Jugement du 12 février 2007 de l`Honorable
Transcription
Jugement du 12 février 2007 de l`Honorable
COUR SUPERIEURE CANADA PROVINCE DE QUEBEC DISTRICT DE MONTREAL DATE : I 12 FEVRIER 2007 I 1 ANDRE HARMEGNIES. Requerant C. TOYOTA CANADA ET AL, Intimees JUGEMENT I I [l] I n) et 38 concessionnaires de la region de Montreal (cr les concessionnaires n) auraient cornplot& dans le but de restreindre indOment la concurrence et d'augmenter dbraisonnablernent le prix de leurs vehicules automobiles, II demande en consequence au Tribunal I'autorisation d'exercer un recours collectif afin d'obtenir une compensation pour la perte2 qu'il aurait subie. II soutient en outre que Toyota, agissant en sa qualite de maison-mere, aurait menace de sanctions les concessionnaires au cas de refus de leur part d'appliquer la nouvelle politique. 1 ! atlegue que Toyota Canada inc. ( R Toyota ' 2 JP?504 Andre Harmegnies (<{ Harmegnies n)' L'emploi du nom dans le jugement vise a alleger le texte et non a fare preuve de [amiliarite ou de pretention. Comme I'article 36(1) de la Loi sur la concurrence, que nous citerons ulterieurernent, emploie indifferemment les mots perte ou dommages, nous utiliserons ces deux expressions dans le cadre d u present jugement. PAGE : 2 C'est dans ce cadre qurHarmegnies entend representer un groupe qu'il decrit [2] comme suit: Toute personne morale de droit prive, toute societe ou toute association qui, en tout temps entre le ler avril 2002 et le le' avril 2003 comptait sous sa direction ou sous son contrale au plus cinquante (50) personnes liees a elle par contrat de travail, ainsi que toute personne physique, qui ont achete eVou loue au Quebec un (des) vehicule(s)autornobile(s) dans le cadre du programme Acces Toyota. >> 1 i I <{ 7. LES PR€TENT~ONSDES PARTIES ' [3] Les reproches quqHarmegnies adresse a I'Bgard de Toyota et des concessionnaires impliques dans le present litige decoulent principalement du programme Acces Toyota ( a le programme >>)qu'elle avait implante en janvier 2002 dans la grande region de Montreal. Cette promotion, qui prevalait a travers le Canada entre le ler avril 2002 et le 1%'avril 2003, fonctionnait selon lui comme suit: I - I - I i ! j 1 I ! une fois par mois, les concessionnaires se reuntssaient pour discuter et fixer a I'avance le prix de vente pour chacun des diffkrents modeles de vehicules concernes; ils les soumettaient ensuite a Toyota qui les colligeait puis calculait une {{ moyenne ponderee >) pour chaque modele de vehicule ainsi que pour chacun des marches donnes. Elle publiait sur son site Internet cette moyenne qu'elle identifiait comme 6tant le (( Prix Acces n; et les concessionnaires vendaient ou louaient les vehicules aux prix qui leur etaient imposes et qu'ils ne pouvaient negode? avec la clientele. C'est en effet, fait valoir Harmegnies, ce qui ressort notamment des documents [4] suivants: la denonciation signee le 9 juillet 2002 par un comrnissaire du Bureau de la concurrence (<<Bureau D) (R-14) dans le cadre de I'enquete qu'il a menee a la suite de plaintes reques a ce sujet. II ! I 3 Paragraphe 2.7 de la Requgte. PAGE : 3 Le commissaire sera alors autorise par un juge de la Cour fedkale a perquisitionner chez Toyota (R-7) afin d'y saisir tous les documents pertinents a la presente affaire; I - une declaration faite le 24 mars 2003 par Toyota dans le cadre d'un reglement hors de cour qu'elle a conclu avec le Bureau a la suite de cette enquete; ! - un article paru dans le journal (( La Presse H (R-2) qui commentait la promotion K Prix C ~ en S main de Toyota }}; i I iI I - un reportage, produit par CBC (R-3) concernant le diffuse dans le cadre de t'emission <r Disclosure D; I I (( I I programnie n, qui etait I I I i un communique de presse (R-4) qu'avait prepare Toyota; et la publicit6 qu'elle avait diffusee sur le site Internet de Toyota (R-5). [5] i I Plaidant qu'il ressort clairement de ce qui precede que Toyota et