Rapport sur deux conférences tenues récemment à Berne

Transcription

Rapport sur deux conférences tenues récemment à Berne
I
12.2015
art law magazine
decision it overturned, the Court
of Appeals’ opinion concluded that “there is no
viable factual or legal support for court’s own
nominal 10% discount”.
Estate tax has serious ramifications for
collections of this magnitude, and the decision
can certainly be read to endorse fractional
interests as a planning tool. And the Elkins
court whose
decision certainly underscores that carefully
thought out and well-documented tax
planning can allow the collector to capitalize
on potentially significant tax efficiencies. And,
when it comes to defending those plans in a tax
controversy, preparation and thoroughness are
always essential.
—
—
Protection des biens culturels : entre progrès et dégradation Rapport sur deux conférences tenues récemment à Berne
Charles Bondry*
Les 2 et 25 juin 2015, deux conférences se sont
tenues à Berne sur le thème de la protection
des biens culturels. Actualité oblige, elles
n’ont pas manqué d’insister sur la destruction
et la dispersion des biens culturels syriens et
iraquiens, ainsi que sur les mesures mises en
place pour lutter contre ce pillage à grande
échelle.
Le thème de la première conférence,
organisée par l’Office fédéral de la culture,
portait sur «La Convention de VUNESCO de 1910:
10 ans de mise en œuvre en Suisse. La préservation et
le devoir de diligence en matière de biens culturels»' .
Cette conférence a donné l’occasion d’évaluer
la situation de l’influence de la Loi fédérale sur
le transfert international des biens culturels
(LTBC) aux niveaux national et international
dans la lutte contre le trafic des biens culturels.
Des intervenants venus de diverses sphères celles des musées, des commerçants d’art, des
collectionneurs, des archéologues et des autorités
- ont pu s’exprimer sur les mesures mises en
*
Charles Boudry est avocat chez LALIVE et archéologue. Il
place dans leurs champs d’activités.
La seconde conférence intitulée «Strategies
of Reconstruction» était organisée en tant que
« session extraordinaire » dans le cadre de la 61e
Rencontre Assyriologique Internationale (RAI)
et portait sur les stratégies de préservation et de
recomposition du patrimoine culturel syrien.2
Lors de cette session, les intervenants - dont
plusieurs archéologues syriens - ont d’abord
peint un tableau sombre des destructions
massives et pillages systématiques opérés sur les
sites syrien et iraquien. Ils ont ensuite recensé
les outils disponibles pour à sauvegarder ce qui
reste à sauver et les stratégies qu’il conviendra
d’adopter à la fin du conflit dans le but de
recomposer ce patrimoine culturel.
Ces deux colloques s’inscrivaient dans des
contextes différents : le premier se rapportant
à l’application d’une loi suisse ; le second à la
recomposition d’un patrimoine culturel. Ils ont
pourtant abordé les mêmes questions et dressé
un constat identique.
Les moyens légaux pour lutter contre le
trafic illicite prennent une dimension de plus en
plus importante. Ainsi, les intervenants n’ont pas
peut être contacté à [email protected].
1 La Convention de l’UNESCO de 1970 : 10 ans de mise en
œuvre en Suisse. La préservation et le devoir de diligence en
matière de biens culturels, a eu lieu le 2 juin 2015 au Centre Paul
Klee. Cf. www,bak.adinin.ch/l<ulmrerbe/043 7 1 /Q5 582/index.
2 61e Rencontre Assyriologique Internationale; Genève Berne, session extraordinaire du 25 juin 201 5 : «< Strategies of
Reconstruction ». Cf. http://rai.unibe,ch/gb/stratcgics-for-resco
ration-and-reçonstryic-tiap/.
