Interview de M. Dino Fumasoli, Responsable du département

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Interview de M. Dino Fumasoli, Responsable du département
Zahnmedizin aktuell
Interview de M. Dino Fumasoli, Responsable
du département des ventes de Cendres et
Métaux SA, Bienne
Anna-Christina Zysset (Traduction française de Thomas Vauthier)
J’ai fait la connaissance de la société Cendres et Métaux pour la première fois lorsque je travaillais encore pour la Croix-Rouge suisse (CRS). CM a libéré un grand nombre de personnes
bénévoles travaillant pour la CRS d’une tâche à la fois extrêmement rebutante et pas très hygiénique, à savoir celle d’ouvrir les enveloppes contenant des dents extraites. En effet, jusqu’aux années quatre-vingt, les patients envoyaient eux-mêmes directement à la CRS leurs
dents extraites porteuses de restaurations en alliage précieux, le contenu étant, comme il se doit
soigneusement emballé dans du papier de soie. Depuis l’avènement du problème du sida, les
responsables ont toutefois cherché à trouver une solution plus hygiénique et la société CM est
venue à la rescousse de la Croix-Rouge suisse pour résoudre ce problème.
Dans cet entretien avec Monsieur Fumasoli, j’ai souhaité en savoir davantage sur CM.
Anna-Christina Zysset: Pouvez-vous nous
dresser un bref portrait de CM et de ses activités principales?
Dino Fumasoli: CM est une entreprise
spécialisée dans le traitement des métaux
précieux. Nous développons, fabriquons
et commercialisons des produits spéciaux
pour les domaines de la médecine dentaire, de la bijouterie et de l’industrie. Le
recyclage et la récupération des déchets
contenant des métaux précieux représente une part importante de nos activités. Il se trouve que le volume le plus important de ces déchets provenant de la
fabrication de nos propres produits. Toutefois, nous achetons également des déchets envoyés par nos clients (cabinets
dentaires, laboratoires dentaires, entreprises industrielles, etc.); à noter que
nous traitons également des déchets
d’un certain nombre clients se trouvant à
l’étranger. Notre service de recyclage et
de récupération traite essentiellement les
métaux suivants: or, platine, argent et
palladium.
Quel est le nombre de personnes travaillant
dans votre entreprise?
Actuellement, quelque 250 collaborateurs sont employés chez nous.
En 1992, vous aviez réalisé un essai pilote
avec une nouvelle installation destinée à la
séparation et la récupération du mercure, selon un procédé qui avait été mis au point par
CM. Cette installation est-elle encore en
fonction actuellement ou a-t-elle été modifiée
depuis? Cet équipement spécial a-t-il fait ses
preuves et a-t-il été rentable également du
point de vue économique?
En fait, cette installation destinée à la séparation et la récupération du mercure
n’a jamais été exploitée de manière pro-
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ductive. Le matériel collecté et retourné
par les médecins-dentistes a d’abord dû
passer par un tri manuel. Par la suite, les
matières toxiques ont été acheminées
vers des spécialistes pour finalement être
éliminées par des procédés respectueux
de l’environnement (par la société Batrec
à Wimmis). Grâce à un nouveau système
de facturation (selon débours pour le
traitement des déchets), nous cherchons
à améliorer la discipline des médecinsdentistes en matière de recyclage. Car
tout déchet émanant du cabinet ne doit
pas être jeté indifféremment dans le
conteneur des «déchets spéciaux».
Ces derniers temps, le thème de la protection
de l’environnement a été relégué au second
plan des préoccupations de la politique. Cette situation a-t-elle eue des répercussions sur
les volumes de déchets de métaux précieux
recueillis?
De tout temps, des déchets de métaux
précieux ont été collectés et recyclés, et il
en sera de même à l’avenir également.
Notre contribution en matière de protection de l’environnement a consisté à recueillir les déchets, bien que depuis mijuillet 2001, ce soit la société Batrec à
Wimmis qui a assumé ce rôle.
Depuis 1994, les déchets d’amalgame
sont recueillis par Cendres et Métaux auprès des cabinets dentaires, en vue de
leur acheminement et retraitement et/ou
élimination respectueuse de l’environnement par la société Batrec. Cette société,
créée en 1989, et bien connue depuis
dans toute la Suisse, a pour objectif de recycler les piles domestiques usagées qui,
comme les amalgames dentaires, contiennent du mercure. Le mercure récupéré est ensuite vendu aux fabricants de
matériel de laboratoire et d’appareils de
mesure. La pureté du mercure récupéré
se situe entre 99,995% et 99,99995%, ce
qui correspond au niveau exigé par les
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repreneurs. Le mercure distillé est destiné entre autres à la fabrication d’appareils de polarographie qui permettent
d’analyser différents éléments contenus
dans l’eau. En outre, le mercure continue
à être utilisé dans les appareils de mesure
de la tension artérielle. Par contre, les
thermomètres médicaux (pour le mesure
de la fièvre) contenant du mercure ont en
grande partie disparu, pour céder la place
à des thermomètres électroniques. La
société Batrec traite également d’autres
déchets souillés de mercure, comme des
boues de filtration des eaux usées, ainsi
que des revêtements de place de sport
(tartan), des condensateurs et des relais.