les concessionnaires visaient a convaincre Ie consommateur qu'avec le prix {{ cles en main n il n'avait plus a negocier le prix de la voiture qu'il entendait acquerir ce qui lui aurait evite de marchander, a partir des documents plus haut decrits. Harmegnies tire les conclusions qui suivent: Toyota a erige le programme en cartel, portant ainsi atteinte a la libre concurrence et contrevenant a I'article 45 de la Loi sur la concurrence, (L.R.C., c. C-34) ( N la loi })14; par le biais de divers vehicules publicitaires pour atteindre une large ctientBle, elle a fait de fausses representations entre autres en indiquant: i I ! - 4 en gros caracteres, que le prix n'ktait pas negotiable: ce qui empechait la L'article 45 de la lo1 se Ilt cornnle suit: (( 45.(1) Cornmet un acte crlminel et encourt un ernprisonnement maximal de clnq ans et une amende maximale de dix millions de dollars, ou l'une de ces peines, quiconque complete. se coalise ou conclut un accord ou arranqement avec une autre personne: a) (...I b) soit pour ernpecher, l~rniterou reduire, i n d h e n t , la fabricatron ou production d'un produit ou pour en elever deraisonnablement le prix; c ) (...) d) soit, de toute autre f a ~ o npour , restreindre, indGrnent, la concurrence ou lui causer un prejudice indu. (. .I )> (La soussignee souligne) I 500-06-000214-037 PAGE : 4 libre concurrence et ne respectait pas les termes de Inarticle52 la loi5:et en petits caracteres, que les concessionnaires pouvaient vend re a prix moindre, ce qui etait faux; et - elle a fait pression aupres de ses concessionnaires afin qu'ils maintiennent le prix convenu, a defaut de quoi elle les rnenaqait de leur imposer des amendes voire meme de leur retirer leur droit d'exploiter une franchise Toyota, ce qui allait a I'encontre de l'article 61 de la loi6. Pour eviter d'etre I'objet d'une poursuite penaie, Toyota a d'ailleurs reconnu [6] aupres du Bureau de la concurrence avoir pose des gestes illegaux et s'est en consequence engagke a modifier sa promotion et a verser un montant de 2 300 000 $ a un organisme voue a la protection du consommateur et a la securite automobile. [7] Plaidant que les prix qui avaient ete fixes a la suite de I'application du {( programme H etaient superieurs a ceux qui auraient normalement ete negocies pour les m h e s vehicules dans un marche concurrentiel et se prevalant de I'article 36 de la loi, Harmegnies soutient que chacun des membres du groupe dont il fait partie a sub! des dommages pour lesquels il est en droit d'obtenir une compensation. Cet article prevoit que: {{ 5 36. ( 1 ) Toute personne qui a subi une perte ou des domrnages par su~te: L'article 52 de la loi prevoit que: N 52. (1) Nul ne peut, de quelque mamere que ce soit, aux fins de prornouvoir d~recterne~t ou indirectement soit la fournjture ou I'ulilisation d'un produit, soit des inter& commerclaux quelconques, donner au public, sciemrnent ou sans se soucjer des consequences, des indications fausses ou trompeuses sur un point important. (...) >} (La soussignge souligne) 11 appert de I'article 63 de la loi que: 4 61 ( 1 ) Quiconque exploite une entreprise de production ou de fourniture d'un produit, offre du cred~t.au rnoyen de cartes de credit ou, d'une faqon generale, exploite une entreprise dans le domaine des cartes de credit, ou detient les droits et privileges exclusifs que confere un brevet, une marque de commerce, un droit d'auteur, un dessin industriel enregistre ou une topographie de circuit integre enregistree ne peut, directement ou indirectement: a ) par entente. menace, promesse ou quelque autre moyen semblable, tenter de faire monter ou d'emokcher qu'on ne reduise le ~ r i xauquel une autre personne exploitant une entrepr~seau Canada fourn~tou offre de fournir un produit ou fait de la publicite au sujet d'un produrt au Canada; b) refuser de fournir un produrt a une autre personne exploitant une entreprise au Canada, ou prendre