LA MOBILITÉ ENTRE LE DOMICILE ET LE TRAVAIL DES WALLONS
Transcription
LA MOBILITÉ ENTRE LE DOMICILE ET LE TRAVAIL DES WALLONS
FOCUS LA MOBILITÉ ENTRE LE DOMICILE ET LE TRAVAIL DES WALLONS Les Wallons parcourent en moyenne 26 km pour se rendre sur leur lieu de travail, le plus souvent en voiture.1 La mobilité entre les frontières linguistiques du pays ou vers les pays limitrophes est par ailleurs une réalité quotidienne pour plusieurs dizaines de milliers de travailleurs de Wallonie. L’analyse qui suit décrit les tendances en matière de mobilité des salariés tant au sein des différentes régions du pays que vers les pays voisins. VIVRE EN WALLONIE, TRAVAILLER AILLEURS… Selon les données de l’ONSS au 31 décembre 2010, plus de 228 000 personnes domiciliées en Wallonie travaillent en dehors de la région2. Parmi celles-ci : 182 000 sont occupées à Bruxelles (133 373) ou en Flandre (48 813) ; et 46 400 travaillent dans un pays limitrophe3 dont 76 % au Grand-Duché de Luxembourg, 11 % en Allemagne, 10 % en France et 3 % aux Pays-Bas. Bruxelles représente un pôle d’emploi important pour les deux autres régions du pays. Sur les 512 500 flux interrégionaux recensés pour l’ensemble du pays, les trois quarts ont pour destination Bruxelles (soit près de 380 000 Wallons ou Flamands occupés dans la capitale). L’attrait de Bruxelles s’explique notamment en raison de la présence de nombreux sièges d’administrations (nationales, régionales ou européennes) et de grandes entreprises. Si les Flamands sont en valeur absolue plus nombreux que les Wallons à travailler à Bruxelles, cela est essentiellement dû au différentiel démographique (la Flandre abritant plus de 57 % de la population en âge de travailler du pays). En termes relatifs, c’est la Wallonie qui semble davantage ouverte sur Bruxelles : 12 % des salariés wallons sont occupés en région bruxelloise, contre 10 % des Flamands. près de 49 000 Wallons travaillent en Flandre contre 29 000 Flamands dans le sens opposé. En termes relatifs, 4 % des salariés résidant en Wallonie sont occupés en Flandre tandis que 1 % des résidents flamands travaille en Wallonie. Le contexte socio-économique des deux régions explique en partie cette situation. À titre d’illustration, sur base du taux de chômage harmonisé au niveau européen, la Flandre présentait en 2011 un écart de plus de 5 points de pourcent par rapport au taux wallon (4,3 % contre 9,5 % en Wallonie4). 246 152 2 053 013 38 182 244 084 29 364 48 813 18 649 133 373 32 383 entrants 935 994 en Wallonie 46 388 sortants vers un pays limitrophe Les mouvements entre la Wallonie et la Flandre représentent 15 % des flux interrégionaux. Les Wallons sont plus nombreux à se rendre en Flandre que l’inverse : Sources : ONSS 2010/4 (flux intérieurs) et INAMI, juin 2011 (flux transfrontaliers). Cartographie : le Forem UN NOMBRE DE WALLONS OCCUPÉS DANS D’AUTRES RÉGIONS LÉGÈREMENT EN BAISSE… LA FAUTE À LA CRISE ? Sur les cinq dernières années observées, en moyenne 16,7 % des Wallons salariés occupaient un emploi dans une autre région du pays. En 2010, soit la dernière année d’observation, cette proportion est de 16,3 %, ce qui correspond à son point le plus bas depuis 2005. C’est en 2007 que cette proportion était la plus élevée avec 17 % des Wallons salariés qui travaillaient à Bruxelles ou en Flandre. Les flux de Wallonie vers la région bruxelloise sont à la baisse durant toute la période d’observation (sur base des écarts annuels entre 2005 et 2010), hormis une hausse entre 2006 et 2007. Évolution en écarts annuels du nombre d’emplois salariés, et du nombre de Wallons occupés à Bruxelles 2,6 % 1,9 % 1,3 % 0,1 % - 0,2 % - 0,2 % 2006 - 0,6 % 2007 - 0,6 % 2008 Flux Wallonie-Bruxelles 0,0 % - 0,4 % 2009 2010 Emplois salariés à Bruxelles Source : ONSS - Calculs : le Forem 1 SPF Mobilité et Transport, rapport Beldam, 2011. 2 ONSS, données 31 décembre 2010. 3 Inami, 30 juin 2011. 