoc, l’évêque du Puy et ses barons jouant un rôle notable lors de la réunion des États de la province. L’excellent moderniste Gérard Sabatier, dans son ouvrage
de 1988 Le Vicomte assailli , a parlé à son propos de « Languedoc des montagnes », ce
qui m’en semble au demeurant une parfaite définition.
En guise d’introduction : la Haute-Loire des années 1930-1945,
une société bloquée
Dans le département de la Haute-Loire, l’introduction de l’idéologie de la Révolution
nationale, accompagnée de celle de ses bras armés, le S.O.L. et la Milice, ne connut pas
une chronologie différente du reste de la zone dite « libre ». Pétain, en visite au Puy en
mars 1941, fut reçu par un aréopage civil, militaire et ecclésiastique ; en novembre 1940,
le cardinal Gerlier, Primat des Gaules, n’avait-il pas prononcé la fameuse formule : « Pétain c’est la France et la France c’est Pétain » ? Très au fait des conditions socio-politiques
du département, les conseillers vichystes savaient pertinemment que le Chef de l’état
trouverait au Puy un accueil des plus favorables. Pour mieux comprendre cela, de même
que les dramatiques événements qui vont suivre, tentons d’analyser succinctement la
situation de la Haute-Loire en ces années : - Au niveau géographique, c’est le deuxième département le plus élevé de France en
altitude moyenne derrière la Haute-Savoie. Les hivers y sont terribles, la neige isolant
des semaines entières certains villages. La couverture forestière est très dense. Cet
enclavement local se rencontre également sur un plan départemental. On ne peut pas
dire à l’époque que s’exerce une attraction de Clermont, de Saint-Etienne ou de Lyon,
tout simplement parce que le réseau routier est tellement mauvais qu’il dissuade de toute
« sortie ». Il en est de même pour le réseau ferroviaire, développé simplement à la veille
de 1914 pour favoriser la mobilisation : les interconnections entre les grandes lignes
(Clermont-Ferrand - Nîmes et Le Puy - Saint-étienne) n’ont jamais été achevées.
- Sur un plan humain, le département a été bien entendu fortement touché par l’exode
rural, mais moins que ses voisins, pour les raisons d’enclavement évoquées plus haut,
certainement surtout en vertu du mode d’appropriation de la terre que nous envisagerons ci-après. La guerre de 1914-1918 a eu des conséquences effrayantes : il faut savoir
que le régiment local, le 96e d’infanterie, a été anéanti à plusieurs reprises, la première
fois à Baccarat dès août 14 ! Mon arrière grand-père paternel, le père de mon oncle, qui
fit toute la guerre en son sein en première ligne sans être blessé gravement, passait pour
un miraculé ! De nombreux villages, en partie dans la vallée de l’Allier, ne se remirent
jamais de cette saignée.
- En ce qui concerne l’économie, si l’on excepte quelques petites mines de charbon
au nord-ouest et les industries de main d’œuvre peu qualifiée du bassin du Puy, le
département est entièrement rural. Depuis la Révolution s’est constituée une société
- Sabatier (G.), Le Vicomte assailli, Saint Vidal, Centre d’étude de la vallée de la Borne, 1988.
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de petits propriétaires qui survivent en autarcie d’une agriculture vivrière extrêmement
médiocre. Les signes de modernisation (nombre de tracteurs, enseignement agricole)
sont faibles, mais la pression foncière limitée et l’absence de grande propriété noble ou
bourgeoise ajoutées à ce mode de faire-valoir expliquent justement le maintien d’une
population paradoxalement assez nombreuse.
- Fondamentalement, aucune analyse ne peut faire l’économie du poids des églises ; il
s’agit là d’une tradition remontant au Moyen Âge. Le clergé catholique règne en maître
incontesté sur le bassin du Puy, la région de Saugues et l’est du département. Le cheflieu possède un nombre de couvents et d’institutions religieuses sans commune mesure
avec le chiffre de sa population. L’importance de l’évêque dans la vie politique et sociale
est considérable, ce d’autant que les autorités savent que, revêtu du pallium, il est les yeux
et les oreilles du pape sur l’Église de France. Ce clergé est extrêmement conservateur :
jusqu’aux réformes de Vatican II, l’évêque du Puy continuera à s’intituler « comte de Velay », titre hérité du paréage de 1305 ! Ce conservatisme souvent très étroit est transmis
aux populations par l’intermédiaire d’un enseignement religieux omniprésent qui fait
plus que doubler l’enseignement laïc. Ajoutons-y dans les campagnes l’institution locale
de la béate, vieille fille qui dans chaque village se charge du catéchisme et surveille la
morale. On comprend aisément que les inventaires de 1905 se sont passés difficilement
et que la guerre scolaire y est une réalité quotidienne. À cette étroite emprise échappe
en partie la région de Brioude, en voie de déchristianisation, et surtout les limites
orientales avec l’Ardèche où les protestants sont ultra-majoritaires depuis le XVIe siècle
(plus de 98 % dans la commune du Mazet-St-Voy). (On connaît au demeurant l’action
de ceux-ci dans le sauvetage des Juifs après l’invasion de la zone occupée, thème des
plus intéressants, qui exigerait une analyse fine au-delà de la simple image d’Épinal qui
a cours de nos jours).
- Terminons en disant que sur le plan politique, cette importance exceptionnelle de
l’emprise cléricale et de la ruralité explique un vote conservateur (mais pas extrémiste) à
la fin de la IIIe République. L’audience de la SFIO est très limitée, encore plus celle du
PCF. Quant au taux de syndicalisation dans les quelques industries, il est fort bas.
Ici comme ailleurs dans notre pays, l’invasion de la zone sud, puis le développement
facilité par les conditions géographiques locales de nombreux maquis (FTPF et FFI
pour l’essentiel) dans l’ensemble du département, dont les effectifs ne cessèrent de
gonfler après l’instauration du STO, aboutit de la part de la milice à ce que l’on a
coutume de nommer aujourd’hui une « radicalisation de la violence ». Ses membres,
marchant de concert avec l’occupant quand ils n’allaient pas au-delà de ses désirs,
se livrèrent à la traque des ennemis politiques du régime, des francs-maçons, des
quelques juifs, sans oublier le pur et simple brigandage. La chasse aux maquisards
représenta cependant une part essentielle de leurs sinistres activités, en particulier lors
de l’assaut du réduit du Mont Mouchet en juin 1944. Malheureusement pour eux, le
débarquement allié de Provence renversa du tout au tout la situation. La ville du Puy
s’insurgea et se libéra dès le 19 août ; les maîtres d’hier tentèrent de quitter la zone de
leurs « exploits » dans les fourgons de ce qui restait de la Wehrmacht. Nombre d’entre
eux furent arrêtés dans l’attente d’un jugement ou exécutés sur place. C’est en l’occurrence sur les archives de cette répression réunis par mon oncle (rapports des RG, de la
gendarmerie, simples PV ou comptes-rendus d’exécutions, archives des diverses cours
de justice, articles de journaux locaux et régionaux, documents d’état-civil, soit une
extraordinaire collation de plusieurs centaines de documents parfois uniques) que je
vais baser l’analyse qui va suivre.
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Qui étaient les Miliciens ?
Mon enquête a porté sur 133 individus, dont 129 miliciens encartés, sympathisants
ou indicateurs. Les 4 autres ne sont pas passés par cette organisation, mais ont choisi
une autre forme de lutte radicale, en l’occurrence l’engagement dans la Waffen-SS ; j’y
reviendrai à la fin de ce travail. Il est toutefois à noter que parmi le premier groupe,
seuls 3 miliciens (2,32 %) passèrent à la LVF, et un seul d’entre eux à la SS. On a donc
ici confirmation des difficultés de recrutement de la Légion des Volontaires. En dehors
d’idéologues convaincus ou de prisonniers poussés par le désir de fuir la misère des
camps, il était peu évident d’abandonner volontairement le pouvoir que vous conférait
l’uniforme noir frappé du gamma dans la France occupée pour aller tenter d’arrêter la
déferlante irrésistible de l’Armée Rouge dans les plaines de Biélorussie et de Pologne.
Concernant donc le groupe des miliciens, je me suis parfois trouvé confronté à un
questionnement méthodologique. En effet, si pour la plupart d’entre eux l’appartenance
à l’organisation ne posait pas de problème, un certain nombre de cas étaient moins
évidents. J’ai alors pris mes responsabilités d’historien, les étudiant l’un après l’autre.
J’ai choisi d’éliminer certains noms de ma liste et au contraire d’en intégrer d’autres, en
basant ce choix sur des critères de vraisemblance dont je suis tout à fait prêt à admettre
la subjectivité. Je pense néanmoins que ceci ne peut remettre en cause la valeur scientifique de l’analyse dans la mesure où ces interrogations ne portent que sur 10 personnes,
soit 7,75 % du total.
Par le titre « miliciens en Haute-Loire », j’entends aussi bien ceux qui étaient installés
dans le département (sans en être forcément originaires) et y ont exercé leur sinistres activités, que leurs congénères qui furent amenés de l’extérieur pour leur prêter main forte
ou encore les Altiligériens qui partirent combattre ailleurs. Je me réserve d’analyser plus
loin le recours à une « importation » d’hommes venus des départements voisins. L’étude
de ces trois groupes montre la répartition suivante :
tableau 1 : secteurs d’activité des miliciens
Miliciens...
... installés en Haute-Loire et y ayant agi
... installés en Haute-Loire et ayant agi ailleurs
... amenés en Haute-Loire pour y agir
données manquantes
total
nombre
96
4
19
10
129
poucentage
74,42
3,1
14,72
7,75
100
Il est donc évident que plus des trois quarts des miliciens étaient installés depuis un
temps plus ou moins long dans le département. C’est pleinement logique en termes de
recrutement des personnels d’un organisme d’espionnage, de police et de répression.
En effet, dans des campagnes assez peu peuplées, dans de petites localités où tout le
monde se connaît, l’efficacité passe par un recours massif à des gens du cru. L’appel à
des personnels « étrangers » ne représente même pas 15 % du total. La quasi-totalité
d’entre eux provient de deux départements voisins, la Loire (14) et le Puy-de-Dôme (3).
Les explications à ces recours sont diverses : besoin de renforts en cas de coup dur ;
appel à des spécialistes du renseignement ou de la torture. Sur un plan géographique,
les miliciens de la région stéphanoise agissent systématiquement dans la zone du Puy
et d’Yssingeaux, alors que les Clermontois sévissent autour de Brioude, ce qui est parfaitement logique au vu de ce que nous avons signalé plus haut quant à l’enclavement
du département. Le nombre de miliciens de la Haute-Loire amenés à combattre en
dehors de celle-ci est négligeable. On peut sans beaucoup de risque émettre l’hypothèse
de choix personnels difficilement analysables au vu de notre documentation. Si deux
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d’entre eux sont impliqués dans la répression en Lozère, explicable là aussi sur un plan
géographique, on est plus étonné de voir un étudiant ponot, Pierre Nauthonier, aller
lutter contre les maquis de la Haute-Savoie.
En ce qui concerne l’état civil, aussi étonnant que cela puisse paraître, le groupe étudié
ne comprend pas que des hommes, mais également 12 femmes (9,30 %) qui ont rejoint
l’organisation à la suite d’un mari, d’un fiancé ou d’un père. D’après les rapports de la
Résistance, beaucoup d’entre elles étaient aussi virulentes sinon plus que leurs congénères masculins, notamment en ce qui concerne la dénonciation et la torture : c’est
le cas par exemple de Juliette Octru, concubine de Ferdinand Parrat, ou de Blanche
Guichard. Plus étonnant, l’élément moteur de l’implication de la famille Thérond dans
la milice semble avoir été la fille Colette. Il est à noter qu’un certain nombre d’épouses
et d’enfants, sans être encartés, payèrent de leur vie la présence à leurs côtés d’un époux
et d’un père milicien : ce fut le cas pour les familles de Joseph Cubizolles, restaurateur à
Saugues, chef local de la Milice et d’Auguste Deloménède, épicier à Lavoûte-Chilhac.
Le premier fut enlevé le 28 mai 44 à son domicile par le groupe Judex et exécuté le
lendemain au Mont Mouchet avec sa femme et son fils ; le schéma des événements fut
rigoureusement identique pour le second, mais ceux-ci se déroulèrent le 26 juin. Quant
à l’épouse du maire de Brioude Clovis Dijon, elle était tombée en même temps que lui
sous les balles des maquisards, devant leur maison, le 29 avril.
Il est également fondamental de savoir quels étaient les âges des membres de la Milice
en 1944 (je n’ai pas tenu compte dans mon calcul du fait que deux d’entre eux furent
abattus durant l’année 43). La répartition par classe d’âge donne les résultats suivants :
Tableau 2 : Âges en 1944 (par décennies)
Miliciens âgés en 1944...