quelque autre mesure discriminatoire a I'endroit de celle-ci, en raison du reqime de bas p r ~ xde celle-ci. ( .))) (La souss~gneesouligne) i I ! PAGE: 5 i a) soit d'un comportement allant a I'encontre d'une disposition de la partie V'; b) ( . . . ) peut, devant tout tribunal competent, reclamer et recouvrer de la personne qut a eu un tel comportement ou n'a pas obtempere a I'ordonnance une somme eqale au rnontant de la perte ou des dommaqes qu'elle est reconnue avoir subis, ainsi que toute somme supplementaire que le tribunal peut fixer et qui n'excede pas le coirt total. pour elle, de toute enquete relativement a t'affaire et des procedures engagees erl vertu du present article. s (La soussignee souligne) II ventile comme suit chacune des reclamations qu'il evalue a 1 500 $, soit [8] 1 000 $ en remboursement de la portion artificiellement gonflee du prlx paye et 500 $ a titre de dommages-inter& pour le prejudice subi. Toyota et les concessionnaires Toyota et les concessionnaires nient le bien-fonde des allegations dlHarmegnies [9] et affirment que sa requete ne rencontre ni les exigences materielles contenues a I'article 1002 du Code de procedure civile ( N C.p.c. 1)) ni les conditions prescrites a I'article 1003 C.p.c. qui encadrent I'autorisation de I'exercice du recours collectif. [lo] i Pour en convaincre le Tribunal, ils invoquent plus precisement que: les faits qu'ils alleguent ne sont pas suffisamment precis pour permettre I'analyse des conditions d'ouverture du recours; et que meme si le Tribunal rejetait cet argument, il lui serait impossible de determiner collectivement le prejudice que les membres7auraient pu subir. I I En effet, font- IS valoir, pour conclure a leur responsabilite, Harrnegnies devait faire la preuve prima facie d'une faute, d'un prejudice et d'un lien de causalite entre ces deux eI6ments. Or, soutiennent-ils et telle que redigee. la requ&te ne peut pas amener le Tribunal a formuler une telle conclusion. i 1 i 1 i I [ll] Comme corollaire a cette derniere proposition, ils plaident encore que s'il autorise le recours, le Tribunal devra obtigatoirement entendre une multitude de miniproces, ce qui justifie davantage encore I'idee qu'il faille rejeter la requete en autorisation. [I21 Subsidiairement, 11s ajoutent que s'il decidait de ne pas retenir les arguments exposes ci-dessus, le Tribunal: ' C'est ce que Toyota et les concessionnaires appellent (( la determination collective du preludice )) i devrait neanmoins rejeter la demande dlHarmegnies, ce dernier n'ayant pas fait la preuve de son lien de droit avec chacun des concessionnaires; ou tout au I I i - restreindre le recours afin qu'il ne vise que les personnes ayant achete ou loue un vkhicule de marque Toyota, modele Matrix. 1131 11 est reconnu que le recours collectif vise a favoriser I'acces a la justice a (( des personnes qui eprouvent des problemes communs d'une valeur pecuniaire souven t modique n.R L'autorisation de I'exercer est prevue a I'article 1002 C.p.c, alors que les criteres pour trancher la demande d'autorisation et I'opportunite de conferer au requkrant le statut de representant sont enonces a I'article 1003 C.p.c. Ces dispositions se lisent comme suit: {{Art. 1002. Un membre ne peut exercer le recours collectif qu'avec I'autorisation prealable du tribunal, obtenue sur requgte. La requete enonce les faits qui y donnent ouverture, indique la nature des recours pour lesquels llautorisat!on est demandee et decrit le groupe pour le compte duquel le rnembre entend agir. Elle est accompagnee d'un avis d'au moins 10 jours de la date de sa presentation et signifiee a celui contre qui le requerant entend exercer le recours collectif; elle ne peut Btre contestee qu'oralement et le juge peut perrnettre la presentation d'une preuve appropriee. Art. 1003. Le tribunal autorise I'exercice du recours collectif et attribue le statut de representant au membre qu'il designe s'il est