3ème FORUM MER EN SECURITE

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3ème FORUM MER EN SECURITE
3ème FORUM MER EN SECURITE
Introduction d’Yves Lagane, Président de la SNSM
Chers amis bonjour,
Merci à tous d’être venus, parfois de très loin, puisque je repère des Sauveteurs venus de Corse, c’est
encore plus loin que Peter Chennell qui vient de Poole en Grande Bretagne. Cette journée pluvieuse
sera, je l’espère, une journée studieuse. En tous cas, c’est comme cela que nous l’avons voulue.
Monsieur Eric Provost, le représentant du maire Jean-Noël Batteux , Monsieur le Sous-préfet JeanPierre Guardiola, Monsieur Paolantoni, Directeur des Affaires maritimes, merci beaucoup s’être là. Je
voudrais aussi saluer le Commandant de la Marine, le Commandant Vollette, qui représente le Chef
d’Etat-major de la Marine, et l’Administrateur Général des Affaires maritimes Loïc Lainé, qui est
notre autorité d’emploi opérationnel avec les CROSS, puisque c’est sous leur coordination que nous
partons en mer en opération. Merci à tous d’être venus.
Je voudrais en quelques mots vous présenter l’esprit de cette démarche qui nous réunit pour la
première fois sur le littoral, et que nous appelons Mer en Sécurité, démarche que nous avons
développée depuis un peu plus de trois ans. Avec Chantal Plessier-Dauvergne ici présente, nous avons
commencé à concevoir une démarche consistant à tirer des enseignements du quotidien des
Sauveteurs. Ces derniers sont au quotidien des témoins d’accidents, et trop souvent, dans 80 à 90%
des cas, ils reviennent en nous disant que ces accidents sont ridicules et peuvent être évités. Et donc,
comment nous, modestement, avec l’expertise que l’on détient au sein de la SNSM, contribuer à
mener une action pour diminuer le nombre de ces accidents ? C’est ainsi qu’est née Mer en Sécurité.
On s’est dit que nous allions rassembler tous les gens, toutes les institutions, tous ceux qui à un titre
ou à un autre sont concernés par l’amélioration de la sécurité des personnes en mer.
Juste un ordre de grandeur : on ne sait pas très bien combien de personnes disparaissent en mer, mais
en gros, si on regarde les statistiques des CROSS qui sont les plus abouties, il y a entre 350 et 400
personnes qui meurent annuellement dans les approches maritimes. Et il y a beaucoup de blessés !
Comment agir pour diminuer ce taux d’accidents ? On a donc décidé pour la première fois en 2009 de
rassembler au sein du premier Forum mer en Sécurité toutes les personnes qui pouvaient être
concernées par l’amélioration de la sécurité des personnes en mer. On a rassemblé des professionnels
des métiers de lamer, du nautisme, de la construction navale, des fédérations de professionnels de la
mer, des fédérations sportives, des opérateurs de services, des opérateurs de télécommunications qui
sont concernés par nos sujets, des sociétés de service, des assureurs, des écoles de formation
maritime, des écoles de voile, des clubs, les institutionnels de la mer, avec bien sûr la Direction des
Affaires maritimes et le Ministère de l’environnement et des transports. On leur a demandé de venir
à la Cité des Sciences et de l’Industrie de la Villette et on leur a proposé de travailler sur trois thèmes.
On a tout de suite vu que « la mousse prenait ». Les gens sont venus nombreux, et on a senti tout de
suite que ce genre de réunion qui était une première « prenait » beaucoup. Le premier enseignement
qu’on en a tiré était qu’il fallait recommencer, les gens éprouvant le besoin de se parler, et le second
est qu’il y a une inégalité considérable dans l’approche sécuritaire de la mer entre tous les
participants. J’ai encore en tête les yeux que nous avions devant le discours de Jean Le Cam. Il venait
de participer au Vendée Globe, et avait vécu un naufrage ayant conduit à une opération de secours
spectaculaire. Il nous avait expliqué comment il se préparait, s’équipait, et s’organisait dans une
situation de détresse pour survivre. Et quand on regardait le monde de la pêche, celui de la plaisance,
celui des loisirs nautiques, on se disait qu’il y avait deux poids deux mesures. Et effectivement, quand
Jean Le Cam a coulé au sud du cap Horn, dans les quelques minutes qui ont suivi son naufrage, on
avait connaissance de sa situation de détresse, dans les 2 ou 3 heures qui ont suivi, on a monté une
opération pour aller lui porter secours, et dans les 3 ou 4 jours, il a été récupéré, en particulier par
Vincent Riou, et sauvé. Entre temps, il s’était mis en condition pour survivre dans de l’eau à 3 ou 4°
complètement immergé. Et dans le même temps on constate encore aujourd’hui, quand on est
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pêcheur et qu’on navigue en Iroise, on peut se retrouver dans une situation de détresse et passer plus
de dix, douze, quinze heures avant que la situation de détresse soit connue. Or, on sait que dans ces
situations là, les minutes comptent ! Il y a quand même vraiment quelque chose à faire !
On a renouvelé cet évènement en 2010 à la Cité des Sciences et de l’Industrie, même succès, les gens
sont venus, et après coup, on s’est réuni , en particulier avec Catherine Chabaud, avec les services de
la direction de la SNSM, avec la direction de la communication en particulier qui s’occupe beaucoup
de prévention, avec la Direction des Affaires maritimes (DAM) et un certain nombre de nos
partenaires pour voir comment aller plus loin. Ce n’est pas le tout de se retrouver une fois par an pour
parler, faire un constat, mais il faut maintenant progresser. Et avec Catherine Chabaud, on a conçu, et
c’est ce qu’on va essayer de vous présenter aujourd’hui, une démarche que l’on pourrait appeler une
démarche collaborative de progrès, qu’on essaye maintenant de mettre en œuvre. Avec tous les
acteurs que j’ai indiqués précédemment, on a commencé à monter il y a six mois quatre groupes de
travail sur des thèmes qui avaient été identifiés comme des thèmes importants au cours de nos
précédents forums. Des thèmes qui vont être évoqués aujourd’hui. Le premier thème est « comment
mieux exploiter notre connaissance et le retour d’expérience sur les accidents dont nous avons
connaissance en mer ?» Le second thème est « comment en matière d’équipement peut-on
améliorer la sécurité individuelle de la personne exposée à la mer à travers principalement ce que
certains appellent le VFI, et qu’on peut appeler gilet de sauvetage ? » Un équipement qui soit conçu
comme un équipement global de sécurité de la personne en mer. Le troisième thème est « comment
mieux se préparer aux premiers secours d’urgence en mer ? » Il existe des schémas, des cursus, des
qualifications pour les premiers secours d’urgence à terre qui sont très bien formatés, en particulier
par le Ministère de l’Intérieur, mais ne pourrait-on pas concevoir un petit module spécifiquement
adapté à la traumatologie qu’on peut rencontrer dans le milieu exposé à la mer ? Le quatrième thème
est « comment agir sur le comportement des gens dans le cadre d’actions de prévention, en
particulier par des actions de communication ciblées pour les sensibiliser à la sécurité en mer ? »C’est
plutôt le domaine de Bénédicte Caillé, la directrice de la communication de la SNSM, et de sa
« ruche », qui va nous présenter cela en fin d’après-midi.
Donc, nous avons commencé à travailler sur ces thèmes sous la tutelle de Chantal Plessier-Dauvergne
et sous la haute autorité de Catherine Chabaud qui a pris la direction de cette démarche collaborative
de projet. Et nous allons vous faire aujourd’hui un point, vous présenter l’état des lieux sur notre
réflexion, susciter vos réactions, prendre en compte de nouvelles propositions, puis Catherine
Chabaud vous dira cet après-midi comment tous ceux qui sont prêts à s’associer à notre démarche
peuvent continuer à développer celle-ci d’une façon formelle mais pas trop, l’objectif étant d’aboutir
à des réalisations concrètes d’amélioration de la sécurité en mer.
Je voudrais aussi remercier nos partenaires qui nous accompagnent depuis le début de ces forums
Mer en Sécurité : Groupama Transports , un partenaire très important qui a cru dès le départ en cette
démarche, la Fondation Total qui nous accompagne depuis deux ans ainsi que sur d’autres chantiers,
le Crédit Maritime qui nous a rejoint l’an dernier. Et puis il y a la Région Pays de la Loire, et la Ville de
Saint-Nazaire qui nous a beaucoup aidés à monter cette opération, et avec laquelle nous avons
engagé un partenariat important depuis sept ans au travers du Record SNSM, un évènement qui va
nous rassembler dans les trois jours à venir, qui a pris de l’ampleur et fait beaucoup de bien à la
SNSM. Et puis aussi, nouveauté dans le partenariat durable avec la SNSM, la création d’un pôle de
formation national au sauvetage. La ville nous a aidés à le monter et le mettre en place avec le Grand
port maritime et un certain nombre d’acteurs que nous présenterons demain au cours de son
inauguration.
Merci à tous pour tout ce que vous pourrez nous apporter dans la dynamisation de cette démarche
qui nous semble très importante, et je passe la parole à Eric Provost, qui est le représentant de JeanNoël Batteux, maire de Saint-Nazaire.
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Allocution d’Eric Provost, adjoint au maire de Saint-Nazaire
Monsieur le Directeur des Affaires maritimes, Monsieur le Sous-préfet, Monsieur le Président,
Mesdames Messieurs les présidents d’associations, Mesdames Messieurs, au nom du conseil
municipal et de Monsieur le maire Joël Batteux, je suis très heureux de vous souhaiter la bienvenue
à Saint-Nazaire. C’est vrai que le climat se prête plus à une présence de gens de mer que de gens de
plage, mais cela tombe bien, puisque vous êtes plutôt des gens de mer. Je souhaitais vous dire que
votre présence ici revêt une importance particulière qui n’est peut-être pas visible pour ceux qui ne
connaissent pas beaucoup Saint-Nazaire, mais qui pour la municipalité est vraiment une forme
d’aboutissement. Il y a quelques années, une quinzaine d’années, la ville de Saint-Nazaire a décidé
d’entreprendre un gros travail de réaménagement urbain sur ce quartier que l’on appelle maintenant
« ville-port ».Lors de la reconstruction de la ville, nous avions en fait le port d’un côté, puis la ville qui
s’était reconstruite, et une sorte de no man’s land qui s’était installé. Et nous avions décidé de
reconquérir cette partie de la ville pour, comme nous le disions à l’époque, retourner la ville vers son
port et vers la mer. Et ce travail bien sûr nous a demandé énormément d’investissements et
d’énergie, mais voilà, ce quartier aujourd’hui a pris forme dans toute sa diversité et dans toute sa
mixité d’activités. Et cette volonté de retourner la ville vers la mer, vers son identité, trouve son
aboutissement aujourd’hui, parce que c’est vrai que ce week-end est assez exceptionnel. Nous avons
là, c’est traditionnel depuis quelques années maintenant, bien sûr le Record SNSM qui partira
dimanche après-midi, mais nous avons donc le plaisir de pouvoir inaugurer demain le pôle de
formation de la SNSM, et puis vous êtes là aujourd’hui pour ce forum Mer en Sécurité. Donc pour
nous c’est vraiment une volonté de pouvoir ré-identifier Saint-Nazaire comme bien sûr un grand port
qu’il a toujours été, mais aussi faire en sorte que les nazairiens et les nazairiennes retrouvent cet
attachement, cette proximité avec la mer. Et vous nous en donnez une fois de plus l’occasion et nous
en sommes vraiment très contents !
Comme le disait Monsieur le Président, le maire qui était absent de Saint-Nazaire hier sera présent
dans la journée, et je pense qu’on va s’organiser pour qu’il puisse venir vous saluer.
La deuxième bonne raison de vous accueillir et de nous réjouir de votre présence, c’est que je crois
que Saint-Nazaire est une ville qui justement offre pour vos travaux une diversité que toutes les villes
n’ont peut-être pas, puisque nous avons à la fois bien sûr des trafics de navires de commerce, nous
avons de la plaisance, nous avons des plages, nous avons des grands skippers qui sont là présents
dans le bassin. Donc je crois que toutes les formes d’utilisation, de navigation sur la mer sont
représentées et je pense que c’est particulièrement adapté à vos travaux de la journée.
Donc je vous souhaite une excellente journée, un excellent travail, et j’espère que vous pourrez
profiter, même si vous n’avez pas beaucoup de temps pour vous promener, de ce nouveau quartier
que nous avons donc réaménagé. Je crois que vous irez déjeuner à midi dans Escale Atlantique, là
aussi un outil assez particulier dont nous sommes très fiers. Merci beaucoup de votre présence.
