des sous-sols encore trop souvent humides
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des sous-sols encore trop souvent humides
PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE Photo Patrick Beaunier/Socabat Utilisation inappropriée d’une nappe à excroissances et problématique du raccordement du saut-de-loup. MURS ENTERRÉS DES SOUS-SOLS ENCORE TROP SOUVENT HUMIDES Même si quelques progrès sont enregistrés ces dernières années, trop de sous-sols subissent encore des infiltrations d’eau aux effets plus ou moins dommageables et coûteux. Les moyens de prévention – notamment, dans bon nombre de cas, un drainage correctement conçu, réalisé et entretenu – sont connus de longue date mais loin d’être intégrés de façon systématique dans la démarche constructive. TEXTE : FRANCK GAUTHIER PHOTOS & ILLUSTRATIONS : AQC, PATRICK BEAUNIER/SOCABAT 50 QUALITÉ CONSTRUCTION • N° 139 • JUILLET / AOÛT 2013 “Faire réaliser une étude de sol, au préalable, pour déterminer sa nature et évaluer le mode de circulation des eaux, ne suffit pas toujours. Il faut aussi très clairement définir avec le maître d’ouvrage l’usage final des locaux enterrés” atrick Beaunier, expert Socabat, souligne «qu’au niveau des infiltrations d’eau dans les sous-sols, nous observons une évolution plutôt favorable par rapport au passé. Les tentatives d’imperméabilisation des murs enterrés, en appliquant une simple émulsion bitumineuse sur la face extérieure des parpaings, tendent à être abandonnées par les Constructeurs de maisons individuelles (CMI) et les maçons. C’est une bonne chose qu’ils renoncent à cette technique car elle est très rarement efficace. Maintenant, ils utilisent de plus en plus des enduits à base de mortiers industriels formulés spécifiquement pour cet usage qui, eux, donnent pleine satisfaction. À condition, bien sûr, d’être appliqués correctement: épaisseur adéquate, mise en œuvre de deux couches, etc.» En revanche, il existe encore trop souvent des tentatives de réalisation d’étanchéité de murs de soubassement à l’aide de seules nappes à excroissances. «Mais comme il est impossible de faire tout le tour de la maison avec une seule feuille, il y aura toujours des discontinuités. Et, en plus, l’eau peut contourner ces nappes puisqu’à leur périphérie rien ne permet d’assurer une étanchéité. Résultat: l’eau contourne la nappe et s’infiltre entre elle et le mur. Facteur aggravant, dans bon nombre de cas, cette eau descend au pied du mur de maçonnerie. Si elle s’y accumule en quantité suffisante, elle finit par passer sous la semelle de fondation pour ressortir en périphérie P POUR EN SAVOIR PLUS TEXTES DE RÉFÉRENCE • NF DTU 20.1 Ouvrages en maçonnerie de petits éléments (octobre 2008) + amendements de juillet 2012. • P11-221 (DTU 14.1) Travaux de cuvelage (mai 2000). • Recommandations professionnelles de la CSFE Isolation thermique par l’extérieur des parois enterrées avec revêtement d’étanchéité, disponibles sur www.etancheite.com (voir aussi l’article paru dans le n° 129 de Qualité Construction [novembre/ décembre 2011, page 48]). DOCUMENTATIONS • Plaquettes publiées par l’AQC: Humidité en sous-sol enterré… et pièces habitable, Cuvelage par imperméabilisation, Murs de soutènement, téléchargeables sur www.qualiteconstruction.com. • Document publié par l’Association des nappes à excroissances pour parois enterrées : Les nappes à excroissances de parois enterrées – Fonctions et caractéristiques, disponible sur www.anepe.asso.fr. du dallage du sous-sol», signale Patrick Beaunier. Sans parler du problème des sauts-de-loup (1) et cours anglaises: l’eau s’y accumule et, faute d’exutoire efficace, déborde dans le sous-sol en passant par les menuiseries. De plus, la jonction des sautsde-loup et cours anglaises avec les nappes à excroissances est très problématique. Ne pas confondre imperméabilité et étanchéité Faire réaliser