... de 15 à 20 ans
... de 21 à 30 ans
... de 31 à 40 ans
... de 41 à 50 ans
... de 51 à 60 ans
... de plus de 60 ans
âge inconnu
Total
nombre
18
49
24
18
15
3
2
129
poucentage
13,95
38
18,6
13,95
11,63
2,32
1,55
100
Il est à noter que le plus jeune du groupe étudié, Norbert Thérond, né en 1928, était âgé
de 16 ans, alors que le plus âgé, André Boudier, né en 1873, avait 71 ans.
J’ai opéré entre ces classes d’âge, suivant les critères suivants, des regroupements permettant de dépasser une certaine impression d’éparpillement et de révéler au contraire des
tendances profondes :
Tableau 3 : Âges en 1944 après regroupement des classes
Miliciens âgés en 1944 (après regroupement des classes)...
... de 15 à 30 ans
... de 31 à 50 ans
... de plus de 50 ans
âge inconnu
total
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nombre
67
42
18
2
129
poucentage
51,94
32,56
13,95
1,55
100
Michel Roux
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Le mouvement milicien recrute massivement chez les jeunes. Jusqu’à 30 ans, ceux-ci
représentent plus de la moitié des cas étudiés (67 individus, 51,94 % du total). On
ne peut que s’interroger devant cette situation. Les explications sont certainement
multiples. Pour des têtes brûlées, l’engagement milicien représentait une possibilité
de vivre une existence plus exaltante que celle qui était leur lot quotidien. D’autre
part, en ces temps d’extrême pénurie, ce choix pouvait représenter l’accès facile à la
nourriture et aux vêtements, sans oublier les prélèvements extra-légaux effectués lors
des opérations au détriment des suspects et des juifs. Ceci a pu attirer des éléments
populaires (mineurs, ouvriers, employés). Néanmoins, lorsque l’on considère que les
miliciens de moins de 20 ans étaient presque tous étudiants, on est forcé d’admettre
que le poids de la propagande et l’intégration intellectuelle d’une idéologie d’extrême
droite (souvent au sein de la famille) amena nombre d’individus à ce choix. Une remarque très importante s’impose à ce moment de notre analyse : ces lycéens fréquentaient dans leur immense majorité le Pensionnat Notre-Dame-de-France, la grande
institution catholique du Puy, dont les bâtiments dominent encore aujourd’hui la cité
anicienne (il en est de même pour des miliciens plus âgés, alors engagés dans la vie
professionnelle, tels les frères Vertupier ou Michel Chambon). On peut légitimement
supposer qu’ils y avaient reçu un enseignement basé sur un catholicisme de combat,
une méfiance profonde vis-à-vis de la République, ainsi qu’un anticommunisme et un
antisémitisme radicaux. L’un d’entre eux, Georges Pouget, fusillé le 16 septembre 44
à l’âge de 18 ans, laissa une extraordinaire lettre d’adieu à sa mère dont l’analyse
démontre une foi profonde, une étonnante maîtrise de la théologie et une véritable
exaltation mystique qui le poussaient à se considérer comme un soldat de Dieu. Il est
d’ailleurs à noter que celle-ci fut publiée dans le bulletin de son ancienne école après
la guerre. L’évolution normale à la sortie de ce lycée privé ou au sein de ses dernières
classes semble avoir consisté en l’engagement dans des mouvements d’extrême droite.
Notre documentation nous le précise pour 10 individus sur l’ensemble de nos miliciens (7,75 %) : tous sans exception sont membres du PPF de Doriot ; 5 d’entre eux
ont moins de 30 ans et sont ou ont été étudiants au P.N.D.F. Servant en quelque sorte
de contrepoint à la figure de ces intellectuels dévoyés et faisant la transition avec ce
qui va suivre, citons la figure de Jean Guerrut, enfant naturel né en 1910, abandonné
par sa mère, ouvrier agricole, sorte de Lacombe Lucien local qui se retrouva on ne
sait comment revêtu de l’uniforme noir. Sa débilité mentale était tellement flagrante
qu’il fut acquitté par la Cour martiale du Puy après son arrestation à Estivareilles en
août 44 puis à nouveau par la Cour de justice de cette même ville en février 45.
Logiquement, le groupe des 31-50 ans arrive en seconde position avec 42 représentants (32,56 %). Les considérations évoquées plus haut ont certainement compté
dans leur engagement. Mais il est nécessaire d’en faire rentrer d’autres en ligne
de compte, comme l’appartenance à la mouvance « ancien combattant » (que mes
sources me laissent supposer mais ne me permettent pas de quantifier), ainsi que
l’engagement politique de l’avant-guerre ou des débuts du conflit. Comme j’ai pu le
signaler ci-dessus, seul les doriotistes sont représentés, mais le niveau de recrutement
ou de responsabilité semble différent. Soit on rentre dans ce parti lorsque l’on est issu
d’un milieu populaire (galochier, mineur) dans une optique opportuniste, ou bien,
en raison d’une éducation brillante, on y exerce une fonction dirigeante : c’est par
exemple le cas de Robert Droguez, né en 1901, chef de section du parti et Ingénieur
des Eaux et Forêts.
Le groupe de ce que l’on appellerait aujourd’hui les seniors est numériquement le plus
faible avec seulement 18 personnes concernées (13,95 %). Les causes d’engagement me
semblent pour ces hommes avant tout politiques, sans oublier leur passé de combattants.
La preuve en est que la plupart des responsables départementaux et locaux (9 sur 13)
appartiennent à cette classe d’âge, et encore devrait-on ajouter que 3 parmi les 4 restants
en sont bien proches.
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Miliciens en haute-Loire...
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Le jeune franc-garde
Georges Pouget
lors de son arrestation à
Estivareilles où il a lutté les
armes à la main aux côtés des
Allemands.
Le chef de trentaine
Léon Mathieu en 1944 ;
condamné à mort par
contumace par la Cour de
justice du Puy en mars 1945,
il bénéficie du réseau de
soutien organisé par l’église
pour passer en Espagne.
Il s’éteint à Porto Santos en 1971.
Léon Mathieu
Georges Pouget
Raymond Touraud
Raymond Touraud,
chef départemental ayant
succédé à Letellier d’Aufresnes,
se bat aux côtés des Allemands
à Estivareilles. Sur ce cliché pris
au moment de son arrestation,
il porte apparemment le bras en
écharpe. Ramené au Puy, il y est
fusillé le 16 septembre 1944.
Militer pour l’Ordre Nouveau peut se faire en famille. Tous les cas de figure se présentent : en couple (8 cas : Roger Agrain et Fernande Tersol, Jean-Baptiste et Blanche
Guichard, Charles et Marguerite Liepert, Pierre et Rose Mahinc, Juliette Octru et
Ferdinand Parrat, René et Georgette Porcq, Jean et Yvonne Sabathe, Raymond et
Marguerite Touraud) ; entre frères (2 ou 3 cas : Louis et Léon Mathieu, Antoine et
Pierre Vertupier, peut-être François et Dominique Salles) ; un père et son ou ses enfants
(5 cas : Georges Brive, sa fille Georgette et son fils Roland ; Marcel Jean et son fils
Gaston ; Pierre Letellier d’Aufresne et son fils André ; Hypolite Maisonneuve et son
fils Roger ; Joseph Marey et son fils Roger) ; enfin, ce peuvent être des groupes plus
complexes : on citera la famille Thérond, avec le père, la mère, la fille et deux fils ou
encore l’association composée par le couple Liepert et leur gendre Alfred Boysson
d’École (comme pour les de Fay de la Roche on peut s’interroger sur l’existence dans ces
familles nobles d’une tradition d’engagement antirépublicain). De façon plus générale,
en dehors de certains couples qui ont pu choisir leur camp au gré des circonstances, il est
important de noter pour les autres l’importance de la tradition politique familiale. En
guise de preuve, signalons que la veille de la capture de son fils à Estivareilles, le père
de Georges Pouget, qui n’était pas passé apparemment par la Milice mais s’était engagé
directement dans la Waffen-SS (certainement dans la division Charlemagne), mourait
en Allemagne orientale des suites de blessures reçues sur le front russe.
Y eut-il de nombreux « enfants perdus » dans la Milice, c’est-à-dire des jeunes gens dont
l’enfance aurait pu revêtir des aspects tellement traumatisants que ceci les aurait fait
basculer du mauvais côté ? Il ne semble pas. Nos renseignements d’état-civil, fiables dans
l’ensemble, signalent 2 enfants naturels, Jean Guerrut et Charles Manhes, 2 pupilles
de la nation, Michel Chambon et Pierre Vincent, 2 enfants trouvés, Juliette Octru et
Ferdinand Parrat. Nous aboutissons donc à un total faible de 6 cas (4,65 % des miliciens
recensés). Sur un plan professionnel, si Parrat a été révoqué des GMR et collectionne
les ennuis avec la justice, si sa concubine n’a pas de profession déclarée, les autres sont
socialement bien intégrés : nous avons vu le cas Guerrut, Manhes est préparateur en
pharmacie, Chambon marchand de charbon et Vincent ingénieur chimiste. Pas de
fatalité sociale ou familiale poussant vers la collaboration et la traîtrise.
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Michel Roux
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Tableau 4 : Ventilation des lieux de naissance
L’examen des lieux de naissance donne les résultats suivants :
Lieux de naissance des miliciens
Le Puy et communes de banlieue
Autres communes de la Haute-Loire
Départements voisins (Ardèche, Cantal, Loire, Lozère,
Puy-de-Dôme)
Autres départements métropolitains
Colonies
Étranger
Inconnu
total
nombre
28
36
poucentage
21,7
27,91
27
20,93
32
2
1
3
129
24,81
1,55
0,78
2,32
100
N.B. : faute de renseignement plus précis, et au regard de son domicile, j’ai choisi de faire
de Jacques Bouisset un natif de Chamalières dans le Puy-de-Dôme, bien qu’il existe une
commune du même nom en Haute-Loire.
Tableau 5 : Ventilation des lieux de naissance après regroupements
Si l’on opère une nouvelle fois des regroupements, on obtient les résultats suivants :
Lieux de naissance des miliciens (après regroupements)
Haute-Loire
Départements voisins
Autres
Inconnu
Total
Nombre
64
27
35
3
129
Poucentage
49,61
20,93
27,14
2,32
100
Ces chiffres permettent d’aboutir à des interprétations assez aisées. On constate en
premier lieu que les natifs de la Haute-Loire représentent à eux seuls près de la moitié
du total étudié. Les explications avancées plus haut (connaissance du terrain et des choix
politiques des adversaires potentiels) sont toujours pertinentes. Les natifs du Puy et de
sa proche banlieue ont un poids supérieur à la position démographique de leur cité dans
le département. L’explication est certainement à rechercher dans la concentration sur
place de postes à responsabilités du public et du privé, couplée à la présence de milieux
intellectuels ultracatholiques, anticommunistes, antisémites et antirépublicains. Pour ce
qui est du reste du département, l’ensemble de son territoire est bien représenté, sans que
l’on puisse déterminer l’existence de noyaux locaux plus importants que d’autres. Plus
révélatrice de la situation locale est la présence de 27 miliciens nés dans un département
voisin. Si un certain nombre d’entre eux tels Gabriel Thérond, né à Saint-étienne-deLugdarès (07) ou Georges Pouget, natif de Langogne (48), se sont installés au Puy
poussés par les hasards de l’existence avant de commencer leur « carrière », les plus
nombreux, qui continuent à résider officiellement dans les départements circumvoisins, n’ont été appelés qu’au titre de renforts, ce qui démontre à la fois l’insuffisance du
recrutement sur place et l’importance des mouvements de résistance. Ainsi que je l’ai
signalé plus haut, la plupart de ces miliciens « importés » sont nés dans la Loire (16,
soit 59,26 % de ce groupe, 12,4 % du total) et du Puy-de-Dôme (5, soit 18,52 et 3,87 %).
Les membres de l’organisation nés ailleurs en métropole représentent un ensemble non
négligeable (32, soit 24,81 % du total) ; toutes les régions sont représentées : à l’exception
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Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
de la Corse, l’Ouest (avec Félix Ferry né à Nort-sur-Erdre [35]), le Sud-Ouest (avec élie
Bastou né à Saint-Avit-du-Moiron [33]), le pays catalan (Louis Bernard a vu le jour à
Amélie-les-Bains), le Sud-est (Albert Durand d’Avignon), la région parisienne (Robert
Droguez de Paris), le Nord (Blanche Guichard de Corbie [80]). Tout cela démontre
que ces hommes et ces femmes s’installèrent en Haute-Loire au gré des aléas de leur
vie privée ou professionnelle et que leur engagement fut postérieur. Il est toutefois à
remarquer une surreprésentation des natifs de l’Alsace-Moselle (4 cas, 12,5 % de ce
groupe, 3,1 % de l’ensemble). Il n’y a là sans doute qu’un effet de hasard, car rien ne
les rapproche : Charles et Marguerite Liepert, nés en 1881 et 1884, lui en Moselle,
elle dans le Bas-Rhin, demeurent à l’heure actuelle un mystère en ce qui concerne
leurs professions éventuelles ; Hubert Meyer, né en 1905 à Wingen (67) est professeur
d’allemand au lycée du Puy ; quant au mosellan Aloys Monlinet, né en 1923, c’est un
mécanicien semble-t-il un peu simple d’esprit, qui ne resta que peu de temps embrigadé.