Merci beaucoup Monsieur le maire pour ces paroles de bienvenue. Nous sommes venus à SaintNazaire pour se rapprocher de la mer, et également parce que l’on considérait que Paris n’était pas
l’endroit idéal pour parler de sécurité en mer. Pour se rapprocher de la mer et des sauveteurs. Et vous
verrez dans la salle un certain nombre de Sauveteurs qui se sont mobilisés aussi pour cette journée,
et qui sont des témoins des sujets dont nous allons parler.
Je voudrais maintenant passer la parole à Monsieur Paolantoni qui est notre Directeur des Affaires
maritimes, quelqu’un de très important pou nous. Il est à la fois l’autorité, le partenaire public qui
nous apporte de l’argent, mais aussi le support de nos autorités d’emploi opérationnel qui, sous la
responsabilité des Préfets maritimes, coordonnent au quotidien les actions de nos Sauveteurs en mer,
qui sont les CROSS représentés ici. Merci, Monsieur Paolantoni, de nous faire l’honneur de votre visite
et de vous exprimer au nom de Monsieur Thierry Mariani, le Secrétaire d’Etat aux transports, qui a
accepté de donner son haut patronage à cette activité, qui devait venir ce matin mais qui n’ a pas pu
pour différents engagements.
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Allocution de Monsieur Paolantoni, Directeur des Affaires maritimes
Monsieur le Président, Monsieur le Préfet, Monsieur l’Inspecteur général, comme il est assez difficile
de distinguer les visages, je m’arrêterai là et je dirai Mesdames Messieurs. Monsieur le Président, j’ai
vu effectivement cette semaine Monsieur Mariani qui m’a indiqué tous les regrets qu’il avait de ne
pas être présent alors que c’était effectivement noté à son agenda. Je vous dirai quelques mots puis
mon collègue Sous-préfet de Saint-Nazaire lira le message qui avait été préparé à l’intention de
Monsieur Mariani.
Monsieur le Président, on peut dire effectivement que ce troisième forum est maintenant ancré
dans le paysage maritime. Vous l’avez indiqué tout à l’heure, ce forum a pris un tour un petit peu
nouveau par rapport aux deux précédents. Je tenais donc à vous féliciter de cette organisation. Tous
les thèmes que vous avez évoqués positionnent la SNSM comme un acteur principal pour instituer et
exercer une action préventive et permanente parmi les usagers de la mer, conformément d’ailleurs
aux missions dévolues à la SNSM. La Direction des Affaires maritimes est engagée comme vous le
savez à vos côtés. Les enjeux sont assez simples, vous les avez évoqués, il s’agit de réduire le nombre
de morts, de blessés, et d’évènements de mer d’une manière générale. Les chiffres situent bien dans
le contexte. Ainsi en 2010, les CROSS ont coordonné 8.000 opérations de sauvetage qui ont
malheureusement occasionné 278 décès et 675 blessés. A nous de trouver toutes les pistes pour
faire diminuer ces chiffres qui s’inscrivent malheureusement dans une tendance en hausse puisque
nous étions, j’allais dire seulement, à 184 morts l’année précédente. Toutes les synergies pour
atteindre les objectifs de réduction des évènements de mer sont à favoriser. Il s’agit, ne l’oublions
pas, de sauvegarder des vies. Le forum offre la possibilité de recueillir toutes les expressions des
acteurs maritimes impliqués de près ou de loin dans cette démarche de progrès. Le forum favorise
les échanges, parfois même les confrontations constructives. En un mot, il permet d’élaborer les
plans de prévention des accidents.
Bien entendu, la Direction des Affaires maritimes est à votre écoute. Bien entendu, mes services
oeuvrent dans ce sens. D’ores et déjà, plusieurs chantiers très concrets sont en cours et s’inscrivent
directement dans le cadre de ce forum. Je pense en premier lieu à la nécessité d’agréger toute
l’information sur l’accidentologie. Pour bien informer, il faut bien connaître. Il s’agit de recueillir
toutes les informations en provenance des différents acteurs du sauvetage maritime, y compris
l’information en provenance de la proche bande côtière. Certes, les bilans d’activité, les statistiques
des CROSS constituent des bases de données incontournables tout au long de l’année, mais elles
n’intègrent pas toute l’accidentologie. Forts de ce constat, issue de nos précédentes rencontres, une
fiche dite « fiche d’intervention sur le domaine maritime », a été élaborée sous l’égide du Secrétaire
d’Etat à la mer.
Un mot également sur le vêtement à flottabilité intégrée que vous avez évoqué tout à l’heure, et qui
est au centre de toutes les réflexions. Il faut intégrer les nouvelles technologies au service de la
sécurité en mer. Là encore, les services de la Direction ne peuvent que comprendre la démarche et
vous accompagner dans le processus. Ainsi, pour élaborer le décret relatif au port de VFI, la
démarche a été longue et progressive. Compte tenu de la diversité et de la richesse des expériences
des partenaires associés à la réflexion sur le VFI dans la plaisance, je suis pour ma part optimiste sur
cette entreprise. Je constate d’ailleurs en lisant les rapports du BEA que le port de VFI commence à
entrer dans les habitudes. Effectivement, nous devons encore progresser, nous devons aussi rester à
votre écoute permanente, Monsieur le Président. Je pense, en parlant de progrès, aux nouveaux
services offerts aux plaisanciers, par exemple avec la diffusion de la météo en boucle. Le progrès
passe par la discussion, par l’échange, par la synergie entre tous les acteurs. C’est d’ailleurs ce qui se
fait entre les services centraux et la SNSM.
Je citerai quelques actions fortes actuellement en cours. La première est la réflexion sur la dotation
des canots de la SNSM. La seconde, la réflexion sur la dotation médicale actuelle des navires de
sauvetage de la SNSM. Et puis un chantier plus important sur l’intégration des nouveaux systèmes
d’information développés par les CROSS, qui porte le doux nom de Marylin, et peut-être pour partie
ces systèmes sont-ils adaptables aux outils de la SNSM. Je pense à la possibilité de faire évoluer les
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systèmes d’appels groupés vers les équipages de canots. Ces systèmes appelés Maewest seraient
intégrés au système d’information Meranim des CROSS. Ainsi, les CROSS et la SNSM auraient les
mêmes sites d’interfaces. Cela permettrait des interactions totales entre les deux acteurs. Cela se
traduirait par des gains de temps pour mettre en œuvre les équipages, et par une extension des
capteurs des CROSS. Les canots de la SNSM deviendraient une fois de plus les yeux des CROSS.
Avant que vous n’engagiez vos travaux, je souhaite faire un point d’information sur la numéro
d’appel 16-16. Je sais que cela a suscité beaucoup de commentaires sur le littoral. Ce numéro a
constitué en son temps un progrès indiscutable. Aujourd’hui les CROSS, à la suite de décisions
communautaires, doivent s’intégrer dans les plates-formes 112 , avec le numéro d’appel
international 112. Donc progressivement, le 16-16 migrera vers le 112, ce qui aura deux avantages :
être un numéro internationalement reconnu, et puis grâce à ces plates-formes 112, bénéficier d’un
service de localisation et de démasquage des numéros.
Je souhaiterais, Monsieur le Président, bien sûr vous féliciter à nouveau, et puis je sais que demain
vous inaugurez un centre de formation. La formation est un des éléments capitaux lorsque l’on parle
sauvetage en mer. C’est capital pour les sauveteurs, c’est capital aussi pour tous ceux qui
fréquentent la mer, qui ne l’oublions pas, ont feint de temps en temps de l’oublier. La mer est un
milieu difficile, peut être un milieu dangereux. Pour affronter ce danger, il faut connaître la mer,
donc être particulièrement bien formé. Je dois dire qu’ayant de temps en temps fréquenté les canots
de la SNSM, j’ai constaté que bien évidemment, quand la mer est belle tout va bien, mais l’une des
particularités des caractéristiques de la SNSM, c’est bien évidemment d’intervenir dans des
conditions difficiles, parfois extrêmement difficiles, et je sais que les Sauveteurs en mer ont payé un
prix lourd à leurs interventions au profit des autres. N’oublions pas tout cela.
Encore une fois, félicitations Monsieur le Président, pour l’organisation de ce forum, et puis tous mes
vœux d’abord aux travaux de cette journée, et tous mes vœux au pôle de formation qui est une
pierre importante dans l’édifice de la SNSM. Merci à vous.
Allocution de Monsieur Jean-Pierre Guardiola, Sous-préfet de Saint-Nazaire
Amiral, Monsieur l’Adjoint au maire de Saint-Nazaire, Monsieur le Directeur des Affaires maritimes,
Monsieur le Commandant de la Marine à Nantes et Saint-Nazaire, Mesdames, Messieurs, en vous
grades et qualités que je distingue mal dans l’obscurité, je vais vous donner lecture de l’allocution
que vous adresse Monsieur Thierry Mariani, Secrétaire d’Etat chargé des transports. « En premier
lieu, je souhaite vous dire combien je regrette de ne pas être parmi vous. Mon emploi du temps ne
m’a pas permis hélas de me libérer pour être présent à ce troisième forum de la mer à Saint-Nazaire.
Je voudrais tout d’abord remercier le Président de la SNSM, l’Amiral Lagane, et tous ses
collaborateurs. Permettez-moi également de vous dire combien je suis heureux de constater que la
France maritime est vivante, enthousiaste, et novatrice. Ce forum représente l’illustration des
initiatives citoyennes au profit d’une noble cause, puisqu’il s’agit de rassembler tous les acteurs
maritimes pour œuvrer au service de l’intérêt général, et plus particulièrement au bénéfice des
usagers de la mer
La France maritime, c’est aussi l’usage du littoral par le plus grand nombre. Tout au long de l’année,
nos concitoyens pratiquent des activités nautiques. Ces activités ne sont pas sans risques. Ainsi,
chaque année, 8.000 opérations de sauvetage sont coordonnées par les CROSS. Plusieurs centaines
de vies sont ainsi sauvées. La SNSM prend une place prépondérante dans ce dispositif, puisque votre
association réalise pratiquement la moitié des opérations. Pour assurer ses responsabilités dans le
cadre des obligations internationales, l’Etat compte sur la SNSM. Je tiens d’ailleurs à dire que la
France dispose d’une organisation maritime efficiente et performante. Ainsi, sous la responsabilité
opérationnelle des Préfets maritimes, les CROSS mettent en œuvre tous les moyens nautiques et
aériens pour sauver des vies et éviter des catastrophes maritimes.
Dans un contexte budgétaire tendu, soyez assurés que le Gouvernement continue et continuera à
prendre en compte tous les enjeux liés à la sécurité maritime. Je tiens à citer quelques exemples. Je
pense tout particulièrement à la subvention qui vous est versée par l’Etat, subvention qui n’a jamais
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été remise en cause. Ces quelque 2,3 million € qui vous sont annuellement dévolus. Je pense
également à la décision du Gouvernement de maintenir coûte que coûte un remorqueur de haute
mer dans le Pas-de-Calais, qui est un des détroits les plus fréquentés au monde. Nos partenaires
britanniques ont décidé de ne plus affréter conjointement de remorqueur. C’est leur décision, mais
la France ne pouvait pas laisser cette zone sans dispositif de prévention lourd. Dès l’automne
prochain, l’Abeille Languedoc assurera cette tâche fondamentale. Je voudrais également rappeler le
très gros effort de modernisation des structures. Le CROSS Jobourg a été totalement rénové pour un
montant de 3 millions €. Cette année, la rénovation du CROSS Gris-Nez pour un montant de 4
millions € va être achevée. Dés l’année prochaine, le CROSS Corsen sera également mis à niveau. Je
citerai également les avancées technologiques des CROSS à travers plusieurs programmes qui
touchent la sécurité maritime. Pour exemple le programme Marylin qui centralise toutes les
informations opérationnelles au profit du sauvetage maritime. Dès 2012, tous les CROSS seront
équipés de cet indispensable système d’information. Nous réfléchissons dès à présent à la façon dont
la SNSM pourrait s’insérer dans ce dispositif. Le système Spationav mené en partenariat avec la
Marine nationale permet aujourd’hui de connaître en temps réel la situation nautique jusqu’à 30
miles au large. Pour maintenir un dispositif opérationnel performant, je compte également sur votre
engagement au quotidien. Je mesure pleinement ce que la Nation doit aux 6.000 bénévoles de la
SNSM. Ce que vous faites est admirable, on ne le dira jamais assez.
Pour ce troisième forum, je souhaite des travaux fructueux. Tous les sujets à l’ordre du jour sont
importants. Gageons que nous progresserons collectivement. Continuons à informer pour prévenir
les accidents. Réfléchissons sur la façon de faire évoluer les mentalités en matière de sécurité. Le VFI
est à cet égard tout à fait prometteur. Travaillons les retours d’expérience, et profitons de ce
moment pour échanger avec tous les acteurs maritimes ici présents. Vive succès à votre
manifestation, tout mon soutien dans vos travaux, bon vent à tous, bon vent à la SNSM ! »
Merci beaucoup, Monsieur le Préfet, de nous avoir transmis ces mots chaleureux de Monsieur le
ministre, et nous allons essayer d’être à la hauteur de ces vœux exprimés par lui. Je pense que
maintenant l’heure est venue de commencer à travailler. Catherine Chabaud, je te passe la parole.
