LE TRAVAIL DES CADRES À HORIZON 2025
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LE TRAVAIL DES CADRES À HORIZON 2025
ACTUALITÉS ANDRH 12 RÉSULTAT D’UNE ENQUÊTE DE L’AVARAP LE TRAVAIL DES CADRES À HORIZON 2025 Pour son 30e anniversaire, l’AVARAP a organisé une enquête1 et une table ronde2. Le statut cadre existera-t-il toujours dans 10 ans ? La fonction aura-t-elle changé en 2025 ? Quel en sera son contenu ? Quelle est la vision prospective des cadres sur leur travail demain ? Autant de questions portées par l’AVARAP pour célébrer les 14 000 retours à l’emploi que l’association a accompagnés depuis 1984. Par Florence Davy La fin programmée d’un statut ? 30 % des cadres interrogés envisagent la disparition du statut dans les 10 ans qui viennent. Est à ce dire que la fonction de cadre disparaîtra ? Si pour Jean Paul Bouchet, président de l’AGIRC et secrétaire général CFDT Cadres, « la question d’un régime “ 71% des cadres interrogés citent le niveau de rémunération comme une motivation prioritaire ” unique est effectivement à l’ordre du jour », pour les experts réunis en table ronde, la fonction a encore de beaux jours devant elle. De l’avis général, elle ne répondra toutefois probablement pas aux mêmes exigences professionnelles. Pour Sandra Enlart, directrice d’Entreprise & Personnel, « il est difficile de répondre à la question du statut en la séparant de celle de la fonction. Il est important de se projeter par rapport aux manières de travailler de demain. Aura-ton encore besoin de gens qui tiendront cette fonction ? Si pour la nouvelle économie la réponse est non, alors la question du statut est réglée d’entrée de jeu ». Une fonction qui évoluera avec les nou velles formes d’organisation du travail A 92 %, les cadres interrogés affirment que le travail en réseau continuera à se développer dans les 10 ans qui viennent, de même que le travail en temps partagé pour 68 % d’entre eux et les formes de « flexisécurité » pour 72 %. Pour 66 % le management dans les entreprises sera plus décentralisé. L’AVARAP EN CHIFFRES (1984-2014) 14 000 retours à l’emploi en 30 ans 80 bénévoles 13 000 heures de travail en 2014 22 ateliers thématiques 64 % de taux de retour à l’emploi Réalisée par l’Institut Opinea auprès d’un échantillon national représentatif de la population des cadres français. 400 interviews ont été menées, online, entre le 10 et le 25 octobre 2014. 1 Table ronde du 11/12/14 animée par Gilles Bridier, journaliste économique, en compagnie de : - Thierry Baril, DRH Airbus Groupe - Jean-Paul Bouchet, président de l’AGIRC, secrétaire général CFDT Cadres - Jérôme Chemin, secrétaire national CFDT Cadres - Sandra Enlart, directrice générale Entreprise & Personnel - Pierre Fonlupt, président du Groupe Plus, président de la Commission nouveaux dialogues économiques du MEDEF - Pierre Lamblin, directeur des études de l’APEC 2 N°556 – Janvier 2015 ACTUALITÉS ANDRH « Si demain on imagine qu’être cadre, ce sera occuper une place dans une hiérarchie, on se trompe. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura plus de marqueurs entre les cadres et les non cadres, simplement il faudra qu’ils soient au plus près de l’activité et donc de l’entreprise » affirme Jean-Pierre Bouchet. Pour Pierre Fonlupt, président du Groupe Plus et président de la Commission nouveaux dialogues économiques du MEDEF, « on devra raisonner à l’intérieur d’un nouvel écosystème plus large que l’entreprise qui est en train d’émerger et qui fera changer les habitudes, les comportements et les compétences ». ✔ Changer de métier sera une nécessité (85%) Alors quels « marqueurs » feront la fonction cadre demain ? ✔ Il sera plus difficile de garder le juste équilibre vie professionnelle / vie privée (57%) Probablement plus dans le