Malaise dans les musées du Québec

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Malaise dans les musées du Québec
Les 50 ans du métro de Montréal
L’imaginaire littéraire sous terre Page F 1
◆
VO L . C V I I
No 2 3 4
J USTIN T RUDEAU ,
LE
DEVOIR,
LES
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SAMEDI
15
ET
DIMANCHE
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16
OCTOBRE
2016
DOUZE MOIS PLUS TARD ...
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= 3 , 2 5 S|
Malaise
dans les
musées
du Québec
L’État redistribue
son aide, enlevant
aux uns pour
redonner aux autres
CAROLINE MONTPETIT
e Musée québécois de la culture populaire
de Trois-Rivières doit faire face à des comL
pressions budgétaires de plus de 1,6 million
JACQUES NADEAU LE DEVOIR
Justin Trudeau profite d’une longue lune de miel, les sondages continuant de lui être favorables. Mais certains commencent à être plus critiques.
Grande séduction et petites désillusions
La popularité des libéraux ne se dément pas, mais l’impatience commence à poindre
HÉLÈNE BUZZETTI
Correspondante parlementaire
à Ottawa
M
ercredi, un an se sera écoulé depuis la victoire électorale décisive de Justin Trudeau. Treize pleines lunes de miel, aimerait-on
dire, tellement les libéraux caracolent en tête
dans les sondages. Pourtant, sous ce vernis d’un
gouvernement suscitant l’approbation généralisée, sourdent quelques égratignures. L’usage du
pouvoir commence à laisser des marques.
Le conflit le plus important qui se profile à
l’horizon est sans conteste celui avec les provinces en matière de santé. À compter de 2017,
les transferts que verse Ottawa croîtront de 3 %
par année, alors qu’ils augmentaient plutôt de
6 % depuis 2004. Le manque à gagner s’élève à
un milliard de dollars par an (écart qui ira grandissant à la longue). Les provinces ont déjà,
Dossier ›
Québec-Ottawa, la relation retrouvée.
Page A 4
L’anti-Trump qui séduit l’Europe. Page A 5
Une opposition en déroute. Page A 6
VOIR PA GE A 10 : SÉDUCTION
d’ici 2020, relativement à la révision des critères d’attribution du programme d’aide au
fonctionnement pour les institutions muséales
(PAFIM). Pas moins de
34 musées seront touchés Les dirigeants
par une baisse de leurs subventions, 21 musées saison- du Musée
niers, ouver ts moins de de la culture
40 semaines par année, n’en
recevant tout simplement populaire de
plus par l’intermédiaire du
PAFIM en 2019-2020. Ces Trois-Rivières
coupes sont ef fectuées en
vont
dépit du fait que le budget
du programme augmentera rencontrer
de 900 000 $ durant la
même période.
le ministre
Le Musée québécois de la
culture populaire est le plus de la Culture
touché. En 2015-2016, il a
reçu un octroi de 1 235 000 $ pour un budget de
2,5 millions. En 2019-2020, il ne recevra plus
que 524 812 $. Les dirigeants du musée estiment ainsi leur manque à gagner à 1 636 000 $
d’ici 2020.
Les données du ministère, obtenues par Le
Devoir, indiquent que d’autres établissements
verront leurs subventions baisser radicalement.
La Fondation du Domaine Joly-De Lotbinière, en
VOIR PA GE A 10 : MUSÉES
Zacharias Kunuk, le passeur de traditions
A UJOURD ’ HUI
ODILE TREMBLAY
Culture › La Biennale de Montréal. Faire de la métropole une
plaque tournante de l’art contemporain. Le commissaire de la neuvième édition reste humble devant le défi proposé. Page E 1
E
Avis légaux.................. C 7
Carrières ..................... C 5
Décès............................ C 8
Mots croisés .............. D 4
Petites annonces ...... C 8
Sudoku ........................ D 4
nfant puis adolescent, au centre
communautaire d’Igloolik (dans
l’actuel Nunavut), Zacharias Kunuk,
qui avait été élevé à l’ancienne par
un père chasseur inuit, découvrit le
cinéma « des films de cowboys et d’Indiens » en
16 mm. Ces wester ns lui sont tombés dans
l’œil, avec John Wayne surtout.