L’EXPLOITATION DU RETOUR D’EXPERIENCE SUR LES ACCIDENTSMARITIMES
Catherine Chabaud, présidente du comité de pilotage Mer en Sécurité, animatrice du débat
Merci Président. J’invite les participants à la première table ronde à nous rejoindre. Je vous rappelle
que nous aurons quatre tables rondes aujourd’hui comme vous l’a précisé le Président tout à l’heure,
sur les quatre thèmes retenus pour le projet Mer en Sécurité. Vous avez compris que nous sommes
passés d’un forum Mer en Sécurité à un projet, que déjà quatre commissions se sont réunies depuis
le début de l’année, et que ce matin et cet après-midi nous allons à la fois vous faire partager le
résultat des premiers travaux mais aussi pousser nos travaux un peu plus loin. Donc la première table
ronde est consacrée à l’exploitation du retour d’expérience des accidents en mer. Il y aura à chaque
fois un animateur. Ce matin, c’est Carine Rocchesani, qui est journaliste et animatrice, et assez
proche des marins. Il y aura également un grand témoin que présentera Carine. Merci également à
André Thomas qui animera avec nous ce forum cet après-midi.
Carine Rocchesani, journaliste et animatrice de la 1ère TR
Je vais vous présenter les intervenants de cette première séquence sur l’exploitation du retour
d’expérience sur les accidents maritimes, séquence qui fait suite à deux réunions de travail et qui va
donc être la poursuite de ces échanges. Merci à notre grand témoin Georges Dachicourt, Président
du Comité national des pêches, d’être avec nous.
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Eric Lefebvre, Directeur du CROSS La Garde, qui va nous présenter des résultats et analyses de 2010,
David Guibert, expert statistique SNSM qui présentera les résultats d’interventions de la SNSM en
2010, et l’on verra que vous avez des méthodes de travail assez proches entre le CROSS et la SNSM,
les assurances représentées par Michel de Bressy, d’Axa, et nous ferons un échange des données que
vous avez à votre disposition et de ce que vous en faites, Guillaume Arnauld des Lyons, de la FIN, qui
traitera du retour d’expérience et des besoins pour faire avancer les choses, toujours dans cet esprit
de prévention qui est le cœur de nos échanges, puis Bernard Vibert, Président de l’UNAN, qui
présentera le retour de la troisième enquête auprès des plaisanciers.
Intervention d’Eric Lefebvre, Directeur du CROSS La Garde
Si effectivement les CROSS n’ont pas une vision totale de l’accidentologie maritime, comme cela a
été expliqué par le Directeur des Affaires maritimes, ils en ont quand même une vision assez aboutie
au travers des opérations qu’ils coordonnent sur l’ensemble des eaux sous responsabilité française,
voire internationale. Avant de tirer quelque bilan avec des chiffres, je vous rassure peu nombreux
pour ne pas vous abasourdir, et des chiffres qui porteront totalement sur le segment de la plaisance,
puisque c’est l’axe sur lequel cette commission a décidé de travailler pour le moment, je vais vous
dire un petit mot sur le recueil de ces statistiques, et tout d’abord sur la classification des opérations
qui a été mise en place en 2010, permettant de recueillir de manière ordonnée les statistiques
d’opérations des CROSS.
Les opérations Secmar se distinguent en quatre types d’opérations, et notamment deux qui nous
intéressent plus particulièrement, les opérations dites SAR pour recherche et sauvetage et les
opérations dites MAS pour assistance maritime. Schématiquement, le CROSS classifie une opération
de SAR lorsque des vies humaines sont en danger, et classifie une opération de MAS lorsque des vies
humaines ne sont pas en danger, voire il n’y a pas de vies humaines concernées, mais on est plutôt
dans de l’assistance aux biens. Je ne développe pas les autres catégories qui nous intéressent peu, si
ce n’est la catégorie qu’on appelle DIV, qui n’est pas forcément une catégorie fourre-tout, mais qui
permet de classer un certain nombre d’opérations dont on pourra reparler, notamment les ruptures
de mouillage.
Pour chaque opération qu’il coordonne, le CROSS rédige un Sitrep, compte-rendu d’opération qui va
se traduire ensuite en statistique grâce à une opération appelée Secmarweb qui a été mise en place
par la Direction des Affaires maritimes début 2010, et dont je vais vous présenter très rapidement la
manière de la remplir. On se connecte donc sur cette application et on va rentrer un certain nombre
d’éléments, et notamment la catégorie de l’évènement. On a plusieurs catégories possibles qui sont
les accidents de navires, les accidents individuels à personne, les avaries non suivies d’accidents de
navire, les autres affaires nécessitant des opérations, et les fausses alertes. Donc accidents de
navires, et pour chaque type d’évènement, on précise de quoi il s’agit, en l’espèce l’exemple choisi
est un échouement. On renseigne ensuite un certain nombre d’éléments d’ordre géographique, la
zone où l’évènement s’est produit, les coordonnées géographiques de l’évènement, et
éventuellement pour les évènements dans les eaux territoriales, le département. On renseigne
également le pourquoi de l’alerte, et c’est là qu’apparaît la classification, le moyen par lequel l’alerte
a été donnée, et la catégorie qui alerte. Pour chacune de ces catégories, on a tout un choix de menus
déroulants permettant d’effectuer des extractions.
Deuxième élément intéressant, on va rentrer le ou les moyens qui sont intervenus, avec les heures
d’appareillage et de retour à quai, et puis on rentre le type de navire concerné, le résultat de
l’opération, et le résultat pour les personnes, si elles ont été assistées, secourues, voire
malheureusement décédées ou disparues.
Donc voilà comment se remplit chaque opération. Donc les quelque 9000 opérations qui ont été
évoquées pour les CROSS en 2010 font toutes l’objet d’une fiche Secmar. Ensuite on peut faire des
extractions. Tout type d’extraction est possible et j’ai pris comme exemple le nombre d’interventions
menées par la SNSM dans les zones de responsabilité française sur des navires de plaisance. La base
permet de voir qu’en 2010, 2364 interventions de la SNSM ont été menées sur le segment plaisance.
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La part des moyens SNSM sur ce segment représente près de 50 % des interventions et 65 % en
temps d’intervention. Voilà un exemple parmi d’autres de ce que nous permet de faire cette base.
Elle nous permet de faire beaucoup d’autres extractions que je ne vais pas vous présenter ici.
Il y a aujourd’hui une chose que la base ne nous permet pas de faire, c’est de la géostatistique. Donc
aujourd’hui, un certain nombre de CROSS dont le CROSS La Garde, avec une application sur internet,
rentrent chacune de ces opérations sur une carte en la catégorisant sous forme de couleurs, et cela
permet de voir, en fonction des zones, quel type d’évènement se situe dans quelle zone, par exemple
ici des zones d’échouement de pénichettes dans l’étang de Thau, et d’embarcations à Leucate et
dans le Golfe de Fos.
De cette analyse de la base Secmarweb en 2010, je vous ai tiré quelques éléments pour amorcer la
réflexion et savoir de quoi on parle quand on parle d’accidentologie dans le domaine de la plaisance.
Les opérations menées par les CROSS en 2010 en zone de responsabilité française sur la plaisance
s’élèvent à 5000 opérations. En moyenne la plaisance représente 55 % des opérations menées par
les CROSS et 60 % des mobiles (navires, engins de plage, avions). 60 % des opérations concernent la
plaisance moteur, et l’on retrouve ce ration quelque soit le CROSS concerné. En termes de
classification des opérations, dans la moitié des cas, les vies humaines ne sont pas en danger. En
termes de personnes, sur les 10.000 personnes concernées par les opérations plaisance en 2010,
2600 ont été secourues, 6400 assistées, près de 2000 se sont tirées d’affaire toutes seules, et
malheureusement près de 70 décès et disparitions sont à déplorer. En termes de zonage, 83 % des
opérations se situent entre le rivage et les 12 milles. Si on regarde enfin les typologies
d’interventions, on remarque que l’avarie du système de propulsion est la première cause
d’opération, y compris pour la voile.
Et puis quelques chiffres pour faire le lien avec l’atelier suivant : on dénombre quatre fois plus de
décès au moteur qu’à la voile, quatre fois plus d’hommes à la mer au moteur qu’à la voile, et 40% des
décès en plaisance moteur sont dus à des chutes à la mer, d’où l’intérêt de porter le VFI.
L’intérêt du RetEx pour les CROSS est réel à plusieurs titres : d’abord en interne, pour la formation
des opérateurs des CROSS, des officiers des CROSS et des Affaires maritimes en général. L’école a mis
en place une formation assez lourde depuis deux ans, et l’on poursuit au sein des CROSS cette
formation initiale par une formation interne importante qui repose notamment sur des analyses
d’opérations ou Anasar. Le système qualité auquel nous sommes soumis nous oblige à faire de telles
analyses, ce qui permet de progresser. On peut aussi envisager d’adapter notre formation continue
tout au long de l’année en fonction de la saisonnalité des opérations. On sait par exemple qu’en
Méditerranée, les accidents de plongée démarrent en avril, et donc il est bien de faire fin mars une
piqure de rappel à l’ensemble des opérateurs de CROSS sur l’accidentologie de plongée. Bien sûr,
une piste sur laquelle on travaille beaucoup, c’est de faire du Retex avec les clients partenaires, au
premier rang desquels la SNSM. On travaille actuellement sur le renforcement d’un accord de
partenariat dont la première version était axée essentiellement sur la conduite de l’opération. On va
l’étendre sur l’amont, c'est-à-dire tout ce qui est entraînement, exercices en commun, puis sur l’aval,
le retour d’expérience en commun. Les exercices ciblés, voilà un bon exemple sous l’impulsion du
Directeur du CROSS Etel, Vincent Denamur. Les CROSS se sont engagés dans cette démarche à la fois
de formation des bénévoles de la SNSM à la fonction de coordinateur sur zone, et de concrétisation
de cette formation par des exercices. Etel a engagé le mouvement et les autres suivent.
En ce qui concerne la contribution à la prévention grand public, une fois qu’on aura dégagé des pistes
de mesures de prévention, les CROSS peuvent être un vecteur intéressant pour diffuser ces
messages. La visite des CROSS est quelque chose d’assez attractif pour le grand public et peur être le
moyen de cibler celui-ci sur nos actions de prévention. L’identification de zones dangereuses a été
évoquée, et peut principalement contribuer à l’adaptation du schéma directeur des moyens de la
fonction garde-côtes, voir si les moyens sont bien adaptés à la fois en qualité et en positionnement
au titre d’opérations qu’on a à traiter.
Le premier bénéfice que l’on retire de la nouvelle base mise en place et de la méthodologie
commune est d’avoir une harmonisation dans les statistiques des CROSS. Chaque CROSS avait
tendance à établir ses statistiques dans son coin et avec une base qui n’était pas assez précise sur la
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catégorie des évènements. On rentre donc dans une plus grande finesse sur la réelle activité des
CROSS. Et le deuxième bénéfice, ce sont les extractions dont on peut tirer des enseignements pour
faire de la prévention.
Intervention de David Guibert, adjoint aux inspecteurs généraux de la SNSM
Je vais me permettre de vous présenter le bilan des sauveteurs embarqués de la SNSM pour l’année
2010. Nos sauveteurs embarqués ont réalisé 2816 opérations de sauvetage, ce qui représente 4847
heures d’intervention, soit un peu plus de six mois à la mer H24. Le délai d’appareillage moyen est de
16’ et la durée d’intervention moyenne de 1h35. C’est 5400 personnes secourues en 2010 et 27 %
des opérations de sauvetage sont réalisées de nuit. Les évènements survenus en 2010 ont rejoint un
peu les chiffres du CROSS avec 39% des interventions sur de l’avarie moteur, suivi par de
l’échouement et aussi par ce qu’on appelle « en dérive cause inexpérience ».
Le retour d’expérience est une notion que l’on emploie tous les jours et que l’on essaye maintenant
de synthétiser, et aussi de donner une sorte de méthodologie pour que l’on puisse tous parler le
même langage et avoir le même retour d’information, la même exploitation de l’information.
Le retour d’expérience, c’est donc l’expérience individuelle au profit de la connaissance collective.
