Les ombres de Simenon à l`heure du Dr House. Signé Pierre Godeau
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Les ombres de Simenon à l`heure du Dr House. Signé Pierre Godeau
actualité, info en marge Changement de cap sur la fumée. Avec à la barre le conseiller fédéral en charge de la Santé, Alain Berset, une toute nouvelle loi sur les produits du tabac a été mise en consultation hier. Elle vise à mieux protéger la jeunesse contre le tabagisme, responsable de 9000 décès prématurés chaque année en Suisse. «57% des fumeurs ont commencé avant 18 ans», a indiqué hier Alain Berset. Son remède? L’interdiction de la publicité pour le tabac doit devenir quasi générale et les règles devraient être uniformisées au niveau suisse. Le second axe de la loi vise à combler une lacune. L’e-cigarette ou vaporisateur personnel fait son entrée dans la catégorie des produits du tabac. Véritable phénomène de mode en Suisse romande, cet appareil controversé se compose d’une batterie et d’un réservoir qui se remplit avec des liquides nicotinés ou non. Aujourd’hui, la vente de fioles avec nicotine est interdite en Suisse. Elle devrait être autorisée, selon le projet du gouvernement. (…) Le Conseil fédéral semble avoir fait sien le rapport de quarante experts suisses rendu public en mars. Si la finalité de l’e-cigarette divise les spécialistes et les jeunes — moyen de sevrage ou marchepied vers la cigarette traditionnelle ? —, le cons tat sur sa dangerosité est plus clair. Le Conseil fédéral le dit dans son rapport : «Les cigarettes électroni ques contenant de la nicotine sont moins nocives que les cigarettes traditionnelles.» Du coup, la libéralisation proposée suscite un consensus quasi général. Même les organes de prévention mes applaudissent. «Nous y som clairement favorables. Nous nous ali gnons derrière le groupe d’experts qui a rendu son rapport ce printemps. C’est une vraie piste d’avenir pour les fumeurs à mon avis. En revanche, il faut protéger les mineurs de ces produits», réagit Grégoire Vittoz, porte-parole de la Ligue pulmonaire suisse. Une telle protection est prévue. La cigarette électronique sera en effet soumise aux mêmes restrictions que sa cousine tradition nelle. Le vapotage dans les lieux publics sera aussi interdit. (…) Pour autant, la nouvelle loi ne prévoit pas de faire de l’e-cigarette un outil de réduction des risques pour les fumeurs traditionnels. (…) Exit a déclenché un nouveau débat en Suisse alémanique : l’organisation d’aide au suicide veut ajouter quel ques mots dans ses statuts, mais cela n’a pas manqué de défrayer la chronique. L’organisation souhaite «s’engager en faveur de la liberté de mourir liée à l’âge». (…) Le but du changement est, d’abord, de susciter un débat public. Dans les faits, «nous souhaitons améliorer le contrôle auquel les personnes doivent se soumettre pour que le médecin signe l’ordonnance pour la substance létale», précise Bernhard Sutter. «Or un nonagénaire n’a pas la même sensibilité qu’un quadragénaire face à un examen en profondeur. Il y a bien des cas où le médecin ne devrait pas refaire tous les examens physiologiques déjà subis par la personne pour comprendre la volonté du patient.» Ce cas de figure est celui qui a mené un médecin neuchâtelois à devoir répondre en justice. Le Tribunal cantonal l’a acquitté fin avril. Le président d’Exit Suisse romande Jérôme Sobel précise que son organisation a également complété son règlement sur les conditions donnant droit à solliciter un suicide assisté, y ajoutant les «polypathologies inva lidantes liées à l’âge». Pour les deux organisations, le critère de «stade terminal d’une maladie» ou de «fin de vie» est trop strict pour répondre aux besoins de la société actuelle, et pour soulager des souffrances parfois énormes provoquées par des maladies chroniques pas forcément mortelles. Pour le président de la Fédération des médecins suisses (FMH), Jürg Schlup, c’est là que le bât blesse. «Des personnes âgées peuvent être fatiguées de vivre, explique-t-il, mais quand on leur propose d’autres options, telles que soins palliatifs, augmentation des soins ou nouvelle prise en charge, par exemple, il arrive bien souvent que l’idée du suicide disparaisse.» (…) «Nous pourrons vivre avec cette modification des statuts d’Exit, mais nous ne la soutenons pas», commente Jürg Schlup. De part et d’autre, on attend avec impatience les ré sultats d’une enquête de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM) auprès d’environ 5000 médecins à propos de suicide médicalement assisté. Ils sont annoncés pour cet automne. Lise Bailat Ariane Gigon La Tribune de Genève du 