Maintes décennies plus tard, le cinéaste
d’Atanarjuat, également sculpteur — qui avait
acheté à Montréal sa première caméra vidéo en
1981, avant de cofonder sa maison de production, Isuma Productions — a eu envie de rendre hommage au genre. The Searchers, chefd’œuvre de John Ford (1956), l’inspirait d’au-
tant plus que des histoires d’enlèvement de
femmes étaient courantes dans l’Arctique entre
nomades. « Au cours de ces rapts, ils ficelaient
les jambes des femmes pour les empêcher de bouger. À la première de Maliglutit à Igloolik, ce
mois-ci, dans l’école municipale, une aînée qui
avait assisté au cours de sa jeunesse à un enlèvement du genre s’est presque évanouie en en retrouvant l’image à l’écran. »
Kunuk est le premier cinéaste inuit à avoir
tourné ses histoir es en inuktitut et avec une
équipe locale. Maliglutit (dont on ignore encore
la date de sortie en salles) est son troisième long
métrage de fiction. Il arrive 15 ans après Atanarjuat, qui lui valut la Caméra d’or à Cannes, avant
FNC
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Le cinéaste Zacharias Kunuk
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O C T O B R E
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ACTUALITÉS
SÉDUCTION
SUITE DE LA PAGE 1
dans une lettre, laissé planer la menace de ne
pas collaborer avec Ottawa sur le front des
changements climatiques si le dossier de la
santé ne se règle pas en leur faveur.
L’écar t monétaire entre les positions des
deux clans est moins grand qu’il n’y paraît. Car
Justin Trudeau mettra par ailleurs sur la table
une somme de trois milliards (sur trois ou quatre ans, il subsiste une ambiguïté à ce sujet)
destinée aux soins à domicile. Ce montant compense presque entièrement les transfer ts
moins généreux pendant le mandat libéral… Le
problème réside plutôt dans le fait que les provinces seront obligées de diriger l’argent vers
une activité particulière. « On doit d’abord financer les services déjà offerts avant de se lancer
dans de nouveaux programmes », a résumé le
ministre québécois Gaétan Barrette.
Cette adoption par les libéraux du taux de
croissance de 3 % décrété par les conservateurs
amène le NPD à reprocher au nouveau gouvernement de n’être qu’une version plus sympathique du régime de Stephen Harper. Il en a
pour autre preuve le dossier des changements
climatiques. Justin Trudeau a certes entériné
l’Accord de Paris, mais il n’a pas changé la cible
fixée par M. Harper — et jugée ridiculement timide à l’époque — de réduire de 30 %, d’ici
2030, les émissions de gaz à ef fet de ser re
(GES) du Canada par rapport à leur niveau de
2005.
En la matière, il faut dire que les actions
comme les inactions d’Ottawa suscitent de
vives critiques. Ainsi, l’engagement d’imposer
une taxe de 50 $ la tonne de carbone, d’ici 2022,
dans les provinces qui ne se seront pas dotées
d’un mécanisme de tarification des GES en irrite certaines. En Saskatchewan, Brad Wall menace de s’adresser aux tribunaux pour stopper
Ottawa.
L’insatisfaction commence aussi à se manifester chez les écologistes. La refonte du processus d’évaluation des projets d’oléoduc n’a
pas été faite et c’est en vertu des anciennes règles qu’Énergie Est sera évalué. En outre, le
premier projet d’oléoduc à avoir été présenté
au gouvernement Trudeau a été approuvé en
septembre. S’il est réalisé, la conduite de gaz liquéfié Pacific Northwest, en Colombie-Britannique, deviendra à elle seule un des plus
grands émetteurs de GES au Canada et fera
augmenter ses émissions annuelles de 0,75 %.