Pour finir ce panorama, disons quelques mots des natifs de l’Empire. On avouera notre
ignorance quant au cheminement qui conduisit Raymond Lacoste de Bône aux bois de
Saint-Julien-du-Pinet où il fut fusillé. Les choses sont peut-être plus faciles à déterminer
pour le chef départemental Georges de Villars, qui était lieutenant de vaisseau. Cette
origine ultramarine laisse supposer l’appartenance à une famille de militaires coloniaux ;
quant à sa nomination au Puy début août 44 à un poste dont personne ne voulait, elle
lui fut imposée par sa hiérarchie. Comment la Milice, organisation éminemment nationaliste s’il en fut, accepta-t-elle en son sein un étranger, fût-il « allié », en la personne
de l’Italien de Trieste Alfredo Bergamasco, cela restera également une énigme. La seule
explication plausible est qu’à partir d’un certain degré de difficulté dans le recrutement,
on n’hésita pas à faire flèche de tout bois.
En ce qui concerne la répartition par professions, il est d’abord important de noter que
nous ne sommes informés que pour 95 individus de notre échantillon (73,64 %). D’autre
part, le problème méthodologique de base consiste à déterminer des groupes cohérents,
ce qui n’est pas toujours aisé ; doit-on ainsi ranger les boulangers et les coiffeurs parmi
les artisans ou les commerçants ? Il y a là une part de choix personnel que je ne renie
pas ; néanmoins, au vu de l’importance du groupe, je ne pense pas que ces quelques cas
puissent remettre en cause la validité de l’analyse. Les résultats sont donc les suivants :
Tableau 6 : Ventilation des professions en données brutes
Professions des miliciens
Étudiants
Agriculture
Ouvriers/mineurs
Employés du secteur privé
Personnels de maîtrise et d’encadrement du secteur privé
Employés du secteur des transports public et privé
Employés de l’administration
Cadres de l’administration
Patrons de l’artisanat
Commerçants/VRP
Professions intellectuelles (journaliste, ingénieur, professeur)
Professions libérales
Police/armée
Sans profession et retraités
total
domitia 11 - 2010
Nombre
12
4
10
10
3
5
9
3
9
12
5
3
7
3
95
Poucentage
12,63
4,21
10,53
10,53
3,16
5,26
9,47
3,16
9,47
12,63
5,26
3,16
7,37
3,16
100
Michel Roux
117
Les groupes socioprofessionnels, examinés de façon brute sans regroupements, expriment de façon évidente un très fort éparpillement. Seuls 4 d’entre eux dépassent
les 10 % : il s’agit des étudiants, des commerçants/VRP (ces derniers étant particulièrement représentés avec 6 individus), des employés du secteur privé et des ouvriers/
mineurs. Nos résultats ne s’éloignent donc guère de ce que les diverses recherches
à propos du recrutement des organisations de masse fascistes ou nazies ailleurs en
Europe ont montré : les gros bataillons sont fournis par une petite bourgeoisie plus
ou moins déclassée, à forte conscience politique et religieuse (catholicisme, antisémitisme et anticommunisme), dotée d’un niveau scolaire convenable. Bien que
le pourcentage d’ouvriers n’ait rien d’exceptionnel au vu des modèles évoqués plus
haut, une précision s’impose en ce qui concerne la Haute-Loire : le département
étant peu industrialisé, une part importante de ce recrutement est originaire de la
Loire (5 individus), avec parmi eux une part non négligeable de mineurs (3) venus
du bassin de Saint-Etienne. Le nombre d’administratifs n’a rien d’exceptionnel
dans un département où ce secteur a toujours représenté une part importante des
emplois (21 cas, soit 22,1 % du total) ; il est bien entendu très diversifié, depuis le
simple facteur rural jusqu’à l’ingénieur des Eaux et Forêts, en passant par l’employé
de préfecture ou des services du Contrôle économique. Il est à noter que le nombre
d’enseignants est très faible (2, soit 2,1 %) ; encore faut-il préciser que l’un d’entre
eux, Georges Pioct, n’est qu’un simple moniteur agricole, et que le second, Hubert
Meyer, d’origine alsacienne, avait manifesté sa germanophilie dès avant la guerre.
Ceci s’explique indubitablement par une opposition idéologique nette du corps enseignant altiligérien, habitué au combat pour la laïcité au sein d’un environnement
traditionnellement peu favorable à l’idéologie de la Révolution nationale. Inversement,
et on ne s’en étonnera pas, on constate la relative importance parmi les membres de la
fonction publique de miliciens issus des rangs de l’armée (2, 2,1 % du total, 9,52 % des
fonctionnaires) et de la police (4, 4,21 % du total, 19,04 % des fonctionnaires). J’avoue
n’avoir aucune explication quant à l’importance relative du secteur des transports
routiers avec ses 5 représentants (5,25 % du total). Il est je pense très important de
noter la faiblesse du nombre des agriculteurs : ces derniers ne sont que 4 (et encore
l’un d’entre eux est-il un ouvrier agricole déficient mental), soit 4,21 % de l’ensemble,
ce qui est ridicule dans un département où la primauté du secteur primaire n’est pas à
démontrer. Faute de disposer pour l’heure d’une analyse fine des partis pris idéologiques des paysans locaux, je pense que l’on peut expliquer cet état de fait sans beaucoup
de crainte de se tromper en disant que si l’idéologie maréchaliste reçut certainement
un accueil assez favorable dans les campagnes, ceci n’alla pas jusqu’à un engagement
dans une formation paramilitaire, certainement par prudence vis-à-vis de l’avenir,
mais également en raison de l’importance des travaux quotidiens qui dissuada les plus
nombreux, ainsi que de conditions de vie plus favorables en termes de ravitaillement
ou d’habillement que pour la prolétariat ouvrier du Puy (nous avons déjà signalé
parmi les motivations poussant à rejoindre les rangs de la Milice l’importance de ces
considérations matérielles).
J’ai également tenté d’opérer des regroupements suivant le degré de formation intellectuelle et de responsabilité professionnelle de chaque sous-ensemble (à l’exception des
étudiants, des militaires et policiers et des retraités ou sans profession, difficilement
assimilables à d’autres), même si l’on peut en critiquer les présupposés. Ceci m’amène
à la proposition de répartition suivante :
118
Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
Tableau 7 : Ventilation des professions après regroupements
Profession des miliciens (après regroupements)
Acteurs économiques de base
Acteurs économiques supérieurs
Étudiants
Police/armée
Sans profession et retraités
Total
Nombre
38
35
12
7
3
95
Poucentage
40
36,84
12,63
7,37
3,16
100
On perçoit d’emblée la surreprésentation de ce que l’on pourrait appeler aujourd’hui
les « décideurs » (même si leur niveau est parfois bien modeste) par rapport à ce que
j’appelle les « acteurs économiques de base » (36,84 % contre 40 %), ce qui confirme ce
que je signalais plus haut quant au recrutement « petit bourgeois » de la Milice. Si l’on
met en rapport les métiers exercés et le degré de responsabilité au sein de la Milice, on
ne s’étonnera pas de constater que les chefs appartiennent tous au groupe supérieur, à
l’exception du chef de trentaine Léon Mathieu, employé du Service du Contrôle économique et d’Aimable Gardon, chef du 2e service, employé des PTT. Plus on grimpe
dans la hiérarchie de l’organisation, plus on ressent l’impression globale d’avoir affaire
à des notables : si les responsables locaux ne sont que restaurateur (Joseph Cubizolles),
droguiste (Pierre Daumas) ou chef de gare (Joseph Jamondy), les secrétaires VRP (André Boudier) ou comptable (Edouard Enjolras), les chefs du SR artisan tailleur (Jean
Sabathe) ou imprimeur (Jean Ogier), on retrouve parmi les chefs départementaux un
officier devenu directeur commercial après la dissolution de l’armée d’Armistice (Pierre
Letellier d’Aufresne), un commerçant en radioélectricité (Raymond Touraud) et un
lieutenant de vaisseau (Georges de Villars) ; quant au chef régional Auvergne, Jean
Achon, c’est un journaliste bien connu. Seule exception à ce modèle, le cas d’Henri
Viala, simple chef local, alors qu’il est ingénieur des Arts et Métiers. Autrement dit, si
le discours officiel de la Milice est révolutionnaire, ses pratiques internes confirment son
respect indéfectible des hiérarchies sociales.
Le chef régional Jean Achon,
semble-t-il en uniforme de
l’armée régulière et non pas
de la Milice.
Jean Achon
domitia 11 - 2010
Aimable Gardon
Aimable Gardon
en uniforme de milicien.
Arrêté à Estivareilles (42),
il est passé par les armes au
Puy le 5 septembre 1944.
Michel Roux
119
Cette étude des professions des miliciens permet enfin de déceler l’existence de « cellules » de recrutement et d’action ancrées dans un secteur d’activité bien déterminé. Pierre
Mahinc et Charles Manhes sont tous deux préparateurs en pharmacie au Puy ; Cyprien
Gential et Claude Gérenton travaillent aux PTT de cette même ville. Ils appartiennent
à peu près à la même génération (Mahinc est un peu plus âgé) et ont tous été scolarisés
au Pensionnat Notre-Dame-de-France.
Tableau 8 : Grades des miliciens
L’étude des grades n’apporte tout compte fait que peu de renseignements exploitables :
Grades des miliciens
Cadres dirigeants
Cadres intermédiaires
Francs-gardes
Miliciens
Indicateurs
Total
nombre
4
11
25
85
4
129
poucentage
3,1
8,53
19,38
65,89
3,1
100
Nous possédons le nom et la fonction du chef régional (Jean Achon) et des trois chefs
départementaux qui se succédèrent en Haute-Loire (Pierre Letellier d’Aufresne, Raymond Touraud, Georges de Villars), soit 3,1 % de l’ensemble des individus répertoriés.
La bonne entente n’a semble-t-il pas toujours régné en leur sein puisque Achon a démis
Letellier le 18/12/43, ce dernier devenant commissaire de police à Lille (faut-il y voir
une incompatibilité entre les deux hommes ou bien un limogeage pour absence de
résultats ? on ne saurait répondre pour l’heure à cette question). Les autres gradés sont
désignés dans les procédures judiciaires ou les articles de journaux par des expressions
qui n’appartiennent pas au vocabulaire de l’organisation (« chef local », « secrétaire »,
« chef du SR »). Un seul est intégré dans la nomenclature officielle avec le grade de chef
de trentaine. Ces 11 cadres intermédiaires constituent 8,53 % de notre échantillon. On
en retire donc une nette impression de sous-encadrement ; il ne me semble pas que celuici provienne d’une capacité plus grande de ces responsables à passer entre les gouttes et
à se rendre invisibles au moment de l’épuration, mais plutôt d’une méconnaissance de
la part de la population, des résistants et des juges des arcanes organisationnelles de la
Milice. Cette même explication me paraît devoir s’appliquer aux hommes de troupe et
sous-officiers (ces derniers n’apparaissant pas clairement dans nos sources). Ils sont invariablement désignés par les mots « milicien » ou « franc-garde ». Il est bon de rappeler
que ce dernier terme désigne le « soldat » de base, l’équivalent d’un deuxième classe,
une sorte de permanent armé et revêtu d’un uniforme. Or, on n’en relève que 25 occurences, soit 19,38 % du total. Bien que ceci ait certainement été le cas dans un nombre
d’occasions qu’il nous est impossible de préciser en l’état actuel de notre recherche,
il serait fort étonnant que le second vocable, très majoritaire avec 85 noms (65,89 %),
n’ait pu désigner que des miliciens d’occasion ou de simples encartés. Ce flou artistique
dans la désignation des individus est encore révélé par le fait qu’au sein du groupe
des « miliciens », l’appartenance au mouvement n’est pas considérée comme certaine
pour 20 cas (15,5 % de l’ensemble, mais 23,53 % de ces derniers). Marginalement cependant, nous pouvons être au fait des fonctions précises de certains francs-gardes :
nous savons ainsi qu’Abel Crozemarie, Léon Cubizolles et Pierre Nicollaud étaient les
gardes du corps du chef régional Achon qu’ils accompagnèrent, les deux premiers de
façon certaine, en Allemagne. Dernier groupe signalé par nos documents, celui des
agents de renseignements, dont la fonction même appelait la discrétion pour mieux
tenter de tromper ou de pénétrer les mouvements de Résistance : on en connaît quatre
120
Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
exemples (3,1 %), Jules Delair, facteur à Brioude, Jean Georges, retraité de Retournac,
Claude Locussol, un autre préposé, mais d’Allègre celui-ci, et Victor Sauron, agriculteur à Retournac également. Le « métier » s’avérait dangereux puisqu’ils furent tous
enlevés et exécutés sans jugement par le maquis. à l’inverse, on peut supposer que les
plus habiles ne laissèrent aucune trace et passèrent totalement entre les mailles du filet.