Cela résume bien la volonté du RetEx, qui consiste à gérer la connaissance issue de l’expérience. Il se
base sur quatre grands axes : Premier axe, la capitalisation de l’acquit prenant en compte les
réussites et les échecs. Deuxième axe, l’identification des pistes de progrès. Pour identifier ces
dernières, lors d’un évènement qui possède un haut potentiel de retour d’expérience, on va valoriser
les bonnes pratiques durant cet évènement et aussi identifier les points perfectibles apparus durant
cet évènement. Troisième axe, une meilleure connaissance des différents acteurs , ce qui est
important puisque lorsqu’on participe à une opération de sauvetage, il y a toute une chaîne
opérationnelle qui est mise en place, et qui permet de mieux travailler ensemble, de connaître les
contraintes de chacun, de les mettre en exergue pour pouvoir fluidifier la transmission de
l’information, et surtout mieux travailler ensemble dans la coordination des opérations de
sauvetage. Le quatrième axe est la diffusion des enseignements tirés du RetEx vers tous les acteurs
source qui ont participé à cet évènement, pour que l’on puisse proposer à l’issue des
recommandations, que l’on puisse faire des opérations communes de prévention, ou plus
simplement pour faire progresser la formation.
Rapport entre la statistique et le retour d’expérience : La statistique est d’abord un élément de
détection des pratiques nouvelles ou des pratiques à risque, c’est le retour d’expérience brut qui
nous permet de confirmer ou d’infirmer un ressenti que l’on peut avoir. Pour avoir une analyse
beaucoup plus fine des statistiques, il faut prendre en considération
une notion dite
« environnementale », c'est-à-dire intégrer le secteur géographique, la localisation et l’heure de
l’évènement, les conditions météorologiques, et c’est là que l’on va commencer à parler de
géostatistique. Je vais vous présenter une carte similaire à celle que vous a présentée Eric Lefebvre.
Il s’agit des échouements coordonnés par le CROSS avec les moyens de la SNSM du 1er janvier au 31
mai. On retrouve la même problématique dans les zones de la sortie de Leucate, l’étang de Thau et le
Golfe de Fos. Ceci permet de pouvoir cibler et de faire des opérations de prévention, mais également
d’aller vers nos sauveteurs embarqués et de pouvoir « extraire » leur savoir afin de le diffuser dans
d’autres zones. Cela nous permet aussi d’avoir d’un seul coup d’oeuil un résumé d’activité au lieu
d’avoir un tas de tableaux plus difficilement exploitables et lisibles par l’extérieur lorsqu’on explique
les différentes causes d’accidents.
La méthodologie du RetEx à la SNSM est très simple. Pour l’instant, elle prend en compte la
nouveauté et la gravité. La nouveauté se réfère à la notion de fréquence. Un évènement de niveau 1
est un évènement relativement récurrent. Au niveau 2, c’est un évènement que l’on a l’habitude
d’observer mais qui n’est pas aussi fréquent que le niveau 1 (par exemple voie d’eau au-delà des 12
nautiques), et un évènement de niveau 3 est l’évènement auquel nous ne sommes pas totalement
confrontés (par exemple le crash de l’Airbus au large de Perpignan). Il y a aussi trois niveaux de
gravité : au niveau 1, il ya très peu de dommages et aucune adaptation du personnel par rapport à
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une procédure existante. Au niveau 2, on a un léger dommage avec une légère adaptation à un
cadre bien défini de procédure, et au niveau 3, il y a de forts dommages et une adaptation complète
des sauveteurs et de la coordination dans un cadre qu’ils ne connaissent pas. Les niveaux 3 sont
généralement des évènements à haut potentiel de retour d’expérience.
Nous avons mis en place à la SNSM une fiche de recueil d’informations, aves laquelle on va
interviewer les acteurs afin de recueillir des informations et surtout connaitre quelles ont été leurs
décisions et quelles ont été les conséquences de ces décisions. A l’issue de ce recueil, nous pouvons
établir un arbre des causes, dégager des pistes de progrès, c'est-à-dire valoriser des bonnes pratiques
et détecter des points perfectibles.
Pour conclure, je vais vous montrer un petit schéma permettant d’expliquer que le RetEx est peutêtre fictif mais a besoin de vivre dans un environnement bien défini , c'est-à-dire une interaction des
acteurs, et il est nécessaire de le faire vivre et de l’entretenir. La connaissance collective, c’est un peu
la base de données de la connaissance de chaque acteur, CROSS, SNSM, qui a besoin des acquits de
chaque entité et doit être entretenue par l’ajout de nouvelles expériences issues de la
capitalisation, donc les nouveaux évènements à haut potentiel RetEx, par l’apprentissage et
l’entrainement de ces évènements issus de notre acquit, et aussi par une interaction qui à doit être à
double sens, c'est-à-dire interaction veille technique par la recherche et le développement, et
interaction des différents acteurs qui participent à la sauvegarde de la vie humaine en mer, ce qui
nous permet d’effectuer une veille administrative sue l’évolution des différentes procédures.
Carine Rocchesani
Merci beaucoup pour ces explications. Peut-être une question commune à tous les deux. Vous avez
mis en évidence lors des réunions qui ont préparé ce forum l’utilisation abusive du Navionic, du
logiciel de navigation, et aussi la pratique de certains loisirs nautiques de plus en plus loin. Y a-t-il une
généralisation de ces pratiques et une alerte sur ces points ? D’autre part, y a-t-il un risque avec la
multiplication des smart-phones ?
Réponse de David Guibert
Quand on parle de logiciel de navigation, il faut bien comprendre que c’est avant tout une aide. Il ne
faut pas considérer tout ce qui est électronique embarquée comme le principe de navigation même.
Rien ne remplace l’humain. Ce sont des aides pratiques, qui permettent de se projeter dans l’avenir,
notamment dans la création de routes ou dans la préparation d’un voyage, mais elles doivent être
considérées seulement comme une aide à la navigation.
Réponse d’Eric Lefebvre
On a effectivement une inquiétude, ce n’est qu’un ressenti qui doit être confirmé, à ce que beaucoup
de gens considèrent que le GPS de leur GSM est un instrument de navigation. On verra cela cet été.
S’agissant des loisirs nautiques, le phénomène que l’on observe, c’est qu’à l’exception des spots bien
connus par exemple des kite-surfers, d’ailleurs très bien organisés, à des fins de tranquillité des
baigneurs, on a tendance à vouloir éloigner un certain nombre de loisirs nautiques de la côte. Loisirs
qui sont souvent des activités très fatigantes, voire épuisantes. Et donc, lorsque les gens
commencent à avoir des difficultés à rentrer, cela devient compliqué d’ aller les chercher et les
secourir dans de bonnes conditions.
Intervention de Michel de Bressy, d’Axa Corporate
Côté assurances, ce que l’on voit, ce ne sont pas des accidents mais des sinistres. Un sinistre n’est pas
forcément un accident, heureusement. Par ailleurs, les polices mises en place dans la plaisance sont
des polices « dommage » qui comportent en général un volet responsabilité civile, mais qui
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s’attachent la plupart du temps aux dommages matériels, qui protègent les biens et qui ne mettent
pas en œuvre des mécanismes de protection des personnes. Donc, ce que l’on voit est un peu plus
restreint que ce que peuvent voir le CROSS ou la SNSM. Par ailleurs, on a assez peu de couverture
de sinistres dans lesquels intervient la SNSM.
L’assurance n’est pas obligatoire en France pour naviguer. En revanche, pour amarrer un bateau dans
un port, la plupart du temps il faut un volet RC sur la police d’assurance. C’est une obligation, mais
je suppose que cela ne concerne pas tous les ports, en particulier les mouillages forains ou les
mouillages plus ou moins organisés en Bretagne. Il y a donc un petit flou à lever sur ces problèmes de
responsabilité civile.
Tous les assurés ne communiquent pas leurs sinistres, ne les déclarent pas pour diverses raisons, par
négligence ou parce qu’ils ne souhaitent pas mettre en jeu les mécanismes d’assurance…Par ailleurs,
par le biais des franchises, on ne voit pas tout. On peut choisir son niveau de franchise dans les
assurances à la carte, et par conséquent, la simple mise en jeu de la franchise fait qu’on ne voit pas
tout ce qui est petit sinistre et tout petit dommage.
Chez AXA, nous avons environ 60.000 contrats plaisance en portefeuille, qui représentent environ
70.000 bateaux. Je parle de petite et moyenne plaisance que l’on limite à 500.000 € de valeur agréée
de bateau. Sur ces 70.000 bateaux, nous avons environ 3.000 sinistres par an. On observe que
beaucoup se passent au port. Les conséquences des tempêtes en Bretagne des années 1999-2000 ou
plus récentes ont donné lieu à d’innombrables sinistres parfois très importants. Tous ne se passent
pas en mer, tous ne sont pas des accidents, et certains sont extrêmement mineurs. En matière de
coût moyen, nous avons un coût moyen de sinistre qui se situa autour de 4.000 €. Nous avons des
analyses par bassin. Par exemple, épisodiquement, en Méditerranée, les réparations coûtent plus
cher. Les sinistres coûtent plus cher sur la façade méditerranéenne que sur les façades atlantique et
de la Manche.
Dans chaque compagnie, les actuaires travaillent aux statistiques, mais dans le but de réviser les
primes et d’être les plus compétitives possible. C’est dommage, et je pense que cela peut être le
forum à travers lequel nous pouvons commencer à travailler, en particulier avec la FIN. On pourrait
par exemple travailler au niveau du marché français l’ensemble des statistiques moteur que l’on
puisse avoir, ou sur des série de bateaux particulières, par exemple des voiliers qui démâtent plus
facilement que d’autres, et en tirer des conclusions au niveau des statistiques nationales.
Par essence, nous sommes tournés vers la prévention afin de diminuer les fréquences des sinistres
et diminuer les sinistres. Chez Axa, nous travaillons beaucoup sur la diffusion de fiches qui sont à la
fois des mémentos et des check-lists. S’agissant de la plaisance qui n’est pas une activité pratiquée
quotidiennement par nos assurés, mais une activité saisonnière, nous pensons qu’il est bon de
rappeler en début de saison les bonnes pratiques à mettre en œuvre. Nous allons bientôt diffuser
une fiche sur les points à vérifier avant de réarmer son bateau et prendre la mer. De la même façon,
on peut très bien diffuser une fiche sur les actions à mener une fois que l’on rentre au port. Nous
sommes donc beaucoup dans la ritualisation, pensant qu’en matière d’activités non pratiquées
quotidiennement, il est très bon d’être dans le rituel et la check-list. En conclusion, le réseau des
assurances peut donc être un levier essentiel pour la prévention.
Carine Rocchesani
Vous avez évoqué la FIN, les retours d’expérience qui vous seraient utiles. Vous avez mis en œuvre
un groupe de travail, quel est son objet et où en êtes-vous ?
Intervention de Guillaume Arnauld des Lions, Secrétaire général adjoint de la FIN
Tout d’abord je veux rappeler que la question de la sécurité des plaisanciers est évidemment et
naturellement une préoccupation permanente des fabricants de bateaux et d’équipements. Donc la
FIN et ses adhérents, nous nous sommes intéressés à ces sujets depuis quelque temps, nous avons
souhaité mettre en place un groupe de travail interne depuis deux ans maintenant, pour justement
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essayer d’étudier et de mieux comprendre le retour d’expérience, les statistiques et les informations
émanant des accidents en mer. Le but n’était pas de réinventer ce qui était déjà fait, mais de
recueillir tout ce qui était disponible, une partie des informations sont disponibles et déjà traitées,
notamment les statistiques des CROSS et de la SNSM déjà traitées par le Conseil Supérieur et l’UNAN,
de récolter tout, le but étant pour nous d’être en capacité de faire des préconisations à nos
adhérents pour améliorer la sécurité des personnes en mer, et des plaisanciers en particulier. Cela
veut dire récolter des informations en termes de chiffres, de statistiques, et il y a beaucoup de
matière on l’a vu, même s’il peut y avoir encore des améliorations en termes de rubriquage,
notamment pour avoir une approche plus fine. Là où nous avons plus de difficulté aujourd’hui, c’est
pour obtenir de l’information « qualitative », et c’est là qu’est intéressant le travail que l’on peut
mener aves les sociétés d’assurance et les mutualistes. Le but est maintenant de rentrer dans des
rapports d’accidents, des rapports d’experts et d’assureurs, pour voir réellement les circonstances
dans lesquelles se sont déroulés les accidents et pouvoir identifier si tel ou tel équipement
supplémentaire, telle ou telle conception différente, auraient pu éviter l’accident. Alors, on ne va
pas tirer de grands enseignements sur la base d’un nombre extraordinairement important
d’accidents, puisque la plaisance reste une activité peu accidentogène, mais on veut essayer de
trouver des enseignements et accompagner les entreprises de la FIN vers de possibles améliorations.
Nous sommes ravis que la SNSM ait lancé ce groupe de travail qui nous permet de rencontrer
également l’ensemble des autres acteurs, de mettre en commun nos informations, et c’est très riche
d’enseignements et de retours pour nos propres travaux.
