1 STAR OU VEDETTE : THAT`S THE QUESTION C - a2i
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1 STAR OU VEDETTE : THAT`S THE QUESTION C - a2i
STAR OU VEDETTE : THAT’S THE QUESTION C’est en parcourant le paysage médiatique sénégalais que m’est venu l’idée de revisiter un ouvrage paru, il y a plus de trente ans, pour comprendre encore mieux et partager avec mes compatriotes l’approche que son auteur, en l’occurrence Jacques SEGUELA, a de ce qu’est une star. Il s’agit, à la lumière de ma relecture, d’inviter tout simplement à une réflexion sur la problématique de la star et de la vedette, sans tirer des conclusions hâtives sur qui, dans notre environnement médiatique et artistique, rassemble les conditions pour être identifiées à l’une ou à l’autre. Sauf que, à mon humble avis, la première semble se positionner sur le registre de la durabilité et la seconde sur celui de l’éphémère. « Hollywood lave plus blanc », puisqu’il s’agit de cet ouvrage, paru aux éditions Flammarion en 1982, est une analyse fine des caractéristiques de la star par rapport à la vedette, à travers la reconstitution d’une méthode utilisée depuis 1910, par l’industrie naissante du cinéma américain, avec les grandes compagnies cinématographiques, comme la Warner Bros et la Metro Goldwin Mayer : « le star système» ou comment fabriquer une star ? Cette méthode, née de la rude concurrence entre ces « majors », a largement transformé le monde du spectacle et des artistes, notamment du point de vue de leur management personnel. Elle a réussi à inverser les rôles pour faire de simples humains des mythes. C'est-à-dire, à faire de simples acteurs inconnus et éphémères, des stars, des étoiles qui brillent de tous leurs feux, dans notre imaginaire submergé de stress et de messages publicitaires. Dans cette turbulence médiatique, seule les stars émergent avec une constance presque absolue. James DEAN, Marylin MONROE, Romy SCHNEIDER, John WAYNE, John LENNON…sont morts mais restent d’éternels jeunes gens qui ont su nous donner de véritables leçons du « savoir partir » et non du « savoir vieillir ». Un cancer, une Porsche lancée à toute vitesse, une dépression, un névrosé criminel ont eu raison de ces stars et leur ont donné l’occasion de durer, dans l’inépuisable bourse de nos phantasmes. Selon SEGUELA, « La star est un être unique et multiple en qui chacun s’identifie et qui s’identifie à tous » parce qu’elle réussit à la fois le triple effet de convaincre, durer et séduire. Elle convainc en nous poussant inconsciemment à nous affilier à ses actes. Nous faisons ce qu’elle veut, adorons ce qu’elle exhibe et agissons comme elle pense. « Clark GABLE, le premier à l’écran, se montra sans T.shirt, nu sous sa chemise, dans le film New- York- Miami. Les ventes de maillots de corps s’effondrèrent. Le syndicat des bonnetiers suppliât que l’on censurât la scène. Gable exigea qu’on leur donnât raison. Les ventes repartirent ». 1 Cette capacité de convaincre est naturelle chez la star et lui donne sa raison d’être : faire acheter. C’est parce qu’elle arrive à nous affilier à tous ses actes que tout ce qu’elle a se vend. Et s’achète. « Plus la star vend et mieux elle se vend ». Sa voix, son geste, son jeu, ses apparitions sont autant de produits dont nous ne demandons jamais le prix et que nous ne marchandons jamais. Parce que le rêve n’a pas de prix. La star dure parce qu’elle est immortelle. C’est pourquoi, affirme SEGUELA, les hommes et les femmes de l’éphémère ne sont rien d’autre que des vedettes parce que notre imaginaire, c’est comme à la bourse, nous n’y rangeons que des valeurs sures, mais stables. Durer pour une star est donc capital mais éprouvant. C’est paraître tous les jours et satisfaire toujours plus le public. Comme à la TV, le présentateur est la vedette et la chaîne reste la star. La boite magique ne lasse pas, mais le présentateur qui ne fait plus le spectacle, disparaît de la chaîne. « Durer c’est chaque fois donner son âme et ne jamais la perdre. C’est se renouveler sans changer, être le maître du temps, ne jamais vieillir, ne jamais mourir ». La star séduit parce qu’elle communique. C’est parce qu’elle a une capacité éternelle de plaire qu’elle accroche son public avec ténacité et constance. Mais ce triptyque « convaincre, durer, séduire » ne suffit pas pour faire une star. Il faut avant tout réinventer