Cet examen trop sommaire tendrait donc bien à démontrer que la peur qu’engendrait
la Milice empêchait les Résistants de s’intéresser de trop près à son organisation alors
qu’elle était en activité, ce que l’historien ne peut que comprendre, mais également
regretter d’un strict point de vue scientifique. Une fois l’heure des comptes venue, le
simple fait d’avoir gravité au sein ou autour de la nébuleuse des hommes en noir suffit
pour être frappé ; les maquisards et résistants, dans l’urgence de l’instant, n’attachaient
plus alors aucune importance à ces différenciations de grades qui devaient leur paraître
quelque peu byzantines. Au-delà des parades et des défilés, une des forces de la Milice,
outre la terreur qu’elle inspirait, résida certainement dans le profond mystère entourant
son fonctionnement interne, mystère savamment entretenu par ses responsables, ce qui
ne manque pas de piquant pour des gens qui, entre autres, se revendiquaient du combat
contre les sociétés secrètes comme la franc-maçonnerie. Autre ironie de l’histoire, sa
structure nucléaire par cercles concentriques, certes inspirée par les exemples nazis et
fascistes, empruntait beaucoup à celle du PCF, dont la solidité avait fait ses preuves
depuis son interdiction par Daladier.
L’épuration et ses suites
Quel fut le sort qui attendait ces hommes et ces femmes après les débarquements de
Normandie et de Provence, puis la libération du territoire ? Pour analyser cela de la façon
la plus claire possible, j’ai choisi d’examiner en premier lieu le cas de ceux qui subirent la
vindicte de leurs adversaires avant l’automne 44, date à laquelle les institutions républicaines sont rétablies en Haute-Loire et dans les départements environnants. Ce groupe
comporte 74 individus (57,36 % du total). Parmi eux, 44 furent abattus ou fusillés sans
jugement (59,46 %), les 30 autres (40,54 %) furent traduits devant une Cour martiale au
Puy, dans le Brivadois ou encore devant un tribunal militaire, juridictions d’exception
qui ne s’embarrassaient pas a priori de fioritures (mais on verra que les choses ne sont
pas si simples).
Tableau 9 :
1944 : Cours martiales et exécutions sans jugements
50
40
30
Est
20
10
0
sans jugem ent
domitia 11 - 2010
Cour m artiale
Michel Roux
121
Les premières exécutions sommaires individuelles eurent lieu dès 1943 : elles concernent
27 individus (61,36 % de ceux qui ne furent pas jugés, 36,49 % du groupe des 74, 20,93 %
de la totalité des miliciens) ; cette année-là, Léopold Praly fut abattu dans un café du
Chambon-sur-Lignon le 6 août, suivi le 7 octobre par Jean-Marie Lambert, encore une
fois dans un débit de boissons, mais d’Yssingeaux. Les événements prirent une toute
autre tournure au printemps et à l’été 1944. Ce sont 18 miliciens qui payèrent leurs
forfaits de leur vie. Marcellin Roche, révolvérisé dans un bar de Vorey, survécut miraculeusement à ses blessures et ne s’éteindra qu’en 1974. Toutes les zones du département
furent concernées par ces actions, bien qu’on dénote une certaine concentration dans le
nord et l’ouest, à mettre en rapport avec l’activité militaire des maquis, notamment aux
alentours du réduit du Mont Mouchet. Six autres miliciens (respectivement 13,63 %,
8,11 % et 4,65 % des échantillons évoqués ci-dessus) furent exécutés en dehors du département soit après leur capture alors qu’ils tentaient de fuir, soit consécutivement à
leur enlèvement en Haute-Loire et à leur transfert dans une circonscription voisine.
Jean Georges, Jean Sabathe et Victor Simon furent passés par les armes par les FTP
de l’Ardèche en août, Jean-Baptiste Pajot et Marcel Mialhe connurent le même sort en
Lozère en juin et septembre, Albert Michel tomba dans le Puy-de-Dôme en juillet.
Jeanne Romieux
ne faisait pas partie de la Milice.
Maîtresse du commandant de
la place du Puy,
le Major Julius Schmähling,
elle accompagna les
Allemands dans leur retraite
de peur des représailles. On
la voit ici lors de sa capture à
Estivareilles (42). Elle est fusillée
dès le 26 août 44 dans le
bois de Lazarlier, commune
de Saint-Clément (63), par
le Corps-franc du capitaine
Hoche.
122
Il y eut également des fusillades collectives sans jugement qui concernèrent 17 individus
(38,64 %, 22,97 % et 13,18 %). Celles-ci furent consécutives à l’attaque de la colonne
allemande qui fuyait Le Puy insurgé depuis le 18 août par divers groupes de maquisards de la Haute-Loire, de la Loire et du Puy-de-Dôme à Estivareilles (42) le 22. Les
troupes nazies durent se rendre ; elles traînaient dans leurs fourgons collaborateurs et
miliciens. Ceux-ci furent partagés, suivant des modalités que nous ne connaissons pas,
entre les résistants. Un certain nombre d’entre eux, nous y reviendrons, fut ramené dans
la cité ponote. Les autres payèrent dans la foulée. Le groupe FTPF du camp Wodli
en transféra 9 à Craponne-sur-Arzon et les exécuta le jour
même (un doute se pose cependant quand au lieu de la mort
de Germain Bouvier) ; les FFI de la Formation Sambre-etMeuse en firent de même pour 4 captifs à Montarcher (42),
bien que François Salles ait pu être exécuté sur le lieu du
combat, peut-être en raison de la gravité de ses blessures qui
le rendait intransportable ; enfin le corps-franc du capitaine
Adrien Pommier, dit « Capitaine Hoche », fit de même le
26 août à Saint-Clément (63) pour 4 autres miliciens, avec
parmi eux le couple Liepert et leur gendre Boysson d’école
(la maîtresse française du commandant allemand de la place
du Puy, Jeanne Romieux, qui n’était pas milicienne, subit un
sort identique). L’âpreté des combats, la férocité de haines
ressassées depuis des mois, voire des années, l’ambiance de
guerre civile en cet été 44 expliquent qu’il ne pouvait guère
être question de faire quartier. Néanmoins, les partisans
ne peuvent être accusés d’avoir agi sans discernement : en
effet, la femme et le jeune fils d’Hippolyte Maisonneuve,
qui allait être emmené au Puy, sans relation avec la Milice,
furent libérés sans être inquiétés.
Jeanne Romieux
Miliciens en haute-Loire...
L’évocation du cas de ce dernier milicien nous permet
d’opérer la transition avec ceux qui l’accompagnèrent au
chef-lieu où ils furent traduits devant une Cour martiale
présidée par le capitaine FFI Lucien Rongier, dit « Capitaine Alain ». Les motifs de renvoi étaient tous assez
semblables et on les retrouvera devant les juridictions offi-
domitia 11 - 2010
cielles compétentes par la suite : il s’agit
d’accusation de trahison, d’assassinat,
de tortures, de dénonciations, d’intelligence avec l’ennemi. Cette redondance
nous a amené pour l’instant à prendre
le parti de ne pas nous y intéresser. La
Cour statua sur 20 cas de miliciens
(66,66 % de ceux qui passèrent devant
ce type de juridiction, 27,02 % du
groupe des 74, 15,5 % de l’ensemble).
Une première session le 4 septembre
envoya au peloton d’exécution assemblé le lendemain au camp d’Eycenac
un premier groupe de 5 condamnés,
George Brive, Pierre Donzel, Robert
Droguez, Aimable Gardon et Hippolyte Maisonneuve (l’épouse de Donzel,
Anna Schachter, citoyenne allemande,
également condamnée, les accompagna
dans la mort) ; une seconde, réunie dans
les mêmes conditions le 15, fit exécuter
le 16, 5 autres personnes : il s’agissait Pierre Donzel
de Lucien Breuil, Blanche Guichard,
son époux Jean-Baptiste, Georges Pouget et Raymond Touraud. La dernière session
du 21 ne frappa du châtiment suprême qu’André Romeyer, qui d’ailleurs avait été
capturé lors de la prise de la caserne Romeuf au Puy et non pas à Estivareilles ; il fut
accompagné dans la mort par deux femmes de mœurs légères, toutes deux maîtresses
de soldats allemands, accusées sans grandes preuves d’être des dénonciatrices de
résistants, Marie-Louise Beaufumé et Marinette Pascal. On ne sait comment furent
constitués ces groupes. Tout au plus peut-on supposer qu’on exécuta en premier ceux
qui avaient accumulé sur eux le plus de haine et dont on pensait qu’un interrogatoire
plus poussé n’amènerait rien. Les derniers fusillés attendirent plusieurs jours, éventuellement pour des raisons opposées à celles que nous venons d’évoquer, à moins
que leurs blessures ne les eussent empêchés de comparaître. La Cour martiale du Puy
ne fut cependant pas un antre de bassesse et de sauvagerie où des « résistants de la
vingt-cinquième heure » se livrèrent aux pires règlements de compte pour faire oublier
leurs propres compromissions ainsi qu’une certaine historiographie tend de nos jours
à en accréditer l’idée. En effet, en raison de leur âge, moins de 25 ans, et alors qu’ils
étaient des miliciens avérés, elle se contenta de condamner à 3 ans de prison Roland
et Georgette Brive, à 5 ans Marguerite Touraud, à 10 Gabriel Thérond et à 20 son
frère Marc et sa sœur Colette. On peut estimer que ces peines étaient lourdes, mais
dans l’échauffement des esprits consécutifs à la Libération, les juges militaires du
Puy surent faire la part des choses. Mieux, ils acquittèrent Norbert Thérond, âgé
seulement de 16 ans et sa mère, ainsi que Jean Guerrut, pris les armes à la main, mais
dont on savait qu’il était simple d’esprit.
Pierre Donzel
en compagnie de son épouse
allemande Anna Schlachter et
d’autres prisonniers après leur
capture à Estivareilles (42) ;
ils seront tous deux fusillés au
Puy le 5 septembre.
L’autre Cour martiale tenue dans le département intéresse le Brivadois. 9 miliciens
(respectivement 30 %, 12,16 % et 6,98 %), accompagnés d’un couple de restaurateurs
accusés d’avoir dénoncé des résistants, furent condamnés à mort le 12 août et exécutés
le 13 dans le bois de Malpeyre, commune de Lubilhac, par le maquis de la 7e zone sous
le commandement de Jean Maurin, dit « Capitaine Cobra ». Le fait que ces individus
aient tous atteint la trentaine ainsi que la férocité des combats qui avaient eu lieu autour
du Mont Mouchet expliquent certainement qu’il n’y eut pas de quartier.
domitia 11 - 2010
Michel Roux
123
Le dernier Altilégérien à être traduit devant une juridiction d’exception le fut dans des
conditions plus originales. Victorien Vincent avait fui Le Puy au moment de la Libération. On peut supposer que comme nombre d’autres miliciens, il cherchait à gagner
l’Allemagne puisqu’il fut arrêté par des éléments de la 2e DB dans les Vosges. Présenté
devant le Tribunal militaire aux armées, il fut passé par les armes à Esseygney (88) le
10 octobre (3,33 %, 1,35 % et 0,77 %).
