THEMES : Arts, espace et temps / Arts, États et pouvoir

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THEMES : Arts, espace et temps / Arts, États et pouvoir
THEMES : Arts, espace et temps / Arts, États et pouvoir.
Problématiques : Quel regard porte l'artiste sur le premier conflit mondial ? Comment cette œuvre d'art estelle mise au service du 'devoir de mémoire' qu'élabore alors la société et l’État français pour les victimes de
la 1GM ?
IDENTIFICATION DE L’ŒUVRE :
Nom de l’artiste : sculpteur Paul ALBAN pour le groupe principal ; Paul THENISSEN pour les bas-reliefs.
Date : inauguré le 20 juin 1926.
Technique (matériau, support, forme…) : groupe sculpté en calcaire et bronze pour le monument aux morts
de Péronne.
Dimensions : l'ensemble du monument est remarquable par sa taille : 19 m
Lieu de conservation : Péronne
AUTEURS :
AUBAN Paul Ch. A.- Sculpteur. Né le 7 mars 1869 à Mirebeau sur Bèze (Côte d'Or) - Mort le 18 juillet 1945 à
Paris
Sculpteur, professeur à l'académie des beaux-arts de Paris, expose régulièrement au Salon des Artistes
Français. Médaille de 1re Classe en 1913, chevalier de la Légion d'honneur
Il a plusieurs œuvres importantes répertoriées comme la statue de Garibaldi, en bronze, inauguré en 1900 à
Dijon. Ce qui le fit connaître : groupes sculptés figurant des mères douloureuses = il remporte ainsi le
concours ouvert pour le mémorial de la bataille de la Somme élevé à Péronne.
La femme de pierre penchée sur un cadavre et qui tend son poing vengeur en direction d'invisibles ennemis
est le centre d'une composition monumentale, dont les bas-reliefs sont signés par Paul Theunissen en 1926.
Paul THENISSEN : 1873-1931.
Famille de sculpteurs. Concourt plusieurs fois au prix de Rome, lauréat de l'école de sculpture aux académies
de Valenciennes, Décoré de la Légion d'honneur en 1926 . Construit de nombreux monuments aux morts
dans le Nord et l'Est de la France (à Anzin, à Caudry...) : http://monumentsmorts.univlille3.fr/auteur/53/theunissenpaul/
Bas reliefs, le siège de la ville de Péronne et la Tranchée : https://inventaire.picardie.fr/dossier/ensemblede-deux-bas-reliefs-le-siege-de-peronne-en-1536-et-la-tranchee/81b665f5-a579-4bc3-a050-f71a4d5a87ea
Liste des morts inscrits sur le monument aux morts :
http://www.memorialgenweb.org/memorial3/html/fr/resultcommune.php?
insee=80620&dpt=80&idsource=11049&table=bp02
CONTEXTE HISTORIQUE :
8 millions de morts et 6 millions d’invalides en Europe, 20 millions de blessés... = bilan humain inouï, la
guerre a engendré un profond traumatisme. Les traces de guerre obsèdent les sociétés des années 19191939, qui cherchent à faire leur deuil (sentiment d'une génération sacrifiée). Traces nombreuses des
combats et des sacrifices humains et économiques : villes et campagnes dévastées dans les régions de
combats, veuves et orphelins de guerre, soldats mutilés revenus à la vie civile...
Comment se souvenir de ses morts ? = cérémonies commémoratives, défilés militaires, cimetières de guerre,
tombe du soldat inconnu, monuments aux morts interdisent l'oubli.
C’est l’ampleur de ce deuil qui a dicté une réponse monumentale :
–
En Australie, chaque localité possède un War Memorial.
–
En Italie, on accroche des plaques avec le nom des soldats morts sur les églises et les synagogues.
–
En Allemagne, de nombreux monuments sont construits dans les cimetières civils et militaires. Un
certain nombre de monuments avait déjà été érigé après la guerre de Sécession, les guerres
coloniales ou les guerres d’unification allemandes. Mais c’est à l’issue de la Grande Guerre qu’ils
deviennent universels, rappelant chez tous les anciens belligérants l’ampleur de cette tragédie.