champ national de la protection sociale, le marqueur qui fera la différence se situera, de l’avis de tous, dans le contenu et les responsabilités de la fonction, ramenés au plus près de l’entreprise et de son contexte. « Entre le monde industriel où tout est contrôlé et précis, et ce qui se passe dans la nouvelle économie, dans une start-up qui va devoir sa survie à l’innovation, ce n’est pas la même chose, cela ne peut pas générer les mêmes marqueurs » exprime Sandra Enlart. ✔ L’auto formation sera un passage obligé (82%). Pour Thierry Baril, DRH du Groupe Airbus, « dans les 10 prochaines années, la vraie différence entre cadres et non cadres, celle qui est en train de s’opérer plus fortement, se fera sur les deux critères d’expertise et de management des hommes, les deux seront tout aussi importants. Le premier renvoie à une responsabilité d’expert et le second à une responsabilité managériale ». Autant le dire d’ores et déjà, si la différenciation et la reconnaissance de la fonction ne s’opéreront plus au niveau du système de retraite et de prévoyance, les DRH devront en trouver de nouvelles formes d’animation. D’autant que si 75 % des cadres interrogés par l’AVARAP se déclarent aujourd’hui satisfaits de leur situation professionnelle, « on a été surpris par ce taux de 75 %, ce n’est pas ce que l’on a l’habitude d’entendre, c’est une petite note d’optimisme, déclare Thierry Baril. 82 % pensent que dans les 10 ans à venir, ils passeront par la « case chômage », près de 30 % des moins de 45 ans voudront changer de fonction et d’entreprise et près de la moitié des plus de 45 ans se projettent dans une nouvelle fonction au sein de leur entreprise. ✔ 65% seulement croient à la réalité du développement de la formation continue responsabilités et les nouvelles missions qui les motivent » affirme Pierre Lamblin, directeur des études de l’APEC. Si effectivement, et on peut s’en étonner, 71 % des cadres interrogés citent le niveau de rémunération comme une motivation prioritaire, ils attendront de l’entreprise d’autres formes de reconnaissance en réponse à des attentes clairement exprimées (cf. encadré ci-dessus) : un accompagnement dans les changements inéluctables de métier, le maintien menacé d’un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, des modes de formation et d’apprentissage garantissant leur employabilité : « en 2025, prés de 60 % des cadres auront 45 ans et plus. Cela pose la question de l’accompagnement de ces personnes mais aussi celle de la transmission des savoirs qui sera à renforcer » explique Jérôme Chemin, secrétaire national CFDT Cadres. “ 82% des cadres pensent que dans les 10 ans à venir ils passeront par la « case chômage ».” Comment valoriser demain la fonction de cadre ? Quels systèmes RH et de reconnaissance pour compenser la perte probable d’un statut social ancré dans nos racines ? Mais aussi retrouver l’autonomie et la capacité de décision qu’ils ont perdues : « ce qui a changé, c’est l’image que les cadres ont d’eux-mêmes, ils se voient beaucoup plus aujourd’hui centrés sur leurs missions comme un véritable rouage opérationnel dans l’entreprise et moins sur la sphère décisionnaire, ils ont le sentiment qu’ils ont moins d’emprise sur la stratégie de l’entreprise » explique Pierre Lamblin. « Dans les enquêtes que nous menons, l’élément rémunération ressort fortement chez les jeunes, c’est ce qui les anime lorsqu’ils souhaitent changer d’entreprise. Passé 30 ans, c’est davantage le développement des compétences, la prise de En d’autres termes, face à la fin presque annoncée d’un statut social ancré depuis des décennies dans les représentations collectives, il faudra sans doute redonner, dans l’entreprise, un nouveau sens à la fonction de cadre. n N°556 – Janvier 2015 13