Le sort des miliciens frappés par la Résistance ou tombés entre ses mains de la fin 43 à
l’automne 44 peut donc graphiquement se résumer de la façon suivante :
Tableau 10 : Ventilation des peines jusqu’à l’automne 44
Les peines jusqu’à l’automne 44
Exécutions sommaires individuelles
Exécutions sommaires collectives
Exécutions après condamnation par une Cour martiale
Peines de prison
Acquittements
total
nombre
27
17
21
6
3
74
poucentage
36,49
22,97
28,38
8,11
4,05
100
Il va de soi que si l’on met en corrélation toutes les exécutions et condamnations à mort
suivies d’effet, on ne peut que constater que l’atmosphère de l’époque ne ressemblait
pas, comme le disait à propos de la révolution Mao Tsé Toung, à celle d’« un dîner de
gala » :
Tableau 11 : Ventilation des peines jusqu’à l’automne 44 après regroupements
Les peines jusqu’à l’automne 44 (après regroupements)
Exécutions
Peines de prison
Acquittements
total
nombre
65
6
3
74
poucentage
87,84
8,11
4,05
100
à partir de l’hiver 1944-1945, les institutions judiciaires républicaines sont rétablies
et les Cours de justice remplacent les juridictions d’exception pour traiter l’ensemble
du contentieux né de la période d’occupation. Elles fonctionneront jusqu’à la fin des
années 40. Parmi notre groupe de 129 miliciens, 41 d’entre eux auront maille à partir
avec elles, soit 31,78 %. Signalons que nous retrouverons parmi eux Jean Guerrut et Victorien Vincent, déjà évoqués ci-dessus. Ainsi que les chiffres ci-après le démontrent, les
peines infligées en première instance sont extrêmement variables, mais on a néanmoins
l’impression, confirmée par d’autres études, que ceux qui eurent la chance d’être jugés
le plus tard s’en tirèrent le mieux :
124
Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
Tableau 12 : Peines prononcées par les Cours de justice
Peines prononcées par les Cours de justice
Condamnés à mort par contumace
Condamnés à mort exécutés
Condamnés à mort ayant vu leurs peines commuées
Travaux forcés à perpétuité
15 ans
10 ans
5 ans
1 an
6 mois
3 mois
Confiscation des biens
Indignité nationale à vie
5 ans d’indignité
Pas de précision sur la condamnation
Acquitté
total
nombre
13
5
2
1
3
2
2
1
2
1
1
3
1
3
1
41
poucentage
31,7
12,18
4,88
2,44
7,32
4,88
4,88
2,44
4,88
2,44
2,44
7,32
2,44
7,32
2,44
100
Avant de procéder à de nécessaires regroupements de données, apportons d’emblée quelques précisions. 18 condamnations (43,90 %) furent le fait de Cours extérieures à la HauteLoire, Riom venant largement en tête avec 9 cas, devant Lyon, 3 cas, Bordeaux, Nîmes,
Clermont-Ferrand, Pamiers et Mende (1 cas). Cet éventail géographique s’explique bien
entendu par les stratégies de fuite diverses des miliciens et leurs lieux d’arrestation, mais
aussi par le fait que Riom étant la Cour d’Appel dont ressort Le Puy, un certain nombre
de procès durent y être transférés dans un souci de plus grande sérénité.
Il est à remarquer que toutes les condamnations à mort suivies d’effet furent prononcées par
ces juridictions extérieures, 3 pour Lyon, Pierre Nauthonnier, Jean Ogier et Jean de Fay
de la Roche (ce dernier cas manque de clarté ; son exécution précoce au mois d’octobre 44
aurait pu être le fait d’une décision de Cour martiale), 1 pour Nîmes (Roger Saladin) et 1
pour Riom (Émile Monnet). Celui-ci tomba sous les balles en avril 46, Roger Saladin en
mai et Jean Ogier en août 47, c’est-à-dire relativement tard. Doit-on attribuer cela à une
plus grande sévérité par rapport à ce qui se passait en Haute-Loire ou bien à la gravité des
forfaits ? Cette dernière explication semble valable pour Nauthonnier qui s’était illustré
en tant que tortionnaire en Haute-Savoie puis à Montpellier, de même que pour Monnet
qui avait sévi à la prison du Puy, tant et si bien que la cour riomoise demanda à ce qu’il
fût fusillé sur le lieu de ses « exploits ». Jean Durand et Ferdinand Parrat eurent plus de
chance. La peine de mort du premier, prononcée par la Cour de Mende en octobre 44
fut commuée en 20 ans de travaux forcés pour « incapacité permanente ». Ayant connu
dans mon enfance et mon adolescence ce personnage au Puy, lequel ne manifestait aucun
handicap physique ou mental, je n’ai pu comprendre la signification de cette expression.
Le second était un des pires miliciens ponots : son exécution ne faisait aucun doute,
mais il eut la chance d’avoir à témoigner après sa condamnation dans le procès intenté
au Procureur de la République de la cité anicienne qui s’était signalé par son zèle dans
la traque des résistants. Les mois passèrent ; la Guerre d’Indochine venait de commencer
et la France avait besoin de renforcer ses effectifs. Comme un certain nombre d’autres,
miliciens, Waffen-SS, prisonniers allemands, il fut gracié à condition de s’engager pour
l’extrême-Orient. Les 13 autres condamnations à mort prononcées au Puy ne le furent
que par contumace. Ironiquement, Victorien Vincent, qui avait été passé par les armes
nous l’avons dit par la 2e DB, fut condamné à cette peine après sa mort, car personne au
Puy n’était au courant de celle-ci.
domitia 11 - 2010
Michel Roux
125
Les peines de prison lourdes, de 5 ans à perpétuité, frappèrent 8 individus (19,51 %).
Perpétuité pour Antonin Barrande (certainement au Puy), 15 ans (à Riom) pour Pierre
Letellier d’Aufresne, arrêté à Nancy, qui paya ses fonctions de Chef départemental,
Jean-Pierre Quinqueton (à Riom également) et Henri Viala (à Bordeaux), 10 ans pour
Léon Cubizolles, garde du corps d’Achon (à Riom), et Georges de Villars, à qui semblet-il on fut reconnaissant de son attitude modératrice lors de sa nomination au Puy début
août 44, 5 ans enfin pour Juliette Octru, accompagnés de la contumace et de 10 000 F
d’amende, et Yvonne Sabathe. Dans 4 cas (9,75 %), les peines furent fort modestes puisque inférieures ou égales à une année d’emprisonnement : Marie Laurent écopa d’un
an, Pierre Liabeuf, qui avait réussi à fausser compagnie aux maquisards qui voulaient
le fusiller durant l’été 44, et Hubert Meyer à 6 mois (pour ce dernier avec une amende
de 1 000 F), Aloys Monlinet, qui n’avait fait que passer brièvement dans la Milice et ne
semblait pas jouir de toutes ses facultés, à 3 mois (à Riom).
Toutes les condamnations évoquées jusque là semblent s’être accompagnées de la confiscation des biens et de l’indignité nationale à vie. Certains justiciables, 6 en l’occurrence
(14,63 %), ne subirent que ce type de peine, et encore pour certains en partie seulement :
ce fut le cas pour Cyprien Gential devant la Cour de Clermont-Fd et pour Michel
Chambon devant celle de Riom ; Pierre Vincent ne fut frappé que de l’indignité à vie
dans l’Ariège, de même que Claude Gérenton à Riom. Cette Cour se contenta d’infliger
une indignité de 5 ans à Georges Pioct. Signalons pour terminer que 3 cas (7,32 %), dont
un jugé à Lyon, demeurent un mystère dans la mesure où nous savons que ces hommes
furent traduits en justice mais nous ne sommes pas parvenus à savoir quelles furent les
peines qui leur furent infligées. Nous terminerons par le malheureux Jean Guerrut : déjà
acquitté par la Cour martiale du Puy, il fut traduit à nouveau devant sa Cour de justice
en février 45. L’expert psychiatre qui l’avait examiné signala que son intelligence était
si limitée qu’elle lui permettait de garder les moutons, mais pas les vaches ! Inutile de
préciser que le second jugement ne démentit pas le premier.
Voici la traduction illustrée de ce qui précède :
Figure 13 : Peines prononcées par les Cours de justice après regroupements
Peines prononcées par les Cours de justice
(après regroupements)
Condamnations à mort (suivies d’effet ou non)
Peines d’emprisonnement lourdes (5 ans et plus)
Peines d’emprisonnement légères (1 an et moins)
Confiscation des biens et indignité permanente ou à temps
Pas de précision sur la condamnation
Acquitté
total
nombre
poucentage
20
8
4
5
3
1
41
48,78
19,51
9,76
12,19
7,32
2,44
100
Les différences par rapport aux résultats observés quant aux décisions rendues par
les tribunaux d’exception de la Libération sautent aux yeux. Certes le pourcentage de
condamnations à mort reste important (48,78 %), mais cela n’a pas grand-chose à voir
avec la situation précédente (87,84 %). De plus, seulement 25 % des décisions prises par
les Cours de justice furent suivies d’effet, ce qui contribue encore à modifier le rapport.
Au total, 64 miliciens furent abattus ou exécutés de la fin 43 au début de l’automne 44,
contre 5 par la suite. Pour les cas graves, les Cours de justice se sont davantage tournées
vers de longues peines d’emprisonnement (19,51 % des cas) que les tribunaux qui les
avaient précédées (8,11 %). Autre différence, ceux-ci n’avaient pas prononcé de peines
126
Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
d’emprisonnement légères, mais le taux d’acquittement, bien que très faible, avait été
assez semblable.
Comme nous l’avons vu plus haut, 14 (34,15 %) parmi les peines prononcées par les
Cours de justice n’étaient que théoriques puisque par contumace. De plus, le jeu des
remises de peines, des grâces et des amnisties fonctionna à plein dès la fin des années 40.
Pierre Nicollaud, condamné à mort par contumace (même si ce dernier point n’est pas
certain), convola en justes noces en 1952. Juliette Octru, qui avait écopé de 5 ans en son
absence, épousa Ferdinand Parrat en 1956 à Neuilly-sur-Seine. Léon Cubizolles, qui
aurait dû purger 10 ans de travaux forcés fut libéré dès 1949.
La Libération du Puy et du département avait donc signifié pour la plupart le grand
sauve-qui-peut. Certains eurent la chance de ne pas se trouver mêlés à la colonne allemande d’Estivareilles. Ils adoptèrent d’autres stratégies. 7 d’entre eux, Abel Crozemarie,
Edouard Enjolras, Claude Gérenton, Louis Mathieu, Jean-Pierre Quinqueton, Antoine
Vertupier et Henri Viala, parvinrent à rejoindre le Reich. Les deux derniers furent capturés par l’armée US et remis aux autorités françaises, les 5 autres rentrèrent par leurs
propres moyens, Quinqueton et Mathieu en se faisant passer pour STO, stratagème
assez classique, et se terrèrent. Crozemarie battit tous les records puisque sa « planque »
à Vaux-en-Velin dura 5 ans. D’autres, avec un aplomb assez remarquable, choisirent
de rejoindre le camp des vainqueurs en profitant de la situation chaotique. Parrat se fit
passer pour un prisonnier libéré dans un centre d’accueil de Lyon. Chambon s’autoproclama FFI à Clermont ; malheureusement pour lui, il fut reconnu par un authentique
déporté ponot de retour des camps de la mort. Quant à Cyprien Gential, il revêtit à
Paris l’uniforme de la gendarmerie. La dernière échappatoire, bien connue également,
est le fameux « réseau des monastères ». Le coiffeur Albert Varenne fut caché dans une
cheminée par les Frères des Écoles chrétiennes de Craponne. Roger Agrain et Léon
Mathieu furent pendant plusieurs mois les hôtes des moines de la Trappe en Lozère. Le
but de ceux-ci était de leur faire quitter la France. Ce fut un échec en ce qui concerne
Agrain qui mourut de maladie dans la banlieue lyonnaise en août 45 ; Mathieu quant
à lui, comme bien d’autres, d’institutions religieuses en couvents, finit par atteindre
l’Espagne de Franco où il décèdera en 1971. Louis Bernard ou André Maneval ont
purement et simplement disparu : ont-ils trouvé la mort ou ont-ils refait leur vie ? il est
bien entendu impossible de répondre à cette question.
neuf individus de notre échantillon (6,98 %) auront le privilège d’être rejugés en leur
présence. Les peines furent très variables, mais systématiquement réduites par rapport
à celles prononcées précédemment (on peut simplement le supposer en ce qui concerne
Crozemarie, faute d’informations précises). Condamné à mort devant la Cour de justice
du Puy en avril 45, Édouard Enjolras n’écopa que de 2 ans en avril 46 à Riom. André
Maneval vit sa peine capitale réduite à 1 an de prison par la Cour de justice de Lyon.
Claude Gérenton en août 45 ne subit plus que l’indignité nationale à vie, peine dont il
fut en partie relevé en mars 46, étant simplement privé de ses droits civiques. Quant à
Cyprien Gential, il fut réhabilité par le tribunal du Puy en avril 45 pour faits de résistance !
Les quatre derniers eurent par contre moins de chance ou ne possédaient pas le même
entregent. Ils écopèrent de lourdes peines de travaux forcés : 10 ans pour Louis Mathieu,
15 ans pour Roger Maisonneuve et Marcel Enjolras, perpétuité pour Antoine Vertupier.
