Semaine du théâtre francophone à la Havane
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Semaine du théâtre francophone à la Havane
La Compagnie du Labyrinthe en partenariat avec El Consejo Nacional de las Artes Escenicas de Cuba La Oficina del Historiador de la Habana L’Ambassade de France L’Ambassade du Canada L’Ambassade de Suisse L’Ambassade de Belgique à Cuba présente « Semaine du théâtre francophone à la Havane » Création du premier Festival de Théâtre Francophone d’Auteurs Contemporains à Cuba Direction artistique Serge Sándor Parrain 2014 Philippe Adrien Mars 2014 – Semaine de la Francophonie La compagnie du Labyrinthe 14 allée des Pommiers, 93110 / Rosny-sous-Bois Tél : 01 48 94 96 18 / [email protected] http://cielabyrinthe.free.fr 1 2 Le programme Dimanche 16 mars 2014 au Théâtre José Marti (600 places) 5 pm : Inauguration de « La Semaine du théâtre francophone » Présentation du programme par Serge Sándor avec Philippe Adrien, Sylvia Bergé (sociétaire à la Comédie Française) Eduardo Manet, (auteur, réalisateur) Lise Martin (auteure) Jennifer Herszman Capraru (metteure en scène canadienne), Eusebio Leal (Historien de la Ville de la Havane) Gisela Gonzalez, (présidente du Conseil des Arts Scéniques) et les ambassadeurs. Projection d’extraits de créations récentes de Philippe Adrien. Dimanche 16 mars sur Radio Progreso (plus d’un million d’auditeurs) Une pièce radiophonique française « En el muelle » de Alain Gras 3 Au théâtre Adolfo Llaurado (160 places) Lundi 17 mars : 6 pm : Mise en espace de Carlos Diaz d’un texte suisse « Por ahora dudo » de Marie Fourquet avec Oswaldo Doimeadios. 8 pm : Présentation de la Comédie Française par Sylvia Bergé. Projection d’un film de Dominique Cabrera « Ca ne peut pas continuer comme ça » produit par la Comédie Française et France 2. (sous-titré espagnol) Mardi 18 mars : 6 pm : Mise en espace de Serge Sándor d’un texte canadien « Juan y Beatriz » de Carole Fléchette. 8 pm : « Les Bas-Fonds » un film de Denise Gilliand (production Suisse) sur une création théâtrale de Serge Sándor à Chaillot avec des SDF. (sous-titré espagnol) Débat avec Serge Sándor Mercredi 19 mars : 6 pm : Mise en espace de Flora Lauten d’un texte français « Las Monjas » de Eduardo Manet 8 pm : Luciano Castillo présente un extrait de « Un dia en el solar » mise en scène de Alberto Alonso et musique Toni Taño, réalisateur Eduardo Manet. Débat avec Eduardo Manet. Jeudi 20 mars : 4 pm : Mise en espace de Carlos Celdrán d’un texte suisse « La prueba de lo contrario » d’Olivier Chiacchiari. 6 pm : Avant première « Le testament de Vanda » (sur-titré) de Jean-Pierre Siméon avec Sylvia Bergé 4 Vendredi 21 mars : 6 pm : Mise en espace d’Isabel Bustos d’un texte français « El fruto prohibido » en présence de l’auteure Lise Martin. 8 pm : « Le testament de Vanda » (sur-titré) de Jean-Pierre Siméon avec Sylvia Bergé Samedi 22 mars : 6 pm : Mise en espace de Jennifer Capraru d’un texte canadien « Incendios » de Wadji Mouawad. 8 pm : « Le testament de Vanda » (sur-titré) de Jean-Pierre Siméon avec Sylvia Bergé Dimanche 23 mars : 4 pm : Mise en espace de Daniel Lana d’un texte belge « La pandilla » de Xavier Carrar avec les acteurs de l’ISA (Instituto Superior de Arte). 6 pm : « Le testament de Vanda » (sur-titré) de Jean-Pierre Siméon avec Sylvia Bergé Peña à 8 pm Clôture du Festival avec orchestre dans le jardin du Théâtre Adolfo Llaurado. Lundi 17 et mardi 18 mars : Deux ateliers d’Art Dramatique sous la direction de Philippe Adrien à l’ISA (Instituto Superior de Arte) et l’ENA (Escuela Nacional de Arte). Mercredi 19 et jeudi 20 mars : Deux ateliers d’Art Dramatique sous la direction de Jennifer Capraru à l’ISA (Instituto Superior de Arte) et l’ENA (Escuela Nacional de Arte) Mardi 18 et mercredi 19 mars : Deux répétitions publiques de « Le testament de Vanda » de Jean-Pierre Siméon avec Sylvia Bergé avec les élèves du Lycée Français de la Havane 5 Un Festival francophone qui se veut populaire Depuis 1997, je me rends régulièrement à Cuba où j’y ai fait 5 créations théâtrales, « L’envol du Quetzal » en 2001 à la Baie des Cochons et Place de la Cathédrale lors du Festival international de théâtre ou « le Chevalier de Paris » en 2010 avec 200 malades psychiatriques et d’autres plus conventionnelles avec des acteurs de renom cubains comme « Gueule de Mariée » en 1998 et « La Valse à 1000 ans » en 2005, toutes deux au Théâtre National. J’ai donc au fil du temps tissé des amitiés avec les artistes du théâtre cubain; j’ai toujours bénéficié de l’appui du Ministère de la Culture et le Conseil des arts Scéniques de la Havane et du Bureau de l’historien de la Ville. Nous pouvons donc compter sur leur totale collaboration quant à la création de ce premier Festival. Les cubains ont une vraie passion pour le théâtre, ce qui se confirme lors du