« Ce projet nous fait reculer alors qu’on ne peut
plus se le permettre », se désole Patrick Bonin,
porte-parole chez Greenpeace.
Relations de travail tendues
Les fonctionnaires ont aussi leurs raisons de
déchanter. Oui, les libéraux ont renoncé au
pouvoir, que s’étaient octroyé les conser vateurs, de désigner unilatéralement ce qui
MUSÉES
Une équipe rudoyée
ment, alertant la sécurité.
Pour sa part, la ministre des
Institutions démocratiques,
Mar yam Monsef, a essuyé
des demandes de démission
lorsqu’elle a admis qu’elle
n’était pas née en Afghanistan, comme sa mère le lui
avait toujours dit, mais en
Iran, laissant planer la
possibilité qu’elle a obtenu
sa citoyenneté canadienne
sur la foi d’une fausse
déclaration. Enfin, Gerald
Butts et Katie Telford,
conseillers de M. Trudeau,
ont dû retourner près de
59 000 $ des quelque
207 000 $ qu’ils avaient reçu
en remboursement de frais
de déménagement.
L’équipe de Justin Trudeau
n’a pas été épargnée par le
passage du temps. Le ministre des Pêches, des Océans
et de la Garde côtière et député du Nunavut, Hunter
Tootoo, a quitté ses fonctions en mai pour suivre une
cure de désintoxication. Il a
même quitté le caucus
libéral. Son départ mystérieux n’a été expliqué que
cet automne, lorsque le
Globe and Mail a révélé que
M. Tootoo avait eu une relation consensuelle avec son
adjointe parlementaire.
Lorsqu’il a rompu avec celleci pour poursuivre une relation avec sa mère, l’adjointe
a fait une crise au Parle-
constitue un service essentiel dans la fonction
publique et, du coup, les employés ont perdu
l’exercice du droit de grève. Mais les conventions collectives échues depuis 2014 ne sont
toujours pas renouvelées. « On a encore sur la
table l’of fre du gouvernement Harper, soit une
augmentation salariale de 0,5 % par année pendant quatre ans », déplore Debi Daviau, présidente de l’Institut professionnel de la fonction
publique du Canada.
L’af frontement sur les congés maladie se
poursuit aussi. Les conser vateurs voulaient
mettre un terme à leur accumulation pour la
remplacer par une couverture en cas de maladie prolongée. Les libéraux n’ont pas abandonné cette idée, au grand dam de l’Alliance de
la fonction publique du Canada.
Arabie saoudite
Le gouvernement Trudeau s’attire aussi les
foudres d’Amnistie internationale ou encore du
groupe anti-armement Ploughshares. Tous
deux ne digèrent pas la décision d’Ottawa d’aller de l’avant avec la vente de véhicules blindés
à l’Arabie saoudite, surtout que c’est finalement
le ministre actuel, Stéphane Dion, qui a signé
les permis d’exportation. « Je m’attendais à ce
qu’on ait une diplomatie basée sur les principes », soupire Cesar Jaramillo, de Ploughshares. Béatrice Vaugrante, d’Amnistie, ne
manque pas de souligner « le manque de cohérence » d’un gouvernement qui poursuit cette
transaction tout en promettant de ratifier le
Traité sur le commerce des armes.
La grogne se fait aussi entendre du côté des
autochtones, où on peine à faire respecter son
opposition aux divers projets d’oléoducs. On
déplore aussi le refus, signifié cet été, de transposer intégralement la Déclaration des Nations
unies sur les droits des peuples autochtones en
une loi canadienne. « Il y a un grand fossé entre
SUITE DE LA PAGE 1
Au cours des 10 dernières années, Kunuk avait
essentiellement travaillé sur des documentaires
et des séries à héritage inuit, afin de nourrir une
chaîne de télé dans la langue de son peuple. «On
a beaucoup travaillé à cette chaîne inuite, préciset-il, veillant également à ce que l’ensemble de la
communauté soit branchée et puisse voir ses
images.» Kunuk a réalisé des documentaires sur
la chasse aux morses, sur l’impact climatique des
grandes minières sur la faune locale, etc.