Pour terminer ce panorama, n’oublions pas de citer ceux qui passèrent entre les gouttes,
dont on ne connaît pas le sort ou qui moururent sans être jugés. Nous en avons relevé
15 exemples (11,63 % du total) ; 12 d’entre eux semblent n’avoir pas été inquiétés. Futce le fruit de la chance, de l’anarchie qui régnait à l’époque ou de relations privilégiées
avec les représentants des nouveaux pouvoirs ? On ne saurait en dire plus, bien que ces
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Michel Roux
127
éléments d’explication ne s’excluent pas forcément l’un l’autre. Rose Verdier, épouse de
Pierre Mahinc qui venait d’être exécuté, ne resta en prison que 10 jours du 20 au 30 août
44 avant d’être libérée sans que des poursuites ne fussent engagées contre elle. Le cas
d’Auguste Chambon est très symptomatique des incertitudes liées à la pratique de ce que
les Anglo-Saxons appellent le « Grand Jeu ». Engagé dans l’armée d’Armistice, puis passé
dans la gendarmerie à la dissolution de celle-ci, il se serait volontairement blessé lors d’une
opération contre le maquis. Il serait alors rentré dans la Milice en mars 44 à l’instigation de
son beau-frère H. Gourgeon, chef du groupe FFI « Marine » pour la noyauter. Il participa
au combat de Rossignol aux côtés de la Résistance, ceci étant attesté par Lucien Rongier,
dit « Capitaine Alain ». Il était cependant perçu dans les milieux résistants comme un
agent double : certes d’un côté il avait fait libérer un maquisard FTP, Georges Heintz,
arrêté par la Milice du Puy, mais son autre beau frère, Paul Bernardon, dont nous allons
reparler, était membre de la LVF. Seules ses connaissances dans les instances dirigeantes
locales de la Résistance lui permirent de ne pas être inquiété après la Libération. Terminons
en disant un mot du personnage le plus important à l’échelle régionale, en l’occurrence
Jean Achon. à l’été 44, il s’enfuit dans les fourgons de ses maîtres nazis, accompagné
de ses gardes du corps, et parvint au cœur du Reich. Il combattit aux côtés des troupes
allemandes et trouva comme Doriot, la mort d’un traître, semble-t-il tué le 2 avril 45 à
Rittenhausen en plein Crépuscule des Dieux.
Quel fut le bilan final de cette épuration ? Quelques chiffres s’avèreront plus parlants
qu’un long discours :
Figure 14 : Le sort final des miliciens de la Haute-Loire
Sort final des miliciens de la Haute-Loire
Exécutés sans jugement, condamnés à mort et passés par les armes
Peine de mort par contumace n’ayant pu être appliquée
Peines de prison lourdes (3 ans et plus)
Condamnations légères (moins de 3 ans, confiscation, indignité
permanente ou à temps)
Acquittés
Réhabilités
Pas de poursuite, pas de précision sur la condamnation finale
total
nombre
70
5
20
poucentage
54,26
3,88
15,51
10
7,75
3
1
20
129
2,32
0,77
15,51
100
Si l’on exclut les trois derniers groupes pour ne considérer que ceux que la justice frappa
effectivement (105 cas, 81,4 % de l’ensemble), on se trouve confronté aux données suivantes :
Figure 15 : le sort des miliciens effectivement frappés par la justice
Sort des miliciens effectivement frappés par la justice
Exécutés sans jugement, condamnés à mort et passés par les armes
Peine de mort par contumace n’ayant pu être appliquée
Peines de prison lourdes (3 ans et plus)
Condamnations légères (moins de 3 ans, confiscation, indignité
permanente ou à temps)
total
128
Miliciens en haute-Loire...
nombre
70
5
20
poucentage
66,66
4,76
19,05
10
9,53
105
100
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On ne manquera pas de penser que 2/3 d’exécutions sommaires et de condamnations
capitales suivies d’effet, 105 morts, constituent, pour nos esprits de ce début de XXIe siècle, quelque chose de terrible ; mais, aux yeux des résistants et des nouveaux pouvoirs,
c’était une réponse normale et logique pour faire payer à la Milice et à ses membres ses
tortures et ses exactions.
Avant de passer à la conclusion, on me permettra de compléter mon analyse par deux
remarques finales :
- Ainsi que je l’annonçais au début de cette étude, la documentation réunie m’a permis
de découvrir la trace de 4 individus qui, sans passer par la Milice, rejoignirent les rangs
de la LVF puis de la SS. Tous de la génération d’après guerre et originaires du Puy et
de sa banlieue (les affirmations concernant le cas de René Lac sont basées sur de fortes
probabilités), de milieux modestes (on relève deux ouvriers parmi eux), on ne sait trop
s’ils intégrèrent l’Ordre noir pour des raisons idéologiques ou plus probablement par
désir de fuir les restrictions et de connaître l’aventure. Ce qui est intéressant concernant
leur devenir d’après-guerre, c’est que pour trois d’entre eux en tout cas, il confirme ce que
nous avons dit pour les miliciens : plus le retour en France se passa tardivement, moins
les condamnations furent sévères (1 an pour Paul Bernardon, 5 ans au final pour René
Bureau, pas de précision en ce qui concerne René Lac). Le frère de ce dernier, Maurice,
eut moins de chance : il déserta de son unité à l’annonce du débarquement. Repris par
les Allemands, il fut fusillé par eux à l’Isle-sur-le-Doubs (25) le 2 septembre 44.
- Que devinrent les condamnés après avoir purgé leurs peines ? Un certain nombre quittèrent la région et partirent s’installer un peu partout en métropole. D’autres revinrent
au Puy ou en Haute-Loire et y reprirent leurs activités comme si de rien n’était. Le
temps jouait en leur faveur, la Guerre froide était là, beaucoup parmi les témoins de leurs
exactions avaient disparu, le commun des mortels était pris dans la fièvre consumériste
des « Trente Glorieuses » et souhaitait passer à autre chose. Donnons quelques exemples. L’ancien SS Paul Bernardon devint, on ne sait trop comment, employé municipal
au Puy jusqu’à sa mort en 1976. Hubert Meyer, suspendu de ses fonctions de professeur,
s’installa à Vichy (sic !) où il parvint à obtenir sa retraite de l’éducation nationale. Durant les années 50, il fit le forcing auprès des députés de sa circonscription pour obtenir
sa carte de combattant. Antoine Vertupier mourut en 1979 dans l’Essonne où il avait
lui aussi rejoint les rangs du corps enseignant. De retour d’Indochine, Ferdinand Parrat
ouvrit au Puy un magasin d’électro-ménager qui prospéra. Il mourut en 1986 dans
l’Allier où il s’était retiré. Michel Chambon fit de son commerce de charbon une entreprise de haute volée spécialisée non seulement dans les combustibles mais également
dans l’équipement des blanchisseries, laveries et chaufferies industrielles, qui équipa
à ce titre des navires marchands ainsi que les porte-avions et sous-marins nucléaires
de la marine française. Président de nombreux organismes professionnels, dirigeant de
la Médecine du travail, de la Prévention routière, de l’aéro-club du Puy, il était en
outre rotarien et impliqué dans l’office de tourisme local. à sa mort, le très catholique
et très conservateur quotidien vespéral du Puy, l’« Éveil de la Haute-Loire », dans son
édition du 19 décembre 2007, lui consacra une longue nécrologie dans laquelle l’habileté
syntaxique du journaliste permit de passer par profits et pertes la période trouble de la
vie du défunt. Après avoir insisté sur son « beau parcours », l’auteur termina en disant
que Michel Chambon – on admirera l’euphémisme – avait été un « homme d’action et
de convictions ». On ne saurait mieux dire !
Conclure un tel travail est toujours difficile. On a d’abord un sentiment d’inachevé. J’ai
attiré l’attention à plusieurs reprises sur nos ignorances et nos hésitations. Bien que minoritaires, celles-ci demeurent encore trop nombreuses aux yeux de l’historien.
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Michel Roux
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Le portrait qui ressort de ce groupe que nous avons longuement étudié semble assez
proche de ce que les historiens ont cru deviner ailleurs. Encore faudrait-il pouvoir établir
une démarche comparative avec d’autres départements à la structure sociale, politique
et économique proche. En Haute-Loire en tout cas, la Milice recruta pour l’essentiel
dans la petite bourgeoisie catholique, antisémite et anticommuniste, fascinée par la
Révolution nationale et l’Ordre nouveau. Ce fut elle qui fournit au mouvement ses gros
bataillons et ses cadres. La troupe fut complétée par des prolétaires attirés certainement
plus par des conditions de vie meilleures que par l’idéologie du mouvement. On ne
peut que remarquer également la relative jeunesse de ces femmes et de ces hommes, qui
durent faire des choix souvent terribles à une époque de la vie où les préoccupations sont
d’ordinaire autres. à la Libération, l’accumulation de haine qu’ils avaient engendrée
provoqua à leur encontre une chasse à l’homme féroce qui se traduisit par la mort de
plus de la moitié d’entre eux. Ceux qui surent se cacher, négocier, reculer au maximum
la date de leur procès, s’en tirèrent somme toute assez bien et les pires tortionnaires ne
furent parfois condamnés, à la fin des années 40, qu’à des peines symboliques.
En ces temps troubles où nombre de nos collègues ont tendance à renvoyer dos à dos
victimes et bourreaux, résistants et miliciens au nom des fameuses « taxinomies d’époque », où la multiplication des catégories désignant les différents types de collaborateurs
sert essentiellement à diluer les responsabilités, je pense que l’intérêt de ce type de
travail, dans la mise en place duquel, je me dois de le répéter, mon oncle a joué un rôle
fondamental, est de rappeler la réalité des choses, alors que le nombre de témoins ne
cesse logiquement de diminuer. Au-delà des chiffres, sur lesquels j’ai conscience d’avoir
beaucoup (trop ?) insisté, il me semble que le prolongement de cette analyse devrait
consister en une démarche visant à comprendre qui étaient les hommes qui se cachaient
derrière les données que nous avons présentées et quelle aberration a pu pousser des gens
ordinaires à devenir des symboles du mal, de la trahison et de l’abjection.
130
Miliciens en haute-Loire...
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Michel Roux
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1920 Le Puy
1914 Tiranges
?
ARCIS Louis
AUBERT Jean
BARRANDE
Antonin
Le Puy
1904 Amélieles-Bains (66)
1873 Clermont-Fd
BERNARD Louis
BOUDIER André
1923 Le Puy
1926 Le Puy
BRIVE Roland
Le Puy
Le Puy
Le Puy
St-Étienne
1920 St-Georgesde-Couzon (42)
1897 St-Étienne
Le Puy
1914 Le Puy
BRIVE Georgette
BRIVE Georges
BREUIL Lucien
St-Étienne
St-Étienne
1927 St-Étienne
1919 St-Étienne
étudiant
employée de préfecture
VRP et commerçant
?
?
cadre à l’usine
Chambriard
?
?
Brioude
BOURNETON
Charles
BOUVIER Germain
BOYER Auguste
BOYSSON
D’éCOLE Alfred
1897 Marguerites (30)
étudiant
VRP
?
surveillant
mécanicien
agent de maîtrise de
société d’électricité
coiffeur
employé d’administration cantonnale
?
notaire
chauffeur du préfet
étudiant
journaliste
profession
BOUISSET Jacques 1924 Chamalières (63 ?) Clermont-Fd
Brioude
?
?
Brioude
Le Puy
Brioude
Le Puy
1903 Trieste (Italie)
BERGAMASCO
Alfredo
BAYLE Jean
1915 St-Avit-duMoiron (33)
1923 St-Pal-enChalencon
Brioude
1912 Lavoûte-Chilhac
ARCHAUD Emile
BASTOU élie
?
1918 La Sauvetat
ALLARY Marcel
Le Puy
1923 Le Puy
AGRAIN Roger
Brioude
résidence
1903 Orléans
date et lieu
de naissance
ACHON Jean
état civil
sort
PPF et milicien
Milice/recrutement
LVF
PPF et milicien
Franc Garde
Milicien
Franc Garde
Milicien
Franc Garde
Milicien
secrétaire de la milice
Franc Garde
Franc Garde
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêtée à Estivareilles (42) ; condamnée par la Cour
martiale du Puy le 04/09/44 à 3 ans de prison et indignité nationale
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné par la Cour
martiale du Puy le 04/09/44 à 3 ans de prison et indignité nationale
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 04/09/44 ; fusillé le 05
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) (?) ; Fusillé à Craponne (?)
Tué au combat de Rossignol par FFI le 06/06/44
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; exécuté par le corps-franc
du Capitaine Hoche le 26/08 à St Clément (63)
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 15/09/44 ; fusillé le16
Peine de mort par contumace par la Cour de justice du Puy le 21/04/46 ; disparu
En permission à La Para, commune de Beauzac ; exécuté par la maquis le 29/07/44
Chef régional Auvergne Serait décédé le 2 avril 45 en Allemagne
Condamné à mort par contumace par la Cour de Justice du Puy le 19 mai 46, à l’indiEx PPF (SR)
gnité nationale à vie et à la confiscation des biens ; se cache en fait au monastère de La
Franc Garde
Trappe (48) après la libération du Puy ; mort le 5 août 45 à Ste-Foy-lès-Lyon (69)
Milicien (?)
Pas de condamnation ; commerçant après la guerre au Puy
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
Milicien
veille par la Cour martiale
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
PPF et milicien
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Franc Garde
?
Condamné aux TF à perpétuité, à la dégradation nationale à vie et à la confiscation
Milicien
de ses biens
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
Milicien
veille par la Cour martiale
Décédé à St Étienne le 01/05/44 après avoir été abattu par les FFI à St-Bonnet-leMilicien
Château (42)
grade
132
Miliciens en haute-Loire...
