Le Bureau de Bienfaisance

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Le Bureau de Bienfaisance
Une page de notre histoire
Le Bureau de Bienfaisance
De façon générale, jusqu’à la révolution, l’Eglise catholique prenait en charge l’action en faveur des
plus démunis, par l’intermédiaire du clergé et des ordres religieux. Même dans les campagnes les plus
reculées on trouve encore trace des « comptes de la charité ».
A la Révolution, sous l’influence des philosophes des lumières, apparaît l’idée selon laquelle
l’assistance est un devoir de l’Etat et un droit pour le citoyen. En 1796, le gouvernement du Directoire
crée les premiers établissements publics de secours : « les bureaux de bienfaisance » ; ce sont des
services communaux placés sous l’autorité préfectorale.
Au départ, la portée de cette loi reste limitée. La création des bureaux est facultative et quand ils
existent, ils cohabitent souvent avec la charité privée. A Bonnétage on retrouve les premières traces
du bureau de bienfaisance en 1817 sur un registre conservé par les Archives Départementales.
L’ouverture de ce registre est assez révélatrice ; il est écrit ceci : « considérant qu’ avant la révolution, il y
avait dans la paroisse un établissement de charité à demeure fixe pour les malades, pauvres et infirmes, pour
lieu,, que les fonds
l’éducation et l’instruction des enfants indigents du dit lieu
fonds de cet établissement consistant en
différents capitaux de rentes ont été égaré en grande partie pendant l’orage révolutionnaire….le conseil municipal
de Bonnétage a recours au Préfet pour établir le bureau de Bienfaisance du dit Bonnétage. »
Comment fonctionne t-il ? Bonnétage est un cas particulier ; l’établissement ne se contente pas des
revenus privés de la charité et des dons de la commune. Dès 1837 il devient propriétaire après le don
fait par Marie-Thérèse Vuillemenot d’une ferme au Village Bas de Bonnétage et de presque 10
hectares de terres. Quelques années plus tard, à nouveau, Mr Jean Joseph Jeambrun lègue au bureau de
bienfaisance une maison au Village Haut avec un verger et 3 hectares de terres situées aux « Rondés »
(Village Haut). Notre bureau doit donc dès les années 1840 gérer ses biens ; la ferme et les terres du
Village Bas sont « amodiées » ainsi que la parcelle des Rondés . La maison du Village Haut en très
mauvais état est donnée à la Commune à condition que le conseil municipal construise sur le terrain
une école pour les filles avec logement pour les sœurs dispensant l’enseignement et s’occupant
également de la charité. Il s’agit vraisemblablement de l’ancienne école des filles du Village Haut
rachetée dernièrement par Mr et Mme Tremblay. Mme Vuillemenot et Mr Jeambrun avaient bien
stipulé dans leurs testaments respectifs que les revenus des biens légués devaient être consacrés à
l’éducation des jeunes filles, à entretenir deux sœurs s’occupant de la charité dans le village et à venir
en aide aux plus démunis.
Voyons maintenant le fonctionnement général de notre bureau de bienfaisance : Les premières années
de 1817 à 1904, la principale dépense consiste à donner du pain aux « indigents » et parfois de la
viande. Une somme est attribuée au boulanger et au boucher du village qui fournit le pain et un peu de
viande parfois à un certain nombre de personnes désignées par la commission administrative.
On vient en aide aussi aux orphelins en octroyant une rente aux personnes qui les prennent en charge
ou en versant des sommes aux établissements publics qui s’en occupent.
Il y a également le secours médical pour les gens qui ne peuvent subvenir aux frais occasionnés par
une hospitalisation ou une longue maladie ou un enfant handicapé. Ainsi sur le registre de l’année
1896, la commission administrative de Bonnétage octroie la somme de 300 francs à une famille dont
le fils est sourd et muet ; celle-ci doit constituer le trousseau de l’enfant pour le faire entrer dans un
institut spécialisé à Saint Claude et n’a pas les revenus nécessaires pour le faire.