d'avis que: a) les recours des membres soulevent des questions de droit ou de fait identiques, sirnilaires ou connexes; b) les faits allegues paraissent justifier les conclusions recherchees; c) la composition du groupe rend difficile ou peu pratique I'application des art~cles59 ou 67; et que d) le membre auquel il entend attribuer le statut de representant est en mesure d'assurer une representation adequate des rnembres. -. B I I rnoins, Union des consommateurs c. Bell Canada, J. E. 2003-620 ( C . S . ) ,par. 8. i I I I I PAGE : 7 ; ! ; 1' I [I41 A ce stade, il n'y a pas lieu <( d'examiner le merite des moyens invoques, mais plut6t leur sirieux apparent afin dgcarter les demandes frivoles et manifestement ma/ fondees. n9 Tres recemment dans I'arret ~harmascience", la Cour d'appel, sous la plume du juge Gendreau, a resume comme suit la nature et la portee d'une requgte pour autorisation de meme que des jugements qui decident de son bien-fonde: i I I rc [24] Dans son opinion a l'appui de I'arrgt Thompson c. Masson, le juge LeBel (alors a notre Cour) definissait la demande de permission d'exercice du recours collectif comme cr un mecanisme de filtrage et de verification )) et qualifiait la decision judicialre qui en decode de jugement (( de verification et de contr6le )) qui, si elle est favorable, {t permettra la formation et I'exercice du recours 1) selon les regles usuelles (art. 1011 C.p.c.). {{ Avant que ce jugement ne soit rendu, ecrit encore le juge LeBel, le recours n'existe pas, du moins s u r une base collective B. (. . .) i [25] 11 ne faut donc pas confondre I'action intentee une fois autorisee et la procedure visant cette autorisation. L'objet et la finatite de I'une et I'autre sont antinomiques. Dans le premier cas, le tribunal doit statuer sur le merite meme de I'action; seront alors appliquees toutes les rkgles de procedure et de preuve imposees par la loi. Dans le second, le juge ne fait que verifier SIles conditions stipulees a ['article 1003 C.p.c. sont satisfaites, c'est-a-dire la qualite du representant, la similarite ou connexite des questions de fait ou de droit et le rapport juridique entre les allegations et la conclusion recherchee. Dans ce dernier cas, le fardeau en est un de demonstration et non de preuve. 3. APPLICATlON DE CES PRINCIPES A LA P R ~ S E N T EREQUETE A) la composition du qroupe rend-elle difficile ou peu pratique I'application des articles 59 ow 67 C.p.c. (art. 1003 c) C.p.c.) ? i 1 [I51 Toyota et les concessionnaires reconnaissent qulHarmegnies remplit les criteres enonces au sous-paragraphe c) de I'article 1003 C.p.c. Ils ne contestent pas non plus qu'environ 37 500 consommateurs" ont acheti! o u loue des voitures de marque Toyota i pendant !a periode concernke ni qu'il s'avere en consequence impossible qu'il identifie de faqon certaine les noms de tous les membres du groupe. 1 I [I61 ! 3 , : 10 De l'avis du Tribunal, la condition prevue au paragraphe 1003 c) est remplie. Supra, note 8, par. 12. Pharmascience inc. c. Option Consommateurs, [2005] R.J.Q. 1367 (C.A.), par. 24 et 25. Voir les paragraphes 3 et 6 de la M Motion for leave to file a written contestation and in the alternative for special mode of hearing >>. I! ' Harmegnies est-il en mesure d'assurer une representation adequate de ses membres (art. 1003 d) C.p.c. ? 6) I I I I ' 11 appert autant de sa requgte que de la volonte qu'il exprime depu~splus de t r o ~ s ans de voulo~rgerer le present dossier et de le mener a terme qu'liarmegnres a la capacite pour le faire et qu'il est en outre pret a consacrer le temps necessalre a sa bonne marche, ce que Toyota et les concessionnaires ne contestent pas. Le Tribunal est donc egalement d'opinion que le critere enonce a 1003 d) est rencontre. [ I 71 I I C) les faits paraissent-ils iustifier les conclusions recherchees (art. 1003 b) C.p.C.)? ' 1 I I , I ! 