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1894 Saugues
1914 Saugues
1890 Marcigny (71)
CUBIZOLLES
Joseph
CUBIZOLLES
Léon
DAUMAS Pierre
1904 Auxerre
Espaly
Le Puy
Milicien (?)
inspecteur des
Eaux et Forêts
Chef de section du
PPF/Milicien
Milicien
ingénieur des
Eaux et Forêts
Nommé au Puy début août 44, il freine l’ardeur répressive de ses subordonnés ; se
constitue prisonnier, condamné à 10 ans de TF et indignité nationale à vie par la Cour
de justice du Puy le 20/03/45
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
?
Fusillé au fort Montluc à Lyon le 04/10/44
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
Cadavre découvert le 30/07/44 à St-Vincent
Rentré tard dans l’organisation semble-t-il pour noyautage ; il participe au combat de
Rossignol avec les FFI. Pas inquiété à la Libération grâce à son beau-frère, chef d’un
groupe FFI
Se fait passer pour FFI à la Libération puis s’enfuit à Clermont où il est reconnu par
un déporté ponot de retour d’Allemagne, Condamné à l’indignité nationale à vie et à
la confiscation de ses biens par la Cour de justice de Riom le 05/07/45, Revenu au Puy,
il fait fructifier son entreprise et meurt couvert d’honneurs en 2007
S’enfuit en Allemagne avec son chef Achon ; condamné à mort par contumace par la
Cour de justice de Riom ; se cache ensuite à Vaux-en-Velin (69) pendant 5 ans, Arrêté
le 20/04/50, Pas de précision sur sa condamnation, Meurt à Thiers en 1963
Enlevé le 28/05/44 par le Groupe Judex avec sa femme et son fils de 18 ans ; fusillés
au Mont Mouchet le 29/05
S’enfuit en Allemagne avec son chef Achon ; rentré et caché par sa sœur ; reconnu et
arrêté, condamné à 10 ans de TF par la Cour de justice de Riom le 23 juin 1945, il est
relâché en 1949, Meurt à Clermont-Fd en 1974
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; exécuté par le corps-franc
du Capitaine Hoche le 26/08 à St Clément (63)
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 04/09/44 ; fusillé le 05 avec sa femme, née Schachter Anna,
de nationalité allemande
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 04/09/44 ; fusillé le 05
Abattu avec son épouse devant son domicile le 29/04/44 par le groupe Judex
Milicien (?)/agent
de la Gestapo
Agent de renseignement
Enlevé et exécuté par le groupe « Jean-Marie » à Collat le 27/07/44
de la Milice
Enlevé en juin 44 par le Groupe Judex avec sa femme et son fils de 20 ans ; fusillés au
Milicien
Mont Mouchet le 26/06
Chef Départemental
Milicien
Milicien (?)
Milicien
Chef local de la Milice
Franc Garde
Responsable local
de la Milice
Franc Garde
Milicien
Milicien
Milicien
Franc Garde
VRP/maire de Brioude
Brioude
1889 St-Michel-deSt-Geoirs (38))
DROGUEZ Robert 1901 Paris
DONZEL Pierre
DIJON Clovis
Lavoûte-Chilhac épicier
facteur
étudiant
Lieutenant de vaisseau
?
?
?
droguiste
garde champêtre
restaurateur
inspecteur de la sûreté
marchand de charbon
employé d’usine
1890 Lavoûte-Chilhac
Brioude
1890 Besse-enChandesse (63)
DELAIR Jules
DELOMENEDE
Auguste
Brioude
1925 Molompize (15)
DEJAX Jacques
Le Puy
1909 Tamatave
(Madagascar)
?
1887 St-Jean-de-Nay
DE VILLARS
Georges
Le Puy
Monistrolsur-Loire
Brioude
Saugues
Saugues
1916 Monistrolsur-Loire
1881 Yssingeaux
1920 Brioude
CROZEMARIE
Abel
DE FAY DE LA
ROCHE Henri
DE FAY DE LA
ROCHE Jean
DE MORANGIES
Albert
Le Puy
1913 St-Geneysprès-St-Paulien
CHAMBON Michel
Brioude
Le Puy
1924 Solignac/Loire
La Ricamarie (42) ?
1923 St-Étienne
agriculteur
Paulhac
1900 St-Bauzire
CHAMBON
Auguste
BRUGEROLLES
Pierre
BRUN Jacques
domitia 11 - 2010
Michel Roux
133
?
FOLCH André
?
ouvrier
comptable
VRP
assureur
Le Puy
Retournac
GENTIAL Cyprien 1921 Le Puy
1885 Nollieux (42)
1922 Paris
1910 Le Puy
GEORGES Jean
GERENTON
Claude
GUERRUT Jean
Firminy (42)
1890 St-Didieren-Velay
1891 Signan (34)
1920 Aiguilhe
1897 Le Puy
1921 Bône (Algérie)
JAMONDY Joseph
JEAN Gaston
JEAN Marcel
LACOSTE
Raymond
Retournac
Le Puy
Le Puy
Langeac
Firminy (42)
1890 Corbie (80)
GUICHARD
Blanche, née
CAPARD
GUICHARD
Jean-Baptiste
St-Pierre-Eynac
Le Puy
Le Puy
?
étudiant
marbrier
cadre dans une usine
Chef de gare
VRP
sans
ouvrier agricole
employé PTT
retraité
employé PTT
comptable
?
Brives-Charensac chauffeur
Le Puy
GARDON Aimable 1906 Le Puy
FERRY Félix
FLANDIN Roger
Le Puy
ENJOLRAS Marcel 1914 Pradelles
1915 Nort-surErdre (35)
1923 Lyon
Le Puy
1900 Pradelles
ENJOLRAS
Edouard
Le Puy
1925 Rodez
DURAND Jean
Brioude
1888 Avignon (84)
DURAND Albert
Franc Garde
PPF/Milice (?)
Chef du service de
sécurité de la Milice
Responsable local
de la Milice
PPF/Milice
Milicienne
Milicien
PPF/Milicien
indicateur de la milice
Franc Garde/Chef
du 2e service
Milicien
Milicien
Milicien
Milicien
Milicien
secrétaire de la milice
Milicien
Milicien
Fusillé par l’AS le 06/08/44 à St-Julien-du-Pinet
échappe à l’épuration, Meurt au Puy en 1982
Cache des armes pour le PPF dans un caveau du cimetière du Nord au Puy ; pas de
problème à la Libération
Exécuté lors de l’attaque de la gare de Langeac le 24/05/44 par le groupe Judex
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 15/09/44 ; fusillé le 16
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêtée à Estivareilles (42) ; condamnée à mort par la
Cour martiale du Puy le 15/09/44 ; fusillée le 16
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
Condamné à mort par la Cour de justice de Mende le 20/10/44, peine commuée en
20 ans de TF en raison d’une « incapacité permanente », Après sa libération, exerce la
profession d’auto-école au Puy
Quitte Le Puy en juillet 44 ; finit la guerre à Ulm, Condamné à mort par contumace
par la Cour de justice du Puy le 21/04/45 et à la confiscation de tous ses biens, Se
constitue prisonnier ce même mois ; rejugé devant la Cour de justice de Riom le
16/04/46
En fuite lors de la libération du Puy ; condamné à mort par contumace par la Cour de
justice du Puy le 17/03/45, Arrêté à Annecy en juin 45, Condamné à 15 ans de TF par
la Cour de justice de Riom le 04/07/45, Meurt au Puy en 1975
Recherché après la libération du Puy, se cache dans la banlieue, Arrëté pour marché
noir le 28/07/45, Pas de renseignement sur sa condamnation
Exécuté par le groupe Lafayette à Présailles le 15/08/44
Traduit devant la Cour de justice de Lyon en juin 47 pour des arrestations effectuées
au Puy au printemps 44, Pas de renseignement sur sa condamnation
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 04/09/44 ; fusillé le 05
Arrêté à Paris le 12/12/44 sous l’uniforme de la gendarmerie ; condamné le 03/10/44 à
la confiscation de ses biens par le tribunal de Clermont-Fd, Réhabilité par le tribunal
du Puy le 26/04/45 pour faits de résistance, Exerce la profession de comptable au Puy
Enlevé par les FTP de l’Ardèche et exécuté à St Martial (07) le 04/08/44
Volontaire pour aller travailler en Allemagne ; arrêté à son retour en juillet 45, condamné
le 7 août 45 par la Cour de Justice de Riom à l’indignité nationale à vie ; relevé de cette
peine le 01/03/46, mais privation des droits civiques maintenue, Demeure au Puy
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; jugé devant la Cour
martiale du Puy : acquitté, De nouveau arrêté le 13/12/44 au Puy, une nouvelle fois
acquitté le 11/02/45 par la Cour de justice de cette même ville
134
Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
1914 Félines
1924 St-Étienne
1919 Le Puy
1899 Valprivas
1925 Craponne
MALFANT Paul
MANEVAL André
MANHES Charles
MAREY Joseph
MAREY Roger
chauffeur
boulanger
boulanger
?
Craponne
Craponne
Le Puy
Milicien
Milicien puis LVF
Franc Garde
Milicien
Milicienne
employé de bureau
employé municipal
Milicien
Milicien
préparateur en pharmacie Franc Garde
La Ricamarie (42) mineur
Annonay (07)
Bas-en-Basset
Bas-en-Basset
1885 Monistrolsur-Loire
1923 St-Étienne
Espaly
1912 Polignac
MAISONNEUVE
Roger
MAHINC Rose,
née VERDIER
MAISONNEUVE
Hypolite
Espaly
MAHINC Pierre
indicateur de la milice
Milicienne
Milicien
préparateur en pharmacie Franc Garde
facteur
Allègre
1911 Coubon
?
?
Franc Garde
secrétaire entreprise
d’électricité
Le Puy
Le Puy
1881 RohrbachSarreguemines (57)
LIEPERT Charles
Milicien
Chef Départemental
Franc Garde
Milicienne
Milicien
Milicien et Gestapo
?
officier, puis directeur
commercial
marchand de meubles
LIEPERT
Marguerite, née
1884 Strasbourg
WINTER
LOCUSSOL Claude 1896 Allègre
Le Puy
Le Puy
1922 Lyon
1912 Le Puy
Le Puy
1895 Paris
LIABEUF Pierre
LETELLIER
D’AUFRESNE
Pierre
LETELLIER
D’AUFRESNE
André
LEBATTEUX Louis 1914 Vendôme (41)
Brioude
Le Puy
LAURENT Marie
modiste
agriculteur
Lissac
1920 Le Puy
VRP
St-Étienne
LAMBERT
1917 St-Étienne
Jean-Marie
LAURENT Claudius 1911 Lissac
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 04/09/44 ; fusillé le 05
Se cache à la Libération ; condamné à mort par contumace par la Cour de justice du
Puy le 17/03/45 ; arrêté et condamné par la même Cour de justice le 05/05/45 à 15
ans de TF et indignité nationale à vie
Ne semble pas avoir été inquiété ; meurt à Pérignat-les-Sarliève (63) en 1987
Condamné par contumace à mort, à l’indignité nationale et à la confiscation de ses
biens par la Cour de justice du Puy le 19/05/45, Arrêté à St-Étienne, il est condamné
par la Cour de justice de Lyon à 1 an de prison et indignité à vie le 03/06/49
En fuite à la Libération ; condamné par contumace à mort, à l’indignité nationale et à
la confiscation des biens par la Cour de justice de Moulins, Disparu (?)
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Arrêtée le 20/08/44 au Puy ; libérée le 30/08/44
Enlevé et exécuté par le maquis à Jax le 12/07/44
Arrêté à Coubon le 15/08/44 par les FFI du groupe Lafayette, conduit au maquis de
Présailles et fusillé le même jour
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; exécuté par le corps-franc
du Capitaine Hoche le 26/08 à St Clément (63)
Arrêté le 06/06/44 à St-Romain-Lachamp, conduit à Rossignol, réussi à s’échapper
au moment où il allait être exécuté, Arrêté à nouveau après la Libération, condamné
le 08/01/45 par la Cour de justice du Puy à 6 mois de prison et indignité nationale,
Meurt à Martigues en 1985
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; exécuté par le corps-franc
du Capitaine Hoche le 26/08 à St Clément (63)
?
Envoyé en mission à Yssingeaux, Abattu par les FFI dans un café de cette localité le
07/10/43, Meurt à l’hôpital du Puy le 09
Abattu le 04/07/44 au domicile de son frère à Bilhac, commune de Polignac
Arrêtée le 15/08/44 par le maquis de Présailles à Brives-Charensac, Condamnée à un
an de prison par la Cour de justice du Puy le 27/03/45
Fusillé le 13 août 44 par le maquis de la 7e zone à Malpeyre après condamnation la
veille par la Cour martiale
Révoqué par Achon le 18/12/43, il est nommé commissaire de police à Lille, Arrêté à
Nancy, condamné par la Cour de justice de Riom à 15 ans de TF et indignité nationale
à vie, Mort à St-Maur-des-Fossés (94) en 1988
domitia 11 - 2010
Michel Roux
135
Le Puy
1919 Clermont-Fd
1924 Le Puy
1905 Wingen (67)
1921 Le Brignon
1917 Paris
MATHIEU Léon
MATHIEU Louis
MEYER Hubert
MIALHE Marcel
MICHEL Albert
Langeac
?