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manqué de signaler les résolutions du Conseil
de sécurité des Nations Unies 1483 (2003)
du 22 mai 2003 et 2199 (2015) du 12 février
2015, lesquelles condamnent les destructions
des patrimoines culturels iraquien et syrien, et
prescrivent aux Etats membres de tout mettre
en œuvre pour empêcher le commerce des biens
culturels enlevés illégalement d’Iraq depuis
août 1990 et de Syrie depuis mars 201 1. Ces
résolutions ont été adoptées dans le cadre du
chapitre VII de la Charte des Nations Unies
qui autorise au Conseil de sécurité des mesures
coercitives dans le seul cadre du maintien
de la paix et de la sécurité internationale.
L’intervention du Conseil de sécurité dans
ce domaine souligne la place qu’occupe
actuellement le trafic illicite des biens culturels,
et son lien avec le financement du terrorisme,
comme l’illustre le cas tragique de l’Etat
islamique. Certains orateurs, d’ailleurs, ont mis
l’accent sur les deux facettes de l’Etat Islamique,
lequel adopte une attitude destructrice, voire
iconoclaste, d’un côté, dans la destruction
d’objets et sites archéologiques parfois
élevés au rang d’icônes par la communauté
internationale, et, de l’autre, affichant une
ambition exclusivement commerciale, quand ces
mêmes objets culturels sont lâchés sur le marché
et achetés à prix d’or par les collectionneurs,
l’argent récolté permettant le financement de ses
activités terroristes.
L’importance de ce trafic illicite et des
ressources financières qui en découlent appelle
une augmentation des exigences en matière
du devoir de diligence attendu des différents
acteurs du marché de l’art. Les commerçants
d’art et les maisons de vente aux enchères sont
tenues maintenant de respecter les prescriptions
de diligence prévues par l’article 16 LTBC et
de tenir un registre des acquisitions des biens
culturels. Les acheteurs doivent quant à eux
se montrer de plus en plus diligents lors de
l’acquisition d’une œuvre d’art ou d’un bien
culturel et effectuer des démarches approfondies
en vue de s’assurer de la provenance licite du
bien convoité, ce qui est illustré par l’arrêt
du Tribunal fédéral ATF 139 DI 305 (Arrêt
Malevitch). Plus récemment, l’article 9a de
l’Ordonnance instituant des mesures à l’encontre
de la Syrie du 8 juin 2012, entré en vigueur le 17
décembre 2014, vient renverser le fardeau de la
preuve en matière de bonne foi pour les biens
culturels syriens exportés depuis mars 2011.
L’acheteur n’est plus présumé de bonne foi, il
est tenu de démontrer qu’au moment de l’achat
n’existait aucune raison de penser que le bien
avait été volé ou illicitement exporté.
Certains spécialistes ont du reste regretté
l’absence d’une base de données centralisée
comme référence unique concernant les biens
culturels volés ou illicitement exportés ; les
informations disponibles étant dispersées
aujourd’hui encore auprès de différents acteurs
(Interpol, Art Loss Register, ICOM, Unesco
etc.). Une telle base de données, facilement
accessible, devrait faciliter la preuve en matière
de devoir de diligence.
Les intervenants ont aussi traité de la
restitution de biens culturels à leur pays
d’origine, domaine récurrent, à cheval entre les
prescriptions légales et la diplomatie. Restitution
par le biais de l’entraide internationale en
matière pénale qui s’appuie sur la nécessité
d’initier une procédure dans le pays source ;
restitution par le biais d’une action civile ; ou
restitution dans le cadre des accords bilatéraux
passés par la Suisse sur la base de l’article 7
LTBC, dont six sont déjà entrés en vigueur
(Italie, Egypte, Grèce, Colombie, Chine,
Chypre).
Ces conférences ont permis de constater les
progrès réalisés dans le domaine de la protection
des biens culturels, notamment en Suisse depuis
l’entrée en vigueur de la LTBC. Les acteurs
sont ainsi soumis à des règles de plus en plus
précises et rigoureuses lorsqu’il s’agit de vérifier
l’origine et l’historique des pièces exportées,
importées, et mises en vente. L’augmentation des
mécanismes de restitution devrait aussi faciliter
le retour des pièces dans leur pays d’origine.
