Jean-Pierre Fleury, secrétaire général de la Fédération nationale

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Jean-Pierre Fleury, secrétaire général de la Fédération nationale
Jean-Pierre Fleury, secrétaire général de la Fédération nationale bovine (FNB) : « Nous
déposons un recours contre le moratoire sur le photovoltaïque »
02/01/2011 I Mise à jour : 10:00
Après le décret du 9 décembre suspendant l’obligation d’achat de l’électricité photovoltaïque, la FNSEA et Jeunes Agriculteurs se
sont rendus à la réunion de concertation du 20 décembre, organisée par les trois ministères de tutelle (Economie, Ecologie et
Energie). Ils ont décidé de s’associer aux organisations de la filière pour déposer un recours au Conseil d’Etat contre le moratoire
gouvernemental. Jean-Pierre Fleury, l’une des personnes désignées par la FNSEA sur ce dossier, revient sur une question
devenue éminemment politique.
- Qu’avez-vous abordé avec le gouvernement lors de cette réunion de concertation ?
Jean-Pierre Fleury : Cette réunion à Bercy, présidée par l’Inspecteur des Finances Jean-Michel Charpin, auteur du rapport publié en septembre
2010 sur le secteur photovoltaïque en France, s’est tenue à la demande du Premier ministre. Le dossier est désormais géré directement par
Matignon. Il est donc devenu très politique.
Jean-Michel Charpin est chargé officiellement de proposer un nouveau cadre de régulation de la filière d’ici à mi-février 2011. Nous avons abordé
avec les trois ministères de tutelle plusieurs points : les conséquences du moratoire gouvernemental sur les files d’attente des dossiers déposés ;
les perspectives de la filière et la moralisation du dispositif face aux à-coups politiques ; la déclinaison du Grenelle de l’Environnement au titre du
bouquet français des énergies renouvelables, dans le cadre de la mise en conformité avec la Directive européenne sur les énergies renouvelables
- Qu’avez-vous fait valoir au nom des agriculteurs ?
Jean-Pierre Fleury : La FNSEA et JA ont d’abord rappelé la désespérance des agriculteurs après ce moratoire ainsi que leur profonde
incompréhension, la perte de lisibilité et la perte de confiance en l’Etat.
Nous avons dit au gouvernement qu’il ne bâtira pas l’avenir de cette filière sans traiter les files d’attente. 5 300 dossiers, correspondant à 1 400 MW
d’électricité d’origine photovoltaïque, sont aujourd’hui en attente, dans lesquels figurent tous les dossiers agricoles. Le Directeur général d’ERDF a
lui-même avoué que 700 MW en attente sont de leur responsabilité parce qu’ils n’ont pas répondu aux porteurs de projet dans le délai imparti de
trois mois.
Nous avons aussi insisté sur la vocation agricole de cette filière, avec des installations sur les toitures des bâtiments agricoles. L’agriculture est
capable à la fois de maîtriser cette filière en lien étroit avec les Régions et les préfets par exemple et continuer à assurer son acte de production.
L’agriculture connaît bien aussi les logiques de filière et celle-ci est facile à réguler. Or qu’apprenons-nous ? A côté des dossiers agricoles qui
relèvent d’ERDF, une bombe est en train de monter en puissance, celle des installations au sol, relevant du Réseau de transport d’électricité (RTE
Mais 40 à 50 % des dossiers au sol sont déposés par une filiale d’ERDF, EDF Energies Nouvelles.
Derrière le développement de la filière photovoltaïque, il s’agit enfin d’enjeux de territoire. Or le gouvernement nous montre que la ruralité ne
l’intéresse pas lorsqu’on observe sa gestion du dossier photovoltaïque.
- Quelles actions envisagez-vous pour débloquer la situation ?
Jean-Pierre Fleury : La profession agricole et tous les acteurs de la filière, comme le Syndicat des énergies renouvelables (SER) ou le Syndicat
National des Installateurs du photovoltaïque (SYNAIP), sont montés au créneau. Ils comptent tous beaucoup sur la FNSEA et JA pour peser
lourdement sur ce dossier car la filière s’appuie avant tout sur l’agriculture.
Aussi la FNSEA et JA ont décidé de déposer avec eux un recours auprès du Conseil d’Etat à l’encontre du décret suspendant l’obligation d’achat
de l’électricité photovoltaïque. Mais le dossier mérite aussi une rencontre avec le Premier ministre que nous allons solliciter prochainement.
- La filière photovoltaïque n’a-t-elle pas pris un faux départ ?
Jean-Pierre Fleury : Veut-on bâtir une filière fondée sur un process industriel source d’emplois ? Malheureusement ce dossier a été abordé sous
l’angle du Grenelle de l’Environnement et non sous celui d’un projet industriel. Il est donc parti d’une idéologie qui aboutit aujourd’hui au blocage
que nous connaissons.
Le moratoire gouvernemental casse une dynamique de développement de la filière photovoltaïque française. En agriculture, les projets sont
familiaux avec des artisans qui travaillent derrière. J’affirme ici que ce moratoire a pour but de tuer 50 % des dossiers déposés ; c’est le pari
gouvernemental et nous ne sommes pas dupes !
Mais la vraie question reste celle-ci : veut-on un projet industriel pour le photovoltaïque qui soit pourvoyeur d’emplois ? La filière pèse aujourd’hui 2
000 emplois mais pourra aller jusqu’à 50 000 emplois demain, essentiellement en milieu rural.