une étude de sol, au préalable, pour déterminer sa nature et évaluer le mode de circulation des eaux, ne suffit pas toujours. Il faut aussi très clairement définir avec le maître d’ouvrage l’usage final des locaux enterrés: parking, cave de stockage, salle d’eau, local habitable… « Cela permettra de savoir si le revêtement des murs périphériques enterrés devra être simplement imperméable ou bien étanche, s’il faudra prévoir un drainage périphérique, un cuvelage, etc. », souligne Patrick Beaunier. Ainsi, pour des locaux non habitables (1) Un saut-de-loup est généralement constitué par une coque en polyester disposée devant une fenêtre sous le niveau du sol pour éclairer naturellement un sous-sol. Des infiltrations peuvent également se produire au niveau des fenêtres de cours anglaises réalisées en maçonnerie. JUILLET/AOÛT 2013 • N° 139 • QUALITÉ CONSTRUCTION 51 PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE Un drainage aussi pour les murs de soutènement Qu’ils soient préfabriqués ou non, des murs de soutènement correctement dimensionnés et réalisés sont stables mécaniquement: pas de basculement, ni de glissement, avec la présence par exemple de bêches. Cependant, face à une forte pluie d’orage ou suite à une période pluvieuse prolongée, ils peuvent présenter des désordres pouvant aller jusqu’à la rupture. «C’est la pression supplémentaire importante provenant de l’eau qui s’accumule sur le mur qui provoque ces phénomènes. Tout cela peut être évité en assurant une évacuation rapide de cette eau grâce à des barbacanes au travers du mur et un drainage en pied de mur», explique Wilfried Pillard, directeur technique de l’Union de la maçonnerie et du gros œuvre (UMGO-FFB). “Dans certaines régions de France, comme notamment la Picardie, les constructeurs de maisons individuelles prévoient assez souvent un drainage en périphérie. Mais certains d’entre eux ont pris la mauvaise habitude de laisser sa réalisation à la charge du maître d’ouvrage” (garage, chaufferie, certaines caves…) dans lesquels des infiltrations limitées (en volume et dans le temps) sont tolérables par le maître d’ouvrage, il s’agira de murs de catégorie 2, au sens de la norme NF DTU 20.1 Ouvrages en maçonnerie de petits éléments. Selon la nature du sol et l’environnement de la construction, les murs de soubassement devront bénéficier d’un revêtement d’imperméabilisation (mortier hydrofuge, produits noirs de fondation) et éventuellement d’un drainage (nappe à excroissances à géotextile intégré contre les parois enterrées et drains en partie basse). Si aucune trace d’humidité n’est acceptée sur la face intérieure des murs de soubassement, il s’agit alors de murs de catégorie 1. Face à de faibles sollicitations à l’eau, leur étanchéité doit alors être assurée par des membranes soudées ou autoadhésives, par exemple, et une nappe à excroissances de protection mécanique. Sinon, l’étanchéité devra être complétée par un drainage: nappe à excroissances à géotextile intégré à double fonction (protection et drainage vertical) et drains en partie basse. Rappelons que le complexe d’étanchéité vertical se pose sur un enduit ciment réalisé sur toute la surface à étancher. La tête du complexe d’étanchéité doit comporter une bande d’arrêt d’étanchéité. Conformément à son Avis Technique, la nappe à excroissances doit être fixée en tête. En présence d’une nappe phréatique susceptible d’affecter le sous-sol, il faut alors réaliser un cuvelage. «Cela impose la réalisation de parois périphériques en béton armé en parfaite continuité avec le dallage inférieur. Un cuvelage est l’équivalent d’une coque de bateau», précise Patrick Beaunier. Un drainage bien conçu… et réalisé « Dans certaines régions de France, comme notamment la Picardie, les constructeurs de maisons individuelles prévoient assez souvent un drainage en périphérie. Mais certains d’entre