Le web, l`approche du Los Angeles Time - WAN-IFRA

Transcription

Le web, l`approche du Los Angeles Time - WAN-IFRA
SYMPOSIUM DE L’IFRA
qui était-il et où le trouver ? J’ai alors envoyé rapidement
un courrier électronique à Carr-1 où je demandais que l’on
m’aide à le retrouver. Au bout de quelques heures, ma
démarche a été payante puisque j’ai reçu quelque 10
réponses dont deux ou troix avec son numéro de téléphone
privé.
Les serveurs de listes sont des outils fantastiques qui ont
prouvé leur efficacité non seulement à moi, mais aussi à
des milliers de collègues. J’ai pris l’initiative de lancer un
serveur de listes pour les journalistes que j’ai appelé
Media. Au dernier recensement, ce serveur comptait plus
de 1000 abonnés répartis dans 22 pays différents. Il s’agit
de journalistes qui, tous les jours, échangent des conseils,
répondent à des questions simples ou compliquées, discutent d’éthique et, parfois, se transmettent des informations
difficiles à obtenir, tout cela en quelques secondes et pour
un prix dérisoire.
Le meilleur des mondes
Je pense que, dans les années à venir, l’une des
principales batailles portera sur le droit d’accès aux informations que notre qualité de citoyen et de membre de la
presse nous habilite à avoir. Nous assistons actuellement à
une course effrénée au Web, chacun voulant y arriver en
premier. Cette fébrilité se calmera et nous devrons, comme
avant, nous battre pour obtenir les informations dont nous
avons besoin. La principale menace provient de la censure
et de la dissimulation qui se répandent déjà à travers le
monde en réponse à la croissance explosive d’Internet.
Prenez-y garde !
Puis nous avons réuni lecteurs et non-lecteurs et leur
avons demandé ce qu’ils attendaient de nous et du nom
respecté du « Los Angeles Times » si nous nous mettions à
distribuer des informations en ligne.
Les réponses ont été, bien entendu, très différentes les
unes des autres et la plupart d’entre elles étaient prévisibles : informations, résultats sportifs actualisés ainsi que la
possibilité de discuter avec nos journalistes et rédacteurs.
Puis les uns après les autres, ils ont commencé à aborder les
différentes possibilités en matière de service. Ils nous ont
expliqué que le « Los Angeles Times » que nous étions
devait en savoir long sur ses lecteurs, qu’il connaissait, par
exemple, tous les marchands de chaussures de la ville et
qu’il ne serait donc pas difficile pour lui d’indiquer à un de
ses lecteurs le magasin le plus proche ayant, de stock, le
style de chaussures lui plaisant au prix le plus juste.
Le « Los Angeles Times » a fait bien des progrès depuis
ses débuts dans l’édition électronique, mais il est encore
loin de répondre à cette attente des lecteurs, ce qui n’est
guère surprenant.
L’édition électronique s’est imposée à nous pour des
raisons d’ordre commercial et journalistique. Du point de
Le web, l’approche du Los Angeles Time
TERRY SCHWADRON
Adjoint au directeur de la rédaction, Los Angeles Times
Los Angeles, USA
Le groupe Times Mirror Company est une société
anonyme qui possède plusieurs quotidiens aux Etats-Unis,
30 maisons d’édition de magazines, de livres et d’ouvrages
spécialisés ainsi que diverses sociétés de formation. Le «
Los Angeles Times » en est la section la plus importante et
représente près d’un tiers du groupe. Ce journal est tiré à
plus d’un million d’exemplaires par jour et à 1,3 millions
au minimum le dimanche. Il est réputé pour son sérieux
dans le monde entier.
Il y a quelques années, le « Los Angeles Times » a
décidé de se lancer dans l’édition électronique. A cet effet,
il a écouté ceux qui l’avaient précédé dans cette aventure,
sondé un terrain qui lui était jusqu’ici inconnu et testé ce
qu’il pensait connaître.
techniques de presse janvier 1997
19
SYMPOSIUM DE L’IFRA
vue commercial, nous assistons à l’émergence de nouveaux
concurrents qui nous disputent plusieurs de nos principales
sources de revenus, surtout dans le domaine des petites
annonces (demandes et offres d’emploi, immobilier et
automobiles). Comme il n’est pas très onéreux de se lancer
dans l’édition électronique, il est facile de comprendre qu’à
nos yeux, les petites sociétés « installées dans des garages »
sont des concurrents aussi redoutables que Microsoft ou
America OnLine. C’était le cas, il y a un an, de Yahoo qui se
composait de deux étudiants en dernière année seulement.
Nous voulons faire comprendre à tout nouveau concurrent
qu’en Californie du sud, il doit compter avec le « Los
Angeles Times » et sa combattivité.
