Predication du 27 juillet 2014-Matthieu 1344-52

Transcription

Predication du 27 juillet 2014-Matthieu 1344-52
Prédication du 27 Juillet 2014 par Michel Caldier
Matthieu 13, 44-52.
Le trésor, la perle, le filet et le scribe pourrait très bien être le titre d'une fable populaire.
Le trésor est découvert...
La perle est trouvée...
Le filet est jeté...
Le scribe est digne d'éloge.
Là est la parabole.
Le trésor, la perle et le filet sont saisis dans des actes humains.
Nous sommes entrés de plain-pied dans le monde des comparaisons.
Le royaume des cieux est maintenant comparable à un trésor, à un marchand de perles, à un filet.
Auparavant, il était comparable à un grain de moutarde, à un semeur sorti pour semer, à du levain.
Le royaume des cieux n’est jamais comparé à un lieu géographique ou à un système doctrinal, voire
théologique.
A peine nous croyons l’avoir saisi que déjà il est ailleurs, différent, déroutant…
Les trois petites paraboles ainsi que l'éloge du scribe ont donc en commun le thème du Royaume des
Cieux.
Le débat central de notre passage, c'est le Royaume des Cieux.
C'est là qu'est la référence : "Le Royaume des Cieux est semblable...".
Les paraboles du trésor et de la perle ont la même structure et malgré quelques différences, elles
disent la même chose.
Dans les deux cas, une chose jugée de très grande valeur par celui qui la découvre ou la cherche est
trouvée.
Et au vu de cette trouvaille, tout est vendu pour acquérir cette chose.
La parabole du filet s'inscrit dans une autre structure : on ramène tout ce qui est dans le filet, puis on
trie...
Quant au scribe : devenu disciple, il tire de son bien du neuf et de l'ancien.
Disons pour simplifier que ces éléments sont les trois aspects d'un même choix qui est celui de l'acte
de foi du chrétien.
La parabole de la perle et du trésor mettent le désir à la base de l'acte de foi.
Voilà qui peut surprendre : le Royaume de Dieu est un royaume de désir...
Je n'ai pas dit un royaume de caprice.
Le Royaume de Dieu ne peut être trouvé que par ceux qui le désirent.
Car le Dieu de Jésus-Christ est un Dieu de désir.
Et là encore seuls ceux qui en ont le désir pourront le découvrir.
Le Dieu de Jésus-Christ n'est pas un Dieu de peur, mais un Dieu de risque.
Le mouvement de la peur voudrait que celui qui a trouvé un trésor ou une perle rebouche le trou, se
taise et s'en aille sur la pointe des pieds : pour ne pas avoir d'histoire!...
Je vous renvoie à la parabole des Talents et à ce serviteur qui cache ce que lui a donné son maître,
mais aussi à notre vie de tous les jours, car nous sommes très forts, quand nous pensons que notre
petite tranquillité est menacée, pour ne pas voir, pour ne pas entendre les autres.
C'est vrai que nous vivons plus poussés par la peur que par le désir.
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Dans notre texte, le découvreur et le marchand vont jusqu'au bout du risque.
Dans le feu de sa joie, cet homme s’en va et vend tous ses biens pour s’acheter ce champ.
L’amour de Dieu pour nous est une grâce inattendue.
Il nous saisit comme « un coup de foudre ». Il nous gagne.
C’est un bonheur qui donne goût et sens à notre vie et nous transforme de manière radicale.
Dans son émerveillement, ce marchand se dépouille de tout, lui aussi, pour s’acheter sa découverte.
Mon père nous disait souvent au catéchisme : « Tu n’adoreras pas ton Dieu en dormant toute la
journée.
Avec lui, il te faut constamment bouger, créer de nouveaux chemins, chercher de nouvelles
possibilités, percer d’autres horizons…
Avec lui, chaque matin, tu auras toujours faim, faim de son amour, faim de lui et des autres ».
Le choix pour le Christ est un choix basé sur un désir et un risque.
Mais il est aussi basé sur une promesse.
Le trésor caché et la perle sont prometteurs d'avenir...
Le Royaume est une présence divine amoureuse et généreuse qui surgit dans notre histoire pour nous
combler de sa présence et emplir nos vies.
Héritiers de la vie nouvelle, nous voici merveilleusement « condamnés », vous et moi, à marcher
chaque jour, à progresser infiniment, à renaître à chaque instant.
Car là où est le mouvement, là seul est la Vie.
Soyons clair, il ne s'agit pour cet homme et ce marchand d'acheter le Royaume.
D'autres paraboles montrent qu'il n'est pas à notre portée, que rien ne peut l'acheter, car il est sans
prix.
S'il faut "acheter" le champ contenant le trésor ou la perle en vendant tout ce que l'on a, s'il faut passer
par un marché, c'est, pour le dire autrement, passer par un risque.
