Rencontres de l`accessibilité en Savoie – Chambéry – 19 janvier

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Rencontres de l`accessibilité en Savoie – Chambéry – 19 janvier
PRÉFET DE LA SAVOIE
Rencontres de l'accessibilité en Savoie – Chambéry – 19 janvier 2012
Discours de Christophe Mirmand, préfet de la Savoie
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux de participer à l'ensemble de cette après-midi et de conclure aujourd'hui nos
échanges. Heureux parce que vous avez été nombreux à répondre à l'invitation de la direction
départementale des territoires à l'occasion de cette deuxième rencontre de l'accessibilité en Savoie.
La première avait été organisée en juin 2010. C'est dire combien ces échanges riches et nourris
d'exemples concrets correspondent à un besoin d'information et à des attentes qui ne sont peut-être
pas totalement satisfaites dans le cadre de la mise en œuvre de la loi de 2005.
Je voudrais remercier les participants qui se sont succédés ici à la tribune pour apporter leurs
témoignages et les participants à la table ronde qui nous ont enrichi de leurs expériences et qui ont
peut-être parfois soulevé un certain nombre de difficultés ou d'enjeux. Je voudrais également saluer
les associations représentées ici et souligner le rôle essentiel qui est le leur. Je leur adresse tous mes
remerciements, au nom de l'État, pour le travail qu'elles accomplissent en Savoie et plus largement
au niveau national pour la cause des personnes handicapées.
Puisqu'on est dans une période où l'on peut encore s'adresser un certain nombre de souhaits, je
voudrais en profiter pour vous adresser collectivement et personnellement des vœux très chaleureux
de bonne année, vœux personnels mais également au titre des actions que vous portez et au titre des
institutions que vous représentez ou des associations que vous contribuez à faire vivre.
Ces rencontres ont un objectif essentiel qui est de mesurer le travail qui a été accompli depuis la
publication de la loi de 2005 et, surtout, de mesurer le travail qui reste à accomplir dans notre
département pour satisfaire ces objectifs d'accessibilité extrêmement ambitieux. Je crois qu'il est
important de souligner que, si cette loi est effectivement ambitieuse, elle a eu l'énorme mérite de
nous faire passer d'une culture de l'acceptation d'une forme d'inégalité – inégalité pour l'accès à
l'éducation et à la formation des personnes handicapées, pour l'accès à l'emploi, pour l'accès au
service public, pour l'accès aux espaces publics et privés – à une obligation stricte d'avancer et de
réaliser l'accessibilité de chacun de ces domaines.
Le bilan de cette loi est sans doute important mais les témoignages qui se sont exprimés ici
montrent, bien sûr, qu'il y a encore des attentes insatisfaites. Au regard des ambitions initiales, ce
bilan reste globalement encore à construire, en particulier en ce qui concerne le logement, les
transports et plus largement l'accès à la ville.
Rencontres de l'accessibilité en Savoie du 19 janvier 2012 – Discours de conclusion du préfet
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M. Charvoz [maire de Saint-Jean de Maurienne] évoquait toute à l'heure les différences de cultures
qui peuvent exister entre les pays européens. En Italie, il existe une culture de « l'inclusion » des
personnes handicapées qui est sans doute plus ancienne que celle qui existe en France, malgré les
efforts engagés à la fois par les pouvoirs publics, les collectivités territoriales et les associations. À
son image, je retiens pour ma part un témoignage dont la presse, je crois que c'était France 2, avait
fait état il y a quelques semaines. Il s'agit de celui du consul général de France à Londres qui faisait
part de son expérience personnelle en tant que personne handicapée et qui soulignait à quel point,
pour tous les gestes de la vie quotidienne, il y avait une différence importante entre ce qui était mis
en œuvre dans ce pays - la Grande-Bretagne - et ce qu'il retrouvait chaque fois qu'il revenait à Paris
au ministère des Affaires Étrangères. Je crois que c'est un témoignage qui montre bien, comme tous
ceux qui ont été relatés à cette tribune tout à l'heure, que malgré tout ce qui a été entrepris beaucoup
reste encore à faire. C'est un programme ambitieux qu'il nous faut remplir ensemble pour satisfaire
dans les trois années à venir l'objectif qui a été fixé par la loi de 2005, à l'échéance – fixe – de 2015.