Il s’agit là d’un investissement. Les preuves ne
manquent pas. Comme le prix des ordinateurs baisse de
moitié tous les 18 mois et que leur puissance va en
augmentant, il est clair qu’ils ne tarderont pas à dominer
suffisamment le marché et à être massivement répandus
non seulement aux Etats-Unis, mais aussi en Europe, je
crois. A la fin de l’année, une demi-douzaine de sociétés
proposeront une boîte à un prix relativement abordable qui
permettra aux utilisateurs d’accéder à Internet via leur
poste de télévision. A elle seule, cette innovation apportera
des millions d’utilisateurs à Internet.
D’un point de vue commercial, nous ne pouvons pas
nous permettre d’attendre même si, pour le moment, les
efforts entrepris ne rapportent pas d’argent.
J’aimerais ajouter que toute une série d’autres raisons fort éloignées des considérations financières évoquées plus haut nous ont poussés à nous lancer dans
l’édition électronique. Nous avons pensé qu’il fallait saisir
la chance qui nous était offerte de devenir une source
d’informations vraiment importantes, actuelles, utiles et
instructives.
Qu’avons-nous fait ?
Après avoir touché à l’audiotex et aux services à base
de télécopie dont certains ont eu, entre parenthèses, du
succès, nous nous sommes lancés dans le monde des
services en ligne. Nous avons créé un premier service en
ligne sur le réseau Prodigy, qui a d’ailleurs eu beaucoup
de succès. Nous avons vendu plus de 21 000 abonnements
à 7 dollars par mois et disposions de trois douzaines
d’annonceurs. La direction a toutefois considéré l’investissement trop élevé et le service a cessé ses activités en
décembre 1995.
En avril 1996, nous avons fait une nouvelle tentative sur
le réseau Internet, avec deux fois moins d’effectifs, soit
près de 20 personnes. Nous diffusons la plupart des articles
qui paraissent dans le journal ainsi que des informations sur
le sud de la Californie et en provenance de plus de 400
communautés dans la région. Le service que nous avons
appelé Hunter rencontre un vif succès. Il s’agit d’un chien
20
qui choisit les articles qu’il rapporte en fonction des goûts
personnels des utilisateurs. Notre succès a été impressionnant dès le début. Actuellement, nous enregistrons, en
moyenne, plus de 650 000 appels par jour. Contrairement à
notre expérience sur le réseau Prodigy, notre site Internet
est principalement visité pendant les heures d’ouverture
des bureaux aux Etats-Unis.
Nous avons cependant abordé cette nouvelle expérience
visant à proposer un service presque gratuit (mis à part
quelques domaines de consultation payants comme les
archives) sous un angle différent. Le partenariat est, à nos
yeux, un élément clé. Nous travaillons en association
avec Archtext, ceux qui ont fait d’Excite! un moteur de
recherche sur le réseau Internet régional de Californie.
Nous travaillons en association avec Pointcast ainsi
qu’avec la société de téléphone régionale pour l’accès à
Internet.
Nous travaillons aussi avec plusieurs autres journaux
américains afin d’offrir un service sur l’emploi bien
distinct appelé CareerPath.com. Nous avons racheté Hollywood on Line et avons mis au point une campagne
publicitaire qui sera diffusée dans tous les cinémas des
Etats-Unis. Le site lui-même repose sur une étroite collaboration avec Netscape et BBN Planet.
Tous ces partenariats génèrent des revenus, avec en tête
CareerPath qui rapportera 1,2 millions de dollars au « Los
Angeles Times » la première année. La plupart des autres
offrent de nouvelles perspectives en matière de publicité.
Qu’il s’agisse des partenariats, de l’accès à Internet, de la
publicité, de la consultation payante et des transactions,
tout aura un rôle à jouer dans la recherche de solutions pour
gagner de l’argent. L’organisation que nous sommes pare à
toute éventualité.
L’importance accordée par beaucoup à l’aspect lucratif
de l’édition électronique me préoccupe. C’est pourtant
l’objectif principal que finissent par avouer les autres
sociétés qui se lancent dans l’aventure électronique comme
les compagnies de téléphone et de télédistribution.
Qu’est-ce qui nous distinguera en fin de compte ? A un
moment donné ou à un autre de ce débat, il faudra bien
revenir à la vocation première du journal qui est de
rapporter les événements, partager des connaissances et
débattre des affaires publiques. J’entends beaucoup parler
de la nécessité de la vidéo sur demande, mais pas du tout de
la documentation sur demande.
La véritable valeur financière de nos marques réside
dans le type de contenu que nous pouvons produire
nous-mêmes et que nous pouvons aider à produire dans nos
communautés. Nous ne sommes peut-être pas en mesure de
donner, sur demande, des informations sur le prix des
chaussures, mais nous devrions être capable de comprendre
que nous pouvons faire beaucoup pour combler le fossé
entre ce que nous offrons à nos lecteurs et ce qu’ils
attendent de nous.
techniques de presse janvier 1997