« J’essaie le plus possible d’associer un jeune
avec un aîné, pour la chasse aux morses, par
exemple, afin que l’un apprenne de l’autre. »
Le cinéaste jongle avec l’idée d’un nouveau
film de fiction, sur des massacres d’Inuits accusés de vol de marchandises, perpétrés au
XVIIIe siècle dans le Nord du Québec, par des
dirigeants de grandes compagnies, La Baie
d’Hudson entre autres, qui envoyaient des Mohawks prendre leurs scalps et leurs oreilles.
« Les Cris les avertissaient de se cacher par des
messages de fumée. J’ai fait des recherches dans
les archives à Ottawa. Ce sera un film à haute teneur dramatique qui implique beaucoup d’action. Et ces faits participent à notre histoire… »
Beauce, par exemple, verra son financement annuel venant du PAFIM baisser de 220 000 $ à
142 000 $ en 2019-2020. « On a eu une rencontre
avec la direction régionale, dit Hélène Leclerc, directrice de la Fondation. Ils nous ont dit qu’en
vertu des nouveaux critères, les lieux historiques
ne pourraient plus recevoir plus de 150 000 $ par
année avec le PAFIM. »
Pour pallier le manque, la Fondation devra
redoubler d’efforts pour aller chercher davantage d’argent en collecte de fonds, en entrées,
en dons et en commandites. « lls nous ont dit
qu’on était hyperperformants », dit Mme Leclerc,
qui af firme que la Fondation est l’institution
muséale privée la plus visitée de la région.
Jusqu’à maintenant, la Fondation était financée
à hauteur de 33 % par subvention, 33 % par les
entrées et 33 % par les dons.
Pour sa part, le Musée d’art contemporain
des Laurentides, à Saint-Jérôme, verra sa subvention annuelle passer de 200 344 $ à
131 361 $.
Tandis que certains établissements muséaux
voient leurs budgets fondre, d’autres voient
leurs subventions augmenter. En même temps
qu’il diffusait ses nouveaux critères d’attribution des subventions, le ministère de la Culture
et des Communications annonçait même que
six établissements muséaux seraient nouvellement financés par le PAFIM. Alors que la subvention annuelle du Musée québécois de culture populaire de Trois-Rivières est réduite de
52 %, Boréalis, le centre d’histoire de l’industrie
papetière de Trois-Rivières, recevra d’ici 2020
une toute nouvelle subvention de 210 000 $.
Le ministère insiste d’ailleurs pour préciser
que l’enveloppe globale des subventions accordées dans le cadre du PAFIM n’est pas réduite,
mais qu’elle sera plutôt bonifiée, à terme, de
900 000 dollars.
Parmi les autres établissements muséaux
nouvellement subventionnés par la voie du PAFIM, mentionnons, dans la région de Montréal,
le Centre commémoratif de l’Holocauste, qui
bénéficiera, en 2019-2020 d’une nouvelle subvention de 214 455 $. La Société d’histoire du
Lac-Saint-Jean est elle aussi nouvellement incluse avec une subvention de 187 705 $. Dans le
Bas-Saint-Laurent, le site historique maritime
de la Pointe-au-Père gagne 78 066 $ par année,
tandis que le monastère des Augustines, dans
la région de Québec, recevra annuellement
90 069 $.
Si on considère les enveloppes régionales,
les régions de Trois-Rivières, de la Côte-Nord,
de la Beauce et des Laurentides enregistrent
une baisse des subventions accordées par le
PAFIM tandis que les sommes accordées aux
autres régions sont en hausse.