Je crois qu'il faut se réjouir qu'au niveau national – la responsabilité du ministère de l'écologie, du
développement durable, des transports et du logement étant en l'espèce engagée – la traduction
règlementaire de la loi de 2005 a été mise en œuvre depuis un certain temps. C'est une vingtaine de
décrets, une quarantaine d'arrêtés, une demi-douzaine de circulaires qui ont été publiés.
Au-delà de ces textes, qui ont leur importance et qui montrent que la loi est déclinée de façon
opérationnelle, on peut relever l'intégration de cette problématique de l'accessibilité dans les
politiques de droit commun qui sont mises en œuvre par l'État :
– les plans de déplacement urbains – et M. Lux [Directeur du service transport et déplacement
de Chambéry Métropole] comme M. Chauvin [Vice-président de Chambéry Métropole en
charge des gens du voyage] ont apporté leur témoignage tout à l'heure,
– la conception des éco-quartiers, dont on sait qu'il s'agit d'une priorité au titre du Grenelle,
– les programmes locaux de l'habitat.
De la même façon un observatoire interministériel de l'accessibilité a été mis en œuvre au niveau
national. Son rôle est de s'assurer que la question de l'accessibilité est prise en compte de manière
satisfaisante, ministère par ministère, au titre des objectifs portés par chacun d'entre eux.
Les expérimentations se développent, au titre du logement par exemple, avec un programme
« Logement design pour tous » qui a été engagé en 2009 afin de préparer une nouvelle génération
de logements, dans le cadre des projets de construction ambitieux qui sont portés par l'État. Il s'agit
non seulement de répondre aux problématiques du handicap stricto sensu mais plus largement de
repenser la conception des logements pour répondre aussi à un enjeu de vieillissement de la
population. Cet enjeu nous concernera tous et nous voulons ensemble nous y préparer, dans un
esprit de mixité sociale et générationnelle, et répondre à la fragilité de populations qui aujourd'hui
ne voient pas leurs besoins satisfaits.
L'État s'est également investi dans le cadre de démarches de normalisation, de rédaction de guides à
destination des professionnels et d'actions de formation et de sensibilisation à destinations des élus.
J'ai noté les inquiétudes qui ont été exprimées dans le cadre de débats locaux ou de débats
nationaux. Ce sont des débats légitimes au regard de la capacité d'un certain nombre de
professionnels, de collectivités, de services et de partenaires à mettre en œuvre les objectifs de la loi
de 2005. On peut penser en particulier à la question de l'accessibilité du bâti ancien, dans un
département touristique comme le nôtre où les structures hôtelières ont une configuration qui ne se
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prête pas toujours à la contrainte de l'accessibilité. Ces inquiétudes avaient été relayées au
parlement dans le cadre d'un débat qui avait abouti à la proposition d'un amendement à la loi portant
amélioration du fonctionnement des maisons départementales pour les personnes handicapées. Je
crois aujourd'hui que ce débat a été tranché de façon assez claire par le conseil constitutionnel en
juillet 2011. Il a rappelé que les aménagements éventuels de la loi de 2005 ne pouvaient être pris en
compte qu'au titre d'une autre loi et non pas par le biais d'un décret ou d'un l'arrêté. C'est un premier
élément important qui montre bien l'importance attachée par le juge constitutionnel à la déclinaison
de la loi de 2005.