Festival de Théâtre International de la Havane où la plupart des salles se remplissent, que ce soit pour des créations nationales ou internationales. (voir article de René Solis, Libération, Nov 2013) Les cubains ont une vraie passion pour la culture française qui a créé un lien privilégié avec leur pays que ce soit dans son histoire récente ou dans son passé plus lointain. Ce Festival mettra donc en avant la culture de langue française contemporaine, son écriture comme ses questionnements sur notre société au travers de mises en espace théâtrales dont la plupart avec des artistes cubains de renom. Ce premier Festival du Théâtre Francophone à Cuba se veut populaire et pérenne, il se consacrera principalement à la mise en espace d’auteurs vivants de langue française ; ce qui permettra aux cubains de découvrir des œuvres remarquables d’auteurs méconnus dans leur pays, français, belges, suisses, canadiens... «Radio Progreso » compte sur 2014 continuer ses dramatiques avec des auteurs francophones qu’ils traduiront via le catalogue des EAT Certaines de ces mises en espace aboutiront à des productions cubaines 6 7 mises en espace, une pièce de théâtre une dramatique radio, des ateliers, des projections, des master class, lectures… Ce festival se veut populaire et accessible à tous les cubains, c’est la raison pour laquelle les mises en espace seront jouées en langue espagnole et donc déjà traduites. Les metteurs en scène cubains qui participent à ces lectures sont tous de grandes figures de la vie théâtrale à Cuba. Sera jouée « Le Testament de Vanda » (sur-titré) de Jean-Pierre Siméon avec Sylvia Bergé (sociétaire à la Comédie Française) mise en scène Julie Brochen, créé en octobre 2009 au Vieux-Colombier. Chaque année, un homme de théâtre prestigieux sera invité pour parler de son travail lors de master class et de projections et dirigera des ateliers aux Conservatoires de la Havane, cette année notre parrain est Philippe Adrien. Ce premier Festival se déroule sur huit jours. Des lectures mises en espace en espagnol d’extraits de textes dramatiques se feront avec différentes compagnies de théâtre cubain et en français à l’Alliance Française. Des projections de films de théâtre, de captations… auront lieu dans un théâtre du Vedado, le théâtre Adolfo Llaurado. Une pièce radiophonique avec la complicité d’une radio nationale, Radio Progreso. (plus d’un million d’auditeurs) qui compte sur 2014 prolonger sa coopération avec les auteurs francophones. Les traductions se feront à la Havane. Autour de ce festival, 4 ateliers d’art dramatique sont envisagés avec Jennifer Herszman Capraru et Philippe Adrien dans un conservatoire d’arts de la Havane, l’ISA (Instituto Superior de Arte). Ce premier festival aura donc lieu à la Havane et pourrait aussi être imaginé dans un deuxième temps à Santiago de Cuba. 7 Les auteurs joués ou invités : Jean-Pierre Siméon Eduardo Manet Olivier Chiacchiari Lise Martin Wadji Mouawad Xavier Carrar Marie Fourquet Carole Fléchette Alain Gras Serge Sándor Philippe Adrien Les partenaires : L’ambassade de France à Cuba Les ambassades du Canada, Belgique et Suisse Les EAT, Ecrivains Associés du Théâtre La SACD (en cours) Le Conseil des Arts Scéniques de la Havane Le Bureau de l’Historien de la Vieille Havane, Eusebio Leal Spengler Radio Progreso Air France Les metteurs en scène : Flora Lauten, Teatro Buendia Carlos Diaz, Teatro El público Carlos Celdran, Argos Teatro Isabel Bustos, Retazos Danza teatro Daniel Lana, Institut Supérieur des Arts Serge Sándor, directeur artistique de la compagnie du Labyrinthe. Jennifer Herszman Capraru, directrice artistique du Theatre Asylum Canada et Isôko Theatre Rwanda, (www.isoko-rwanda.org www.theatreasylum.com www.youtube.com/watch?v=N6YoNN6RyKU 8 Serge Sándor a débuté, en tant que comédien, au théâtre en 1975 avec R. Girard puis D. Mesguich. En 1977, sa première mise en scène est une adaptation d'un texte d'Emma Santos à Paris et Avignon. Entre 1977 et 1979, il parcourt le monde en écrivant des nouvelles et poèmes puis prend durant un an la direction artistique de la «Cour des Miracles» avant de s’installer au Mexique où il monte en français et en espagnol, Beckett, Vian, de Obaldia, Courteline... En 1984, il réalise le premier spectacle avec des détenus dans une prison mexicaine. De retour en France en 1986 il crée la Compagnie du Labyrinthe et monte dans les prisons françaises et suisses certains de ses textes : “ Que Faire en Cas de Copropriétaires ? », mais également des textes en écriture collective et quelques classiques dont le "Dom Juan" de Molière. Parallèlement, dans des théâtres sur Paris et ailleurs, il crée "Un Revolver pour Deux", "Abus de Mémoire", "Not'Bon Louis" au Château de Vincennes, puis "Scène à Scène" à Lisbonne... "La Valse à Mille Ans" est montée par une Compagnie