Dans une entrevue accordée au Devoir la semaine dernière, la présidente de la Société des
musées du Québec, Katy Tari, reconnaissait
que le milieu avait exprimé le souhait que la
« per formance » des musées soit prise en
compte dans l’attribution des subventions et réclamait une meilleure « reconnaissance du travail effectué au sein des institutions ».
Les nouveaux critères déterminent l’admissibilité des établissements muséaux, mais non la
nature des montants accordés, précise-t-on au
ministère. En ce qui a trait au Musée québécois
de la culture populaire, des sources ministérielles mentionnent que ce musée faisait partie
des trois musées québécois, avec le Musée
McCord et le Centre canadien d’architecture,
qui recevaient une subvention de plus de 1 million de dollars par année par l’intermédiaire du
PAFIM. Or, il compterait notamment cinq fois
moins de pièces dans ses collections que le
Musée McCord. La quantité de personnel et le
budget total du musée sont également pris en
compte.
Du côté du Musée québécois de la culture
populaire, le président du conseil d’administration, Jean Asselin, af firme qu’un plan de restructuration a déjà été mis en place. Le musée
a, par exemple, décidé qu’il fermerait dorénavant ses portes le mardi en basse saison. « On a
réduit le personnel de 28 à 17 employés, dit
M. Asselin. Si je continue à couper, je n’aurai
plus de directrice de communications ou de directrice des finances », dit-il.
L’équipe du Musée a par ailleurs déjà obtenu
un rendez-vous avec le ministre de la Culture et
des Communications, Luc Fortin, le 7 novembre prochain, confirme l’attaché de presse du
ministre, Karl Filion. Le ministre souhaite discuter avec l’équipe de direction du musée d’un
plan d’accompagnement de l’établissement
pour en éviter la fermeture.
« Il va vraiment falloir qu’on trouve l’argent
nécessaire », poursuit M. Asselin, sans pour autant évoquer lui-même une éventuelle fermeture du musée, qui devra toutefois se tourner
vers d’autres sources de financement.
Selon M. Asselin, il est sûr que certains projets seront touchés par ces compressions, dont
la création d’une exposition permanente et d’un
espace éducatif, et un volet lié au virage technologique. Comme une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, le directeur du musée, Yves
Noël, a démissionné de ses fonctions, jeudi,
pour des raisons personnelles. Le conseil d’administration nommera un directeur par intérim
sur recommandation de son conseil exécutif.
Le Devoir
Le Devoir
LA PRESSE CANADIENNE
Hunter Tootoo
ce qu’il a promis et ce qu’il fait », conclut Russell
Diabo, de Defenders of the land.
Avions, amiante et boîtes à lettres
On pourrait aussi parler de la déception des
anciens travailleurs d’Aveos envers le projet de
loi C-10, qui lève l’obligation pour Air Canada
de faire l’entretien de ses appareils dans certaines villes. « C’est clair qu’on a été trahi par le
gouvernement Trudeau », lance leur porte-parole, Jean Poirier.
Pour leur part, les militants contre l’amiante
n’en peuvent plus d’attendre que Justin Trudeau
réalise sa promesse d’en interdire l’importation
et l’utilisation. Chaque jour de délai voit l’arrivée
de produits amiantés au pays, ce que Kathleen
Ruff qualifie de « bombe à retardement ».
Enfin, il y a tous ces citoyens qui croyaient
que la livraison de leur courrier à domicile
était sauvée par l’élection des libéraux et qui
se rendent compte que tel ne sera peut-être
pas le cas. Le gouvernement a commandé un
rapport d’experts, en admettant que tout était
sur la table.
« Je pense que beaucoup de candidats libéraux
ont tenté de jouer sur les deux tableaux, lance
Mike Palecek, président du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes. La plateforme disait une chose, mais les gens en campagne disaient autre chose. Alors, nous ne
sommes pas surpris. Nous critiquions la position
libérale, nous faisions pression pour qu’ils s’engagent à restaurer la livraison à domicile, mais je
crois que le public, lui, est surpris. » Comme
quoi la déception est souvent proportionnelle
aux attentes créées en premier lieu.