Le deuxième élément sur lequel je voudrais apporter un témoignage est la façon dont le Président de
la République, lors de ses vœux à la France solidaire le 10 janvier dernier, a rappelé l'importance
qui était attachée à cette question de l'accessibilité. Je cite ses propos : « Il est des conditions
normatives sur lesquelles on ne peut pas transiger parce que, là encore, une société se juge à la
façon dont elle traite les plus faibles et les plus fragiles ». C'est dire l'attachement du chef de l'État à
faire en sorte que cet objectif posé par la loi de 2005 ne soit pas remis en cause, quelques soient les
difficultés dans sa mise en œuvre. Ces difficultés, il nous faut les traiter ensemble de la façon la plus
appropriée possible. La raison en est simple : la question de l'accessibilité n'est pas une question qui
concerne uniquement le handicap, et a fortiori le handicap moteur. Cela a été dit tout à l'heure, la
question concerne toute la société. Au travers des démarches qui sont mises en œuvre dans le cadre
de la loi de 2005, il s'agit de permettre plus largement le confort et l'accès au service public de tous
nos concitoyens, et de répondre notamment à la problématique du vieillissement et de la
dépendance. C'est une raison pour laquelle cet objectif de la loi de 2005 à échéance de 2015 sera
tenu et respecté, de façon à faire en sorte que nous puissions tous collectivement satisfaire cet enjeu.
S'agissant en particulier de la dépendance, je rappelle que 9 français sur 10 plébiscitent le maintien
à domicile comme étant la solution la plus appropriée pour la prise en charge des personnes
vieillissantes et puis dépendantes. Mais, ce maintien à domicile, comment l'assurer si l'on n'est pas
en mesure de proposer des logements appropriés ? Et quand bien même il y aurait des logements
appropriés, comment faire en sorte d'éviter que ce maintien à domicile devienne synonyme de
confinement et d'isolement si, dans la ville, dans la circulation et dans les transports, on n'est pas en
mesure de garantir cette totale accessibilité ? Voilà qui justifie, comme l'a rappelé le chef de l'État,
le maintien de cette nécessité de mise en accessibilité comme une priorité absolue pour l'État.
Que faire en Savoie pour répondre à cet enjeu ? Je suis très heureux d'avoir entendu les témoignages
des personnes qui se sont succédées avant moi et en particulier ceux des trois représentants des
collectivités territoriales à la table ronde : M. Pierre-Marie Charvoz pour la commune de Saint-Jean
de Maurienne, M. Marc Chauvin pour Chambéry Métropole et M. Emmanuel Lombard pour
Arlysère. Ils ont souligné la dynamique territoriale qui était mise en œuvre et la richesse de ce qui
était fait dans le cadre d'un contact et d'un travail quotidien avec les représentants des personnes
handicapées. Surtout, ils ont montré la prise en compte de cet enjeu de façon quotidienne dans les
politiques territoriales, avec des démarches concrètes et opérationnelles.
Ce qu'il nous faut finalement réussir ensemble dans les trois années à venir, c'est de faire mieux
fonctionner ce carré – je n'ose pas dire ce carré magique – qui est constitué :
– de l'État au titre de son rôle en matière de réglementation et du Conseil général en raison de
ses responsabilités dans le cadre de la politique du handicap et du fonctionnement de la
MDPH,
– des collectivités territoriales qui sont des acteurs de premier plan et pour lesquelles
l'intercommunalité me paraît, de mon point de vue, le bon niveau pour répondre à cet enjeu
(C'est un niveau où l'on peut trouver une expertise et où l'on peut répondre à un certain
nombre de demandes techniques de la part des mairies quant ces dernières n'ont pas la
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possibilité de prendre en charge la dépense correspondant à un emploi),
– des associations avec lesquelles il faut travailler et établir le dialogue,
– des personnes handicapées elles-même, pour que ce dialogue soit nourri par la réponse à
leurs besoins et à leurs attentes, comme un certain nombre de témoignages s'en sont fait
l'écho tout à l'heure dans la salle.