Le Puy
Craponne
Le Puy
Le Puy
PARRAT Ferdinand 1923 Vals-près-le-Puy
1911 Craponne
1920 Le Puy
PICARD Jean
PIOCT Georges
PORCQ Georgette,
1923 Le Puy
née BRIVE
St-Étienne
OLAGNOL Basile 1918 Lavoûte-Chilhac
PAJOT Jean-Baptiste 1898 St-Vénérand
1909 Vienne
OGIER Jean
?
1925 Annemasse
Le Puy
Le Puy
1923 Arpajonsur-Cère (15)
NAUTHONIER
Pierre
NICOLLAUD
Pierre
1920 Le Puy
Riom
1894 Thuret (63)
MONNET Emile
OCTRU Juliette
Le Puy
MONLINET Aloys 1923 en Moselle
Bas-en-Basset
?
Le Puy
Le Puy
St-Étienne
MASCLAUX Pierre 1914 Le Monastier
?
moniteur agricole
libraire-droguiste
GMR (révoqué)
?
?
imprimeur
sans
étudiant
étudiant
chauffeur
mécanicien
mécanicien
?
professeur d’allemand
Milicienne
Milicien
Milicien
Franc-Garde
Chef du SR de
St-Étienne puis LVF
Milicien (?)
Milicien
Milicienne
Franc Garde
Franc Garde
Milicien
Milicien
Milicien (?)
Franc Garde
Milicien
Franc Garde
Chef de trentaine
contrôleur du Service
économique
mécanicien
Milicien
mineur
Semble avoir échappé à l’épuration,
Exécuté par les FFI à Aubazat dans la deuxième quinzaine de juillet 44
Fusillé par les FFI de la Lozère le 13/06/44 à St-Denis-en-Margeride (48)
Capturé une première fois par les FFI du groupe Lafayette, il s’évade, Se cache à la
Libération dans un centre d’accueil pour prisonnier à Lyon où il est arrêté, Condamné
à mort par la Cour de justice du Puy le 05/12/44, il doit témoigner dans un autre
procès, Sa peine est commuée en prison à vie, puis il est grâcié pour aller combattre en
Indochine, Revenu, il ouvre un commerce florissant d’électro-ménager au Puy, Meurt
en 1986 dans l’Allier où il s’était retiré
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Condamné par la Cour de justice de Riom à 5 ans d’indignité nationale, Se retire
dans l’Allier
Condamné à mort par la Cour de justice de Lyon le le 13/03/47, fusillé le 08/08/47
Abattu par les FFI dans un café d’Yssingeaux le 17/04/44
Disparaît à la Libération du Puy ; condamné à mort par contumace par la Cour de
justice du Puy le 03/03/45, Se cache à La Trappe (48) de 44 à 45 puis est exfiltré en
Espagne où il décède en 1971
Part en Allemagne avant la Libération, Condamné à mort par contumace par la Cour
de justice du Puy, Arrêté à Aigueperse (63) où il se faisait passer pour déporté STO ;
Condamné par la Cour de justice de Riom en juin 45 à 10 ans de TF et indignité
nationale
Condamné par la Cour de justice du Puy à 1 000 f d’amende, 6 mois de prison et
indignité à vie, Suspendu de ses fonctions, se retire à Vichy où il obtient sa retraite et
tente d’obtenir sa carte de combattant
Fusillé par les FFI de la Lozère le 04/09/44 à St-Denis-en-Margeride (48)
Fusillé par les FFI du corps franc du capitaine Hoche en juillet 44 à La Chapelle-enLafaye (63)
Quitte rapidement le mouvement, Condamné par la Cour de justice de Riom en
avril 46 à 3 mois de prison et indignité nationale à vie
Condamné à mort par la Cour de justice de Riom et exécuté au Puy où il avait sévi à
la prison le 22/04/46
Transféré en Haute-Savoie où il lutte contre les maquis, puis à Montpellier où il est un
redoutable tortionnaire, il est fusillé le 19/10/44 par les FFI à Lyon
Condamné à mort et à la confiscation de ses biens par la Cour de justice de Riom en
février 46, Contumace? N’est pas exécuté puisque se marie en 52
Condamnée par contumace le 19/05/45 par la Cour de justice du Puy à 5 ans de
prison, confiscation de ses biens, 10 000 F d’amende et indignité nationale, épouse
Parrat en 56 à Neuilly
136
Miliciens en haute-Loire...
domitia 11 - 2010
Le Chambonsur-Lignon
1920 St-Michel-deChabrillanoux (07)
1925 Le Puy
1924 Cannes
1900 Marseille
1910 St-Étienne
1906 Vorey
1912 Dijon
PRALY Léopold
QUINQUETON
Jean-Pierre
RAMBAUD Jean
REY Franck
ROCHE Marcellin
RODDON Victor
ROMEYER André
?
?
Le Puy
Beauzac
?
SALLE François
St-Étienne
1906 St-Étienne
1921 St-Julien-du-Pinet Retournac
1921 St-Étienne
SALLES François
SAURON Victor
SEJALON Roger
Le Puy
Le Puy
1897 St-Étiennedu-Vigan
Le Puy
Le Puy
1928 Salettes
1922 Langogne (48)
THEROND Marc
THEROND
Norbert
THEROND
Palmyre, née SABY
1892 St-Étiennede-Lugdarès (07)
Le Puy
THEROND Colette 1924 Salettes
THEROND Gabriel
Clermont-Fd
Le Puy
SIMON Jules
1895 St-Dié (88)
TERSOL Fernande 1922 Sansac-l’Eglise
St-Étienne
St-Étienne
SALLES Dominique 1907 St-étienne
1906 St-Étienne
tailleur
SABATHE Jean
1911 Le Puy
SABATHE Yvonne,
1900 Uzès (30)
née AUZAS
SALADIN Roger
1924 Pélussin (42)
?
étudiant
étudiant
?
secrétaire
?
secrétaire
mécanicien
agriculteur
?
transporteur
tuyauteur
mineur
?
?
?
?
galochier
inspecteur auxiliaire de police
étudiant
?
Vorey
St Didieren-Velay
Le Puy
?
Lyon
Le Puy
Le Puy
Le Puy
1926 Langogne (48)
POUGET Georges
Le Puy
1907 St-AmandMontrond
PORCQ René
Milicienne (?)
Milicien
Milicien
Milicien
Milicien (?)
Milicienne
Milice/recrutement LVF
Milicien
indicateur de la milice
Milicien
Milicien
Milicien
Milicien
Milicienne
Chef SR
PPF/Milicien
Milicien
Milicien
Milicien
Milicien
PPF/Franc Garde
Milicien
Franc-Garde
Milicien
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 15/09/44 ; fusillé le 16
Abattu dans un hôtel de la localité par des résistants du groupe Bonnissol le
06/08/43
En Allemagne en 44, Rapatrié comme STO en juin 45, caché par sa mère, se livre en
novembre 45, Condamné par la Cour de justice de Riom le 03/05/46 à 15 ans de TF
et indignité nationale à vie, Se réinstalle ensuite au Puy
Fusillé par les FFI à Tence le 04/08/44
Semble avoir échappé à l’épuration, Mort au Puy en 1974
Abattu par le groupe Lafayette dans un café de Vorey le 07/05/44, Survit à ses blessures, Meurt à St-Étienne en 1974
Quitte le département à la Libération sans être inquiété, Meurt à Paris en 1975
Arrêté certainement lors de la prise de la caserne Romeuf le 19/08/44, Condamné à
mort par la Cour martiale du Puy le 21/09/44, exécuté le 22
Fusillé par les FFI à de l’Ardèche le 20/08/44 à St-Pierre-de-Colombier (07)
Condamnée le 24/01/45 par la Cour de justice du Puy à 5 ans de prison et indignité
nationale
Condamné à mort par la Cour de jutice de Nîmes et fusillé le 13/05/46
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sur place par les FFI
de la Formation Sambre-et-Meuse
Enlevé par les FTP de l’Ardèche et exécuté à St-Martial (07) le 04/08/44
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement à
Montarcher (42) par les FFI de la Formation Sambre-et-Meuse
Exécuté en août 44 par le Groupe Tailleur à Céaux-d’Allègre
Semble avoir échappé à l’épuration
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêtée à Estivareilles (42) ; condamnée par la Cour
martiale du Puy le 15/09/44 à 20 ans de TF
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné par la Cour
martiale du Puy le 15/09/44 à 10 ans de TF
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné par la Cour
martiale du Puy le 15/09/44 à 20 ans de TF
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42), Cour martiale du Puy le
15/09/44: acquitté
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêtée à Estivareilles (42), Cour martiale du Puy le
15/09/44: acquittée
Semble avoir échappé à l’épuration, Mort à Marseille en 1975
domitia 11 - 2010
Michel Roux
137
1920 Brives-Charensac Le Puy
VERTUPIER
Antoine
Le Puy
Le Puy
Le Puy
1885 Firminy (42)
1920 Le Puy
1918 Le Puy
1925 Chadrac
?
VINCENT Pierre
VINCENT
Victorien
BERNARDON Paul 1922 Le Puy
1919 Le Puy
VINCENT Louis
BUREAU René
LAC Maurice
LAC René
?
?
Le Puy
Firminy (42)
Le Puy
?
?
manœuvre
tôlier -soudeur
employé de bureau
ingénieur chimiste
?
Waffen SS
Waffen SS
STO, LVF, Waffen-SS
Charlemagne
STO, LVF, Waffen-SS
Charlemagne
Milicien
Milicien
Milicien
Milicien (?)
1924 Le Puy
VILLIANO Félix
?
Chef local
ingénieur des Arts
et Métiers
1893 Brioude
VIALA Henri
Brioude
Milicien
Milicien/ LVF/
Waffen-SS
Milicien
étudiant (?)
employé du Contrôle
économique
géomètre
Milicien
Chef départemental
Milicienne
VERTUPIER Pierre 1926 Brives-Charensac Le Puy
Le Puy
1912 Le Puy
VERDIER Marc
coiffeur
St-GeorgesLagricol
1916 Sembadel
commerçant
Le Puy
1905 Paris
?
Le Puy
?
VARENNE Albert
TOURAUD
Marguerite,
née CHIGNARD
TOURAUD
Raymond
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; condamné à mort par la
Cour martiale du Puy le 15/09/44 ; fusillé le 16
Recherché par le maquis à la Libération, il est sauvé par les Frères des écoles de
Craponne qui le cachent dans une cheminée, Condamné par la Chambre civique le
29/03/45, Meurt à St-Georges-Lagricol où il avait repris son métier en 1989
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement par
les FTPF du camp Wodli à Craponne le 22/08
Condamné à mort par contumace (Cour de justice du Puy?) le 21/04/45, Capturé en
Allemagne par l’armée US ; condamné aux TF à perpétuité, Meurt en 1979 à Igny
(91) où il exerçait le métier de professeur
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement à
Montarcher (42) par les FFI de la Formation Sambre-et-Meuse
Blessé par la Résistance en décembre 43, Fuit en Autriche à la Libération, Capturé,
condamné à 15 ans de TF et à l’indignité nationale à vie par la Cour de justice de
Bordeaux en 1946 (?)
?
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêté à Estivareilles (42) ; fusillé sans jugement à
Montarcher (42) par les FFI de la Formation Sambre-et-Meuse
Condamné par la Cour de justice de l’Ariège à l’indignité nationale à vie
Condamné à mort par contumace par la Cour de justice du Puy en 1944, Capturé par
la 2e DB, condamné à mort par le tribunal militaire aux armées et exécuté le 02/10/44
à Esseygney (88)
Capturé par l’armée US à Ulm, 1 an de prison et indignité national le 31/01/47 par la
Cour de justice de Riom ; employé municipal au Puy jusqu’à sa mort en 1976
10 ans de TF, indignité nationale, confiscation des biens le 21/08/45 par la Cour de
justice de Riom ; ramené à 5 ans de prison et 20 ans d’indignité ; libéré en 49, Mort
à Grenoble en 1980
Déserte à la libération de la France ; repris par les Allemands et fusillé par eux le
02/09/44 à l’Isle-sur-le-Doubs (25)
échappe à l’épuration, Préparateur en pharmacie au Puy
Fuit Le Puy avec les Allemands ; arrêtée à Estivareilles (42) ; condamnée par la Cour
martiale du Puy le 15/09/44 à 5 ans de TF