Lausannoise en 1993 et "Pygmées" en octobre 95, à Villeurbanne mis en scène par Patrick Pineau et Sylvie Orcier. Il réalise en résidence une pièce de théâtre jouée par des enfants de Villeurbanne, met en scène un conte contemporain dans les hôpitaux pour enfants malades et un spectacle dans le cadre des Rencontres Urbaines avec des jeunes de Créteil. Depuis lors, il a écrit d'autres textes édités pour le théâtre et travaillé sur certaines adaptations dont “ les Bas-Fonds ” de Maxime Gorki qu'il crée au Théâtre National de Chaillot avec des "SDF" en octobre 98. Il monte dès 1998 dans les cafés parisiens et en province : « Un carré de dames », 4 monologues de femmes joués en Suisse, Espagne, Cuba et Mexico. En 1999, il est invité au Festival International de la Havane pour y reprendre “ Gueule de mariée ” en espagnol. En mai 2000, il monte “ Le Concile d’amour ” au Théâtre de la Tempête avec des acteurs malades du SIDA. En 2001, il crée « L’Envol du Quetzal » lors du Xème Festival International de la Havane et en tournée à Cuba. En 2002, il crée “ A la tombée de la nuit ” de J.Disla au Centre Cervantés de Paris. En 2004, il crée deux spectacles théâtre et musique « Une comète à Cuba » de C. Monsarrat au Théâtre du Chaudron et « L’Opéra des Gueux » au Théâtre de Vidy de Lausanne, et en espagnol « La Valse à Mille ans » au Théâtre National de La Havane. En 2005 à l’Opéra Comique, un spectacle musical inspiré de Nicolas Guillen et « Poubell’s Land » à la Tempête, spectacle en 18 langues. En 2007, il monte « La fin des hasards prévus » de B. Hammond au Théâtre Tallia. Il tourne en 2008, son premier documentaire « La Mariée fugitive » à Mexico (CNC et PROCIREP) Il écrit en 2009 « Il était encore une fois… » à la prison de Fleury Mérogis pour des femmes détenues et monte un carnaval théâtre à La Havane fin 2009 avec 200 patients psychiatriques. De ces créations, il réalise ses trois premiers documentaires. En 2011, il créé dans le Morvan « Les enfants des Vermiraux » à Avallon, Quarré-les-Tombes et la prison de Joux-la-Ville. En 2012-2013, il réalise 7 courts métrages avec des jeunes de foyers et de centres éducatifs en Bourgogne. 9 Philippe Adrien C’est à la fin des années 60 que Philippe Adrien, alors acteur, se fait connaître comme auteur dramatique : La Baye montée en 1967 par Antoine Bourseiller, avec Jean-Pierre Léaud et Suzanne Flon – puis trente ans plus tard par Laurent Pelly – met en situation une famille : satire sociale bien sûr, mais l’enchevêtrement des répliques et la dynamique intensive du dialogue révèlent un goût et un art du désordre qui mèneront Philippe Adrien vers des auteurs « irrévérencieux » : Jarry, Gombrowicz, Witkiewicz, Cami ou encore Copi… Le metteur en scène s’affirmera dans les années 70 au sein d’un travail collectif d’expérimentation, aux côtés un temps de Jean-Claude Fall : L’Excès d’après Georges Bataille ;L’Œil de la tête – effet Sade (auteur qu’il retrouvera en 1989 avec le texte d’Enzo Cormann Sade, concert d’enfers) ; Le Pupille veut être tuteur de Peter Handke (partition sans dialogue) ; La Résistance : ces spectacles se donnent comme autant de questions ou provocations au théâtre, à son cadre, à ses contenus, à sa capacité de Représentation(titre d’une œuvre de 1976). C’est en Allemagne, paradoxalement, qu’il aborde son premier auteur du répertoire : Molière, qu’il ne quittera plus : ce seront Dom Juan, George Dandin, puis une pièce qu’il lui consacre en 1979 : Le Défi de Molière, sur trois moments clés de la vie de Jean-Baptiste Poquelin. Le début des années 80 va constituer une charnière : Jarry (Ubu roi et Ubu cocu), Witkiewicz (La Poule d’eau) prolongent le geste libérateur et provocateur du cycle précédent : le théâtre y reste défini comme transposition scénique de processus mentaux, et c’est avec l’œuvre de Kafka que ce mouvement va ensuite cristalliser : Une Visite, adaptation du chapitre 7 de L’Amérique en révèle la dimension loufoque et jubilatoire puis, trois ans plus tard, Rêves de Kafka place l’activité onirique au cœur de la création. Nommé en 1981 directeur du Théâtre des Quartiers d’Ivry, à la suite d’Antoine Vitez, Philippe Adrien y présentera Monsieur de Pourceaugnac (toujours Molière), Homme pour homme de Brecht, La Funeste Passion du professeur Forenstein dont il est l’auteur, La Mission de Heiner Müller. C’est en 1983 qu’il est pour la première fois invité à mettre en scène à la Comédie-Française où il monte Amphitryon et Le Médecin Volant de Molière puis, dans la décennie 90, au Vieux Colombier, Maman revient, pauvre orphelin de Jean-Claude Grumberg, Point à la ligne de Véronique Olmi, L’Incorruptible de Hugo von Hofmannsthal, Monsieur de Pourceaugnac de Molière, Extermination du peuple de Werner Schwab. Il signe en 1995 une mise en scène des Bonnes de Genet et de Arcadia de Tom Stoppard, que le succès conduira à reprendre à la salle Richelieu les saisons suivantes. Dans le même temps, Philippe Adrien met en scène Tennessee Williams à deux reprises : Un tramway nommé désir, avec Caroline Cellier, au Théâtre Eldorado (1999), puis Doux oiseau de jeunesse, avec Claudia Cardinale, au Théâtre de la Madeleine (2005). 