Oui, il faut "tout vendre" pour "acheter".
C'est une opération où nous risquons de tout perdre ou de tout gagner.
Le fait de tout vendre introduit un autre aspect du choix chrétien.
C'est que ce choix concerne "tout l'homme" et "le tout" de l'homme.
Ce n'est pas un à-côté.
C'est le "tout de Dieu" et le "tout de l'homme" qui sont en cause.
Quand Dieu vient à nous, il n'en garde jamais sous le coude...
Quand Dieu envoie son fils partager notre vie, il ne le fait pas à moitié.
La parabole du filet introduit la décision dans le choix chrétien.
Car l'acte de foi, et cela peut surprendre, est un acte de jugement.
Dieu est un pêcheur au grand cœur.
Il ramasse toutes sortes de poissons avec son grand filet qui ratisse bien large.
Il prend tout, il accueille tout.
Mais quand il ramène son filet, il n'attend pas des jours, des mois pour faire le tri.
Il le fait tout de suite afin de ne pas perdre ce qui est bon et mangeable.
Le tri est fait et l’on rejette ce qui ne vaut rien.
Oui, loin de rejeter le jugement à la fin du monde, la parabole place celui-ci aujourd'hui, dans
l'immédiat, dans notre présent : c'est aujourd'hui que l'acte de foi nous fait décider et choisir.
Comme nous le rappelle l'Evangile, il y a urgence à se décider, urgence à choisir.
Et avec l'urgence, avec le choix, il y a aussi le jugement.
Le désir de la perle ou du trésor n'est pas un caprice, ce n'est pas non plus seulement un mouvement
de la spontanéité, c'est avant tout le désir de la volonté.
Le risque de la foi est un risque voulu, calculé et choisi.
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Cela ne sert à rien d’avoir été baptisé, si nous n’avons pas changé de vie.
En Christ se marient
la largesse de cœur et l’exigence de vérité,
la patience divine et l’urgence de la conversion.
Ou nous sommes chrétiens en vérité, dans notre cœur et dans notre vie,
ou nous ne le sommes pas du tout.
Personne n’a été prédestiné à la perdition, mais
si nous méprisons l’occasion de salut qui nous est accordée aujourd’hui,
si nous piétinons le trésor donné,
si nous usons de la patience de Dieu pour faire le mal,
nous nous engageons dans une voie d’où il nous sera impossible de revenir.
Jésus conclut en demandant à ses disciples s’ils ont « compris » tout son enseignement.
Comprendre n’est pas seulement un acte intellectuel.
Cela signifie accueillir dans la foi le don de sa révélation et mener une existence d’obéissance,
d’amour et de reconnaissance.
Quoiqu’il en soit, le scribe, le «sage» du Royaume est proclamé doublement riche,
riche des choses anciennes et
riche des choses nouvelles.
Le « neuf ne détruit pas le « vieux », il le mène à son accomplissement.
C’est la clé de lecture de ces paraboles : se fonder sur le vieux, à savoir l’enseignement de Jésus, tout
en ayant l’audace de le réadapter pour de nouveaux besoins propres à notre société, qui correspond au
neuf.
Voilà qui renvoient dos à dos les "conservateurs" et les "progressistes", y compris dans notre Eglise.
Voilà qui doit nous aider non pas à modérer nos prises de positions mais surtout à modérer nos
jugements vis-à-vis de nos frères et sœurs que nous jugeons trop conservateurs ou trop progressistes.
Mais le chrétien, c’est-à-dire chacun de nous, ne conserve pas ses biens dans son coffre.
Il les manifeste, à l’image d’une lampe allumée dont parle Matthieu et qui éclaire toute la maison
(Mat 5,14ss).
Il les fait fructifier, à l’instar du bon serviteur qui travaillait dans l’amour et la confiance dont nous
parle toujours Matthieu (Mat 25,14ss).
Il fait cela, bien sûr pour exprimer son grand bonheur, mais pour que d’autres s’en réjouissent aussi et
s’enrichissent.
Puisse ce « oui » fervent de la compréhension des disciples résonner aujourd’hui plus fortement
encore dans nos églises et susciter en nos cœurs la double soif du vieux et du neuf.
Que l’Esprit du Christ nous apprenne à puiser efficacement et positivement dans nos racines
culturelles et spirituelles, anciennes et nouvelles.
Que l’Esprit du Christ nous apprenne à répandre avec amour et générosité, autour de nous et partout
ailleurs, toutes les richesses divines qui inondent nos vie par la foi au Christ.
Alors à travers nos sagesses, à travers nos gestes et nos paroles, à travers nos richesses et nos
largesses, le souffle du Royaume de Dieu transformera notre monde d’exclusion et d’intolérance.
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