Sainte-Anne-des-Plaines - Communauté métropolitaine de Montréal

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Sainte-Anne-des-Plaines - Communauté métropolitaine de Montréal
M001_OLEODUC_MRC De Thérèse-de Blainville et Ville Sainte-Anne-des-Plaines
" Le principe de précaution représente
une condition sine qua non d’une
saine gouvernance "
MÉMOIRE DE LA MRC DE THÉRÈSE-DE BLAINVILLE
ET DE LA VILLE DE SAINTE-ANNE-DES-PLAINES
présenté à
la Communauté métropolitaine de Montréal
au sujet du
Projet Oléoduc Énergie-Est
de TransCanada Pipelines
Présenté par
Guy Charbonneau
Maire
Le 3 septembre 2015
TABLE DES MATIÈRES
1. Mise en situation………………………………………...................page 2
2. Appréciation du risque…………………………………………………..page 3
3. Les contraintes réglementaires et d’aménagement……..page 4
4. Nos recommandations……………………………………………….….page 5
5. Conclusion………………………………………………………………………page 8
ANNEXE A……………………………………………………………………………page 9
ANNEXE B…………………………………………………………………………..page 10
ANNEXE C…………………………………………………………………………..page 11
1. Mise en situation
Le territoire de la Ville de Sainte-Anne-des-Plaines qui compose environ 48 % du territoire
de la MRC Thérèse-De Blainville est déjà traversé sur plus de 10 km par la ligne 9-B
d’Enbridge depuis environ 40 ans avec tous les risques associés. Il est raisonnable
d’estimer que ces risques pourraient s’amplifier surtout depuis qu’on veut en inverser le
flux en augmentant sa capacité de 25 % tout en changeant la composition du nouveau
pétrole qui y sera transporté.
Voilà maintenant que le projet Énergie-Est de TransCanada Pipelines veut également
utiliser notre territoire pour installer un nouvel oléoduc qui transportera 5 fois plus de
pétrole que celui d’Enbridge. Le projet s’étendrait également sur plus de 10 km de
longueur même si aucun tracé officiel n’a été déposé à ce jour auprès de l’Office national
de l’énergie (ONÉ).
Le projet présenté à date traverse 41 propriétés, principalement agricoles. D’abord
projeté en terrain cultivé, les représentants d’Énergie-Est proposent maintenant deux
tracés alternatifs en zone boisée. Mais voilà que cette zone boisée est constituée de
nombreux milieux humides qui servent à recharger l’aquifère dont dépend les quelque
16 000 habitants de Sainte-Anne-des-Plaines de même que la population carcérale de
l’Institut Archambault en plus du cheptel et des cultures sous irrigation.
Cette situation inquiète beaucoup les Anneplainois qui craignent pour la pérennité de leur
approvisionnement en eau de qualité, si bien qu’un climat de confrontation entre urbains
ruraux avait commencé à s’installer avant d’en arriver à notre proposition municipale qui
rallie presqu’à l’unanimité tous les citoyens.
Oh, bien sûr, les représentants d’Énergie-Est ont bien rencontré les autorités de la MRC et
de la Ville tout comme ils ont rencontré les propriétaires un à un et même les citoyens
"one on one" dans une présentation publique selon la bonne vieille méthode de Jules
César, diviser pour régner.
Nous déplorons cette situation et nous croyons qu’il serait beaucoup plus transparent et
plus avantageux pour toutes les parties de discuter du projet globalement afin d’en
apprécier tous les impacts et les alternatives possibles.
2. Appréciation du risque
La nature est ainsi faite que le risque zéro n’existe pas; il s’agit plutôt d’essayer de le
minimiser le plus possible. Ainsi, nous reconnaissons d’emblée que le transport du pétrole
par oléoduc constitue, dans l’état des connaissances actuelles, probablement le moyen le
moins dangereux à date.
Cependant, les populations qui sont exposées ont droit de s’exprimer sur les risques
encourus et ont droit à des réponses transparentes et précises à leur questionnement.
Le territoire de Sainte-Anne-des-Plaines est constitué de plus de 92 kilomètres carrés et
est agricole à plus de 90%. Nos sols sont considérés comme parmi les meilleurs du
Québec étant composés surtout d'argile Sainte-Rosalie et l'agriculture représente la
première industrie de notre communauté. Dans la plaine agricole, le sous-sol est
constitué d’argile sur environ 15 à 25 mètres d’épaisseur, ce qui représente une bonne
barrière contre la percolation jusqu’à l’aquifère.
Cependant, advenant un déversement en surface suite à un bris de conduite, il y a un
risque important pour nos puits et tout notre bassin versant car le relief de nos terres est
plat. Il serait très difficile d'empêcher que le pétrole ne se répande rapidement jusqu’à
nos nombreux fossés et cours d’eau. En somme, la protection de la ressource eau et sol
est d'une très grande préoccupation pour tous les citoyens.