1 [I 81 a (I)/ est essentiel que la requete fasse Btat de faits sufisanlrnent prkcis pour permeftre au juge de verifier si les conditions d'ouverture du recours sont i ! I I '' respectees. N En I'absence de telles allegations, le Tribunal ne sera pas en mesure de determiner si les faits ({ paraissent justifier les conclusions recherchees 1, et partant, i de determiner si l'autorisation doit etre accordee. Cornme le precise le juge Gendreau dans affaire Phaimaacience ci14et3 plus haut B cette &tape N ie juge dail examher le syllogisme juridique au regard des faits allegues les tenant, a ce stade, pour averes. n. ; I [I 91 Rappelons qulHarmegnies reproche a Toyota et aux concessionnaires impliques dans la presente affaire, d'avoir forme un cartel dans le but de restreindre la concurrence et d'avoir fourni aux consommateurs des informations fausses et trompeuses, ce qui aurait eu pour consequence de gonfler le prix des vehicules vendus ou loues dans le cadre du (( programme n ou tout au moins d'empkcher que leur prix ne soit reduit'! Pretendant qu'iis auraient ainsi contrevenu aux articles 45, 52 et 61 de la IOI'~, Harmegnies soutient qu'il serait en droit de se prevaloir de l'article 36 pour obtenir compensation. [20] A 1'8tape de I'autorisation. pour avoir gain de cause, Harmegnies devait faire la preuve prima facie des elements constitutifs de la responsabilite prevus a l'article 36 de la loi, soit du comportement allant a I'encontre d'une disposition de la partie Vt, du prejudice et du lien de causalite entre ces deux elements. Voyons s'il y a reussi. I:! ' 1A 1 -1 Option consom~nateursc. Novopharm Limited, 2006 QCCS 118 (C.S.),par. 69. Supra, note 10, par 29. Voir les paragraphes 2.5 a 2.14 et 2.23 a 2.28 de la Requete. Supra, notes 4, 5 et 6. 1 PAGE : 9 a) comporternent fautif 1211 Pour appuyer sa pretention, Harrnegnies refere a certaines pieces qu'il depose au soutien de sa requete. Nous consacrerons une attention particuliere a celles qui suivent: la denonciation du commissaire du Bureau (R-7) i [22] Saisi des plaintes que des consommateurs lui ont adressees au sujet du programme que Toyota avait mis sur pied en juillet 2002, le Bureau decide de mener une enquete. Dans la denonciation qu'il signe afin d'obtenir I'autorisation de perquisitionner les locaux de Toyota (de meme que dans I'Annexe A qui I'accompagne), le commissaire allegue alors entre autres ce qui suit: (( 12. On April 4, 2002, acting on the complaints which the Bureau had received. and accompanied by my colleague, Donald Plouffe, who is a competition Law Officer in the competition Bureau, I visited Estrie Toyota in Granby, Quebec. Mr. Plouffe was posing as a consumer in search of a 2002 Toyota Camry LE with Option Package 8. I am informed by Mr. Plouffe, and do belleve, that he was quoted the Access Price, as shown on Toyota Canada's Internet s~te, and was advised by a salesman by the name of Gerald Roy that such price was the same at all Toyota dealerships and was non-negot~able.I am further advised by Mr. Plouffe, and do believe, that he was further told by Mr. Roy that dealers have signed an agreement containing procedures and rules in respect of the Access Toyota program and that dealers who do not abide by Access Prices are subject to penalties imposed by Toyota Canada: 525,000 for a first infraction and a loss of the dealership for a subsequent tnfract~on.)) [23] Puis il commente comme suit les visites que les commlssaires du Bureau ont effectuees chez les concessionnaires Toyota dans la grande region de Montreal: trois officiers se sont rendus a differents moments chez 12 concess~onnaires distincts (paragr. 26 et 27) qui ont tous donne la meme version de leur comprehension du {{ programme n; ils ont tente de negocier le prix d'une voiture Toyota Camry LE: le vendeur le fixe a 25 I 5 5 $, soit le prix Acces tel qu'il etait annonce par Toyota sur son site Internet; et PAGE : 10 les avise qu'il ne peut pas baisser le prix en deqa du prix Acces, ce prix 6tant le meme chez tous les concessionnaires du Quebec en vertu du ({ programme N (paragr. 