Ce constat toutefois s’inscrit en demi-teinte,
vu l’insuffisance des moyens développés pour
empêcher un commerce illicite extrêmement
lucratif. Plusieurs courants de réflexions ont été
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art law magazine
suggérés pour endiguer ce trafic illicite, comme
le renforcement de la protection in situ des biens
culturels, le développement d’inventaires publics
à même de tracer l’objet, l’interdiction de vendre
le bien culturel sans certificat d’origine - ou
certificat d’exponation - uniformisé au niveau
international ou, davantage encore, l’interdiction
pure et simple du commerce d’antiquités (ou
leur « démonétisation »), afin de décourager le
pillage et la perte irrémédiable d’information,
solutions qui devront bien entendu être portées
12.2015
au niveau international.
L’apport décisif de ces deux conférences a
été de rassembler, au travers de présentations
souvent remarquables, des spécialistes venus
d’horizons fort variés mais avec un objectif
commun, celui de protéger un patrimoine
culturel participant à la mémoire collective de
l’humanité. La collaboration entre les différents
acteurs du marché de l’art demeure primordiale
dans la poursuite de cet objectif.
Conference report: Kunst if Recht / Art
if
Law 201 5
Niklaus Glatthard*
On 19 June 2015, for the sixth time, the
conference Kunst & Recht / Art & Law took
place at the Congress Center Basel during the
ever exciting Art Basel and brought together
participants from academia and legal practice as
well as from the art world.
Marc Spiegler, Director of Art Basel, opened
the conference and provided a short overview
of the developments and legal challenges Art
Basel is currently facing. Speaking about the
legal implications of the transactions during the
fair, Mr Spiegler noted that while Art Basel is
not involved in the transactions, its exhibition
regulations include a provision whereby
exhibitors shall “respect all existing laws”.
Accordingly, breaches of the said provision would
be remedied by Art Basel by way of refusing
admission to Art Basel or revoking an admission
already granted.1 Regarding the art market as
a whole, Mr Spiegler saw possibilities for self¬
regulation. He opined that transparency is key to
maintaining an art market governed by passion
rather than by too stringent legal requirements.
The first keynote speaker in the array of
distinguished art law professionals, Dr. Friederike
Gràfin von Brühl, M.A., Attorney at K&L Gates
LLP, Berlin, elaborated on die legal relevance
of the catalogues raisonnés. She demonstrated that
catalogues raisonnés (or catalogues of works) are
undergoing important changes; new methods
and new tides are employed in their making.
Nonetheless, the importance of the catalogues
raisonnés remains unchanged. Dr. Gràfin von
Brühl discussed digital versions which allow
continuous amendments, as opposed to paper
versions which only provide a summary of an
artist’s work at the time of publication. Rightfully,
Dr. Gràfin von Brühl pointed out that a catalogues
raisonnés should by definition be work in progress.
at Law, LL.M., Associate at LALTVE in Zurich,
[email protected].
* Attorney
1 Paragraph 20 of the Exhibition Regulations 2015 - Abidance
by the laws
It is imperative for exhibitors to respect all existing laws, especially
the statutory provisions against forgery of arTworks and provenance ,
commercial fraud, money-laundering, and illegal import arid export of
cultural heritage The Show Management shall have the right to refuse
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admission to Art Basel or to revoke an admission already granted, if an
exhibitor has been incriminated by a legal procedure or convicted by a
court decision of having violated such statutory provisions and thereby is
compromising the reputation of Art Basel.
(see hnps://wwwÿftbMel.com/-/tncdia/ArtBa<el/DocumcnKy
Shmvkic Basel/Xcw EiicsrilBB! 5 Exhibition
Rcgulations.pdf: last retrieved 7 July 201 5, 9 45 a.m )
Furthermore, she mentioned the increase in
liability claims against the experts who establish
catalogues raisonnés. She split such claims into
two categories: (i) liability claims relating to the
incorrect inclusion of an artwork and (ii) claims
regarding incorrect exclusion of an artwork.