D’autre part, Ressources naturelles Canada, dans le Bulletin 587 de la Commission
géologique du Canada datant de 2013, nous apprend que l’aquifère qui fournit l’eau à tout
Sainte-Anne-des-Plaines est un aquifère captif qui se recharge à partir des contreforts des
Laurentides, justement où l’on projette d’installer l’oléoduc d’Énergie-Est. Si jamais cet
aquifère venait à être contaminé, il faudrait installer des kilomètres de conduite pour aller
puiser dans la rivière des Mille-Îles ou ailleurs et desservir notre très vaste territoire. À
quel prix? Il est fort à parier que Sainte-Anne-des-Plaines deviendrait probablement un
autre Val-Jalbert.
Du côté sécuritaire, l’expérience avec l’oléoduc actuel sur notre territoire démontre que
les valves d’interruption sont beaucoup trop distantes en cas de déversement pouvant
laisser échapper de grandes quantités avant l’extinction complet du flux de pétrole.
Pour ce qui est des plans d’urgence, comme nos équipes d’intervention n’ont pas
l’expertise requise, les opérateurs de l’oléoduc doivent fournir la formation et le matériel
nécessaires en cas d’accident.
3. Les contraintes réglementaires et d’aménagement
La Ville de Sainte-Anne-des-Plaines ainsi que la MRC Thérèse-De Blainville font partie de
la CMM et sont régies par le Plan métropolitain d’aménagement et de développement
(PMAD). Le PMAD prévoit entre autres la protection des bois et corridors forestiers
métropolitains.
De plus, le Comité technique d’aménagement de la CMM sur le tracé du projet Énergie-Est
a recommandé de tenir compte de six critères pour établir le tracé :
 La sécurité de la population;
 Les enjeux de protection de l’environnement (boisés, milieux humides, cours d’eau,
etc.);
 Les impacts sur le déroulement des activités agricoles;
 La concentration des infrastructures dans des corridors déjà existants sur le
territoire;
 La protection des secteurs patrimoniaux, des sites historiques ou archéologiques;
 La protection des aires de vulnérabilité des aquifères.
En appui, il faut aussi tenir compte d’une politique de l’Union des producteurs agricoles
défendue depuis le milieu des années 70, qui demande de placer les différentes
infrastructures en parallèle dans des corridors prévus à cette fin lorsqu’elles traversent
des milieux agricoles.
D’autre part, la Ville de Sainte-Anne-des-Plaines a réglementé depuis 2011, en accord
avec sa population, la protection complète de la forêt du Trait-Carré où l’on ne peut y
pratiquer uniquement que des activités compatibles avec l’usage forestier.
Or, c’est justement dans cette forêt où Énergie-Est se propose d’installer son oléoduc,
dans une forêt protégée également par le PMAD, forêt où l’on retrouve des milieux
humides de grandes dimensions et où se recharge l’aquifère qui alimente toute la
population anneplainoise.
De plus, comme un oléoduc traverse déjà le territoire dans la même direction, il serait
logique et conséquent que les deux oléoducs se suivent en parallèle.
En somme, si nous suivons les recommandations du Comité technique d’aménagement de
la CMM, en les couplant aux réglementations de la CMM et de la Ville tout en tenant
compte de la politique de l’UPA sur les corridors d’infrastructures en milieu agricole, il
devient évident que la proposition actuelle d’Énergie-Est ne tient pas la route.
4. Nos recommandations
4.1 Le tracé
Le tracé actuel déposé par Énergie-Est, tant le tracé original que ses différentes
variantes, ne convient absolument pas ni aux recommandations du Comité
technique d’aménagement de la CMM, ni aux règlements de la CMM et de la Ville de
Sainte-Anne-des-Plaines, ni aux règlements du schéma d’aménagement de la MRC
ni même aux politiques de l’UPA en milieu agricole.
La proposition actuelle traverse d’abord la zone de recharge de l’aquifère pour toute
la population anneplainoise et son industrie agro-alimentaire. Ajoutons à cela que
de nombreux milieux humides de grande surface seront affectés tout comme le
paysage forestier qui subira une grande balafre sur plus de 10 kilomètres de long.