10 Une étape marquante sera la longue période d’ateliers, puis d’enseignement régulier (1989-2003) au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique. La transmission pédagogique va indéniablement rapprocher Philippe Adrien de la littérature théâtrale. De nombreux projets naîtront « dans la classe », constituant une traversée du temps : Shakespeare (Hamlet, puis Le Roi Lear), Marivaux (Les Acteurs de bonne foi et La Méprise), et pour le XXe siècle Claudel (L’Annonce faite à Marie), Brecht (La Noce chez les petits bourgeois), Beckett (En attendant Godot), Vitrac (Victor ou les enfants au pouvoir), Gombrowicz (Yvonne, princesse de Bourgogne), Copi (L’Homosexuel), Armando Llamas (Meurtres de la princesse juive)… Ses relations avec le continent africain - son histoire et sa mémoire - ont conduit Philippe Adrien à monter Kinkalid’Arnaud Bédouet (Molière du meilleur spectacle de création en 1997) ; à aborder la question de la colonisation avec Mélédouman de Philippe Auger d’après La Carte d’identité de Jean-Marie Adiaffi (création à Brazzaville), puis Le Projet Conrad, adaptation de la nouvelle Un Avant-poste du progrès ; enfin, à porter à la scène le roman d’Amos Tutuola L’Ivrogne dans la brousse et à réaliser récemment au Bénin Rêver à Cotonou, création collective. Par ailleurs, une fructueuse collaboration avec Bruno Netter (acteur aveugle) et la Compagnie du Troisième Œil, composée de comédiens handicapés et valides, a donné une perspective et une résonance inédites au Malade Imaginaire de Molière en 2001, puis au Procès de Kafka, àŒdipe de Sophocle, à Don Quichotte de Cervantès et auxChaises de Ionesco en 2011. On ne saurait dissocier le parcours artistique de Philippe Adrien du Théâtre de la Tempête, sis à la Cartoucherie, dont il est depuis vingt ans le directeur et le programmateur : lieu d’accueil et de création, ouvert aux jeunes compagnies comme aux metteurs en scène confirmés, aux propositions les plus contemporaines comme au vaste trésor du répertoire. Ces dernières années, La Mouette puis Ivanov (2006 – 2008) ont placé Tchekhov parmi les auteurs de référence de Philippe Adrien, aux côtés de Claudel - dont il monte en 2012 Partage de midi mais aussi une farce mythologique oubliée : Protée qui sera repris en 2014 au Théâtre de la Tempête -, et de Molière encore, dont il mettra en scène L’École des femmes en septembre 2013. Ce répertoire dramatique ne saurait cependant éluder l’inquiétude et la curiosité quant au présent : qu’il s’agisse d’auteurs contemporains et de leurs paraboles sur l’histoire Mayorga La Tortue de Darwin ou Werner SchwabExcédent de poids, insignifiant amorphe -, de situations vécues, privées - Exposition d’une femme, lettre d’une psychotique d’après Blandine Solange -, ou publiques voire politiques - L’Affaire, suite à l’événement DSK : le projet reste bien d’interroger le monde et son envers. Bug ! vaste fresque coécrite avec Jean-Louis Bauer en 2011 se proposait, sous la forme d’un périple rêvé à travers notre mémoire et les enjeux scientifiques et artistiques actuels, de « faire un point » sur notre civilisation. 11 Eduardo Manet Né à Cuba, Eduardo Manet est citoyen français depuis 1979. De 1952 à 1960, jeune étudiant, il parcourt l’Europe et séjourne en France. A Paris, il suit les cours de Tania Balachova et de Pierre Bertin, et entre dans la compagnie de Jacques Lecocq, (joue dans ce cadre un spectacle qui tourne en France et en Italie). De retour à Cuba (1960/1968), il devient directeur du Centre Dramatique Cubain, réalisateur et scénariste à l’Institut du Cinéma Cubain (ICAIC), à l’intérieur duquel il réalisera 4 longs métrages et 6 courts métrages (le public français a pu voir « Portocarrero » présenté en 1989 à CANAL PLUS dans l’émission « Hommage au cinéma cubain » Eduardo Manet a été fait officier des Arts et des Lettres en 1998. Et chevalier de l’Ordre du Mérite en 2001. ROMANS Une vingtième de romans parmi lesquels. - La Mauresque. NRF Gallimard. Prix Jouvenel de l’Académie Française 1982 Finaliste au Goncourt. - Zone interdite. NRF Gallimard, 1984. - L’île du lézard vert. Flammarion, Prix Goncourt des lycéens 1992. - Rhapsodie cubaine. Grasset, 1996. Prix Interallié, finaliste au Goncourt. - D’amour et d’exil. Grasset. 1999. Prix Relais H. .- Maestro ! Robert Laffont, 2002. Grand Prix du Télégramme de Brest - Mes années Cuba, Grasset, avril 2004 - La Conquistadora, Robert Laffont, 2006. Prix Corbet lycéen des Antilles.-Marrane ! Hugoroman édition, 2007 - La Maîtresse du commandant Castro. 