On the basis of a comparative analysis of the
French, German and Swiss legal regimes, Dr.
Gràfin von Brühl illustrated that liability claims
in Germany2 and Switzerland are generally
based on a contractual relationship between the
claimant and the art expert. French courts, on
the other hand, do not seem to require a direct
contractual relationship as illustrated by a case
before the Tribunal de Grande Instance ofNanteire?
In that case, the art expert Werner Spies had
written a note confirming that he considered a
painting to be by Max Ernst and that he would
include it in the catalogues raisonnés. A company
bought the painting and later auctioned it off
through Sotheby’s. The painting turned out
to be a fake and the sale had to be annulled.
The court ruled that the art expert should have
known the effect that the note would have had
on the art market and that he did not exercise
reasonable care. Consequently, the art expert’s
negligence made him liable for damages. To
conclude, Dr. Gràfin von Briihl reflected on the
current paradigm in the art market, which confers
considerable power to the foremost experts
who establish catalogues raisonnés on specific
artists. Regarding the claims made against these
predominant experts’ assessments, she submitted
an interesting proposition whereby instead of the
legal framework governing traditional liability
on such claims, competition law may provide an
alternative approach as it generally sanctions the
abuse of dominant market positions.4 Moreover,
2 OLG Hamm, 01 .07 2004, GRUR-RR 2005, 177-178
regarding the request to include an artwork into the Catalogue
Raisonné of Karl Hofer
3 TGI Nanterre, 24 05.201 3, 1 1/03520, Monte Carlo Art S A
/.Spies, de la Béraudièrc; TGI Paris, 16 09.1999, no 10459-98,
“Dumenil”, a case against inter alia the Wildenstcin Institute
4 Dr. Gràfin von Briihl referred to a parallel case in Germany,
where a dog breeding club issued pedigree certificates, men¬
tioned dogs in the pedigree book and thereby increased the
to establish a
guiding principle for diligent efforts
in the art market, Dr. Gràfin von Briihl referred
to the three D’s of the auction business; “Debt,
Death and Divorce” and put forward the three
T’s; “Teamwork, Transparency and Time”.
The second speaker, Prof. Dr. Winfried
Bullinger, Parmer at CMS Hasche Sigle and
Photographer in Berlin, discussed the copyright
aspect of restorations with a particular focus on
digital art. Eloquently, Prof. Bullinger illustrated
a series of fundamental copyright challenges
based on six examples from his professional
experience. The examples illustrated the tension
amongst the different players in relation to
an artwork. In terms of copyright law, Prof.
Bullinger emphasised the significance of the
artist’s rights, the necessity to include the artist
in any restoration endeavours and the copyright
problems following the death of the artist. His
hands-on guidance was mainly based on German
law, although he suggested that Swiss law has
a similar framework. Prof. Bullinger ended his
keynote by suggesting four strategies to avoid
or solve conflicts relating to restoration: (i)
contractual agreements between the owner of the
artwork and the artist with regard to restoration,
particularly whenever copyright issues may arise
with regard to the materials used by the artist;
(ii) contractual agreements to replace works or
to migrate media art in a legible form, in case
certain materials or the entire artwork is likely to
decay; (iii) backup copies for digital works; and
(iv) communication with and inclusion of the
artist in the restoration measures.
In between the legal speeches, Werner
Müller gave some insight into his daily work
as head of the restoration department at the
Kunstmuseum Basel. His keynote contained
practical examples and reflected on both the
collaborative approach regarding restorations
at the Kunstmuseum Basel as well as on the
inherent risks accompanying any restoration.
Mr Müller’s strategy to maintain the originality
dogs’ value. The competent court, the Kammergericht Berlin,
determined this club to be in a dominant market position, which
it shall not abuse (KG Berlin, 27.09 1 978, WuW/E, OLG 2028,
“Hundezuchtverein”)
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