C’est difficile de vous dire ce qui peut nous manquer comme information exploitable. Par exemple,
quand un bateau se retourne, même si les bateaux répondent à des normes très précises – il ya une
directive européenne et une soixantaine de normes ISO qui encadrent la construction des bateaux de
plaisance-, il peut y avoir des faiblesses structurelles sur certains modèles, et c’est intéressant
d’avoir ce retour d’expérience pour l’analyser et en informer le fabricant, l’architecte, le bureau
d’études. Mais il peut y avoir aussi des actions menées par les fabricants de bateaux et
d’équipements en termes de modes d’utilisation des produits, en termes d’information du
plaisancier. Il y a peut-être des points sur lesquels il faut davantage insister, des informations qui
manquent. Il y a peut-être une mauvaise compréhension. Donc ce sont des retours d’expérience qui
ne vont pas forcément servir qu’à faire évoluer radicalement certains équipements, mais aussi à se
dire là sur le manuel du propriétaire, ce serait bien de faire un focus plus particulier sur tel ou tel
point parce qu’on s’est aperçu que des accidents survenaient par une méconnaissance ou une
mauvaise utilisation du produit par le plaisancier.
Aujourd’hui nous en sommes au point d’avancement suivant dans le recueil des données et l’analyse.
Nous avons bien identifié toute la partie statistique, qui évolue et se perfectionne, ce qui est une
bonne chose. Nous en sommes aujourd’hui à nous tourner vers les assureurs, vers les associations
d’experts, notamment le SESAME, pour essayer de décortiquer au cas par cas des dossiers, en toute
confidentialité bien sûr, afin d’essayer de tirer des enseignements beaucoup plus qualitatifs. Nous
avons déjà obtenu des éléments par un acteur que nous n’avons pas encore cité, le BEAmer, qui a
fait un certain nombre d’enquêtes sur la plaisance. Même si le gros des enquêtes et des dossiers
concerne plutôt la pêche ou des pratiques professionnelles, on a pu récupérer quelques éléments du
BEA, et sommes en tous cas très demandeurs d’informations qualitatives, et notamment au niveau
des assureurs.
J’interviendrai dans la table ronde suivante sur les gilets de sauvetage et les conclusions que
l’apporterai viennent de ce groupe de travail. Ce groupe ne travaille pas seulement sur la base de
statistiques et de remontées d’informations du terrain, mais par le biais d’autres informations, en
nous permettant de mettre autour de la table tous les fabricants de gilets de sauvetage présents sur
le marché français pour les faire travailler sur une organisation commune très claire sur les
modalités de révision des gilets de sauvetage.
Carine Rocchesani
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Je passe la parole à Bernard Vibert, Président de l’UNAN, qui va présenter les résultats de la
troisième enquête auprès des plaisanciers et les enseignements qu’il en a tirés
Intervention de Bernard Vibert. Président de l’UNAN
Les statistiques que je vais présenter sont coordonnées, puisque tous les acteurs, la SNSM, les
Affaires Maritimes, le Conseil supérieur de la navigation de plaisance et les plaisanciers que je
représente, travaillent sur les mêmes chiffres. Elles sont donc cohérentes. L’UNAN que je préside
compte une trentaine de milliers de membres dans 200 associations de ports ou de mouillages
réparties sur nos côtes. L’enquête de l’UNAN a été menée auprès de presque la moitié des
plaisanciers qui ont demandé assistance via les CROSS en 2008 , 2009 et 2010. Elle est destinée à
donner des coups de projecteur sur les causes exactes des difficultés subies. Les résultats en sont
très cohérents d’une année sur l’autre.
Parmi les types d’événements, on trouve d’abord les pannes de moteur qui représentent entre 61 et
53 % des événements, avec une petite tendance à la baisse. En seconde position, les difficultés de
navigation représentent en 2010 23 % des événements. Cela recouvre le bateau qui ne sait plus très
bien où il se trouve, l’échouement, les difficultés de manœuvre, la météo, tous les cas où l’on est
dépassé par les événements. Santé et divers représentent 6,5 % des événements. Il s’agit
essentiellement de santé que l’on arrive d’ailleurs à décomposer en événements de santé liés à
l’exercice de la plaisance, et les accidents de santé assez nombreux aussi qui auraient pu survenir
chez soi ou dans son lit et surviennent à bord. Hélice ou safran engagé (7,3 %) reste stable mais
malheureusement relativement élevé. Il y a beaucoup d’engins de pêche amateurs essentiellement
qui sont mal mouillés ou mouillés dans des endroits interdits. Enfin opérations de plongée compte
pour 1,6% et autres avaries détaillées plus loin pour 7,7 %.
Si l’on détaille les principaux types d’événements, à savoir pannes de moteurs, difficultés de
navigation et autres avaries, on trouve : pour les pannes de moteur, et cela confirme ce que l’on
savait déjà, en premier lieu le carburant (33%)- cela peut être la panne de carburant, le carburant
pollué, la pompe à carburant- puis l’électricité (20,4 %)-gestion de batterie ou panne d’électricitépuis refroidissement (12,6%)- c’est le sac plastique qui bouche la crépine ou le rotor de pompe à eau
qui n’a pas été changé- puis transmission (10,6%) avec pas mal de problèmes sur les embases , puis
« déma rrage » (8,8%) du moteur , et enfin les autres causes (15 %) telles que l’explosion d’un
moteur très ancien.
Parmi les difficultés de navigation, on trouve d’abord l’échouement (27,8 %), suivi par les erreurs de
navigation (24,6 %), l’ancre qui dérape ou est engagée (18,3 %)-ce qui n’est pas surprenant quand on
observe les équipements de mouillage utilisés par certains plaisanciers- les erreurs de manœuvre
(6,3 %) et enfin les autres difficultés (10,3 %).
Parmi les autres avaries, on trouve une catégorie qui progresse régulièrement, à savoir les ruptures
de mouillage (34 %). Beaucoup de bateaux sont au mouillage, les ports ne pouvant pas contenir
toute la flotte, et il suffit d’un coup de vent ou d’un mouillage mal adapté pour que le bateau parte à
la dérive. Puis viennent gouvernail/safran 20,3 %), voie d’eau (17,8 %) liée à des problèmes de
vannes ou de presse-étoupe, gréement (14,4 %), et enfin autres (12,7 %) dont le vandalisme qui
concerne aussi les mouillages dont un certain nombre sont coupés. Un phénomène qu’il faut
observer et qui peut devenir préoccupant.
Quels enseignements retenir de ces chiffres ?
Que peut-on faire pour éviter toutes ces demandes de dépannage qui peuvent conduire à des
accidents plus sérieux ? On observe en effet un phénomène d’enchaînement : cela commence par un
petit pépin, puis la météo se met de la partie, la panique survient éventuellement, et l’on aboutit à la
catastrophe.
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On constate d’abord que sur trois années les causes des demandes d’assistance montrent une
grande cohérence des résultats annuels malgré quelques évolutions de fond. Au niveau du matériel,
les pannes de moteur viennent en tête, loin devant les autres avaries. Lorsqu’on regarde le détail
exact des pannes, on a l’impression que la moitié environ d’entre elles pourraient être évitées, s’il y
avait un minimum d’entretien préventif et un minimum de débrouillardise de la part de plaisancier,
l’autre moitié étant constituée de pannes mécaniques inéluctables. L’entretien par des
professionnels est probablement mieux, mais ne met pas toujours à l’abri des pannes. Il ne constitue
pas une assurance tous risques. Il y a beaucoup d’accidents notamment lors de la remise en route
d’un bateau après l’hivernage, même si celui-ci a été vu par un professionnel. Les permis renforcés
ou les contrôles techniques montrent qu’il y a une telle diversité de causes de pannes qu’on ne
pourrait pas espérer que cela améliore réellement la situation. Par contre il y a un certain nombre
d’actions à entreprendre au niveau de la sensibilisation et de la formation du plaisancier. Ce dernier
devrait savoir gérer certaines situations classiques simples, telles que filtre bouché ou
refroidissement. Filtre bouché parce que le carburant est de plus en plus pollué par des bactéries. En
effet le gasoil contient obligatoirement 5% de biocarburant, et celui-ci étant présent plus longtemps
dans les réservoirs que celui d’une voiture, il y a développement de bactéries et un risque
d’augmentation dans le futur des pannes par colmatage de filtres. En ce qui concerne le
refroidissement, le plaisancier doit pouvoir changer le rotor de pompe à eau. Il faut faire davantage
de prévention sur l’équipement de mouillage, la vérification des batteries, les voies d’eau (vannes
corrodées, presse-étoupe non changé).
Si l’on considère le facteur humain, des erreurs sont souvent dues à l’inexpérience, l’inattention,
l’imprudence. L’essentiel des bateaux disposent d’un GPS mais s’en servent trop peu, ou manquent
de cartes. Quand on constate en effet que 90% des bateaux en sont équipés et qu’il y a encore des
plaisanciers qui s’échouent, ou bien ils ne savent pas se servir de leur GPS, ou bien ceux-ci tombent
en panne parce qu’étant des appareils portatifs sur piles ou batteries que l’on n’ a pas changé, ou
bien le GPS n’est pas ouvert, ou encore il est ouvert mais les gens ne savent pas reporter un point
GPS sur la carte. Parfois aussi, on dispose d’un GPS mais pas de cartes, ou d’un écran tellement petit
que la carte ressemble à un timbre poste…
Un peu de formation sur la météo serait utile, car très souvent les gens n’écoutent pas la météo, ou
ne savent pas l’interpréter. Or, on sait par exemple qu’un vent qui passe de 10/15 à 20/25 nœuds
met nombre de bateaux en difficulté. Il faut prendre la météo même pour une sortie brève, et
vérifier l’équipement avant d’appareiller. La navigation, voile ou moteur, requiert un minimum
d’expérience et un peu de préparation.
On constate que l’usage de la VHF se développe régulièrement. L’an dernier, on avait autant
d’alertes données par la VHF que par GSM, alors que cette année 56% d’alertes proviennent de VHF
et 44% de GSM. Par ailleurs, les CROSS sont de plus en plus réactifs.
Deux tiers des événements de mer se passent à moins de 2 miles d’un abri et 90% à moins de 6 miles.
Sur un échantillon de 300/400, on ne relève qu’ 1 ou 2 accidents au-delà de 12 miles.
Quelle prévention mettre en œuvre, pour qui et comment ?
Pour la plaisance voile ou moteur (hors engins de plage), il est de plus en plus compliqué de naviguer.
Les bateaux se perfectionnent, et l’on ne navigue que 15 jours par an sans y penser le reste de
l’année, on peut facilement être débordé par les problèmes techniques de moteur, d’électronique,
de navigation. Les éléments à connaitre pour naviguer en sécurité sont nombreux et pas toujours
innés (technique, réglementation, météo, radio, sens marin…). L’UNAN édite régulièrement un Code
des Bonnes Pratiques qui totalise une centaine de pages A5, tant il y a de points à assimiler.
Seuls les messages de sensibilisation bien ciblés sur les points essentiels se traduiront dans les
statistiques. En effet, les messages généraux sont peut-être adéquats pour les activités de bord de
plage ou des juniors, mais peu adaptés pour la plaisance habitable et côtière.
Les actions de formation classique, journées de sécurité, formations dispensées par les associations
ou les clubs, les articles formation de la presse nautique touchent surtout ceux qui en ont le moins
besoin. Il est difficile d’atteindre les plaisanciers qui auraient le plus besoin de formation. En effet, de
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nombreux plaisanciers, surtout moteur -tels les plaisanciers en semi-rigides qui se mettent à l’eau sur
une cale, viennent et repartent sans connaître personne- n’ont souvent aucun contact
« sensibilisant » tels que la lecture de revues nautiques et d’ouvrages de formation, l’appartenance à
des associations ou des clubs, la navigation avec des amis expérimentés. Il faudrait arriver grâce à
des fiches simples à toucher ces plaisanciers pour leur donner un début de sensibilisation, mais c’est
difficile.
Pour toucher les navigateurs moins expérimentés et isolés, Bernard Vibert évoque plusieurs
moyens : les conseils de ponton, de mouillage et de cale,- mais il faut prendre en compte le risque
juridique, car en cas d’accident, la victime peut se retourner contre celui qui a prodigué les conseils
et le mettre en cause-, les contacts et documentations pratiques distribuées sur les cales de mise à
l’eau, les formations brèves sur le bateau dispensées aux épouses et aux enfants, ou comment se
débrouiller à bord si le chef de bord est « hors service » à la suite d’un accident, d’une maladie ou
autre. On constate que ces formations intéressent beaucoup ces cibles, et conséquence inattendue,
leur donnent envie d’approfondir leurs connaissances, et parfois, de naviguer. Sont programmés des
thèmes tels que j’affale les voiles, je sais démarrer le moteur, je sais mettre en route le GPS et utiliser
la VHF.