–
En France, durant la guerre, les Français découvraient les noms des soldats morts au combat
sur une liste affichée sur la porte des mairies. Mais très vite, la population éprouva le besoin
d’inscrire tous ces noms dans la pierre et dans les années 20, la France se couvre de nombreux
monuments aux morts : plus de 30000 ont été érigés de 1920 à 1925, aujourd’hui, ce sont
95% des communes françaises qui en possèdent un.
= Il s’agit d’une volonté locale de rendre hommage aux disparus, d’un mouvement initié par le bas puisque
l’État ne participe que faiblement à leur financement : les communes acquièrent leur monument par
souscriptions (très peu de subventions de l'Etat). Les monuments sont choisis sur catalogue ou on fait appel
à des artistes de renom.
Les monuments aux morts rappellent ainsi aux vivants le souvenir des disparus. Ils s’inscrivent dans
l’espace public et permettent de faire le lien entre les champs de bataille et l’arrière. Ils sont le lieu
du regroupement commémoratif le jour du 11 novembre. Le mouvement qui les fait s’ériger en quelques
années est donc l’expression d’un sentiment unanime à la fois de reconnaissance, d’hommage et de dette : les
survivants seront toujours redevables aux morts d’avoir, par leur sacrifice, préservé leur liberté et leur
identité nationale.
Ce sont aussi des rappels du pacifisme qui se répandent dans toute l’Europe après les combats. Ne jamais
revoir un conflit aussi pénible est un sentiment partagé par la majeure partie des populations. Ça doit être la
« Der des Der ».
Plusieurs styles de monuments aux morts : civiques (exaltant les valeurs de la République), patriotiques
(exaltant le sacrifice des soldats, leur courage, et avec souvent bras vengeur contre l'Allemagne), funéraires
(exprimant souffrance et deuil) ou pacifiques (« Maudite soit la guerre »...).
LE MONUMENT AUX MORT DE PÉRONNE :
Localisation : dans l'espace public, près de l'ancienne gare, dans un ancien terrain militaire offert par l'armée
à cette occasion.
Description :
Un socle (dédicace : »A nos morts ») avec les dates des deux guerres mondiales (le nom des morts est
derrière, sur l'ensemble monumental derrière) porte un groupe sculpté : une femme, représentant la
Picardie où est située Péronne, tend le poing et est agenouillé devant le corps sans vie d'un soldat, son époux
ou son fils. Derrière on voit une colonne brisée.
Bas relief derrière : La tranchée (représente des Poilus dans une tranchée devant les ruines de Péronne) et le
Siège de Péronne en 1536 (résistance héroïque de la ville).
Analyse :
Cette femme a longtemps été présentée comme la Picardie maudissant la guerre, mais elle maudit plus
probablement l'Allemagne : elle crie vengeance pour la mort du soldat devant elle, et la colonne brisée
représente les destructions provoquées par la guerre et les Allemands.
Remarque : le mouvement de l'allégorie de la Picardie est le même que celui d'un autre groupe sculpté par
Paul Alban à Nantes (L'Epave : bras vengeur en direction de la mer).
Cette figure féminine est un classique : elle représente une mère ou une veuve douloureuse sur le modèle des
Pièta, tenant le mort dans ses bras et pleurant ses souffrances. Ce modèle est donc emprunté à l'origine à
l'iconographie religieuse. Elle est ici aussi une représentation des civils et de l'arrière qui ont soutenu l'effort
de guerre, et qui ont souffert également puisque beaucoup sont morts lors des bombardements.
Ici, pas d'exaltation de la patrie ou de l'héroïsme des combats. Le soldat représenté est avec son uniforme,
son équipement, mais il ne se tient pas debout fièrement, il est mort au combat et il gît au sol : image des
corps martyrisés des Poilus morts dans les tranchées et lors des assauts.
Œuvre de comparaison : un autre monument aux morts au choix des élèves (monument aux morts pacifiste
notamment comme celui de Gentioux dans la Creuse (un enfant debout devant une stèle et une dédicace :
« Maudite soit la guerre »).

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