Le Devoir
Lire aussi › Idées. Un an de féminisme avec Justin Trudeau. Page B 5
PASSEUR
SUITE DE LA PAGE 1
d’être couronné meilleur film canadien de tous
les temps par un pool critique et 10 ans aussi
après The Journals of Knud Rasmussen.
On rejoint le cinéaste par téléphone dans son
studio d’Igloolik, où il travaille à redonner ses
mythes et sa mémoire au peuple Inuit. Dans la
communauté, les jeunes s’acculturent à toute
vitesse, la drogue fait des ravages, sous haut
taux de suicide et perte des repères.
La toundra, désert blanc
Sans constituer un vrai remake du film de
Ford, Maliglutit, lancé en première à Toronto,
reprend la trame de ce film de vengeance sur la
quête d’une jeune fille enlevée par les Comanches. Sauf que, cette fois, la toundra de
l’Arctique remplace les déserts de Monument
Valley et que ce sont son épouse et sa fille que
le chasseur veut retrouver. « Je n’ai jamais entendu parler de kidnappings, chez nous, de
femmes par les Blancs. Ça se faisait entre
Inuits », précise-t-il.
Le réchauffement climatique est à géométrie
variable. Kunuk précise qu’en mars 2015, dans
sa région, lors du tournage de Maliglutit, la
température n’avait jamais été aussi froide :
-47 o, -48 o. « On enveloppait l’équipement avec
des fourrures de mouton, mais les acteurs ont
subi des morsures de froid. Ce fut le plus grand
défi de ce tournage. »
Natar Ungalaaq, inoubliable acteur d’Atanarjuat, grand ami de Kunuk, a coréalisé le film.
« Je voulais lui permettre de découvrir le travail
du cinéaste, d’avoir une nouvelle corde à son
arc. » Une des fonctions de Natar était d’aider
de jeunes acteurs inexpérimentés à bâtir des
personnages dont ils n’endossaient pas nécessairement les paroles et les actes.
Kunuk a mis de nouveaux interprètes à
l’avant-plan, dont son propre frère, Benjamin
« Il n’avait jamais conduit un traîneau et le film
lui a permis d’acquérir ce savoir-faire. »
« Pour le décor, les costumes, ce sont les aînés
qui font le travail, car ils savent coudre des vêtements traditionnels et fabriquer les objets dans
les igloos. On élabore les histoires avec eux aussi.
Ils connaissent celles du passé. Quant aux jeunes,
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Scène tirée du film Maliglutit, du réalisateur Zacharias Kunuk
ils ont ainsi l’occasion d’apprendre. »
Sous la protection du huard
Maliglutit est une équipée, cer tes. « Mais,
comme chez Ford, le film aborde aussi une traversée intérieure d’un homme dans sa chasse au
ravisseur. Le périple transforme ceux qui sont lésés en prédateurs à leur tour. » Le film porte également sur les répercussions du drame familial.
Un esprit totémique huard se tient aux côtés du
vengeur. « Trois cent cinquante sortes d’esprits
avaient été identifiées par les premiers anthropologues dans la culture inuite, précise Kunuk, des
totems d’insectes ou d’autres types d’animaux
veillaient sur les hommes. Moi, j’avais envie
d’utiliser le cri du huard, un oiseau très présent
chez nous. » Il s’agit en fait du plongeon arctique, cousin de notre huard à collier.
L’action se situe en 1913, d’où ces premiers
objets venus des Blancs, présents dans le film :
des tasses, un poêle, de la vaisselle, un fusil.
« Celui-ci ne pouvait que tirer trois balles », précise Kunuk. The Journals of Knud Rasmussen,
situé pour sa par t en 1922, montrait des
échanges d’objets plus poussés avec les Blancs.
Atanarjuat embrassait le temps du conte et du
mythe, avec les seuls artefacts inuits.
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