L’activité principale reste toutefois le recyclage des piles usagées. L’entreprise
compte quelque 55 collaborateurs, qui
ont fort à faire en raison de la logistique
lourde nécessaire à la récolte et au traitement des déchets contenant du mercure.
Les déchets provenant des cabinets dentaires sont actuellement récupérés en
premier lieu par la société Marti Logistik.
Il est indéniable que la société Batrec
assure ainsi une part importante dans les
efforts de protection de l’environnement
en Suisse.
Quelles sont vos possibilités d’agir contre les
tricheurs notoires?
De notre côté, nous n’avons aucune possibilité d’«épingler» les contrevenants
notoires. La responsabilité à ce propos
incombe à l’OFEFP (Office fédéral de
l’environnement, des forêts et du paysage) à Berne.
Lorsque vous l’évaluez à une échelle temporelle plus vaste, disons 5, 10 ou 15 ans, diriez-vous que le taux de récupération en vue
du recyclage des métaux précieux s’est amélioré?
Le recyclage de matières précieuses vaut
et vaudra toujours la peine. Il est évident
que le rendement est tributaire des prix
du marché des métaux précieux à un moment donné. D’un autre côté, mieux les
matériaux précieux auront été triés par
rapport à des matières viles, et moins
l’effort de retraitement sera important, et
meilleur sera la rendement financier. De
ce fait, dans le domaine de la récupération et du recyclage, il convient dans tous
les cas de s’astreindre à une discipline
dès le départ.
Cause en or CRS
L’action «Vieil or» de la CRS prouve que
rassembler et recycler des métaux précieux est toujours avantageux. Rendre la
vue à une personne lui permettant ainsi
L’actualité en médecine dentaire
L’histoire de l’entreprise Cendres & Métaux SA (CM) remonte
au siècle dernier. C’est à cette époque que Louis Aufranc créa,
à Biel-Bienne, bourgade bilingue qui fut considérée à l’époque
comme la métropole de l’horlogerie, une petite fonderie de
métaux précieux consacrée essentiellement à la refonte de
vieux bijoux et au traitement de déchets contenant des métaux
précieux et provenant de la fabrication des boîtiers de montres. L’objectif de l’entreprise était de récupérer les métaux
précieux contenus dans ces déchets. Ces derniers étaient brûlés et produisaient, d’un côté, des cendres, et de l’autre, des
métaux. Ce sont ces deux produits qui ont donné son nom à
l’entreprise. Ce nom a été déposé en 1924, après la fondation
de l’entreprise en société anonyme.
Alors que le traitement et la fonte de métaux précieux et de déchets (balayures) représentaient les activités principales de la
jeune société, son domaine d’activité s’est considérablement
élargi au fil des ans. La fabrication d’alliages de métaux précieux de très haute qualité pour les usages dentaires et industriels, pour la bijouterie et pour l’industrie électronique, ainsi
que la réalisation de bijoux en métaux précieux ont constitué
les points forts du développement permanent de l’entreprise.
Aujourd’hui, CM a acquis une réputation internationale pour
la fourniture d’alliages, d’attachements et de produits endodontiques pour la médecine dentaire. CM s’est fixée pour objectif de développer sans cesse des produits nouveaux, innovateurs et intelligents tant pour la médecine dentaire que pour
de nouveaux marchés, par exemple le domaine de la médecine en général.
Dans le segment de la technique dentaire, CM Dental développe et fabrique plus de trente alliages de métaux précieux différents pour la technique de couronnes et de bridges. Fait en
outre partie de sa gamme de produits toute une série d’attachements et de pièces auxiliaires nécessaires à leur réalisation.
Le segment médecine dentaire est desservi par une gamme
de travailler à nouveau et donc de redevenir indépendante, est un bienfait inesti-
d’endodontie exceptionnelle dont les produits sont fabriqués à
partir de matériaux biocompatibles. CM Dental travaille en
étroite collaboration avec plusieurs universités et différentes
institutions spécialisées.
CM Recycling. Depuis ces origines (refonte de vieux bijoux et
traitement de déchets contenant des métaux précieux provenant de la fabrication des boîtiers de montres), le recyclage est
de tradition chez CM et en est l’un des domaines principaux.
Appelé dès lors CM Recycling, le département du retraitement
des déchets a comme objectif de récupérer des métaux précieux purs (or, argent, platine et palladium). CM Recycling
accepte tous les matériaux et déchets contenant ces métaux.
Après réception, les marchandises sont soumis à des traitements en deux étapes. D’abord une étape d’homogénéisation
par laquelle les déchets sont convertis en un matériau homogène pouvant être analysé de manière précise, puis une étape
d’analyse qui permet de déterminer de façon précise les taux
des métaux fins. Ce n’est que cette analyse qui permet le décompte précis avec le client. La deuxième étape, comprenant
la fonte et séparation des différents métaux, se base sur des
procédés chimiques et électrolytiques qui permettent de récupérer des métaux fins d’une pureté supérieure aux standards
usuels. Ces métaux précieux de grande pureté seront avant
tout utilisés en tant que matières premières pour la production
d’alliages dentaires et d’autres produits CM.