28, 29 et 30). A la mBme epoque, un officier du Bureau communique avec le service de la clientele de la maison-mere Toyota. Un representant lui confirme alors que (paragr. 31 c), d) et e ) ) : I241 c) {("dealerships do negotiate between themselves" and "every so often they meet to decide on prices"; d) dealerships negotjate to make sure that they have the same price and that they are deciding not to compete with each other; e) since entering into an agreement with other dealers, they wilt not undercut each other. )) [25] 11 appert de la denonciation du commissaire que les enqueteurs, qui ont meme visite certains concessionnaires a plusieurs reprises, ont obtenu d'eux des informations identiques, ce qui amene le Tribunal a conclure, selon la preuve etabl~eprima facie, que Toyota avait contrevenu aux articles 45 (1) (b), 52 (I} et 61 (1) a ) et b ' de ~ la loi en: exerqant de la pression sur ces derniers pour qu'ils maintiennent le prix Acces; les menaqant de sanctions; erigeant le {( programme )> en systeme avec leur concours; et donnant des inforrr.ations trompeuses aux consornmateurs. la declaration de Toyota (R-14) ii) [26] A la suite de I'enquete que mbne le Bureau, Toyota sjgne une declaration dans laquelle elle decrit te fonctionnement de son {( programme n, les representations qu'elle fait a son sujet de meme que la methode que les concessionnaires utilisent pour fixer les prix. Voici une partie de ce qu'elle y reconnait: cc 4. In respect of pricing under the Access Toyota Program. Toyota dealers partic~pat~ng in this program ("Access Dealers") submit price votes by way of a d~scountoff the manufacturer's suggested retail prrce to TCI on a monthly basis far all of the Toyota vehicle models and options. PAGE : 11 5 Using a we~ghted-averageformula, TCI averages the price votes submitted for each local market, and then the averaged prices (known as "Access Prlces") for each local market are made available on the Toyota web site. For instance, price votes by Manitoba Access Dealers are used to calculate Access Prices for the Manitoba market, and price votes by Alberta Access Dealers are used to calculate Access Prices for the Alberta market. 6. In addition to Access Prices, TCl's website also employs and d~splays"DrrveAway Prices" for each local market, which represent Access Prices plus all applicable fees and taxes. 7 . Shortly after its introduction in Manitoba the Access Toyota Program was reviewed by the Competition Bureau. TCI represented to the Competit~on Bureau that Access Dealers would be free to sell Toyota veh~clesfor less than the specified AccesslDrive-Away Prices and that dealers '.hat sold for less would not be disciplined or discriminated against by TCI. Based on these representations the Competition Bureau advised TCI that the Access Toyota Program did not raise serious concerns under the Act 12. TCI became aware that, on occasion, certain Access Dealers were meeting to discuss and agree in advance on the price votes to be submitted by these Access Dealers to TCI that were then used to establish the Acces.s Price. 13. In addition, subsequent to the launch of the Access Toyota Program, TCI monitored and enforced Access Dealers' adherence to the Ac8;ess Toyota Program. 14. The Comm~ss~oner of Competition (the "Commissioner") has informed TC1 that h ~ sinvestigation has revealed that the effect of the monitoring and enforcement activities of TCI under the Access Toyota Program caused some Access Dealers to understand that if they sold or leased Toyota vehides below Access PriceslDrive-Away Prices, or advertised that they sold or leased at the AccesslDr~ve-Awayprlce when the represented price was other than the Access PriceslDrive-Away Price established under the Access Toyota Program. the Access Dealer could be subject to substantial financial penalties. 