Eric Lefèbvre Concernant la formation donnée aux épouses et aux enfants, le premier élément à
leur enseigner est comment parler à la VHF. En effet, on se rend compte que le skipper, même s’il
n’est pas tombé à l’eau, a beaucoup de difficulté à gérer à la fois l’événement sur son navire et la
communication avec le CROSS.
Intervention de Pierre-Georges Dachicourt, grand témoin et Président du Comité National des
pêches
Je voudrais souligner que je suis un convaincu de sécurité, et de toujours plus de sécurité. Il y a
quelques années, je me suis démené avec quelques uns qui n’étaient pas convaincus de rendre
obligatoires les VFI a bord des bateaux de pêche, et j’ai pris des coups… Mais au fil du temps, on
s’aperçoit que çà commence à payer. C’est un peu comme les ceintures de sécurité dans les années
70. Personne ne voulait les mettre, puis dans le temps c’est devenu un geste tellement banal, et cela
a sauvé de nombreuses vies. Je suis donc très heureux que la VFI progresse, grâce aussi au concours
de l’IMP et à la pression exercée par le Comité National sur ses comités régionaux et ses comités
locaux qui deviendront départementaux dans moins de dix mois. On atteint 45 % de gens qui portent
la VFI. La mettre devient un geste banal. En 2010, on a recensé 13 personnes qui, selon leur
déclaration, ont été sauvées grâce à leur VFI. Pour le premier semestre 2011, on en est déjà au
même score. La progression de ces résultats prouve que les professionnels portent de plus en plus le
VFI, devenu une nécessité. La mer, je le dis et le répète à nos amis plaisanciers, est tout sauf une aire
de loisirs. Même lorsqu’il fait très beau et grand soleil, elle est tout aussi dangereuse qu’avec le
mauvais temps d’hiver.
La profession évolue donc, et l’on est en train de mettre en place la seconde génération de VFI avec
balise individuelle incorporée, qui permet aussi aux canots de la SNSM qui en sont équipés de
pouvoir récupérer très rapidement les gens. Il faut savoir que lorsqu’un pêcheur passe par-dessus
bord au moment d’un virage de chalut ou autre, il faut quinze minutes pour embarquer le chalut, et
donc une réaction très rapide est nécessaire. Les nouveaux VFI marquent un grand pas en avant,
nécessaire car la vie d’un homme n’a pas de prix pour la société. Je suis convaincu qu’il faut étendre
cet équipement à tout le monde, professionnels comme plaisanciers. Il faut arriver à convaincre
tous les navigateurs. Convaincre en particulier les professionnels qui ont souvent un caractère obtus,
et les femmes jouent en la matière un rôle très important. La sécurité des hommes en mer passe par
les femmes.
Enfin il faut renforcer la sécurité des bateaux, et l’Europe doit commencer à comprendre que nos
flottilles de pêche vieillissent et veiller à ce que nos pêcheurs ne naviguent pas sur des bateaux
poubelles. Il faut donc renouveler les flottilles et les rendre plus sécurisées. Je pense même qu’il sera
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indispensable dans l’avenir de rendre insubmersibles les bateaux au-dessous de 12 mètres, c'est-àdire disposer de réserve de flottabilité sur ces bateaux. C’est indispensable et c’est le challenge de
l’avenir. Voilà mon témoignage.
Jean-Marc Vaillant, Président de l’Ecole des Pêches des Sables d’Olonne
Je partage entièrement l’avis de Pierre-Georges Dachicourt sur la sécurité, et l’Ecole que le préside
essaye de former au maximum les patrons pêcheurs à la sécurité. On a testé grandeur nature sur un
chalutier la balise individuelle portée sur le VFI. De la grosseur d’un portable et non gênante à porter,
elle est polyvalente, permettant de faire stopper le moteur, de déclencher une alarme sonore
prévenant le reste de l’équipage, d’avertir le CROSS, de déclencher des secours. On a mis deux
minutes entre le moment où l’homme est tombé à la mer et sa récupération, ce qui est un temps
vraiment minime.
Valérie Bussière, du Center Européen de Formation Continue Maritime
On se pose toujours la question de la formation pour une meilleure prévention, mais en fait les
plaisanciers ne sont pas forcément sensibilisés à venir se former. A quand les obliger à effectuer une
formation à partir du moment où ils assurent leur bateau ? Pourquoi ne pas obliger tous les
plaisanciers à se former ?
Carine Rocchesani
Il y a quelque 60.000 permis bateau délivrés chaque année, et c’est peut-être l’occasion d’améliorer
la formation à la sécurité.
Michel de Bressy
En tant qu’assureurs, nous nous plions à la réglementation. Il est nécessaire d’avoir un permis pour
les bateaux à moteur, et donc au moment de la souscription d’une assurance, on demande à
l’utilisateur de bien vouloir en fournir une copie.
Pierre Bost, Secrétaire général de la Fédération Nationale des Bateaux-Ecoles
Je voudrais lancer un cri d’alarme, tant le manque de formation des moniteurs de bateaux-écoles est
inquiétant. Les moniteurs sont les premières personnes que rencontrent les accédants à la mer, et
ce sont eux qui vont former, je dirais presque « déformer », ces nouveaux plaisanciers. On forme des
gens en 48 heures, c’est tout et n’importe quoi, mais certainement pas le partage d’une expérience
que malheureusement beaucoup de moniteurs n’ont pas. 60 % au moins des moniteurs n’ont pas le
niveau suffisant pour enseigner des notions que souvent ils ne connaissent même pas eux-mêmes. Il
faudrait donc retrouver un moyen pour former les moniteurs, et définir des critères de qualification
pour exercer leur fonction.
LE VFI IDEAL POUR LA SECURITE DES PERSONNES EN MER
Catherine Chabaud, navigatrice, journaliste, animatrice du débat
Cette table ronde va faire état des travaux du deuxième groupe de travail qui s’intéresse plus
globalement à l’amélioration des équipements de sécurité embarqués et non uniquement au gilet
de sauvetage dont nous allons parler. Nous allons essayer au travers des témoignages de notre
grand témoin Bruno Sroka, champion du monde de kite surf, et de Georges Tourret, de l’IFM,
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d’élargir le débat sur d’autres pistes d’équipements sur lesquelles nous devrons travailler plus tard.
Je vous présente l’équipe ici réunie : Charles Babin, ingénieur testeur à l’Institut National de la
Consommation qui nous parlera d’essais comparatifs de gilets réalisés par l’INC, François-Xavier
Ricardou, spécialiste équipements à Voiles et Voiliers qui a publié des tests réalisés sur trente gilets
gonflables, Pierre Brugnon, chargé de mission prévention à la SNSM, Guillaume Arnauld des Lions, de
la Fédération des Industries Nautiques (FIN), Dominique Kervazo, qui représente le Pôle mer
Bretagne et qui parlera d’amélioration et d’innovation, Bruno Sroka qui décrira les équipements de
sécurité et de communication pour les sports nautiques individuels, et enfin Georges Tourret, de
l’IFM, lequel a une très grande expérience du vêtement à flottabilité intégrée.
Intervention de Charles Babin, de l’INC
L’Institut National de la Consommation est un établissement public dont le rôle et les missions sont
définis par décret publié au JO. L’INC fournit un appui technique aux organisations de
consommateurs, regroupe, produit, analyse et diffuse des informations, études, enquêtes et essais
auprès des consommateurs, met en œuvre des actions et des campagnes d’information et de
communication, et apporte un appui technique aux commissions placées auprès de lui ,telle que la
Commission de Sécurité des Consommateurs depuis début 2011.
L’INC apporte des réponses relatives aux quatre grands thèmes qui composent le droit à la
consommation : le droit à l’information, le droit de choisir, le droit à la sécurité et le droit d’être
entendu. L’une des portes d’entrée techniques pour apporter ces réponses consiste à effectuer des
essais comparatifs.
Les essais comparatifs de l’INC portent sur les fonctions majeures des produits. Ils sont effectués sur
un échantillonnage représentatif de produits sur un segment donné. Ils sont réalisés sur des produits
achetés comme par tous les consommateurs. Ils s’appuient sur des méthodes d’essais reproductives
et rigoureuses, toutes les procédures d’essais étant normalisées (norme NF X 50-005).
L’indépendance du centre d’essais de l’INC est garantie d’une part par la non participation des
fabricants et des distributeurs aux essais, que ce soit en phase amont, pendant les essais ou lors de
leur exploitation, d’autre part par l’absence totale de publicité dans les medias de diffusion de
l’Institut.
Depuis 2007, l’INC travaille activement sur les accidents de la vie courante, et dans le cadre d’un
partenariat avec la SNSM, il a effectué un essai comparatif de neuf gilets de sauvetage gonflables,
automatiques, de la catégorie 150 Newton. Nous nous sommes intéressés aux caractéristiques et
modes d’emploi des différents gilets et avons effectués divers tests. Une première série de tests en
laboratoire, portant sur le temps de déclenchement (dans une piscine d’eau douce), sur la
flottabilité à temps zéro et après 24 heures passées dans l’eau, et sur les possibilités de
déclenchement intempestif (passage sous une douche). Une seconde série de tests avec des essais
d’usage, pour lesquels nous avons eu recours à quatre panelistes de morphologie et de sexe
différents vêtus identiquement (pull, jeans et baskets). Nous nous sommes intéressés à l’ergonomie
des gilets à terre et en mer, à leur capacité de retournement dans l’eau pour une personne
inconsciente, à leur visibilité de nuit.
Les résultats de cet essai comparatif ne sont pas encore diffusés à ce jour. Ils seront publiés dans
« 60 millions de consommateurs » de juillet-août 2011 (à partir du 27 juin sur www.60millionsmag.com et du 30 juin en kiosque). Voir résultats ci-joints .Mais il est possible de faire déjà de faire
mention de quelques résultats généraux : On constate que le prix des gilets peut varier du simple au
triple, voire davantage. Dans 30% des cas, les kits de réarmement des gilets sont difficiles à se
procurer. Le comportement des gilets aux essais en laboratoire est assez hétérogène. Enfin l’INC n’a
pas été convaincu par la capacité des gilets à retourner une personne inconsciente en situation
d’usage en mer. Dans le cadre de son partenariat avec la SNSM, le message de prévention que l’INC
compte faire passer à l’appui de l’article à sortir est le suivant : « Ajuster son gilet et le porter en
permanence ».
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Pour conclure sur tous les essais comparatifs menés par l’INC, leurs objectifs sont d’apporter une
information objective aux consommateurs et d’être un vecteur d’amélioration de la qualité et de la
sécurité des produits. Dans les cas extrêmes, l’INC peut alerter les pouvoirs publics sur la dangerosité
d’un produit. En règle générale, il arrive à insuffler et à provoquer une évolution de la réglementation
et de la normalisation en vigueur pour les produits testés. D’une façon générale, on constate une
réaction positive des industriels et des distributeurs, laquelle va contribuer largement à
l’amélioration des produits.
Catherine Chabaud
Pourquoi avez-vous réalisé les tests en jean et baskets et non en ciré et bottes ?
Réponse de Charles Babin
Nous avons choisi cette tenue parce que c’est la tenue habituelle du plaisancier en mer, et en nous
référant aux normes habituelles des essais qui sont effectués en piscine et en maillot de bain. Mais
nous avons opté dans notre protocole d’essais pour une tenue qui soit plus représentative du
plaisancier ordinaire à bord.
Catherine Chabaud
Lorsque vous évoquez évolution de la réglementation et de la normalisation, cela porte sur quel
point précis ?
Réponse de Charles Babin
C’est un peu le travail de cette table ronde d’y répondre. Mais cela peut concerner notamment
l’amélioration des protocoles d’essais, ou comment être plus représentatifs lors de nos essais en
laboratoire par rapport aux conditions réelles.
Intervention de François-Xavier Ricardou, spécialiste équipement Voiles et Voiliers
Comme l’INC, nous avons effectué un essai comparatif de gilets de sauvetages dont les résultats
sont parus dans le numéro d’avril 2011 de Voiles et Voiliers. Il a porté sur 30 gilets gonflables de 50
Newton et plus et nous a apporté de grandes surprises (parfois très mauvaises). Voir en annexe
Ces essais ont été réalisés dans le cadre d’un dossier sécurité, partant du constat qu’aujourd’hui, la
sécurité n’est plus associée à un bateau, mais qu’elle est individuelle. Chacun doit prendre en compte
son propre matériel de sécurité, l’adapter, l’avoir avec soi.
Pour tester nos 30 gilets, nous avons disposé de quatre essayeurs qui ont sauté à l’eau dans une
piscine, vêtus d’un haut et bas de ciré et de bottes. Chacun avait le choix du saut, la chute à la mer
n’étant jamais conforme à une norme, et le naufragé volontaire devait « faire le mort », tête face au
fond, les bras pendants, pour vérifier que le gilet retournait le naufragé inanimé sur le dos.