4 Taux de chômage calculé sur la population des 15-64 ans, pour l’année 2011, SPF Économie, DGSIE. MARCHÉ DE L’EMPLOI - JANVIER 2013 6 FOCUS Si l’on observe l’évolution de l’emploi salarié intérieur de la région capitale sur la même période, seules les années 2007 et 2010 affichent une croissance de l’emploi. Toutefois la reprise de 2010 ne semble pas avoir stimulé un retour à la hausse du nombre de Wallons occupés à Bruxelles. Les flux de Wallonie vers la Flandre ont été en progression d’une année à l’autre durant toute la période, à l’exception de l’année 2009. Avant 2009, la croissance du nombre de Wallons occupés en Flandre tendait à ralentir : passant d’un taux de croissance annuel de 5,7 % entre 2005 et 2006 à 1 % entre 2007 et 2008. fortes évolutions ces deux dernières années. Néanmoins dans le même temps, la Wallonie a connu également un ralentissement de l’évolution de son emploi salarié avec une progression de 0,9 % entre 2010 et 2011, et une baisse de 0,7 % entre juin 2011 et juin 2012. Évolution en écarts annuels du nombre d’emplois salariés, et du nombre de Wallons occupés en Flandre 5,7 % 4,5 % 2,3 % 2,6 % 1,0 % 0,9 % 1,1 % - 0,6 % - 0,6 % Tout comme pour Bruxelles, des similitudes existent entre l’évolution du nombre - 2,3 % de Wallons occupés en Flandre et l’emploi intérieur flamand. En effet 2009, année 2006 2007 2008 2009 2010 durant laquelle le nombre de travailleurs en Flux Wallonie-Flandre Emplois salariés en Flandre provenance de Wallonie a diminué, correspond à un recul de l’emploi salarié dans la Source : ONSS - Calculs : le Forem région. Néanmoins, en 2010, alors que l’emploi repart à la hausse en Flandre sur base annuelle, les Les prévisions du Bureau Fédéral du Plan1 indiquent pour flux en provenance de Wallonie sont encore légèrement 2013 une hausse modérée de l’emploi de 0,2 % en Flandre orientés à la baisse. et de 0,6 % à Bruxelles. Toujours selon cette hypothèse, ces prévisions n’augureraient pas d’une forte évolution Cette courte analyse permet de rappeler l’effet de l’acd’emplois occupés par des Wallons dans ces régions. tivité économique sur la mobilité des travailleurs. Entre Néanmoins, d’autres déterminants que l’activité économi2010 et 2011 (de décembre à décembre), l’emploi salarié que interviennent dans la mobilité entre le sud et le nord a progressé de 0,9 % en Belgique, de 1,6 % à Bruxelles du pays. Par exemple, l’évolution démographique liée à et 0,8 % en Flandre, tandis qu’entre 2011 et 2012 (dondes départs à la retraite plus importants dans le nord nées de juin à juin) l’emploi a diminué dans chacun des que le sud du pays, l’infrastructure routière et du rail, ou territoires considérés respectivement de 0,4 %, 0,1 % et encore les politiques menées en matière de mobilité, sont 0,3 %. Si l’hypothèse du lien entre l’évolution de l’emploi autant de paramètres pouvant jouer dans l’équation de la intérieur dans ces régions et l’évolution du nombre de mobilité entre les régions. résidents wallons occupés dans les autres régions de Belgique se vérifie, ce dernier n’a pas dû connaître de PRINCIPAUX FLUX DOMICILE-TRAVAIL DES RÉSIDENTS WALLONS La suite de l’analyse utilise un niveau géographique plus fin, au niveau des Directions régionales (D.R.) du Forem et des communes. Il s’agit dans un premier temps d’observer les flux les plus importants puis d’identifier les communes wallonnes « dépendantes » des emplois des autres régions. Signe d’un lien fort entre la population wallonne et le marché de l’emploi bruxellois, quatre D.R. ont Bruxelles pour premier pôle d’emploi « externe » à leur territoire. Il s’agit de la D.R. de Nivelles (34 500 personnes étant occupées à Bruxelles), de La Louvière (12 800 personnes), de Namur (12 000) et de Charleroi (11 000). La carte qui suit met notamment en évidence l’importance des mouvements du sud du pays vers le nord. Notons ainsi que le deuxième pôle d’emploi « externe » du Brabant wallon, après Bruxelles, est la Flandre (8 700 personnes). Dans cet axe sud-nord, le Brabant wallon est également une destination de travail importante puisqu’elle accueille 9 000 Namurois, 7 300 Carolorégiens et 7 200 Louviérois. Quant aux « métropoles » wallonnes, elles drainent de la main-d’œuvre essentiellement issue des D.R. voisines. Ainsi, la D.R. de Charleroi attire 8 700 Louviérois2 et 9 200 Namurois et Liège est la destination de travail de 14 300 Hutois et de 10 500 Verviétois. 