Union du Maghreb Arabe

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Union du Maghreb Arabe
Union du Maghreb Arabe
Secrétariat Général
21ème session des journées de l’entreprise
Sur le thème :
« L’Entreprise Maghrébine : Concurrence et Complémentarité »
Sousse, 1-2/12/2006
Intervention de
Monsieur Habib BEN YAHIA
Secrétaire général de l’Union du Maghreb Arabe
Monsieur Chekib Nouira,
Messieurs les chefs d’entreprises,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens tout d’abord à remercier l’Institut Arabe des Chefs d’Entreprises pour
l’invitation adressée au Secrétariat général de l’Union du Maghreb Arabe à participer à
cette session des journées de l’entreprise, organisée sous le haut patronage de son
Excellence ZINE El ABIDINE Ben Ali Président de la République.
Je voudrais saluer cette initiative dont le thème « l’Entreprise Maghrébine :
concurrence et complémentarité », traduit notre conviction du rôle moteur des
entreprises dans le processus d’édification de l’intégration économique Maghrébine.
Je voudrais également souligner l’importance de cette rencontre, et ce à plus
d’un titre. En effet, le dernier rapport mondial de Davos sur la compétitivité vient de
classer la Tunisie trentième au niveau de la compétitivité dans le monde, Qu’il me
soit permis, à cette occasion, de saluer les efforts entrepris par la Tunisie et ses
performances non négligeables pour la mise à niveau de ses entreprises, ce qui lui a
permis de gagner 7 points passant ainsi de la 37éme place à la 30éme.
Elle intervient quelques semaines après la première rencontre des Présidents
des Patronats Maghrébins organisée par l’UMA à Rabat, confortant l’importance
qu’accorde les Chefs d’Etats Maghrébins au secteur privé, en tant Qu’acteur
incontournable dans le développement de l’intégration économique maghrébine, et en
tant qu’accélérateur de la croissance d’une économie maghrébine dynamique et
compétitive.
S’inscrivant dans cette logique d’optimisation des ressources, et en vue de
créer une nouvelle dynamique pour le Maghreb, On ne peut que se réjouir de la
création, de l’Union Maghrébine des Employeurs (UME), qui est une preuve de la
cohésion et de la volonté des milieux d’affaires à contribuer au processus
d’intégration.
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Considérant que l’ intégration,la complémentarité, et la croissance économique
auxquelles aspirent nos pays, ne peuvent être réalisées que par une dynamisation
du partenariat entre les entreprises maghrébines , en se donnant collectivement les
moyens d’atteindre ces objectifs ; l’UME constitue le cadre approprié qui permettra
aux hommes d’affaires à mieux connaître le marché maghrébin, ses entreprises afin
de créer des synergies et des joint- ventures ou simplement un climat sain de
compétition positive .Un forum des opérateurs économiques maghrébins sera
organisé par l’UME probablement en 2007.
Mesdames, Messieurs,
L’union du Maghreb Arabe s’est fixée pour objectifs, depuis sa
création, d’œuvrer progressivement à réaliser la libre circulation des personnes, des
services, des marchandises et des capitaux.
Les dirigeants maghrébins ont inscrit, au cœur de l’action maghrébine à
mener, la réalisation du développement industriel, agricole, commercial et social des
états membres et la mobilisation des moyens nécessaires à cet effet, notamment par
la mise en place de projets communs et l’élaboration de programmes globaux visant
l’intégration économique maghrébine.
Mais si nous pouvons estimer que les fondements pour une intégration
maghrébine ont été jetés dés le sommet du conseil de la Présidence de RAS LANOUF
en 1991(11/3/1991) par l’adoption de la stratégie Maghrébine
pour le
développement commun, et qui a pour objectif ultime la constitution d’un marché
commun maghrébin, il faut bien reconnaître que sa mise en œuvre a connu un
certain retard imputable, toutefois, à certaines difficultés de parcours.
Permettez moi tout d’abord, de donner un aperçu sur les grands axes de cette
stratégie, visant la réalisation de l’intégration maghrébine en quatre étapes qui se
focalisent autour de :
- la création d’une zone de libre échange Maghrébine, et ayant pour objectif le
démantèlement des barrières douanières et non douanières; de développer les
échanges commerciaux entre les états membres et de donner une impulsion
puissante et concrète à la production et aux échanges inter –maghrébins ;
- la concrétisation de cette étape réside dans l’adoption de mesures juridiques,
administratives et financières susceptibles de créer un climat propice aux
transactions et investissements Maghrébins et de mettre en œuvre les
conventions ayant déjà été ratifiées ;
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- l’institution d’une union douanière instituée sur les bases entre autres, de la
garantie des conditions d’une saine concurrence entre les producteurs des pays
de l’Union par l’institution de bases claires en la matière dans le respect d’une
complète transparence ;
- la création d’un marché commun entre les pays de l’Union du Maghreb Arabe.