Par ailleurs, les représentants municipaux ont fait leurs devoirs en rencontrant les
propriétaires agricoles potentiellement affectés en regard du tracé que nous
proposons pour installer ce nouvel oléoduc (Voir Annexe A). Ainsi, au lieu de 41
propriétaires touchés par le projet déposé actuellement par Énergie-Est, moins de
15 seraient affectés par notre proposition. Également, notre proposition respecte la
politique des corridors de services de l’UPA et les recommandations du Comité
technique d’aménagement de la CMM en utilisant le même tracé que l’oléoduc
d’Enbridge. De plus, notre tracé proposé se retrouve en milieu argileux moins
risqué pour la contamination du sous-sol par percolation, sans oublier qu’il ne
traverse que des cours d’eau mineurs.
Le tracé que nous proposons se retrouve pour plus de trois kilomètres sur la
propriété de l’Institut Archambault, un établissement carcéral appartenant au
gouvernement du Canada, ce qui a moins d’impact en affectant moins de citoyens.
Les quelques propriétaires agriculteurs qui seront affectés (quelquefois les mêmes
qu’avec la proposition actuelle) sont en général plus enclins à accepter notre tracé
car il respecte le principe des corridors de services, principe qu’ils connaissent déjà.
De plus, on nous dit : «En avoir un ou en avoir deux, ce sont les mêmes
contraintes».
Nous recommandons donc de retenir le tracé en bleu montré à l’Annexe A jointe
au présent document afin de :
 Éviter la recharge de l’aquifère qui fournit toute la population anneplainoise et
même carcérale tout autant que notre agriculture;
 Protéger nos vastes milieux humides et nos forêts tout en respectant notre
réglementation d’aménagement et de nos paysages;
 Respecter le principe des corridors de services en milieu agricole;
 Éviter la confrontation entre les urbains et les ruraux du territoire;
 Respecter l’acceptabilité du projet par la population locale.
Nous fournissons aussi aux Annexes B et C une suggestion de tracé montrant sa
faisabilité à Terrebonne, à Mascouche et même à Repentigny.
4.2 Le modus operandi
Jusqu’à date, les représentants d’Énergie-Est ont présenté ouvertement leur projet
à différents groupes et nous les en félicitons. Cependant, ces rencontres se font
par petits groupes ou un à un. Nous souhaitons vivement que les discussions sur
l’éventuel tracé se fassent de manière globale afin d’arrimer les différents points de
vue.
Nous recommandons donc que les discussions pour établir le tracé définitif se
fassent en présence de toutes les personnes intéressées dans un territoire donné et
qu’ensuite, les discussions se poursuivent en présence de tous les représentants
des MRC de la Rive-Nord de Montréal.
4.3 La sécurité
La population de Sainte-Anne-des-Plaines et de toute la MRC assume une partie des
risques reliés à ce projet et est préoccupée par les mesures pour assurer le plus
possible la sécurité des personnes, de leurs biens et de leur environnement.
Ainsi, pour ce qui est des plans de mesures d’urgence, ils devraient être assumés
complètement par les opérateurs de l’oléoduc, incluant les formateurs et le temps
de nos équipes municipales tant pour la formation que pour les opérations ainsi que
les équipements requis.
Avec environ 10 km de conduite sur notre territoire, il est impératif d'installer une
valve de sectionnement ou d’interruption à Sainte-Anne-des-Plaines. De plus, il
faut s'assurer que la route la desservant soit accessible 12 mois par année, 24
heures par jour et qu'elle soit desservie par le réseau public d'électricité en plus
d’une génératrice d’urgence, installée idéalement près de la route 335 ou sur le
boulevard Gibson.
Finalement, le jour où le pipeline ne sera plus utile, que fera-t-on du tuyau enfoui
chez-nous? Qui décontaminera le sol? Qui paiera pour ce travail? Autant de
questions qui préoccupent nos citoyens.
Nous recommandons que l'opérateur du pipeline forme nos services municipaux
d'urgence et s'assure de la mise à jour des connaissances régulièrement, à chaque
année, en effectuant des simulations de déversement. L’opérateur doit aussi
assumer tous les coûts reliés à la formation tant pour les formateurs que le temps
de nos équipes municipales. Si des équipements spécifiques étaient requis, ils
seraient à la charge de l’opérateur tout comme les coûts occasionnés par des
opérations de nos équipes de mesures d’urgence.
Nous recommandons aussi qu’une valve pour stopper le flux du pétrole soit
installée à tous les 20 kilomètres maximum, de manière à minimiser la quantité de
pétrole qui pourrait se répandre en cas de déversement. Ces valves doivent être
accessibles de façon permanente en toute saison et reliées au réseau public
d’électricité et assistées d’une génératrice d’urgence. Nous souhaitons vivement
qu’une de ces valves soit située à Sainte-Anne-des-Plaines.
Nous recommandons enfin, qu’advenant l’abandon de la conduite, l’opérateur soit
responsable de retirer le tuyau du sol, de réhabiliter ce sol tout en assurant, le cas
échéant, sa décontamination. À cet effet, un montant de garantie ou bon de
garantie devrait être fourni à l’ONÉ ou au gouvernement pour assurer la remise en
état des lieux.