Premier constat, parmi les 30 gilets, deux ne sont pas gonflés automatiquement, l’essayeur ayant du
tirer manuellement pour le déclencher. Le mécanisme des gilets peut donc ne pas fonctionner.
Second constat, douze des gilets testés n’ont pas retourné et mis la tête hors de l’eau des essayeurs
inanimés. Même des gilets de 150 Newton et plus ne retournent pas l’individu inconscient, et donc,
le volume de flottabilité ne fait pas tout dans le retournement. On constate aussi que la tenue
adoptée, bottes et ciré, gêne le fonctionnement des gilets, notamment à cause de masses d’air à
l’intérieur du ciré qui font que l’individu ne flotte plus de la même façon et qui contrarient le
retournement du gilet. Il nous semble donc incroyable que les normes aient été définies pour une
personne vêtue d’un short et d’un tee-shirt, alors que peu de plaisanciers naviguent dans cette
tenue, et encore moins quand ils portent leur gilet de sauvetage. Autre constatation concernant le
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poids du gilet, lequel va de 560 grammes jusqu’à plus de 2 kg : on s’est rendu compte qu’au-dessus
de 1,2 k 1,5k , un gilet était trop lourd et que de ce fait, on ne le portait pas. Le poids constitue en
effet un frein important pour le port de cet équipement. Pour qu’il soit porté en permanence, il faut
qu’il soit léger, pas trop rigide pour ne pas gêner les mouvements. Et l’on s’est rendu compte que les
femmes n’étaient pas du tout prises en considération et qu’aucun gilet n’est adapté à la morphologie
féminine, en particulier à la poitrine qui est comprimée.
De cet essai, nous avons tiré un certain nombre de points à améliorer, et le groupe de travail ayant
démarré au même moment de la publication de ses résultats, nous lui avons apporté notre
expérience sur le sujet.
Georges Tourret, de l’IMP
Nous avons effectué des analyses sur des batteries de FFI à flottabilité additionnelle et constaté que
sur trente gilets de 150 Newton, dix étaient en disfonctionnement, ne se déclenchant pas. Même
constatation au sein des services de l’Equipement, chez les éclusiers qui doivent porter des gilets de
sauvetage. Un sondage effectué par une coopérative de fourniture de ce type d’équipement a
trouvé au moment du renouvellement des proportions à peu près identiques de disfonctionnement.
Plus inquiétant, nous avons régulièrement des gilets qui ne se déclenchent pas au moment des
sinistres eux-mêmes. Il existe un problème de fiabilité sur le long terme, et donc l’entretien du gilet
de sauvetage s’impose.
Intervention de Pierre Brugnon, chargé de mission prévention à la SNSM
Un groupe de travail piloté par Benjamin Serfati, directeur des achats à la SNSM, s’est réuni avec des
représentants des fabricants de gilets de sauvetage pour discuter de ce que devrait être un
équipement de flottabilité porté par les plaisanciers, cible sur laquelle il s’est focalisé, englobant les
plaisanciers en eau de mer comme en eau douce.
En préambule, comment définir cet équipement ? Gilet, VFI, EFI ? Georges Tourret précise qu’on
appelle gilet ou brassière de sauvetage un équipement prévu régulièrement pour le plaisancier dans
la drone de détresse du navire, mais que si on le porte quotidiennement en situation de travail et en
qualité de professionnel, l’équipement en question, conforme au décret de 2008 sur les aides à la
flottabilité, est aussi un VFI qui se définit comme un « vêtement de travail à flottabilité intégrée ».
Défini donc par l’usage qu’on en fait et non pas par sa morphologie. Afin que le plaisancier
s’approprie l’équipement, le groupe de travail préconise de l’appeler « gilet de sauvetage
gonflable », par opposition aux gilets à flottabilité permanente.
Cet équipement a pour mission de sauver la vie en cas de chute dans l’eau. Avant tout, il doit
permettre de maintenir hors de l’eau la tête d’une personne en toute sécurité. Puis, il doit être
capable de retourner le corps d’une personne habillée dans toutes les conditions
Or on a vu dans les enquêtes que ces conditions ne sont pas toujours remplies, et c’est donc un sujet
sur lequel il convient de se pencher afin de garantir que quelqu’un qui tombe à l’eau ait la garantie
d’avoir la tête hors de l’eau et de pouvoir être sauvé en attendant les secours.
Pour pouvoir remplir sa mission, le gilet de sauvetage gonflable doit être porté. Or on observe que
beaucoup ne le portent pas pour de très nombreuses raisons dont le groupe a détecté un certain
nombre : « ce n’est pas convivial, cela gêne », « ce n’est pas beau », « cela coûte cher » ( en effet les
prix varient de 1 à 3, voire 4, soit grosso modo de 70€ à 200-300€, ce qui représente un budget
significatif, surtout si l’on est plusieurs à bord), « je n’en ai pas besoin », « nous autres les anciens,
nous n’en avons jamais porté », « personne n’en porte autour de moi », « de quoi ai-je l’air avec
ça ? », « c’est trop lourd ». Devant toutes ces réticences, il est prioritaire de sensibiliser l’ensemble
des pratiquants de la mer.
Le groupe de travail suggère un certain nombre de caractéristiques que doit présenter le gilet de
sauvetage : pour les plaisanciers, 150 Newtons, ce qui n’est pas le cas pour les métiers de la mer qui
peuvent recommander des flottabilités de 50, 100 voire 275 Newtons. Le gilet doit permettre le
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retournement en toutes circonstances. Le poids maximum doit être de 1,5 kg avec tous ses
accessoires, ce qui est supportable par les plaisanciers. Il est nécessaire de le rendre plus attractif
esthétiquement, et pour cela faire des collections donnant envie de le porter. Il doit ensuite
permettre un marquage personnalisé, par exemple nom de la personne et du bateau. Cela suppose
que le plaisancier arrive avec son propre gilet, et non qu’on lui affecte au hasard un gilet stocké à
bord. L’ensemble doit être conditionné dans un sac avec poignée pour en garantir un bon stockage et
un bon transport. Enfin, le remplacement du kit de gonflage doit être facilement réalisable par
l’utilisateur, surtout lorsqu’il est en mer. On pourrait suggérer à cet égard que les fabricants mettent
systématiquement un kit de rechange dans le sac de vente, utilisable quand le gilet a été déjà
percuté.
Le gilet de sauvetage doit pouvoir être équipé d’accessoires de signalisation, de détresse et de
repérage que le groupe de travail a listés : matériaux réfléchissants de couleur blanche , ou mieux
orange, couleur qui se voit le mieux la nuit, sifflet de niveau sonore supérieur à 115 décibels, miroir,
bâton lumineux (durée 12 heures) de couleur verte de préférence, dispositif de maintien pour
empêcher la remontée du gilet une fois gonflé (sous-cutale ou autre), fluorescéine, et enfin DAMAS
ou dispositif d’alarme d’homme à la mer et d’actions de sauvetage, à savoir une balise permettant le
repérage de la personne à la mer. Pour disposer de ces accessoires pas tous nécessaires suivant le
type de navigation, il convient que l’enveloppe du gilet dispose de poches permettant de les intégrer.
La conception du gilet est également liée à la morphologie de son utilisateur. Il doit être aussi
confortable à porter pour les hommes que pour les femmes. Il doit être décliné en plusieurs tailles.
Avant leur achat, les personnes doivent pouvoir essayer les gilets, pour en vérifier le confort. Or il n’y
a pratiquement pas de boutiques où cela puisse se faire. L’idée serait donc de demander aux
distributeurs de proposer une gamme de gilets que l’on puisse essayer.
En conclusion, la première étape consiste à identifier les freins qui conduisent au non port du gilet,
puis prendre en compte les suggestions d’amélioration du groupe de travail, et adresser aux
pratiquants de la mer le message suivant : « sauvez vous la vie en portant vous-même votre gilet ».
Les anglais ont conçu un autre message : « Non porté, le gilet ne sert à rien ».
Intervention de Guillaume Arnauld des Lions, de la Fédération des Industries Nautiques
La FIN travaille la question des gilets de sauvetage et a créé un groupe avec l’ensemble des
fabricants de gilets et des têtes de réseaux de distributeurs type Uship ou Accastillage Diffusion. On y
traite depuis deux ans d’un sujet particulier qui est « Que faut-il faire en termes de révision et de
maintenance des gilets de sauvetage gonflables ? » On s’aperçoit en effet qu’un certain nombre de
plaisanciers ne savent pas très bien ce qu’ils doivent faire en la matière, selon quelle périodicité
réviser le gilet, comment procéder, même si la notice des fabricants contient des informations, qui
ne sont pas d’ailleurs les mêmes d’un fabricant à l’autre. Il y a donc un souhait d’harmonisation, une
nécessité que les fabricants se mettent d’accord. On a travaillé pour arriver à une position commune
et à un dispositif de révision qui sera rendu opérationnel début 2012. Le groupe a conclu qu’un gilet
de sauvetage gonflable doit être adapté à la personne et au type de navigation pratiqué, et qu’il doit
faire l’objet de révisions. Une période de révision qui a été statuée à 2 ans par l’ensemble des
fabricants et distributeurs. Tous les 2 ans minimum, il faut donc faire réviser son gilet en pratique
plaisance. On a par ailleurs souhaité mettre en place un système de marquage sur les gilets, comme
pratiqué en Allemagne. A chaque révision, une pastille ou un marquage indique la date préconisée
pour la prochaine révision. Ce système sera mis en place avec le concours des stations de révision.
Dans la communication qui sera faite auprès des plaisanciers, on n’encouragera pas ces derniers à
effectuer eux-mêmes la révision ni à changer les kits eux-mêmes. En effet, la révision doit être
effectuée de façon très rigoureuse en pratiquant un certain nombre de tests, et l’on préconise que
cela soit fait systématiquement par des professionnels agréés par les marques, ayant reçu la
formation nécessaire et disposant du matériel de contrôle qui permettra aussi de vérifier l’usure des
gilets. Cela étant, on ne préconise pas de ne plus vendre de kits de recharge, utilisables notamment
par les plaisanciers lorsqu’ils sont à bord et qu’ils doivent réarmer un gilet percuté, mais on estime
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que la révision périodique et approfondie du gilet doit être réalisée dans des conditions et selon des
protocoles très particuliers.
Nous avons mis en place une charte que tous ont signée et nous serons en mesure de communiquer
beaucoup plus officiellement vers nos partenaires, SNSM, Direction des Affaires Maritimes et aussi
vers le public à partir du 1er janvier 2012. D’ici là, il y a toute une phase logistique avec la mise en
place du système de marquage qui est en route. Tout ceci est mené en cohérence avec le groupe de
travail initié par la SNSM, qui arrive au bon moment, car la FIN peut ainsi exploiter les informations
résultant des travaux, et notamment des tests, et les rendre opérationnelles pour les fabricants.
Pour terminer, il faut rappeler que pour être mis sur le marché, un gilet de sauvetage doit répondre à
des critères très précis, à une directive européenne, à des normes de fabrication, pour s’assurer que
l’on respecte les exigences essentielles de sécurité de la directive. Et à travers la FIN, les fabricants
sont proactifs sur l’évolution de ces normes et de la directive. Cette dernière dite « directive pays »
va entrer dans une phase de révision, et nous avons émis à Bruxelles un certain nombre de
préconisations à prendre en compte en ce qui concerne la révision des gilets. Deux points importants
ont été mis en avant par la France : nous préconisons de passer pour les gilets gonflables à partir de
150 Newtons de la catégorie 2 à la catégorie 3 au niveau des processus de vérification, c'est-à-dire
qu’on intègre des contrôles obligatoires lors des différentes étapes de la fabrication en usine. D’autre
part, on préconise que le certificat de conformité du gilet délivré par un organisme reconnu
officiellement (par exemple INPP, CRITT Sports Loisirs) ait une durée de vie limitée dans le temps
pour repasser à une nouvelle vérification et voir notamment, si les normes ont évolué, à intégrer de
nouveaux critères.
Catherine Chabaud
Comment réagissent les fabricants aux tests, et les modifications à apporter aux normes ne doiventelles pas aussi concerner les tests ?
Réponse de Guillaume Arnauld des Lions
Les normes et la directive représentent le minimum à respecter par les fabricants. Tous les tests en
interne qui sont effectués au-delà des exigences de la norme sont laissés au « libre choix » des
différents fabricants dont un certain nombre vont procéder à des tests beaucoup poussés en milieu
réel, des tests habillés, des tests d’usure beaucoup plus forts au niveau des matériaux. C’est le plus
que va pouvoir apporter chaque fabricant.