2009. Robert Laffont. - Un Cubain à Paris, Ecriture. Jean-Daniel Belfond, 2009. - Pour avoir du panache à tout âge. Hugo et cie. 2009 -Les Trois frères Castro. Ecriture. Jean-Daniel Belfond 2010 -Quatre villes profanes et un paradis. ( Nouvelles) Editions Bouclats. 2010 -Le Fifre. Ecriture. Jean-Daniel Belfond. 2011 THEATRE Une vingtaine de pièces de théâtre, parmi lesquelles : - Les Nonnes, NRF Gallimard, collection « Le manteau d’Arlequin » Prix Lugné Poe 1969. Cette pièce a été traduite en 21 langues. - Eux ou la prise du pouvoir, NRF Gallimard, collection « Le Manteau d’Arlequin » 1971 Création à la Comédie Française. 12 - Holocaustum, ou le borgne, NRF Gallimard, collection « Le Manteau d’Arlequin » 1972 Présenté à l’Athénée, dans une mise en scène de Michel Fagadau - L’autre Don Juan, NRF Gallimard, collection « Le Manteau d’Arlequin » 1974 - Madras, la nuit où… NRF Gallimard, collection « Le Manteau d’Arlequin » 1975, - Lady Strass, L‘Avant-Scène Théâtre, 1977, création au Poche-Montparnasse, mise en scène de Roger Blin. Version anglaise présentée à l’UBU Théâtre de New York, octobre-décembre 1996. - Un balcon sur les Andes / Mendoza, en Argentine…/ Ma’déa, NRF Gallimard. 1985 « Un balcon sur les Andes » a été présenté dans une co-production Nouveau Théâtre de Nice -Théâtre de l’Odéon dans une mise en scène de Jean-Louis Thamin. - Le jour où Mary Shelley rencontra Charlotte Brontë. L’Avant-Scène Théâtre, 1979 Création au Petit Odéon, en co-production avec la Comédie Française - Histoire de Maheu, le boucher. Gallimard, collection Papiers 1986 Prix du Off à Avignon, 1987. - Monsieur Lovestar et son voisin de palier. Actes Sud Papiers, 1995 Première mondiale à la Comédie de Genève, en 1996, reprise au TILF (Théâtre de la Villette) Jouée à Beyrouth, Liban. - Viva Verdi ! suivi de Mare Nostrum. 1998, Actes Sud Papiers. - Viva Verdi ! Création mondiale à Fontainebleau (co-production Act-Emploi), 2004. - Les Chiennes, création mondiale à Saintes dans une mise en scène de Domnique Biton. 2008. OPERA - Cécilia, livret d’Eduardo Manet, musique de Charles Chaynes, mise en scène de Jorge Lavelli. Première à l’Opéra de Monte Carlo, le 19 mai 2000, Théâtre de l’Opéra de Nancy et de Liège en 2001. A L’opéra d’Avignon en 2003. Diffusé sur Arte à deux reprises.-Mi amor, livret E. Manet, composition et musique Charles Chaynes, Opéra de Metz En projet une présentation à l’opéra de Madrid et le San Carlos de Buenos Aires. En novembre 2008 Eduardo Manet participe comme acteur dans un spectacle inspiré par son livre Mes années Cuba. Sous le titre de « Comment je suis devenu une agence de tourisme cubain sans le vouloir », cette pièce a été présentée à Evry et Boulogne Billancourt dans une Mise en scène de Camila Saraceni. 13 Sylvia Bergé 1982-1986 : Conservatoire National Supérieur d'Art Dramatique de Paris. Ses professeurs sont : Viviane Théophilidès, Pierre Vial et Gérard Desarthe, elle commence sa formation vocale avec L.-J. Rondeleux qu'elle poursuit avec N. Fallien à la Comédie-Française puis Jean-Pierre Blivet en 2000. • En 1988, elle intègre la Comédie-Française en tant que pensionnaire • En 1998, elle devient la 496 ème sociétaire de la Comédie-Française Elle y interprète aussi bien des auteurs du répertoire classique comme : - Molière : "le Misanthrope" (1989) , "les femmes savantes" (1998) mises en scène de Simon Eine , «Amphitryon» mise en scène de Jacques Vincey (2011) - Racine : "Iphigénie" mise en scène de Yannis Kokkos (1991), «Phèdre» mise en scène d’Anne DELBÉE (1995) - Victor Hugo : Le roi s'amuse" mise en scène de Jean-Luc Boutté (1991) - Schiller: "Intrigue et amour" mise en scène de Marcel Bluwal (1995) Marivaux : « les sincères »mise en scène Jean Liermier (2006) et « La dispute »mise en scène Muriel Mayette (2009) Des auteurs contemporains comme : - Michel Vinaver: "L'émission de télévision" mise en scène de Jacques Lassalle (1990) et « L’Ordinaire » mise en scène par l’auteur ( 2009) - Nathalie Sarraute : "Le silence" mise en scène de Jacques Lassalle (1993) -Topor : « L’hiver sous la table » mise en scène C.Confortès (1997) - Jean-Pierre Siméon écrit pour elle « Le testament de Vanda » mise en scène de Julie Brochen (2008 ) Au sein de la Comédie-Française les spectacles dans lesquels elle joue et chante sont : • En 1997, "La vie parisienne" (Métella ) de Jacques Offenbach mise en scène. de Daniel MESGUISH, ce qui la conforte dans son envie de lier ces deux passions chant et théâtre. • En 2001, "la Visite inopportune" (Regina Morti) de Copi mise en scène de Lukas HEMLEB dans lequel elle chante des extraits de "La Traviata", "Andrea chénier", "La Wally", "il Trovatore", "le Barbier de Séville", "Manon Lescaut" • En 2004, « Les Bacchantes" d'Euripide mise en.scène par André WILMS à la salle Richelieu