22 mai 2014 Le Courrier du 22 mai 2014 1222 62_63.indd 1 Les ombres de Simenon à l’heure du Dr House. Signé Pierre Godeau On ne présente plus le Pr Pierre Godeau, monument de la médecine interne française. Combien sommes-nous à conserver «le Godeau» sur notre bureau ? Trois décennies de référence et près de quatre mille pages dans la dernière édition de l’antique maison Flammarion. La lourde trace d’une époque médicale qui n’a en rien disparu. Bien au contraire. L’édition s’est numérisée tandis que la médecine interne se complexifiait. Tout cela aurait pu rester dans l’ombre. C’était compter sans le génie télévisé du Dr House. La célèbre série américaine a fait la promotion des internistes sans galvauder leur rôle. Mieux, le Dr Gregory House en a rehaussé le talent, magnifié l’aura. Héritier du Holmes de Doyle il a, sur écran, renoué les fils de l’intrigue écrite. Claudicant et drogué, errant lui aussi aux frontières de l’homosexualité, le Dr House a peut-être même suscité quelques vocations. C’est au même grand écart que nous invite aujourd’hui le Pr Godeau. L’affaire a pris la forme d’un petit livre. Hier, des milliers de pages papier bible du «Godeau» de chez Flammarion. Aujourd’hui 175 seulement, avec gros corps des éditions Fiacre.1 Un format et un titre que l’on retrouvera dans les gares. Non loin des Simenon, ceux du grand Georges auquel la «Rue du Pas-de-la-Mule» est offert, in memoriam. Pierre Godeau, un polar ? Inquiet, nous entrons dans ces pages ouvertes sur l’amour, la haine, la mort. Et nous revient la mémoire d’une rencontre organisée en 2005. C’était pour Le Monde. Hôpital de la Pitié, secteur pavillonnaire, les ombres ou les mânes de Charcot, Freud et Babinski. Pierre Godeau recevait avec chaleur et simplicité dans un bureau d’où le XIXe siècle n’avait pas encore totalement disparu ; un espace débordant de livres et de savoir humaniste. Un antre dont son élève et successeur, JeanCharles Piette, lui avait alors élégamment laissé l’usufruit. Rencontrer Pierre Godeau, c’est croiser l’élégance. Officiellement à la retraite de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris mais toujours présent, bénévolement, dans ce service qu’il a bâti, Pierre Godeau surveillait alors la sortie de la quatrième édition de cette somme collective à laquelle il avait laissé son nom. Son «Traité de médecine». Médecine interne ? Il aurait préféré «médecine globale». «On pourrait définir l’interniste comme un décathlonien de la médecine, confiait celui qui ne cache pas la passion qu’il a toujours nourrie pour le cyclisme, le ski et la natation. De la même manière que le décathlonien ne s’engage pas dans toutes les épreuves d’une compétition d’athlétisme, nous n’avons pas la prétention de tout connaître. Mais, comme lui, nous cherchons à avoir un niveau le plus correct et le plus large possible.» L’ambition affichée de ces spécialistes hors des normes a, selon lui, été largement caricaturée : on les réduit souvent à de pures figures intellectuelles, des Pic de La Mirandole de la médecine. «Disons D.R. La nicotine sera autorisée dans les vapoteuses Exit veut faciliter le suicide lié à des souffrances non mortelles D.R. revue de presse Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 28 mai 2014 26.05.14 10:59 Jeudi 5 juin 2014 Signal de Bougy 13 h 30 Visite des stands d’exposition Modérateur : L. P. Nicod 14 h 00 Traitements des apnées du sommeil : nouveautés, R. Heinzer 14 h 30 BPCO avancée : place de l’oxygénothérapie et de la ventilation non invasive, C. Uldry 15 h 00 Physiothérapie ambulatoire et à domicile, A. Larcinese Jean-Yves Nau [email protected] 1 Godeau P. Rue du Pas-de-la-Mule. L’amour, la haine, la mort. Paris : Editions Fiacre, 2014. Institut de droit de la santé Modérateur : B. Egger 16 h 00 Insuffisance cardiaque et troubles respiratoires associés, J. L. Pépin 16 h 30 Insuffisance respiratoire d’origine neuromusculaire : particu larités et défis, J. P. Janssens 17 h 00 Insuffisants respiratoires : un avenir à domicile ? G. NicoletChâtelain 17 h 30Conclusion, L. P. Nicod formation continue en cours d’emploi Renseignements : Service de pneumologie CHUV – 1011 Lausanne [email protected] Fax : 021 314 13 84 Information www.unine.ch/mas-droit-de-la-sante Innovation, recherche et produits thérapeutiques (mars-juin 2014) * Droits fondamentaux et santé publique (septembre 2014-janvier 2015) Droit des assurances sociales, travail et santé (mars-juin 2015) Direction Prof. O. Guillod et Prof. D. Sprumont Des cours individuels peuvent également être suivis www2.unine.ch/mas-droit-de-la-sante/page-4089.html * Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 28 mai 2014 annonce_1007088.indd 1 62_63.indd 2 1007088 22e rencontres vaudoises de pneumologie On n’oubliera pas non plus (à côté du «Godeau») la vie, les amours, les haines et la mort de Léon Dubois, ce chirurgien-dentiste qui n’avait pas fait médecine. Non par manque d’intelligence mais, plus simplement, à cause du corps des femmes. Master, diplôme ou certificat en droit de la santé (MAS, DAS, CAS) agenda Prise en charge à domicile des insuffisants respiratoires du milieu du XXe. Mais aussi la sexualité éternelle, la folie destructrice d’un couple, le sordide de la bourgeoisie, l’entrée dans l’alcoolisme et les joies de l’arsenic. Certains y retrouveront les ivresses des salles de garde, la solitude de l’adolescence, la beauté angoissante de la médecine débutante. D’autres chercheront où est ici Pierre Godeau. Léon Dubois, ce chirurgien-dentiste ? Les médecins et autres professeurs qui le prennent en charge avant et après l’infarctus inaugural ? Et qui sont ces femmes, de mauvaise vie ou pas, qui hantent ce Dubois ? Pourquoi cette mère boulangère et nymphomane – ou presque ? Les réponses importent peu. La tragédie livrée est éternelle comme le sont les plus belles de celles brossées par Georges Simenon ou Frédéric Dard. On y découvre ce qui se trame dans cette rue du Pasde-la-Mule, elle qui commence boulevard de Beaumarchais avant d’en finir Place des Vosges. Le visiteur remarquera, au numéro 3, une maison ancienne. On trouvait là, vers le milieu du XVIIe, un cabaret célèbre, à l’enseigne de La Fosse-aux-Lions. Y buvait, entre autres poètes, Tallemant des Réaux (1619-1692), écrivain, gazetier et poète. On se souvient de lui pour ses Historiettes, recueil de courtes biographies de ses contemporains. D.R. n’avoir jamais voulu reproduire le modèle du mandarin. Sans nier l’absolue nécessité d’une autorité certaine – il ne manque pas de rendre hommage à ses deux maîtres que furent le cardiologue Yves Bouverain et le gastroenté rologue Marcel Cachin –, Pierre Godeau jugeait que la médecine interne impose avant tout, à l’image des sports collectifs, le travail en équipe. Politiquement parlant, ce médecin ne cachait pas ne pas partager les grandes idées de la gauche. Sans colère ni rancune, mais avec con viction, il dénonçait les erreurs ou les illusions que sont, selon lui, le droit à l’accès au dossier médical ou la … , il dénonçait les erreurs ou les transparence de la relaillusions que sont le droit à l’accès tion nouée entre le au dossier médical ou la transpa- médecin et le malade relation dont rence de la relation nouée entre le –oncette voudrait croire médecin et le malade … qu’elle pourrait finalement être une relation mesure du chemin parcouru. Sans marchande parmi tant d’autres. Il nostalgie. «Rétrospectivement, je ne craignait pas, non plus, de tremble à l’idée des responsabilités dénoncer cette lourde tendance que l’on confiait aux jeunes inqui corsette la pratique médicale au moyen de statistiques, de réternes des hôpitaux qui, à deux, dans les années 1950, pouvaient glementations et d’études contrôavoir la charge d’une centaine de lées. «On voudrait nous faire malades», confiait-il. croire que la qualité d’un concert Il gardait aussi intact le souvenir de p iano tient à la qualité de l’insde ce que pouvaient être les protrument, concluait-il. Selon moi, ce qui compte avant tout, et ce fondes injustices d’un système qui comptera toujours, c’est la hautement féodal où certaines qualité du pianiste.» «protections» facilitaient grandeNeuf ans plus tard, le pianiste est ment la carrière hospitalière, l’exercice du pouvoir et les revenus de retour. Et c’est une étrange qui s’y attachent. Et peut-être est-ce musique que nous livre l’artiste. Un concert a minima dont on ne pour en avoir souffert que ce fils sort pas indemne. Des échos de la de chirurgien-dentiste, spécialisé fin du XIXe, un Paris en noir et dans la prise en charge des «gueules cassées», affirmait blanc, la respectabilité médicale plus simplement que, sans nous disperser, nous cherchons à garder le contact et à avoir une vue pano ramique des choses, résumait-il. C’est peut-être, si l’on veut, une définition de l’intellectuel, mais pour ce qui nous concerne nous sommes aussi des praticiens. Quant à devenir un Pic de La Mirandole, il y a bien longtemps que ce n’est plus possible. Janvier 2005. A près de 75 ans, Pierre Godeau s’apprêtait à participer à la rédaction d’un Livre blanc et au mouvement de révolte, alors en germe, chez les 1500 «internistes» français. C’était pour lui l’occasion de prendre la 1223 14.05.14 15:08 26.05.14 10:59