4.4 Les compensations financières
Comme déjà mentionné, la population de Sainte-Anne-des-Plaines est partie
prenante du projet puisqu'elle assume une partie des risques. Toute entreprise qui
prend un risque (comme Énergie-Est ou une compagnie d’assurance) s'attend à
retirer un bénéfice pour cette part de risque.
Par ailleurs, quand un pipeline occupe un espace du territoire municipal, on ne peut
plus construire de bâtiments sur cette partie de terrain. Or, comme la fiscalité
municipale est basée sur la taxation des immeubles, il en résulte un manque à
gagner pour les municipalités. L’actuelle méthode utilisée par les oléoducs pour le
paiement de taxes municipales déprécie drastiquement l’infrastructure sur quelques
années et est complètement contraire à la réalité terrain des autres immeubles du
territoire qui, eux, s’apprécient au fil des ans.
Pour la part de risques assumés par les Anneplainois, nous recommandons que
des redevances soient versées à la municipalité tout comme c'est le cas pour les
éoliennes, les tours de transmission des télécommunications et des sites
d'extraction de gaz ou de pétrole. Sinon, l’autre façon de compenser la Ville serait
de lui octroyer un montant forfaitaire unique et non récurent de 100 000 $ par
kilomètre de conduite utilisant son territoire. En effet, il en coûte beaucoup moins
cher pour installer ces conduites dans des terrains ouverts (agricoles) qu’en milieu
urbain. Ce montant ne représente qu’une fraction des coûts à encourir pour
traverser des milieux urbains. Par contre, pour les milieux ruraux, c’est souvent
une des rares manières de participer aux retombées économiques de cette activité
économique.
Nous recommandons également que l’évaluation foncière de la première année
demeure permanente tant et aussi longtemps que l’oléoduc restera en service et
que les taxes applicables soient payées en fonction des taux de chacune des villes.
5. CONCLUSION
Sans remettre en cause le transport du pétrole par oléoduc, car nous croyons qu’avec les
connaissances actuelles c’est probablement le moyen de transport le moins dangereux,
personne ne niera que le risque zéro n’existe pas. Il faut donc essayer de prévoir les pires
scénarios car l’histoire et l’actualité récente nous démontrent qu’ils se produisent de
temps à autre.
De plus, avec l’avènement des moyens modernes de communications, les autorités et les
promoteurs doivent désormais tenir compte de l’acceptabilité sociale dans la mise en
œuvre de tout projet. Aussi, comme la population de Sainte-Anne-des-Plaines est
composée d’environ 95 % d’urbains qui occupent 5 % du territoire avec les proportions
inverses pour les ruraux, les autorités doivent composer avec les deux groupes qui ont
des intérêts complètement divergents, voire opposés, en regard de ce projet d’oléoduc.
Le tracé proposé par les autorités municipales a su rallier les intérêts tant des urbains que
des ruraux de notre communauté. Aussi, serons-nous absolument intransigeants sur le
tracé que nous proposons.
En tant que maire et premier responsable en cas de catastrophe, il est de mon devoir de
m'assurer de la sécurité personnelle, physique et environnementale de tous les citoyens
anneplainois. Or, ce projet représente un risque potentiel pour la santé, l'économie et
l'environnement de notre territoire. En cas de déversement majeur, la qualité de notre
eau et l'économie de la ville seraient indéniablement compromises. Les coûts qu’il
faudrait assumer seraient astronomiques et impraticables.
Enfin, il est de mon rôle de maire de veiller à la sécurité financière de la ville que je
représente. L’utilisation de notre territoire par des infrastructures de transport d’énergie
pour des services bénéficiant surtout à des populations externes, et ce, sans véritable
compensation financière est inacceptable pour de simples raisons d’équité envers nos
citoyens. C’est pourquoi de nouvelles règles pour l’établissement des montants de taxes
ainsi que des redevances ou des montants forfaitaires doivent être consentis pour
compenser les risques assumés par nos citoyens.
Il nous fera toujours plaisir d’élaborer davantage les différentes avenues que nous avons
avancées dans ce mémoire.
Guy Charbonneau, maire
Ville de Sainte-Anne-des-Plaines
450-478-0211
ANNEXE A
Tracé proposé à Sainte-Anne-des-Plaines
En jaune ___, le tracé actuel d’Enbridge
En vert ___, le tracé approx. proposé par Énergie-Est
En bleu ____, notre proposition de tracé pour Énergie-Est
ANNEXE B
Tracé proposé à Terrebonne
ANNEXE C
Tracé proposé à Mascouche et partie Repentigny

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