L’objectif étant, bien sur, de parvenir à l’intégration économique, de jeter les
bases d’un régime unique pour les marchés, d’instituer des arrangements uniformes à
l’intérieur de l’espace Maghrébin, de mettre en place un grand marché intérieur
exempt de droits de douane et de tout autre obstacle aux échanges et d’assurer la
libre circulation des personnes, des services, des marchandises et des capitaux.
L’aboutissement de ce processus d’intégration régionale est l’institution d’une
union économique qui devra se concrétiser par l’uniformisation et l’harmonisation des
politiques et des plans d’action de développement économiques sur des bases
communes et selon des objectifs partagés, compte tenu de la nécessité de resserrer
les écarts de développement tant au sein des différents pays de l’UMA qu’entre eux.
Comme je l’ai déjà souligné l’Union du Maghreb Arabe a accusé un retard par
rapport au calendrier prévu. Et, selon certains économistes, ce retard dans le
processus d’intégration coûte, à chaque pays de la région 2% de son taux de
croissance annuel.
Il convient, par ailleurs, de signaler que dans ce cadre, des accords et
conventions ont été adoptés par le Conseil de la Présidence dont certaines sont
entrées en vigueur notamment :
- la convention sur les échanges des produits agricoles ;
- la convention commerciale et tarifaire ; adoptée en1991 préconise la libre
circulation des produits d’origine maghrébine, elle comporte quatre
protocoles d’accords relatifs au certificat d’origine, à l’application d’une taxe
compensatoire unifiée de 17,50% entre les pays de l’UMA ; aux mesures de
sauvegarde et un protocole portant liste des produits libérés et des mesures
non tarifaires ;
- la convention relative à l’encouragement et à la garantie de
l’investissement maghrébin ;
- la résolution portant principes et règles à observer pour la constitution
d’une union douanière entre les pays de l’UMA,
- la déclaration relative à la création d’une zone de libre échange (sommet
de Tunis 1994).
D’autre part, je voudrais mentionner que la Banque Maghrébine
d’investissement et du commerce extérieur, l’instrument financier maghrébin
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approprié pour la promotion et le financement des projets productifs d’intérêt
commun économiquement viables et financièrement rentables sera opérationnelle à
partir de 2007.
Ce sont là des acquis incontestables mais, il est une évidence pour tous,
renforcée par les options prises dans le cadre des institutions de l’UMA, d’accorder un
rôle primordial au secteur privé, qu’on ne peut atteindre les objectifs fixés par le Traité
de l’UMA, sans entre autres, mettre sur pied des projets à effet intégrateur.
En effet, nos marchés maghrébins sont porteurs d’opportunités à explorer avec
des perspectives de développement unanimement reconnues, et encouragés aussi
bien par l’union européenne que par les institutions internationales à savoir la
banque Mondiale et le Fonds Monétaire International.
Et c’est par un partenariat réel inter-entreprises, entre autres, qu’on peut
évoluer vers une intégration naturelle et ériger le Maghreb en tant que force
économique, en mesure de se positionner dans le sillage d’un ordre international en
mutation.
Mesdames, Messieurs
Certes la situation actuelle des échanges inter-maghrébins laisse apparaître
une faiblesse des flux inter maghrébins qui contraste avec les taux des échanges des
pays Maghrébins avec l’union Européenne, qui reste le principal client et fournisseur
des pays Maghrébins.
Ainsi pour l’année 2004 et selon le dernier rapport du FMI ces échanges
étaient de 66% avec l’union européenne et ne dépassaient pas 3% entre les pays de
l’UMA.
Un taux très faible comparé à celui d’autres groupements régionaux à
titre d’exemple :14,8% pour Mercosur et de 21,6% pour l’Asean.
Si tous les économistes partagent globalement le même constat sur les
faiblesses des échanges inter-maghrébins, et les attribuent à des facteurs allant d’une
faible complémentarité, d’un manque de spécialisation des produits, à l’insuffisance
d’infrastructures et la faiblesse de la circulation des informations économiques ; ces
mêmes économistes s’accordent sur
la sous exploitation des potentiels du
développement des échanges. Potentiels très diversifiés, allant de l’agroalimentaire,
l’énergie, les produits de la mer, l’industrie pharmaceutique au secteur du tourisme.