eux ont pris la mauvaise habitude de laisser sa réalisation à la charge du Photos Patrick Beaunier/Socabat 52 1 3 2 4 QUALITÉ CONSTRUCTION • N° 139 • JUILLET / AOÛT 2013 maître d’ouvrage», signale Patrick Beaunier. Or le maître d’ouvrage est un particulier, donc par définition pas un professionnel à même d’évaluer l’impact de ses choix. Pour lui, la tentation est grande de s’affranchir de cette contrainte coûteuse afin de réaliser quelques économies, ou de le réaliser lui-même, de manière approximative donc insuffisante. «Et, dans ce cas, le CMIste ne s’assure jamais de la bonne réalisation de ce drainage avant la réception de la construction de la maison… Erreur fatale, car s’il se produit des infiltrations d’eau, sa responsabilité sera très probablement recherchée, ne serait-ce que dans un premier temps», commente Patrick Beaunier. D’une manière générale, il faudrait de toute façon accorder bien plus d’attention au système de drainage. De trop nombreuses erreurs sont encore rencontrées en expertise: mauvais raccordement du drainage vertical avec les drains, emploi de drains de type agricole (perforés de tous les côtés) à la place de drains conçus pour le bâtiment (perforés uniquement sur le dessus), absence de feutre géotextile (ou équivalent) empêchant le colmatage du système de drainage par entraînement des particules de terre, pente insuffisante des drains, absence de regards de visite aux changements de direction des drains rendant impossible une intervention en cas de colmatage, exutoire absent ou insuffisant pour évacuer correctement l’eau recueillie par les drains… Dans tous ces cas de figure, l’eau s’accumule contre la face externe des murs de soubassement et finit par pénétrer dans le soussol de la maison. Pourtant, tous ces aspects sont évoqués dans l’annexe A du NF DTU 20.1 partie 4 «Conception des ouvrages annexes associés aux maçonneries enterrées: regards d’eaux pluviales et réseaux de drainage». Attention aux nouvelles pathologies ! Une nouvelle tendance se développe en Picardie: le sous-sol se poursuit au-delà de l’emprise de la maison puis est recouvert d’une grande terrasse carrelée, dans le prolongement du rez-de-chaussée. Une approche certes séduisante, mais comme il n’y a souvent aucun revêtement d’étanchéité sous le carrelage de cette terrasse, ni même d’imperméabilité d’ailleurs, d’inévitables infiltrations d’eau se produisent dans le sous-sol… «C’est pourtant assez simple de prévoir et de mettre en œuvre une étanchéité liquide, une membrane d’étanchéité, etc., avant de poser le carrelage!», commente Patrick Beaunier. Pour autant, cela ne suffit pas toujours: lorsqu’une membrane d’étanchéité est mise en œuvre, il manque trop souvent un relevé d’étanchéité contre la façade de la maison, ce qui fait que l’eau finit par pénétrer au niveau de la jonction terrasse/façade. Un phénomène sérieusement aggravé lorsque la terrasse a mal été réalisée et qu’une contre-pente ramène l’eau contre la façade au lieu de favoriser son évacuation vers l’extérieur. «Il commence heureusement à y avoir une petite prise de conscience de la part des constructeurs, mais il reste encore un nombre relativement important de dossiers à traiter qui révèlent souvent les mêmes erreurs », ajoute Patrick Beaunier. ■ Photos Patrick Beaunier/Socabat 1 Émulsion bitumineuse appliquée directement sur parpaings (incorrect). 2 Enduit d’imperméabilisation mince appliqué à la brosse en une seule couche (incorrect). 3 Inondation par remontée de nappe phréatique. 4 Infiltration par saut-de-loup. 5 Infiltration à travers le mur. 6 Infiltration sous une terrasse carrelée (sans interposition d’un revêtement d’étanchéité) en prolongement du rez-de-chaussée. Photos Moeding 5 7 Étanchéité sur terrasse, mais sans relevé d’étanchéité au droit de la porte-fenêtre (incorrect). 6 7 JUILLET/AOÛT 2013 • N° 139 • QUALITÉ CONSTRUCTION 53