On retrouve également trace d’indemnités versées pour de mauvaises récoltes liées à la sécheresse ou à
la grêle, pour la perte de bestiaux (surtout les décès de juments, perte considérable à cette époque).
Les catastrophes liées à la météo sont souvent énoncées dans les registres. Ainsi en 1867, un orage de
grêle a détruit toutes les récoltes, endommagé les toitures et même cassé quelques vitres des maisons.
Nous n’avons pas réellement de chiffres constatant la population nécessiteuse de cette époque ;
simplement en 1858, le préfet demande aux communes de recenser leurs « indigents ». A Bonnétage
on reconnaît que 62 personnes sont à secourir alors que seulement 31 ont bénéficié des aides du
bureau….
Au début du XXè siècle, les lois d’assistance à l’enfance en 1904 puis aux vieillards, infirmes et
incurables en 1905 et enfin aux familles nombreuses en 1913 vont modifier l’aide apportée par ces
organismes sociaux. En plus du pain donné aux plus défavorisés, des pensions alimentaires sont
versées ; des demandes de placement en hospice pour des personnes âgées dépendantes sont
formulées et transmises aux administrations. La commission étudie aussi les dossiers des handicapés,
infirmes, etc…pour les placer dans des établissements spécialisés. Les enfants miséreux sont
également secourus par l’Assistance Publique : à Bonnétage en 1906, la commission fait appel aux
services de l’assistance pour prendre en charge une famille dont les enfants sont orphelins de
mère : « les enfants sont si mal tenus et vivent dans des conditions d’hygiène si déplorables
déplorables qu’ils sont guettés
par la tuberculose …..que le père par son inconduite abandonne quelquefois ses enfants pendant plusieurs jours et
les loge d’une si sale manière qu’il est impossible qu’ils survivent à cet état de chose…En conséquence les membres
du bureau expriment le vœu que l’autorité supérieure s’occupe du cas qu’ils ont l’honneur d’exposer »
Avec l’arrivée de la guerre en 1914, le bureau de bienfaisance va aussi porter secours aux familles des
mobilisés sans ressources (horlogers, artisans, bûcherons et quelques agriculteurs laissant leurs
épouses et enfants sans revenus) ainsi qu’aux familles des prisonniers de guerre.
Une nouvelle forme d’aide apparaît dès 1932 : « l’assistance aux femmes en couche » et on ne voit
presque plus que cela sur le registre de Bonnétage ! témoin de toutes ces familles nombreuses de notre
village…. Il est vrai que cette loi avait été prévue surtout pour les ouvrières, leur permettant ainsi un
repos bien mérité après un accouchement. Dans nos campagnes, il s’agissait surtout d’une indemnité
versée ou le droit aux soins médicaux nécessaires.
Durant les années 1950 tout change avec l’apparition de la sécurité sociale ; les bureaux de
bienfaisance deviennent les Bureaux d’Aide Sociale (B.A.S.). Ils sont chargés d’étudier les dossiers
d’aide médicale gratuite, d’aide sociale et de superviser les « Cartes d’Economiquement Faibles ». Des
secours en nature persistent malgré tout pour les plus démunis, mais petit à petit au fil des ans le B.A.S
qui devient le C.C.A.S en 1986 (Centre Communal d’Action Sociale) réduit son activité. S’il garde
encore une place importante dans les villes, il est vrai que dans nos campagnes il est réduit à sa plus
simple expression. Par exemple, aujourd’hui à Bonnétage, le C.C.A.S continue à assumer la gestion
des biens laissés par les donateurs mentionnés plus haut ; il distribue les cadeaux de naissance pour
nos nouveaux nés , les paquets de Noêl pour les Anciens et donne des secours ponctuels à des
personnes nécessiteuses si besoin est.
Mais il existe et n’oubliez pas qu’il reste à l’écoute de toute personne qui pour une raison quelconque
aura besoin d’aide. C’est sa vocation depuis deux siècles déjà…

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