1 Bureau Fédéral du Plan, Perspectives économiques 2012-2017 2 Par Louviérois, Namurois, ... il faut entendre habitants de la D.R. de La Louvière, de Namur, ... MARCHÉ DE L’EMPLOI - JANVIER 2013 7 FOCUS Mobilité domicile-travail entre les Directions régionales (D.R.) du Forem et les autres régions de Belgique et les pays frontaliers Flandre Bruxelles capitale Flandre Mouscron Allemagne D.R. Nivelles D.R. La Louvière D.R. Tournai D.R. Liège D.R. Huy D.R. Verviers D.R. Mons ADG D.R. Namur D.R. Charleroi D.R. Arlon Luxembourg France Nombre de navetteurs Sources : ONSS pour l’emploi intérieur, INAMI pour les personnes occupées à l’étranger Traitements par directions régionales et cartographie : le Forem Note : un flux doit compter au minimum 2 000 navetteurs pour être représenté. La D.R. de Namur, où se situe pourtant la capitale de la Wallonie, ne connaît pas d’entrée de main-d’œuvre aussi importante de l’extérieur. Le contingent le plus important venant de la D.R. de Charleroi avec 7 500 personnes, les D.R. de résidence les plus importantes bien après Charleroi sont celles de Huy, Arlon et Namur avec respectivement 4 000, 3 400 et 3 200 navetteurs. Enfin, en dehors de nos frontières, parmi les 46 400 Wallons qui travaillent dans un pays limitrophe, 35 421 sont occupés au Grand-Duché de Luxembourg (soit 76 % des sortants de Wallonie). La grande majorité de ces travailleurs occupés au Grand-Duché, soit 27 359 personnes, résident dans la D.R. d’Arlon. Les deux cartes suivantes permettent de s’intéresser de manière plus détaillée aux origines des flux vers Bruxelles et la Flandre. Comme on pouvait s’y attendre, toutes les communes du Brabant wallon sont fortement dépendantes du pôle d’emploi Bruxellois. Toutefois en y regardant de plus près, la « couronne bruxelloise » semble décalée vers l’ouest : les communes du nord de la D.R. de La Louvière et de l’est de celle de Tournai étant plus « dépendantes » de Bruxelles que les communes de l’est du Brabant wallon. Notons ici que selon le rapport sur la mobilité domicile travail du SPF Mobilité et Transport1, les travailleurs occupés à Bruxelles sont nombreux à s’y rendre en train. Le nœud de chemin de fer de la région bruxelloise et les liaisons ferroviaires entre communes de domicile et Bruxelles y jouent un rôle important. En revanche, l’utilisation de la voiture vers les lieux de travail de Wallonie est supérieure à la moyenne nationale. 1 SPF Mobilité et Transport, Diagnostic des déplacements domiciletravail 2011, Rapport final, Janvier 2012. MARCHÉ DE L’EMPLOI - JANVIER 2013 8 FOCUS Dépendance des communes wallonnes aux emplois bruxellois et flamands VERS BRUXELLES-CAPITALE Part des résidents travaillant dans une autre région (en %) 40 à 51 30 à 40 20 à 30 10 à 20 5 à 10 Moins de 5 Nombre de travailleurs 4 593 1 663 274 Chemin de fer VERS LA FLANDRE Source : ONSS (hors APL, imputations et corrections) Traitements et cartographie : le Forem Par rapport aux communes dépendantes des pôles d’emplois flamands, ce sont les communes à la frontière des deux régions qui connaissent la plus forte concentration de travailleurs wallons occupés en Flandre. C’est particulièrement le cas de certaines communes du nord de la Wallonie picarde, et des extrémités nord-ouest et nord-est du Brabant wallon. ploi important tant pour le nord que pour le sud du pays. Par ailleurs, il semblerait que les déplacements dans une autre région tendent à diminuer lorsque le marché de l’emploi de cette région se contracte. Autre constat, même interrégionale, la mobilité est souvent une question de proximité, tantôt directe, tantôt favorisée par une liaison ferroviaire, dans le cas de Bruxelles par exemple. Cette brève analyse, sans prétendre à l’exhaustivité, met en lumière quelques tendances sur les dynamiques interrégionales en termes de déplacements domicile-travail. Globalement, si l’ampleur des flux interrégionaux varie d’une région à l’autre, Bruxelles représente un pôle d’em- Ce dernier élément met en exergue l’importance de l’équipement dans la réflexion sur les déplacements domiciletravail à l’heure où la congestion des routes et le prix du carburant sont des préoccupations majeures. MARCHÉ DE L’EMPLOI - JANVIER 2013 9