une personnalité à la personne, qu’elle soit déjà vedette ou simple personne. Faire une star, c’est rendre extraordinaire une personne ordinaire, du point de vue des trois composantes de sa personnalité que sont le physique, le caractère et le style. Ainsi, la personnalité devient-elle extraordinaire lorsque le physique convainc, le caractère dure et le style séduit. Clark GABLE héros d’un des films les plus célèbres du cinéma américain, « Autant en emporte le vent » est né d’une moustache, John WAYNE, l’acteur américain qui a rendu le Western à la postérité, est né d’une démarche devenue légendaire. Marilyn MONROE est née d’une chevelure blonde et d’une robe qui flotte au vent, sous la bouche d’un métro. Coca Cola est née d’une bouteille et …des bulles, Marlboro est né d’un cow-boy. Les personnes stars à l’instar des marques stars se sont toutes affirmées avec un physique convaincant. Toutefois « la gueule » ne suffit pas à modeler la star (Mais qu’est-ce qu’elle a ma gueule chantait Johnny HALLIDAY !). « Le physique doit être le signe extérieur d’une richesse intérieure » qui se nomme le caractère. La star se forge aussi par l’affirmation d’un caractère qui est à la fois son « fond et son fonds de commerce ». « C’est l’être, dans toute sa plénitude, qui révèle la valeur profonde du paraître ». C’est le caractère qui valorise le physique. Ainsi, le cow-boy rêveur de Marlboro reflète t-il la sérénité et « incarne t-il à jamais l’homme tranquille qui sommeille en chacun des hommes pressés que nous sommes ». C’est le dynamisme de Marilyn Monroe qui, en affirmant son corps plantureux et ses formes généreuses, a créé des vibrations érotico sensuelles, chez ses fans, à travers le monde. Plus proche de nous, MADONNA Lady GAGA, 2 RIHANNA, Jennifer LOPEZ exhibent le même dynamisme et créent l’hystérie collective à chacun de leurs shows. Cependant, le physique et le caractère s’expriment à travers un style dont la fonction est de plaire, donc de communiquer. Le style rassemble les constantes d’exécution que la star utilise pour se faire remarquer, mais aussi pour affirmer son caractère. Marilyn, c’est la robe moulée à même le corps, Coca- Cola c’est huit lettres rapidement reconnaissables mais… inimitables. Coluche c’est une saloppette, Marlboro ce sont les grands espaces de l’ouest américain, c’est un cow-boy aux yeux couleur jean délavé, Madonna c’est la provocation. Parce qu’on n’est pas extraordinaire à n’importe quel prix ; parce que le physique, le caractère et le style doivent répondre à des conditions particulières : la star est, sous ce registre, exigeante, honnête, réaliste et confiante vis-à-vis de son physique. L’exigence consiste à se doter d’un physique qui défie le temps : la chemise à carreaux et les lunettes de Woody ALLEN, les lunettes de John LENNON, la moustache de Clark GABLE sont indémodables. L’honnêteté consiste à ne pas se focaliser sur les points forts de son physique, mais à profiter des faiblesses. « L’imperfection aide à sortir de l’anonymat plus sûrement que la perfection, avec l’incontestable avantage que se partagent la laideur et le bon vin, de se bonifier en vieillissant ». Serge GAINSBOURG trouvait qu’il était laid et a réussi à se faire aimer avec sa laideur et ses complexes. John WAYNE fit graver sur sa pierre tombale : « laid, fort et régulier » (fue, fuerte y formal). Autre condition du physique, garder le sens des réalités. Puisque la star a une valeur marchande, être réaliste consiste pour elle à se vendre, conformément aux besoins de son public. La confiance dans le physique c’est ne pas s’entourer de complexes inutiles. « L’important dans le physique n’est pas dans ce qu’il est mais ce qu’il nous permet ». Mohamed ALI mettait KO ses adversaires parce qu’il était grand. CHARLOT était petit et savait divertir. La confiance dans le physique ne naît d’ailleurs pas du qualificatif « grand » ou « petit » mais du verbe d’action qui subordonne ce qualificatif : mettre KO, faire rire… Le caractère de la star doit être élémentaire, sincère, archétypal et symbolique. Dans l’espace sur agitée des marques, le monde en reconnaît à peu près une centaine sur des milliers et dans celui du cinéma, parmi la multitude d’acteurs seuls quelques uns ont émergé du lot. C’est à la fois une question de caractère et de simplicité dans ce caractère : « le public a toujours préféré les dieux simples. A ses motivations primaires, il veut des réponses primaires ». 