4e Analyse Bal au Moulin de la Galette
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4e Analyse Bal au Moulin de la Galette
I. LE CONTEXTE A. Contexte historique Le Bal au Moulin de la Galette est un tableau peint par Renoir en 1876 (DOC.00). 6 ans auparavant, en 1870, Napoléon III entraîne la France dans une guerre contre la Prusse, qui se transforme vite en déroute. Après une insurrection à Paris, l’Empire est renversé. Les Parisiens refusent la défaite. Paris est assiégé, l’hiver 1870 - 1871 est très rude. Un nouveau gouvernement s’installe, mais il accepte la paix avec les Prussiens. Les Parisiens les plus pauvres, qui vivent à l’Est de Paris (par exemple dans le quartier de Montmartre) se révoltent à nouveau et forcent le gouvernement à fuir à Versailles. Les révolutionnaires parisiens décident de se gouverner seuls et forment la « Commune de Paris », qui vote de nombreuses lois, essayant de retrouver l’esprit de la Révolution de 1789. Le gouvernement en exil à Versailles décide de lancer son armée sur Paris pour attaquer les « Communards ». Les « Versaillais » bénéficient du soutien des Prussiens et finissent par envahir Paris. La répression est terrible : on compte entre 5000 et 10000 morts parmi les Communards, dont environ 1500 fusillés. La décision est prise de construire la basilique du Sacré-Cœur sur la colline de Montmartre, là où l’insurrection a commencé, pour « expier les crimes de la Commune ». B. Contexte artistique Depuis le XVIIe siècle, c’est l’Académie royale de peinture et de sculpture (ensuite nommée Académie des Beaux-Arts) qui dicte les règles que les artistes doivent appliquer dans leurs œuvres. L’Antiquité gréco-romaine est le modèle dont il faut s’inspirer. Les œuvres doivent être simples, harmonieuses, pures. (DOC. 1, 2, 3, 4). L’enseignement de l’Académie repose sur les points suivants : • le dessin est prioritaire sur la peinture ; • il faut maîtriser l’étude du nu, de l’anatomie ; • il faut travailler dans l’atelier et non en plein air ; • il faut réaliser des œuvres achevées ; • il faut imiter les Anciens et la nature. Le seul endroit important où les artistes peuvent exposer leurs œuvres est le Salon de l’Académie. Les œuvres sont choisies par un jury qui écarte toutes celles qui ne correspondent pas à ses principes. Parallèlement, des peintres, comme Courbet ou Millet, développent une peinture « réaliste » : elle cherche à représenter la réalité, mais une réalité plus proche de la vie des pauvres gens (des paysages ,mais aussi les artisans, les ouvriers, les paysans). (DOC. 5, 6, 7, 8). Dans les années 1860, apparaît un nouveau courant, dont les représentants principaux sont Pissarro, Cézanne, Manet, Degas, Monet, Renoir. Ils refusent les conventions académiques. Il s’agit pour eux d’affirmer la subjectivité de leur art. Comme le dit Manet : "Je peins ce que je vois, et non ce qu'il plaît aux autres de voir". Ces artistes peignent des sujets issus de la vie quotidienne, ou des paysages, en n’hésitant pas à reproduire les traces de la révolution industrielle (usines, ouvrages métalliques, etc.). Ils affirment la priorité de la couleur sur le dessin. Ils travaillent à l’extérieur, grâce notamment à l’invention de matériels plus facilement transportables et de l’apparition des tubes de couleur. Comme ils sont refusés par le Salon de l’Académie, ces artistes, qu’on nomme d’abord les « Indépendants » ou les « Intransigeants », organisent leurs propres expositions dans des lieux privés. En 1874, Monet expose une toile intitulée Impression, soleil levant (DOC.09). Un critique d’art reprend ce terme d’ « impression » pour se moquer de ce nouveau genre de peinture : il surnomme cette exposition « l’exposition des impressionnistes ». Au bout de quelques années, Monet et ses amis finiront par accepter et même revendiquer ce nom. II. L’ŒUVRE A. Genèse de l’œuvre Renoir est né en 1841, dans une famille de pauvres artisans. À l’âge de 13 ans, il entre comme apprenti dans un atelier de porcelaine pour y faire la décoration des pièces. En 1862, Renoir réussit le concours d'entrée à l’École des beaux-arts de Paris, où il rencontre notamment Monet et Sisley. Une solide amitié se noue entre les jeunes gens qui vont souvent peindre ensemble en plein air. Les tableaux de Renoir reçoivent des critiques souvent négatives. La période impressionniste de Renoir commence à la fin des années 1860, et au début des années 1870 il expose avec Monet et ses amis. En 1876, Renoir a 35 ans. Il a réalisé dans son atelier, de mémoire, une esquisse représentant une scène de bal au Moulin de la Galette, lieu situé sur la Butte Montmartre, où les gens pauvres du quartier, des peintres, des voyous, des prostituées se retrouvaient les dimanches et les jours fériés pour danser. Un ami le convainc d’exécuter ce tableau. Grâce à l’argent que lui rapporte une commande, Renoir peut louer pendant