Le commerce des métaux précieux est soumis à la Loi sur le
contrôle des métaux précieux (LCMP) du 20 juin 1933 et par
conséquent à la surveillance par l’Administration fédérale des
douanes. Les analyses en vue des décomptes sont placés sous
la responsabilité d’essayeurs jurés fédéraux agissant à titre
d’indépendants.
A noter que les eaux usées et l’air d’évacuation des usines de
CM subissent de contrôles continus et un retraitement et une
purification en conséquence.
mable. Ne nous laissons donc pas décourager et laissons-nous plutôt enthousias-
Une cause en or
Croix-Rouge suisse
Dents en or ou bijoux usagés du même métal... Ces objets insolites sont régulièrement envoyés
à l’entreprise Cendres & Métaux à Bienne, spécialisée dans la fonte des métaux précieux. Car
le produit de ce recyclage vaut de l’or, au vrai sens du terme. A l’origine de cette initiative,
l’action «Vieil or – Redonner la vue», menée depuis plusieurs années auprès des médecinsdentistes et de leurs clients. Les fonds ainsi récoltés servent à financer des projets ophtalmologiques axés sur la prévention et les soins dans les régions les plus pauvres du monde.
Il y a une vingtaine d’années, un médecin-dentiste de Suisse orientale nommé
Max Schatzmann eut une idée de génie:
si une seule dent en or n’a qu’une faible
valeur pour le patient, pourquoi ne pas
les collecter toutes pour les refondre et
affecter ensuite les recettes de l’opération
à un projet humanitaire? Cette heureuse
initiative a donné naissance à l’action
«Vieil or», menée depuis lors sous l’égide
de la Croix-Rouge suisse.
Pourquoi l’ophtalmologie plutôt que
la médecine dentaire?
Dans les pays du tiers-monde, plus de
45 millions de personnes souffrent de cécité... et des graves conséquences socioéconomiques que cette infirmité entraî-
mer par des hommes géniaux comme
Max Schatzmann (Une cause en or). ■
ne. L’ignorance des mesures d’hygiène
élémentaires permettant de prévenir les
maladies oculaires, la malnutrition, l’absence d’infrastructures médicales et de
personnel spécialisé sont les principales
causes de cet handicap. Il est heureusement possible d’obtenir d’excellents résultats avec peu de moyens. La somme
de 50 francs suffit par exemple à financer
une opération de la cataracte, et un seul
tube de pommade ophtalmique permet
de soigner un trachome, affection douloureuse et contagieuse. Il semblait donc
judicieux de donner la priorité aux soins
oculaires plutôt qu’aux soins dentaires.
C’est ainsi que dès la création de l’action
«Vieil or», il a été décidé de consacrer
l’intégralité des recettes aux projets ophtalmologiques de la Croix-Rouge suisse
en Afrique et en Asie.
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L’actualité en médecine dentaire
place ainsi qu’aux nombreux volontaires
de l’organisation, il est possible de traiter
et de soigner chaque année des milliers
d’enfants et d’adultes. La Croix-Rouge
suisse soutient ainsi l’objectif de l’OMS, à
savoir éliminer la cécité évitable dans le
monde d’ici à 2020, conformément au
projet «VISION 2020 – Le droit à la vue».
Les recettes provenant de la fonte des métaux précieux ont augmenté de manière croissante au cours des 20 dernières années. En revanche, il n’est pas possible
d’évaluer le produit moyen par don. Pour des raisons d’hygiène, les enveloppes
individuelles envoyées par les patients ainsi que les envois groupés effectués par
les médecins-dentistes ne sont pas ouverts à la Croix-Rouge suisse. Ils sont transmis à la maison Cendres & Métaux, qui fond l’or dentaire en même temps que
d’autres objets usagés en or, comme les bijoux.
La Croix-Rouge suisse déploie en premier lieu ses activités dans les régions reculées, où le système de santé est défi-
cient. Grâce à un réseau de cliniques
ophtalmologiques et de dispensaires bien
équipés, au personnel local formé sur
Un geste qui compte
Pour remplir ses missions, la Croix-Rouge suisse est tributaire du soutien des
médecins-dentistes et de leurs patients.
Les membres de la SSO sont régulièrement invités à participer à l’action «Vieil
or» et informés de l’utilisation du métal
récolté. L’objectif est que toujours plus de
médecins-dentistes adhèrent à cette cause en or: en effet, chaque dent en or permet à une personne de recouvrer la vue.
Croix-Rouge suisse
Action «Vieil or – Redonner la vue»
Rainmattstr. 10
3001 Berne
tél. 031/387 71 11
CP 30-9700-0 ■
Grâce à une opération de la cataracte à l’œil droit, cette
jeune mère ghanéenne a totalement recouvré la vue.
Au Ghana, les ophtalmologues et le personnel soignant se
rendent dans les villages où ils se contentent de dispenser
des soins de base, faute de moyens.
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Ce commerçant népalais est heureux: il
a recouvré la vue et
peut à nouveau travailler.

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