3 La deuxième condition du caractère c’est d’être archétypal, c'est-à-dire être en adéquation totale avec les valeurs essentielles (générosité, équité, amour, etc.) afin de provoquer l’identification populaire et universelle qui sont l’apanage de la star. La troisième condition du caractère est la sincérité. Présentant Kirk DOUGLAS, le père de Michael du même nom, comme un homme tendre et calme dans une interview, une journaliste reçu de lui une lettre lui signifiant que « si elle persistait à détruire une réputation qu’il avait eu tant de mal à établir, il l’a poursuivrait en justice ». En effet, le célèbre père de Michael DOUGLAS, vivant sincèrement ses passions et ayant acquis l’art d’avouer ses faiblesses, disait que sa première qualité c’est que le public aime le haïr. Or la journaliste le présentait sous un angle différent à ce même public. La leçon, à en tirer, selon SEGUELA, c’est que fondamentalement, « la sincérité est à la réussite ce que la fidélité est à l’amour, le garant de sa longévité ». La dernière exigence du caractère, selon SEGUELA, c’est d’être symbolique. Si le star system consiste à transformer la vie privée d’une personne ou d’une vedette en vie publique, il est important de rendre cette vie palpitante en lui accrochant des symboles qui produisent le rêve auprès du public. Ceci est valable pour les marques stars comme pour les personnes stars. En lançant la fameuse campagne des produits libres des hypermarchés Carrefour, à la fin des années 70, les affiches n’ont pas montré les produits, ni vanté leurs mérites, encore moins la modicité des prix. Elles ont plutôt centré le message sur un ciel bleu dans lequel volait une mouette blanche. « En leur donnant la liberté et les ailes de la mouette dominant l’azur, nous les avons changé en symbole ». Le style étant l’expression du caractère, la star doit le soigner, pour assurer son succès. Cette troisième composante de la personnalité est également régie par quatre conditions. Le style doit être : fastueux, événementiel, harmonique et jusqu’auboutiste. Le caractère fastueux du style consiste pour la star à assurer le spectacle et dans cet exercice, les moyens font la différence. Citant l’exemple de Kirk DOUGLAS, SEGUELA explique comment en y mettant tous ses moyens financiers, en hypothéquant sa maison et en faisant travailler gratuitement sa famille, il a réussi de façon spectaculaire, à conquérir son public et faire des bénéfices énormes en deux ans sur deux les deux films les plus importants de sa carrière : « Les vikings » et « Spartacus ». Francis Ford COPPOLA a réussi le même challenge avec son film culte sur la guerre du Viêt-Nam, « Apocalypse now ». « La finalité du style est l’événement », deuxième condition de son expression par la star. Dans un paysage artistique et médiatique où les messages sont surabondants, il faut savoir se faire remarquer et étonner toujours plus son public, sans tomber dans la morosité. 4 Exercice difficile, dans la mesure où, « se répéter sans se redire », changer dans la continuité, n’est pas facile. C’est le défi que s’impose depuis de nombreuses années le cow-boy de Marlboro, de changer à chaque campagne et de rester toujours le même. Ce changement dans la continuité reste l’un des souffles forts de la star. Enfin, si le caractère est intangible, le style doit suivre voire épouser les évolutions sociologiques sans trahir son adéquation avec le physique et le caractère. Engagement suprême de veille et d’anticipation sur un monde dont les évolutions et les révolutions se font et se défont à un rythme extrêmement rapide. A cet effet, J. SEGUELA cite l’engagement de Jane FONDA à travers son militantisme affichée notamment pour la guerre du Viêt-Nam et mai 68 : « la starlette sex- stéréotypée a gravi les échelons des courants socioculturels pour incarner la star d’aujourd’hui ». Dans un Paris Match récent, Jane FONDA, 74 ans maintenant, avoue adorer faire l’A…..A cet âge ! Le débat est ouvert sur le sujet. Qu’il soit serein et dépassionné. Ainsi soit le Star System ! Yatma Mody NDIAYE Juriste d’affaires, Ingénieur marketing et stratégie Expert commercial agrée ONEEAS, Consultant et Formateur Directeur a2i-Conseils +221 77 639 43 83 [email protected] [email protected] [email protected] 5