21. In acknowledgement of the seriousness of the issues raised by the Commissioner, TCI has made a voluntary donation totalling $21.3 million to charitable andlor non-profit organizations dedicated to consumer protection and automobile safety. This donation is over and above any charitable donations budgeted by TCI for the current fiscal year. D PAGE : 12 [27] De ce qui precede le Tribunal retient que: - dans un marche donne, celui de Montreal etant le plus important. des concessionnaires se reunissaient et fixaient le prix de vente et de locat~ondes voitures; ils sournettaient ces prix a Toyota qui fixait les prix main H des voitures et en faisait la promotion; (( Acces H et (( cles en Toyota s'assurait que les concessionnaires ad hbraient au ({ programme N malgre le fait qu'elle avait declare au representant du Bureau qu'ils etaient libres de vend re ou de louer les vehicules a prix moindres; - les concessionnaires croyaient en consequence que s'ils derogeaient a ['application du {( programme ils s'exposaient a ce que Toyota leur impose des penalites. [28] A la lumiere de ce qui precede, le Tribunal estime qu'il y a la (( demonstration u , tel que I'exprirne le juge Gendreau dans I'arret ~harmascience'" que pour la periode concernee Toyota et les concessionnaires formaient un cartel (art. 45) dans le but de restreindre la concurrence et qu'elle tentait d1empGcherses concessic~nnairesde reduire le prix de ses vehicules a defaut de quoi ils etaient passibles de sanctions (art. 61 (1)). iii) les reportages (R-2 et R-3) I [29] Dans un article publie le lundi 18 mars 2002 dans le quotidien La Presse, le journaliste rapportait les propos de Claude ChassB, reprbsentant de Chasse Toyota, qui lui declarait que <( la peur de voir son client sortir de chez ( h i ) pour se faire offrir 50 $ de reduction chez un aufre concessionnaire Toyota H (R-2) n'existait plus. La transcription d'une partie de I'emission ({ Disclosure }} diffusee par CBC reveiait en outre qu'un journalise affecte a ce dossier n'avait pas rbussi a negocier, chez le meme concessionnaire, le prix de la voiture qu'il sirnulait convoiter (R-3). Chasse, qui ne pouvait pas deroger au programme", avait refuse de ne ocier a au moins trois occasions: (( Trois fois plutet qu'une ! )), resumera Harmegnies9 8 . ! ' i [30] De ce qui precede, il appert que le (< programme H avait un impact sur les prix que les consommateurs payaient pour acheter ou pour louer un vehicule. Referant a la 1E Ii ID Supra, note 10, par. 25 in fine. Voir la denonciation de Stephane Brisson aux paragraphes 27, 28 et 30 b). Soulignons d e plus que les officiers du Bureau ont visite Brossard Toyota, aucuel Harmegnies refere dans sa requete, par. 2. t 7 a 2.22. I I i , PAGE : 13 denonciation du commissaire (R-71, a la declaration de Toyota (R-14), aux reportages R-2 et R-3 de meme qu'aux documents publicitaires R-4 et R-5, te Tribunal estime qulHarmegnies a {{ demontre )} que Toyota et ses concessionnaires avaient erige le (( programme n en systeme et ainsi forme un cartel. Elle avait egalernent donne au public des indications trompeuses quant a la possibilite de marchander le prix de vente ou de location des vehicules concernes. la perte (ou le dommage) b) [31] Meme s ' c c (I)/ est acquis que ce n'est pas au stade de l'autorisafion qu'un Tribunal determine la valeur du prejudice subi nl', pour en faire la preuve prima facie, il ne suffit pas d'affirrner par une simple allegation, comme le fait Harmegnies, qu'en restreignant la concurrence le (( programme )> a cause une perte. Voyons comment, en I'espece, Harmegnies presente les faits relativement a cette question. 