Certes, une dynamique bilatérale existe, et malgré qu’elle soit en deçà des
attentes, elle ne peut que relancer la régionale.
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En termes de perspectives, et comme réponse aux études qui ont démontré
que le coût du non Maghreb reste très élevé en termes d’échanges commerciaux et
d’investissements, on ne pourrait que souscrire aux thèses affirmant que l’intégration
Maghrébine donnerait naissance à un marché régional de plus de 80 millions et
bientôt de 100 millions de consommateurs, et suffisamment vaste pour créer des
économies d’échelle.
Un marché qui ne pourrait que permettre aux entreprises Maghrébines d’être
plus compétitives dans un environnement globalisé, de réaliser leur plein potentiel,
surtout dans les secteurs à grande valeur ajoutée, de favoriser l’émergence de
producteurs puissants, de rendre la région plus attrayante aux investissements intermaghrébins et étrangers et voir les flux commerciaux intra maghrébins progresser.
Nul doute qu’un espace économique aussi large, doublé des quatre libertés ne
pourrait qu’accélérer le développement
socioéconomique et contribuer à
l’amélioration des conditions de vie des populations maghrébines, et surtout à créer
des emplois et permettre à nos jeunes un meilleur accès aux opportunités
économiques, d’autant que le taux du chômage dans les pays Maghrébins reste
relativement élevé ; pour l’année 2004 il a été de 14.2% en Tunisie, 17.7% en
Algérie et de 10.8% au Maroc.
Les mutations économiques intervenues au niveau régional, ne permettent plus
un marché étroit et cloisonné mais imposent plutôt, une nouvelle approche quant à
l’intégration maghrébine, intégration qui s’impose de plus en plus comme la seule
voie au développement.
De ce fait, il est devenu primordial de conférer au Maghreb une capacité à
mieux faire entendre sa voix pour défendre ses intérêts, comme il nous appartient de
repenser nos actions et, pourquoi pas, penser à mettre en place notre feuille de
route, plus ambitieuse, tout en revigorant l’esprit qui a présidé en 1989 à Marrakech.
Une feuille de route qui consisterait à faire un saut qualitatif dans nos objectifs,
à mobiliser les énergies maghrébines afin d’avoir un secteur privé performant et
pourvoyeur d’emplois durables, et d’assurer les bases d’une assise solide pour la
prospérité de notre région et en vue de stimuler le commerce, l’investissement et le
développement .
Il nous incombe aussi afin de créer un véritable espace économique régional,
cohérent et dynamique :
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- de fixer un nouvel ordre de priorités, ayant pour finalité de créer un
environnement efficient pour les échanges commerciaux et les
investissements
- d’harmoniser les réglementations et les normes ainsi que nos politiques
fiscales, bancaires;
- d’établir des conditions de concurrence harmonisées au niveau régional ;
- d’avoir une approche commune vis-à-vis de la concurrence internationale ;
- de supprimer progressivement les obstacles administratifs pouvant
restreindre le développement des échanges inter-maghrébins à l’instar des
mesures prises dans le cadre des accords d’association avec l’ Union
Européenne.
Ces mesures devraient aussi comprendre l’élimination des obstacles au
commerce des services, en oeuvrant pour l’harmonisation de la réglementation des
services, car l’adhésion à l’économie mondiale passe par un pouvoir de production et
des services, ainsi qu’une meilleure circulation des facteurs de production entre pays
maghrébins.
D’après une étude (de la Banque Mondiale) pour arriver à une intégration plus
profonde il faudrait la libéralisation conjointe du commerce des biens et des services
notamment les télécommunications et le transport, ce qui engendrerait une
diminution des coûts et une amélioration de la qualité.
L’association du secteur privé est un préalable incontournable, condensé de
puissance et principal moteur de la croissance, il est la voie à la productivité et au
plein emploi, de ce fait il est primordial qu’il joue le rôle qui lui est dévolu.
A cet égard, une concertation plus approfondie des opérateurs économiques et
leur participation à la mise en œuvre des réformes pourraient contribuer à renforcer,
dans une large mesure, les perspectives de croissance économique de l’espace
maghrébin.