dans une musique originale • En 2007, « Vie du grand Dom Quichotte et du gros Sancho Pança » d’Antonio da 14 Silva mise en scène d’Émilie Valantin et Éric RUF musique originale de Vincent LETERME au Studio-Théâtre de la Comédie-Française, elle conçoit, dirige et interprète : « le cabaret de mers » avec quatre acteurs et trois musiciens. • En 2008, « Le voyage de M.Perrichon » (Anita) d’Eugène Labiche mise en scène de Julie BROCHEN musique originale de Denis CHOUILLET • En 2009, « Le loup » d’après le conte de Marcel Aymé mise en scène Véronique VELLA, musique originale de Vincent LETERME • En 2010, « Les oiseaux » ( Belle espérance) D’Aristophane mise en scène d’Alfredo ARIAS musique de Bruno COULAIS « L’Opéra de quat’ sous « (Jenny) de Bertold Brecht mise en scène Laurent PELLY musique Kurt WEILL dirigée par Bruno FONTAINE • En 2011 Cabaret « chansons déconseillées » dirigé par Philippe MEYER • En 2012 « Rituel pour une métamorphose » (Warda) de Saadallah WANNOUS mise en scène Sulayman AL-BASSAM • En 2013, dans la salle éphémère de la Comédie-Française en janvier puis salle Richelieu en septembre-octobre, elle conçoit, dirige et interprète : « 4 femmes et 1 piano » avec Osvaldo CALO au piano. «Psyché» ( Vénus) de Molière et Corneille mise en scène de Véronique VELLA musique de Vincent LETERME Activités hors Comédie-Française • En 2000, elle chante le "Stabat Mater" de Pergolèse en l'Église St Germain- des-Prés à Paris avec les musiciens de la Prée • Elle intervient régulièrement en milieu scolaire et dirige des ateliers de théâtre (Lycée Molière à Paris et Romain Rolland d'Argenteuil, cours Florent) ce qui lui donne envie de se confronter à la mise en scène. En 2000, elle monte à Oissel repris au festival de Dinan un spectacle musical "Logic Lewis" tiré des "Jeux de Logique" de Lewis Caroll qui mêle vidéo, musique, chant et théâtre dont elle réalise également la scénographie et les costumes avec une musique originale composée par Laurence GARCETTE . • En 2003, salle Gaveau à Paris elle est récitante pour "L'histoire du soldat" de Stravinsky avec l'orchestre d’Ile de France • En 2004, à l'Opéra d'Oslo elle est la récitante du "Perséphone" de Stravinsky sous la direction de Frédéric Chaslin • En 2004, au festival de Mondétour (Normandie), elle donne un récital d'airs du XVIIIe ( Mozart, Rameau, Gluck et Grétry) • En 2006, au festival de Fénétrange elle est Sarah Bernhardt dans « Sarah B. ou le cœur indomptable » de Marc-Fabien Bonnard musique Jean-Marie SÉNIA 15 Jennifer Herzman Capraru est Directrice Artistique du Théâtre Asylum, www.theatreaslym.com, une compagnie nominée pour son travail au Canada. En 2008, elle fonde la compagnie ISôKO, www.isoko-rwanda.org dans le but de développer un théâtre contemporain inter-culturelle au Rwanda. La compagnie a été nominée pour le Freedom to Create Priz 2010, http://www.freedomtocreate.com/isoko-theatre-rwanda. Dans ce cadre, elle met en scène deux oeuvres - Littoral de Wajdi Mouawad (en Français), nominé pour la meilleur mise en scène aux Grand Prix Théâtre Francophone Africain 2013 à Brazzaville, et The Monument de Colleen Wagner (en Kinyarwanda), qui tourne en Europe, Canada et le Rwanda. http://www.harbourfrontcentre.com/worldstage1011/themonument.cfm http://dialogfestival.pl/en/spektakle/the-monument/ Jennifer est titulaire d'un Master en Theatre & Performance Studies (York University, Toronto) et a suivi une formation de metteur en scène en Allemagne auprès du Landestheater Tübingen et du Volksbühne Berlin. Elle a été Associate Dramaturg au Factory Theatre Toronto, et a été nominée pour les prix Hirsch et McGibbon pour ses mises en scène, artiste invitée par Schloss Solitude Allemagne, et metteure en scène invitée aux Lincoln Centre's Director's Lab, New York. Ses productions dans le cadre du Theatre Asylum - BéBé, The Trials et My Mother's Courage - ont été montées à travers le Canada en partenariats avec le Theatre Centre, National Arts Centre, l'Intrepid Theatre, Segal Centre, Harbourfront, et Banff Centre. Parmi ses autres mises en scène on trouve: 24 Exposures (Serge Boucher) pour Canadian Stage, Lullaby (Thelon Oeming) pour Dark Horse (Dora Nomination, Outstanding Production), The 7th Seal (Ingmar Bergman) au DB Clark Theatre, Metamorphoses (Mary Zimmerman) pour le Phoenix Theatre et L'Illusion (Tony Kushner après Corneille). Jennifer enseigne également le théâtre (York University) et a été conférencière invitée pour Haifa University (Israel), plusieurs universités Canadiennes (Brock, Western et Laurier), Macalaster College et Brown University (USA). Ses essais ont été publiés dans Methuen Drama, Palgrave-MacMillan et Liaison. 