Mme Masséglia a rappelé dans son intervention les points sur lesquels il pouvait être envisagé de
travailler pour essayer de faire en sorte de mieux nous préparer à l'échéance de 2015 et surtout de
satisfaire cette échéance de 2015 :
– une mobilisation facilitée des associations par le biais du recensement de celles-ci sur la
base d'un annuaire qui sera mis à jour avec la maison départementale des personnes
handicapées,
– un club de l'accessibilité départemental pour stimuler la réflexion et l'échange de bons
exemples,
– l'élaboration de plans d'urbanisme intégrant les questions de déplacement des personnes
handicapées, et c'est la responsabilité de la direction départementale des territoires, en lien
avec les collectivités territoriales,
– la cotation de l'accessibilité des logements, et j'ai entendu avec beaucoup d'intérêt ce qui a
été présenté tout à l'heure par Mme Saniel du CETE de Lyon, s'agissant d'une expérience
dont on peut s'inspirer également pour le territoire savoyard,
– et puis j'ajouterai également le dialogue avec les communes. J'ai adressé pour ma part un
courrier à l'ensemble des communes du département au mois de novembre pour leur
rappeler, en matière de construction neuve, les responsabilités qui sont celles des maires au
titre des déclarations d'attestations de l'achèvement et de la conformité des travaux. Il leur
revient en tant que maire de s'assurer de la bonne réalisation de ces travaux lorsqu'un
immeuble neuf est livré, au moment de sa réception.
Il y a un travail important à réaliser en commun. Je crois que le principe de tables rondes
territoriales qui a été évoqué par Mme Masséglia est extrêmement. Elles permettront de mieux
mutualiser les bonnes pratiques et de constater l'avancement – ou au contraire les retards – par
rapport à ce grand chantier. Je pense qu'il faut aussi que nous rendions public sur le site Internet des
services de l'État en Savoie les éléments d'information relatifs à l'observatoire départemental de
façon à permettre de suivre l'avancement de ces chantiers.
Et puis je vous proposerai, si vous êtes d'accord, que nous puissions organiser à nouveau une
troisième série de rencontres de l'accessibilité territoriale, peut-être au début de l'année 2013, pour
pouvoir nous permettre de mesurer collectivement l'avancement de l'enjeu d'ici 2015.
Voilà mesdames et messieurs les points sur lesquels je voulais intervenir en conclusion de vos
échanges de cette après-midi. Je retiens trois messages pour ma part :
– le premier est que faire progresser les droits des personnes handicapées en terme
d'accessibilité est faire progresser les droits de tous. Lorsqu'on parle d'accessibilité, on ne
parle pas simplement des problématiques évoquées au titre de la loi de 2005. C'est vrai en
matière d'accessibilité au domaine public et aux transports mais aussi en ce qui concerne
l'emploi. Lorsqu'une entreprise s'ouvre à la différence, c'est une entreprise qui, d'abord,
donne sa place à chacun – les femmes, les jeunes, les séniors, les personnes issues de
minorités – et l'ensemble de la population finit par profiter de cette démarche qui est
naturelle, au-delà des prescriptions et des obligations fixées par la loi ;
– le deuxième est que la politique du handicap n'est pas une politique catégorielle. C'est
d'abord et avant tout un projet de société et c'est comme ça que la loi de 2005 a été conçue.
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Chacun d'entre vous en est convaincu et c'est dans cet état d'esprit-là qu'il nous faut
continuer à travailler ensemble ;
– le troisième est que, dans une période où, comme M. Charvoz l'a souligné tout à l'heure, il y
a sans doute un certain nombre de préoccupations budgétaires, à la fois pour l'État et les
collectivités territoriales, il est évident que la politique du handicap ne doit pas être une
variable d'ajustement. On ne peut pas concevoir de développement économique harmonieux
s'il n'y a pas de justice sociale ni de société qui place véritablement l'Homme au cœur de son
projet. C'est sur ce point que je voulais terminer notre réunion de ce soir.
Je compte sur vous pour continuer à travailler dans les trois années qui nous séparent de 2015 et,
pour prolonger cette réunion, je vous inviterai à laisser vos coordonnées à l'accueil pour que le cas
échéant, si vous en acceptez le principe, vous puissiez être sollicités par la DDT pour participer à
l'ensemble des démarches qui vous sont proposées et notamment au club accessibilité.
Merci de votre participation et merci de votre attention, et merci aux interprètes qui nous ont
accompagné tout l'après-midi.
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