1321 Pour soutenir sa pretentionZ0,il refere a deux articles parus dans le quotidien La Presse I'un, dans I'edition du 29 mars 2003 (R-91, qui proposait que t{ (s)e/on une nouvelle enquete eclair de INPA, (.. .) les vehicules Toyota ies plus chers (colitaient) jusqu2 2 500 $plus cher a Montreal qu'a Toronto N , I'autre. dans celte du 8 mars 2002 (R-2), qui soulignait, en referant aux propos de Claude Chasse, cr in peur H qu'avaient les concessionnaires de la competition qu'ils devaient se livrer. [33] Le Tribunal est d'avis qu'a elles seules, ces allegations ne suffisent cependant pas. Harmegnies avait le fardeau de << demontrer >> la pette. Au stade de I'autorisation il devait faire en sorte que le Tribunal puisse verifier s'il y avait apparence de droit non seulement quant a la faute mais egalement quant aux dommages: il devait {( etablir un certain fondement factuel2'~>.Son Bnonce devait en consequence Gtre suffisamment complet et clair pour permettre au Tribunal de dhcider si les faits paraissaient ou non justifier le remboursement du prix de vente ou de location et les dommages-inter6ts reclarnes dans sa requgte. Le Tribunal estime qu'a eux seuls les artides de ce quotidien ne suffisent pas pour conclure que la cc demonstration )) d e I'existence de cet element constitutif de la responsabilite a ete faite. [34] Pour cc demontrern la faute, Harmegnies explique comment, en formant un cartel, Toyota et les concessionnaires avaient fixe le (c prix Acces n. En raison du fait que certains d'entre eux avaient convenu de prix moyens de vente ou de location de leurs vbhicules, certains consommateurs y gagnaient alors que d'autres y perdaient. [35] '' Supra, note 12. par 107. -)sj Voir les paragraphs 2.23 a 2.28 de la RequGte. 21 Supra. note 17. par. 143. 500-06-0002 14-037 PAGE: 14 1 Seule, devons-nous le rappeler, la derniere hypothese aurait pu causer une perte aux mernbres du groupe. A la lurniere de ce qui precede, le Tribunal est d'avis que les pretentions d'Harmegn ies ne (( paraissen t pas justifier les conclusions recherchees N, les faits allegues ne cr demontrant n pas de perte. 1361 [37] Pour convaincre le Tribunal de lui donner raison Harmegnies le refere entre , lequel la Cour d'appel a accueilli la requete en autres a I'arret ~ l c a n ' ~dans autorisation. Rappelons cependant que dans cette affaire il n'etait pas conteste que les membres du groupe avait subi un dommage, seul le quantum de celui-ci etant en litige. [38] En I'espece, le Tribunal est d'opinion qu'Harmegnies n'a pas fait la preuve prima facie de I'existence d'une perte. I1 ne suffit pas d'identifier une faute et de pretendre par la suite qu'il en dkcoule un dommage pour remplir les conditions d'ouverture du recours. {{ (N)ul ne peut etre tenu responsable d'une faute qui a ete sans consequence H, ecrivait le juge Gonthier dans I'arrkt ~ a l l a i r e ~ ~ . : c) le lien de causaiite entre la faute et le dommage [39] Vu ce qui precede, le Tribunal ne croit pas utile de discuter de cette question. [40] Malgri! les conclusions auxquelles it en arrive quant au critere enonce a !'article 1003 b) C.p.c. le Tribunal analysera la derniere condition a laquelle refere cette disposition. I I D) I I les recours des membres soulevent-ils des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes (art. 1003 a)) ? I 1 i I [41] La condition posee par 1003 a) C.p.c.,allegue Harmegnies. vise a a demontrer )) que le groupe existe en raison des questions communes qui unissent les recours individuels de ses mernbres. Pour y arriver, poursuit-il, il suffit que certaines questions de droit ou de fait soient similaires pour l'ensemble des membres, sans egard a la situation factuelle que chacun d'eux vit. 12 I i Cornite d'env~ronnementde la baie inc. c. Societe d%iecfro/yseet de ch~mieAlcan Itee, [?9901 R.J.Q. : 655 (C.A ) ou la Cour d'appel ecrit a la page 659: (( I...) Doubtless, the damages and inconvenience caused by the alr pollution varied from house to house, depending on the nature and value of the house and the distance !rom the port installat~ons I and its location with reference for the prevailing wind. )I I '"allaire c. Paul-€mile Martel inc., [I 9891 2 R.C.S. 4 19. p. 425. i