16 Libération - mardi 26 Novembre 2013 à 18:26 Le théâtre cubain lève le rideau de fer Le festival de La Havane a révélé une scène en plein renouveau, irrévérencieuse et inventive. Par René Solis, Envoyé spécial à La Havane Pour Ana Karenina, présenté par le théâtre Vakhtangov de Moscou, le Teatro Nacional de La Havane est plein à craquer. Et l’annonce demandant d’éteindre les portables est faite d’abord en russe. La machine à remonter le temps est en marche. Avec son grand rideau plissé marron et ses murs jaunâtres, la salle monumentale a des allures 100% soviétiques. Drôles de retrouvailles : la majorité des jeunes comédiens de la troupe du Vakhtangov n’ont pas connu le communisme et le voyage à Cuba constitue pour eux une excursion à l’époque de leurs parents. Les spectateurs cubains de plus de 40 ans ont pour leur part presque tous appris le russe au lycée. Magnifique, le spectacle est d’une implacable tristesse. Le roman de Tolstoï a été transposé en pantomime par la chorégraphe et metteuse en scène Angelica Kholina. La sobriété du décor trois lustres et quelques chaises - renforce l’élégance d’un procédé qui restitue l’essence du roman, sans que jamais un mot ne soit prononcé. Le suicide d’Anna - un grincement de roues et un coup de vent qui fait voler des feuilles mortes - vient clore une deuxième partie où, vêtus de noir, tous les interprètes portent d’avance le deuil de l’amour manqué. Et le frisson glacé qui étreint à cet instant la salle ne doit rien à l’air conditionné soufflant au maximum. Rien ne change à Cuba, surtout pas l’impression du temps suspendu, comme si le deuil de la révolution n’en finissait pas. Et pourtant… Le festival de théâtre de La Havane qui s’est tenu du 25 octobre au 5 novembre a multiplié les signes d’une évolution encore impensable il y a peu. L’héroïne de Tolstoï est aussi l’affiche du Trianón, l’un des nombreux théâtres qui bordent Línea, l’une des principales avenues du Vedado, le quartier qui concentre une bonne part de la vie culturelle de La Havane. Liberté. Pièce de Nilo Cruz, auteur américain d’origine cubaine écrivant en anglais, Anna in the Tropics a obtenu en 2003 un prix Pulitzer pour le théâtre. L’œuvre a pour cadre une manufacture de tabac en Floride dans les années 30 et raconte l’arrivée d’un homme embauché par des travailleurs pour leur faire la lecture à haute voix pendant les heures de travail. Les ouvriers écoutent donc des pages d’Anna Karénine, tandis que la famille propriétaire de l’usine se déchire. L’intérêt du spectacle réside d’abord dans ses conditions de production : après sa création à La Havane, fin octobre, cette version d’Ana en el Trópico vient d’être présentée, du 22 au 24 novembre, au Colony Theater de Miami, et la distribution rassemble des acteurs vivant à Cuba et d’autres installés aux Etats-Unis. Un cas de figure qui illustre le comblement progressif du fossé entre Cubains «du dehors» et du «dedans». Ce soir-là, les actrices Mabel Roch et Lilian Rentería, qui ont quitté l’île depuis vingt ans, sont ovationnées au moment du salut et nul n’aurait l’idée de les traiter de gusanas («vers de terre» - entendre «vermine» -, le mot qui désigne les Cubains ayant quitté l’île). A l’affiche avec elles, Osvaldo Doimeadiós vit toujours à La Havane. Célèbre pour ses rôles dans des telenovelas et ses émissions humoristiques, Doime, comme tout le monde l’appelle, a été invité en 2010 à animer une émission sur Mega TV, une chaîne américaine en espagnol basée à Key West, en Floride : «A Cuba, tout le monde était persuadé que j’allais rester là-bas. 17 Mais je ne voyais pas pourquoi il fallait que je choisisse entre un pays ou l’autre. La guerre froide est finie ! Il y a quelques années, combiner les deux aurait été impensable. Aujourd’hui, les artistes peuvent faire des choses sans attendre les décisions politiques. Les temps changent.» Un «changement» qu’illustre aussi l’étonnante liberté de ton, tant sur le fond que sur la forme, de plusieurs spectacles. Dans Fichenla, si Pueden («Chopez là si vous pouvez»), adaptation de la Putain respectueuse de Sartre, le metteur en scène Carlos Celdrán, fondateur de l’Argos Teatro, transpose la pièce dans le Cuba d’aujourd’hui et met les deux pieds dans plusieurs sujets brûlants : racisme, arbitraire policier et corruption politique, le spectacle tourne au brûlot d’actualité. Par sa rigueur, son intensité et la qualité des interprètes, la pièce est cousine des productions argentines de Daniel Veronese et Claudio Tolcachir, qu’on a pu voir ces dernières années en France, notamment au Festival d’automne. Metteur en scène expérimenté, Carlos Celdrán sait très exactement jusqu’où pousser le bouchon : «Je monte des textes qui permettent de dialoguer avec la réalité urbaine d’aujourd’hui. Que ce soit Ibsen, Strindberg, Beckett, Sartre, ou Virgilo Piñera [poète «fondateur» du théâtre contemporain cubain mis à l’index dans les années 70 et mort en 1979, ndlr]. Il s’agit toujours pour les acteurs de parler