quelques mois une maison dans le quartier. Chaque jour, Renoir et ses amis transportent la grande toile (1, 76 m. sur 1,32 m.) jusqu’au Moulin. Les amis de Renoir et quelques jeunes filles payées servent de modèles. La toile sera présentée à la troisième exposition impressionniste, en 1877 (DOC.00). B. Description de l’œuvre (DOC. 00) Au premier plan des personnages sont assis sur des bancs et des chaises ( les décrire précisément), au second plan des gens dansent ou discutent (les décrire précisément), tout au fond on aperçoit la foule, un orchestre, des bâtiments, des luminaires. Renoir ne cherche pas à représenter des formes précises, mais suggère des impressions par des touches désordonnées de peinture à l’huile, qu’il dépose avec un pinceau souple. On le constate par exemple avec les feuillages du fond, ou avec l’orchestre, suggéré par une masse sombre sans forme : on distingue seulement les cols blancs des musiciens, le dos sombre et les cheveux blancs du chef, le volume brun de la contrebasse. Le visage des jeunes filles comporte quelques détails à peine dessinés : en fait, ce sont les tons jaunes, roses, verts qui suggèrent les volumes. Les éclats dorés des bijoux, ainsi que les masses claires des verres et des bouteilles sur la table, sont obtenus par des empâtements (c’est-à-dire des couches épaisses de peinture). Renoir utilise une gamme limitée de pigments. Il n’y a pas de noir pur, le ton dominant est le bleu. Le bleu, qui était autrefois souvent réservé au lointain (le ciel), envahit le premier plan dans les tableaux impressionnistes : il s’agit notamment de donner une grande importance aux ombres (ex. : le bas de la robe de la danseuse à gauche). On retrouve le bleu dans la robe à rayures de la jeune fille assise sur le banc. Renoir cherche à rendre compte de l’effet de la lumière du soleil sur les différents éléments de la scène. Cette lumière qui passe à travers le feuillage provoque des taches de peinture de couleurs différentes selon l’endroit où elles se déposent (voir par exemple le pantalon du danseur à gauche, le tronc de l’arbre, les taches claires sur le banc et sur la veste du personnage assis de dos). C. Effet produit L’impression générale est celle de la fête, d’un monde parfait où tous les personnages partagent une même joie, un même bonheur de se retrouver ensemble dans un moment de plaisir. Les personnages sont physiquement liés par la danse ou par des échanges de regards. Renoir s’intéresse avant tout aux personnages. Il se distingue en cela de certains de ses amis impressionnistes, qui représentent plus volontiers des paysages, en y intégrant des éléments de la société moderne. (DOC.10, 11). Renoir se méfie du nouveau monde mécanique, il le rejette de ses tableaux. Il a volontairement cadré la scène du Bal pour en éliminer tous les éléments du paysage citadin qui se trouve autour (les vieux moulins en ruines, les pauvres maisons) (DOC 12). Il ne veut pas de laideur dans ses tableaux. Renoir disait : « Un tableau doit être aimable, joli, joyeux. Il y a assez de choses embêtantes dans la vie pour que nous en fabriquions d’autres ». Le tableau a été créé dans un contexte historique très dur (la répression de la Commune) : la scène est située sur les lieux mêmes où le sang a coulé quelques années plus tôt, et pourtant Renoir choisit d’oublier ce cauchemar, comme il choisit d’oublier la vie misérable de ses personnages les six autres jours de la semaine. III. LIENS AVEC D’AUTRES OEUVRES (RUPTURE ET CONTINUITÉ) Cette volonté de Renoir de créer du bonheur dans ses tableaux est à rapprocher de l’esprit de certains peintres du XVIIIe siècle, qu’il appréciait beaucoup : Boucher, Fragonard, Watteau. (DOC 13, 14, 15). Renoir était familier de ces artistes puisqu’il avait souvent peint des reproductions de leurs toiles sur de la porcelaine lorsqu’il était tout jeune. (DOC. 16, 17). Il s’agissait de scènes légères, pleine de joie et de malice, où les personnages étaient liés par le bonheur, le plaisir, la complicité, toutes choses qu’on retrouve dans le Bal du Moulin de la Galette. On l’a vu, les impressionnistes, même s’ils continuent bien sûr d’appartenir à la longue tradition de la peinture figurative (c’est-à-dire qui représente des choses ou des personnages), sont en rupture avec la peinture de leur temps : cette façon révolutionnaire de peindre ouvrira la porte à toute la peinture moderne de la fin du XIXe siècle (Gauguin, Van Gogh, Seurat, Toulouse-Lautrec, etc.) (DOC. 18, 19) et du début du XXe siècle (Matisse, Braque, Picasso, etc.) (DOC 20). On peut aussi considérer que le fait de centrer son art sur les « impressions » et non sur la copie de la réalité permettra beaucoup plus tard l’apparition de la peinture abstraite (qui ne cherche plus à représenter plus la réalité visible), représentée par Kandinsky, Klee, Mondrian, etc. (DOC.21). IV. AVIS, IMPRESSIONS PERSONNELS