D’autre part, et face à la perspective de la zone de libre échange Euromed d’ici
à 2010, c’est-à-dire demain, les pays de l’Union du Maghreb Arabe seront confrontés
à une plus grande compétitivité de 30 pays du pourtour méditerranéen.
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Et nos pays n’ont d’autres alternatives que de s’engager dans la construction
d’un marché économique Maghrébin afin de pouvoir se forger un
ancrage
prometteur dans l’espace Euro Med.
D’ailleurs, les accords d’association avec les trois pays Maghrébins insistent sur
l’intégration horizontale entre eux. Ces accords stipulent que « la coopération
encouragera l’intégration économique Maghrébine par la mise en œuvre de toute
mesure susceptible de concourir au développement de ces relations intra
Maghrébines ».
Et compte tenu de l’adéquation des intérêts Maghrébins et Européens, et de
l’impact du développement du Maghreb sur la sécurité de l’Union Européenne,
l’instauration d’un partenariat plus équilibré s’impose.
Mesdames, Messieurs,
Nul doute que dans un monde qui ne cesse d’évoluer, où les enjeux de la
mondialisation pèsent sur les entreprises, nos entreprises maghrébines, doivent
composer et faire face aux contraintes du développement du marché qui dominent la
conjoncture économique mondiale actuelle.
Les défis tels que la concurrence croissante, notamment celle des pays dits
émergents, les changements technologiques les exigences réglementaires, les
facteurs humains, commandent la nécessité pour nos entreprises d’avoir une
approche commune vis à -vis de la concurrence internationale, et de se donner
collectivement les moyens de lever les obstacles au développement.
Mais peut on pour autant dire que les termes de concurrence et
complémentarité sont antinomiques ? A mon sens nos entreprises doivent juste tirer
profit de leurs atouts afin de passer d’une logique de concurrence à une logique de
complémentarité. Une concurrence qui doit se jouer sur la qualité, les services et
l’innovation; et une complémentarité au niveau du marché du travail, au niveau du
marché des matières premières d’où l’urgente nécessité de créer des partenariats
interentreprises.
Cette complémentarité pourrait en effet, permettre aux entreprises de mieux
s’implanter dans les marchés africains subsahariens et d’envisager celle d’un marché
potentiel à proximité, le marché Européen.
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Une approche à mon sens complémentaire est nécessaire quant aux actions
menées par nos entreprises à savoir, œuvrer à créer un environnement pour favoriser
la croissance et l’innovation au sein des entreprises, et ce en développant les
technologies de l’information et de la communication qui demeurent un élément
primordial dans les gains de la productivité et sur les conditions de concurrence
future.
L’objectif étant d’être en mesure d’affronter un espace compétitif qui se profile
à l’horizon 2010, avec la zone de libre échange Euromed, l’Europe élargie, une
politique de délocalisation des entreprises européennes au profit des pays asiatiques
compte tenu des différences d’avantages comparatifs; nos entreprises n’ont d’autres
alternatives que de renforcer les liens entre les professionnels; de créer des projets
porteurs d’une valeur ajoutée pour créer des emplois et augmenter les capacités
technologiques ainsi que partager le savoir faire des entreprises. Et ce afin de pouvoir
résister à la concurrence de puissants partenaires Euroméditerranéens.
Mesdames, Messieurs,
Nul doute que l’action conjuguée des opérateurs économiques pour une
intégration plus profonde, est la seule réponse possible aux défis réels de la
croissance et de la création d’emplois. Et surtout l’emploi des jeunes diplômés, parmi
les jeunes nouveaux entrants sur le marché du travail, ce qui leur donnera la
possibilité de porter un regard neuf sur l’impact du processus d’intégration
maghrébine et éviter la fuite des cerveaux.
Le dessein maghrébin demeure la seule cause mobilisatrice de notre jeunesse
contre les mouvements extrémistes, et contre l’érosion humaine vers l’Europe.
Tout en livrant ces réflexions à votre appréciation, qu’il me soit permis de
conclure mon intervention sur une note optimiste et d’assurer que pour tous nos
dirigeants Maghrébins l’intégration maghrébine demeure une option irréversible, cette
rencontre le confirme.
Une grande ambition aussi, à vous, acteurs économiques de la rendre réelle en
conjuguant vos efforts, et en oeuvrant de concert pour cultiver le sens de l’intérêt
collectif et développer l’envie d’entreprendre Maghrébin et de défendre le label
Maghrébin.
Je forme tous mes vœux que les travaux de cette rencontre soient couronnés
de succès, et puissent dégager des lignes prioritaires d’action.
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