d’eux-mêmes et du présent. Quand on sort les textes de leur contexte original - lieu ou époque -, on peut donner la sensation qu’ils se passent ici et maintenant sans même avoir besoin de dire : "Ça, c’est Cuba." C’est une stratégie relativement subtile. Le théâtre dispose d’un espace de dialogue que n’ont pas le cinéma ou la télévision. Nous profitons de cette brèche.» La metteuse en scène Nelda Castillo, fondatrice en 1996 de la compagnie El Ciervo Encantado («Le cerf enchanté»), n’y va pas non plus avec le dos de la cuillère. Dans la chapelle désaffectée qui abrite son théâtre, elle est du genre à veiller sur les spectateurs comme sur des enfants potentiellement turbulents («toute sortie est définitive»). Solo interprété par Mariela Brito, Rapsodia Para el Mulo («Rhapsodie pour la mule», titre inspiré d’un poème de Lezama Lima) est un spectacle au premier degré d’une rare violence. Nue, harnachée et entravée comme un véritable animal, l’actrice tourne en rond pendant une heure en traînant une carriole, Mère Courage muette et harassée fouillant dans les poubelles de la révolution, au pied d’une silhouette du Che en ombre chinoise et d’un slogan, «Del combate diario a la victoria segura» («Du combat quotidien à la victoire assurée»). Combat et victoire résumés par ce personnage à l’état de bête, qui accumule ses «richesses», tomes dépareillés des œuvres de Marx, Engels et Lénine, plateaux-repas en étain cabossé, cartes de rationnement déchirées, panneaux de «tâches révolutionnaires» maculés de rouille et de boue. Le tout au rythme d’une bande-son pimpante : des extraits d’émissions de Radio Enciclopedia, station culturelle grand public, égrenant, au gré d’un jingle stressant, des «infos» façon Sélection du Reader’s Digest : «Les fourmis ne dorment jamais» ; «Les éléphants sont les seuls mammifères incapables de sauter». Et pour solde final des lendemains qui chantent, l’actrice s’arrête pour uriner sous elle. Impossible d’être plus explicite. La nouvelle génération a l’irrévérence plus légère. Dans La Mujer de Carne y Leche («La femme de chair et de lait»), les jeunes artistes du collectif MCL, réunis autour de Leire Fernandez, partent à l’assaut de quelques incontournables de la culture nationale - notamment le machisme -, via des micros-trottoirs aussi édifiants qu’hilarants, la gaîté n’occultant pas une forme de colère sourde. Fil. Dans la même veine, en plus déjanté et plus écrit, Perros que Jamás Ladraron («Chiens qui n’ont jamais aboyé»), du jeune dramaturge Rogelio Orizondo, s’inspire de témoignages souvenirs d’enfance, expériences amoureuses - souvent glaçants de ses acteurs. Et les insère dans un show interactif avec le public (invité à envoyer des SMS à l’un des acteurs, qui les lit en direct). Le tout dans un bordel qui revendique sa filiation avec le «théâtre allemand contemporain». L’autre fil suivi par les jeunes dramaturges cubains passe par un retour aux héros du théâtre grec. Ils s’inscrivent en cela dans la lignée de Virgilio Piñera, dont Electra Garrigó (1948) 18 constitue l’une des œuvres majeures du théâtre cubain du XXe siècle. Un retour aux classiques qui est aussi un raccourci vers l’actualité que certains ont payé cher. Tels Antón Arrufat, auteur en 1968 d’une réécriture jugée «contre-révolutionnaire» des Sept contre Thèbes d’Eschyle, qui lui valut mise en accusation et interdiction professionnelle, ou José Triana, auteur de Médée dans le miroir, qui vit à Paris depuis plus de trente ans. L’époque n’est plus aux procès staliniens et les deux Antigone présentées au festival ne font l’objet d’aucune censure. Antigona de Yerendy Fleites transforme Créon en bureaucrate borné et fait d’Antigone une jeune fille d’aujourd’hui : les enjeux du texte original - l’enterrement du corps de Polynice, le défi d’Antigone à Créon, la punition - sont comme dilués dans une société où règne l’ennui, encore plus que l’arbitraire. Plus ambitieux et maîtrisé, Antigonón de Rogelio Orizondo (l’auteur de Perros que Jamás Ladraron) part d’Antigone pour passer en revue certains héros de l’histoire cubaine, comme José Marti, le père de l’indépendance, dont les bustes et les représentations sont encore plus nombreux à Cuba que ceux de Che Guevara. Le metteur en scène Carlos Díaz (celui d’Ana en el Trópico) déploie tout son savoir faire et son sens de l’humour, dans un spectacle aussi réjouissant visuellement - avec des clins d’œil appuyés au cabaret de travestis - que pertinent théâtralement, sur le fil entre dérision et poésie, dans un enchaînement de questions qui en appellent toujours d’autres. Une façon, comme dit Carlos Díaz, de «repousser les limites». «La nouvelle génération, ajoute-t-il, se fiche de la vieille rhétorique. Elle se situe déjà demain.» Un demain qui ne chante pas, mais auquel le théâtre cubain commence à donner une voix. 19