Les fabricants vont tirer profit du retour des tests. Pour chacun d’entre eux, un retour individualisé
est prévu au cours duquel il sera informé des seuls résultats le concernant, avant de prendre
connaissance de l’étude complète lors de la sortie du magazine.
Pour conclure, il n’y a pas de gilet de sauvetage gonflable idéal. Celui qui est idéal est déjà celui qui
est porté et pour qu’il le soit, il doit être adapté à l’utilisation qu’on en fait et à la morphologie de
son utilisateur. Derrière, toute l’évolution, tout le travail effectué par les fabricants vont dans ce
sens là, car il y a non seulement une vraie responsabilité à assumer, mais également un marché à
conquérir.
Intervention de Dominique Kervazo, du Pôle mer Bretagne
Je suis un animateur du Pôle mer Bretagne, un ancien sous-marinier et un praticien de la voile. Je vais
traiter du gilet de sauvetage gonflable idéal pour la sécurité des plaisanciers en mer, ou comment
progresser par l’innovation et la recherche. On peut innover de trois manières. On peut innover en
faisant moins cher, en travaillant sur les processus ou sur les matériaux (le modèle chinois), en
améliorant un produit existant en jouant sur la qualité, la sécurité, la solidité, le recyclable, le design
(le modèle allemand), puis on peut inventer, inventer de nouveaux produits, services, usages, de
nouvelles normes, ce qui permet d’élever le niveau des équipements, et aussi de nouvelles modes.
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C’est plutôt le modèle américain ou japonais, sachant que les autres pays piochent dans tous ces
domaines.
Avec le respect de la norme, la première qualité du gilet gonflable idéal est de donner envie de le
porter à son possesseur. Il faut susciter une conviction d’utilité et des performances, ce que je
résume sous le terme de « cycle de vie », lequel débute chez le marchand quand on peut l’essayer et
l’adapter à sa morphologie, puis se poursuit avec la maintenance, le stockage en dehors de son
utilisation. Il faut rechercher un port confortable, viser une multifonctionnalité potentielle, se
différencier en termes de mode, de design, de personnalisation, mais aussi par la technologie.
L’objectif final est que le possesseur veuille porter son gilet, et même le montrer.
Je résume cela en reprenant une citation d’Antoine Riboud, ancien PDG de BSN puis Danone :
« L’innovation est une alliance entre recherche, marketing, instinct, imagination, produit et courage
industriel ».
Pour avancer vraiment dans cette ambition, une méthode reconnue comme la plus efficace, c’est
d’importer et partager l’innovation, c'est-à-dire ne pas travailler tout seul. Il faut oser pousser les
murs de l’entreprise ou ouvrir les portes. On y gagne un moindre coût à résultat équivalent, on
améliore la pertinence du produit ou du service proposé en mutualisant toutes les compétences, on
raccourcit les délais vers le marché grâce à des équipes plus performantes, et on baisse les risques en
faisant un produit plus adapté au marché.
C’est ce qu’on appelle l’innovation ouverte : en interne, il ne faut hésiter à faire travailler ensemble le
marketing, le commercial, la R&D, la distribution terrain. En externe, il faut aller chercher les
compétences dont on ne dispose pas en interne, surtout dans une PME, à savoir les laboratoires, les
écoles et universités, les cabinets de design, les sous-traitants qui peuvent suggérer de bonnes idées
d’amélioration, les partenaires, les start-up. Et surtout, ne pas oublier le client, avec notamment les
clubs utilisateurs, les tests consommateurs. Faire travailler tous ces gens ensemble, cela s’appelle
des « clusters », c'est-à-dire des réseaux organisés d’innovation partenariale, qui sont déclinés en
France sous la forme de pôles de compétitivité dont les deux pôles Mer Bretagne et PACA qui
rassemblent tous les acteurs de la mer, soit plus de 600 adhérents. Parmi ces derniers, on compte
18 % de recherche que représentent une centaine d’établissements prêts à travailler en partenariat
avec des industriels, y compris dans le domaine qui nous intéresse. La question du non retournement
des gilets pourrait ainsi faire intervenir des laboratoires, des écoles, des universités dans lesquelles
on trouve des chercheurs en stabilité dynamique des navires. Ceux-ci sauraient trouver des pistes,
modéliser, afin de réaliser quelque chose qui fonctionne, par exemple des gilets dissymétriques,
compartimentés, ou ayant des séquences de gonflage permettant d’organiser un mouvement. Cette
question est suffisamment complexe pour être mise entre les mains d’universitaires, qui pourraient
de la même façon travailler sur la réduction de la cartouche du gilet afin d’alléger celui-ci.
Les deux pôles mer conduisent par ailleurs deux projets qui touchent à la sécurité maritime. Une
équipe travaille sur la miniaturisation de la balise Cospas-Sarsat pour en faire une balise individuelle.
Une balise qu’il faut miniaturiser tout en la réalisant à un coût accessible. Une autre travaille sur des
gilets de sauvetage comportant un ballon qui est largué et part en altitude au moment de la chute à
l’eau et du gonflage, ballon permettant de faciliter la localisation du naufragé.
Le pôle mer est donc là pour animer et faire de l’ingénierie de projet. Il aide à construire des
consortiums, va chercher des aides au financement de l’innovation, valorise les projets arrivés en
phase de développement auprès des investisseurs éventuels
En conclusion, on peut construire un projet collaboratif innovant sur le gilet gonflable du futur, à
condition qu’il réunisse au moins deux industriels et un laboratoire de recherche, ou davantage.
Catherine Chabaud
On a beaucoup parlé de plaisance, mais on ne parle jamais du kite-surf et de se qui se passe en
matière de sécurité pour ce sport. Nous avons vu dans les statistiques qu’on ne sait pas très bien ce
qui se passe sur la frange littorale, et l’on évoque davantage aujourd’hui une accidentologie qui se
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passe au large. Alors comment réagit Bruno Sroka, notre grand témoin, champion du monde de kitesurf, à ce qui a été dit ? Ce sport est-il dangereux, et comment assure-t’il sa propre sécurité ?
Intervention de Bruno Sroka, champion du monde de kite-surf
Le kite-surf est un sport jeune qui date des années 1996-97 et qui évolue à une vitesse folle. Je
réalise des projets aventures et l’un d’entre eux a consisté à passer le Cap Horn en kite-surf sur une
distance de 100 milles nautiques. Pour ce projet, j’ai utilisé une combinaison sèche avec dessous une
polaire de 3cm. J’ai été dans l’impossibilité d’utiliser un gilet de sauvetage, car je devais emporter de
la nourriture pour une navigation de neuf heures sans m’arrêter, ainsi qu’une VHF, une balise
individuelle, un miroir, tout ceci dans un sac à dos, plus le harnais. Un gilet m’aurait empêché de
bouger. Sur tous les projets aventures que je réalise, je rencontre un gros problème en termes de
matériel de sécurité. Cumuler un harnais, un sac et autres équipements avec un gilet est
pratiquement impossible. Les planches qu’on utilise de plus en plus pour faire de la compétition font
1m80 de long, 70 cm de large, et on arrive à des volumes de 80 litres de flottaison, laquelle est
suffisamment importante pour être hors de l’eau. On a par contre un problème à partir du moment
où l’on perd sa planche ou que l’on a un accident de voile. L’idéal serait pour nous de disposer d’un
gilet- sans pastille de sel en raison de la confrontation permanente avec les embruns- avec un sac à
dos incorporé derrière, permettant de mettre une VHF, une balise ou autre. La difficulté est que l’on
manque de poches ou autres dispositifs pour mettre des équipements supplémentaires.
Dans la nouvelle norme, on a le droit de naviguer jusqu’à deux milles des côtes, mais à partir du
moment où on part plus loin, il faut disposer d’un système de sécurité. La VHF peut être utile mais
elle est peu appropriée pour notre sport. Dans une eau très froide et avec des gants, il est difficile
d’actionner les boutons de l’appareil. Par ailleurs, il est très difficile d’entendre le son de la VHF. Il
existe bien des systèmes de déporteurs avec des oreillettes ou des systèmes qui prennent la voix,
mais ils ne sont pas non plus adaptés au kite-surf, car ils cessent rapidement de fonctionner en raison
des embruns.
A la question de savoir si le kite-surfer lambda a besoin d’une VHF, il faut considérer deux cas de
figures : dans tout l’ouest du pays, on dispose de nombreuses plages et sites où l’on peut pratiquer
ce sport et donc on est moins assujetti à partir loin et la VHF ne s’impose pas. Au contraire, on a dans
le sud une réglementation très structurée en ce qui concerne les sites de pratique, d’où des plages
très restreintes où de nombreux kite-surfers peuvent évoluer dans un espace réduit. Là les
pratiquants ont alors tendance à partir de plus en plus loin, avec des planches plus longues et en surtoilant, et dans ce cas il faut partir avec une VHF.
Dans la pratique, le port du gilet est très variable, selon que l’on est en école d’apprentissage, dans
les vagues ou au loin, en compétition ou pas, mais il n’est pas systématique et pourtant il serait utile,
ne serait-ce que pour amortir les chocs.
Dans le kite-surf il y a deux types d’accidentologie : accidentologie à terre sur tout ce qui est passes
de décollage et d’atterrissage, et accidentologie au large par casse de matériel, notamment lignes
cassées et impossibilité de redécoller la voile, ou ensaucissonnement dans les lignes, qui peut
advenir notamment lorsque les pratiquants n’ont pas tendance à larguer le matériel.
Jean-Jacques Morvant, Chef du bureau de sauvetage et de la circulation maritime
A partir de nos bases rapportées par l’ensemble des CROSS, il y a eu en 2010 plus de 600 opérations
concernant les kite-surfs et pratiquement une centaine de kite-surfers secourus, dont 34 dans la
bande des 300 mètres.
Intervention de Georges Tourret, de l’Institut Maritime de Prévention
Nous n’entendons parler que de gilet depuis ce matin, et je souhaite élargir le débat à l’équipement.
C’est pourquoi j’ai apporté un équipement dont l’IMP fait la promotion, à savoir la casquette de
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sécurité. Elle peut sembler ordinaire, sauf qu’elle est blindée et résiste pour les professionnels de la
mer à tous les chocs frontaux, et l’on sait que les blessures de la tête sont très fréquentes. Un même
souci de protection existe en matière de plaisance, par exemple pour éviter une baume lors d’un
empannage intempestif. Cette casquette peut être colorée et disposer de bandes réfléchissantes de
façon à être visible, doit disposer d’une ouverture d’aération, et pourrait être équipée d’une
jugulaire. Ce genre d’équipement vaut environ entre 10 et 15 €. Si on arrive à y intéresser la
plaisance, ce prix pourrait encore baisser.
Je veux maintenant parler de l’évolution du VFI à l’aide de modèles que je vais vous présenter. Les
premiers modèles étaient entièrement de couleur rouge ou bleue, et nous avons demandé aux
équipementiers de réaliser un VFI de couleur bleue à l’avant pour être moins salissant et jaune sur
les pans. En ce qui concerne la sous-cutale, ou plus exactement la sangle sub-inguinale, j’ai noté que
personne n’aime vraiment la mettre. Il est donc préférable et possible d’attacher le VFI sur la
ceinture du pantalon, à l’avant come à l’arrière. Mieux, on a maintenant un VFI disposant de poches
dans lesquelles on peut mettre une balise, glisser des fluos ou une lampe flash. Encore mieux, le
modèle suivant dispose d’un DIL ou dispositif individuel de localisation.
Mais au milieu de tout cela, les professionnels nous ont dit : vous ajoutez des dispositifs au VFI, mais
que pouvez vous nous proposer qui soit en port permanent et qui ressemble à notre vêtement de
travail quotidien ? D’où l’équipement que je vous montre, soit une cote de type ordinaire à l’intérieur
de laquelle on a des plaques de mousse dissymétriques qui se mettent à l’avant et à l’arrière, et en
dessous une petite culotte dont j’ai demandé au fabricant qu’elle soit équipée d’une braguette.
PREPARATION AUX URGENCES MEDICALES MARITIMES
André Thomas, Rédacteur en chef, Le Marin
Nous allons poursuivre ce forum avec un sujet auquel personne ne souhaite être confronté, mais qui
se produit, celui des urgences médicales. Les problèmes médicaux en mer sont tout de suite plus
compliqués, voire beaucoup plus compliqués, que lorsqu’ils se produisent à terre. Quelque chose de
bénin peut se transformer en drame si l’équipage n’a pas pris soin de se préparer soigneusement. Les
médecins qui sont autour de nous vont nous expliquer comment la politique de prévention et les
pratiques de la médecine à distance dans le milieu maritime sont aujourd’hui des disciplines qui se
sont énormément affûtées, au point de pouvoir envisager un peu toutes les situations pour peu
qu’on y soit bien préparé. Pour autant, la prévention en matière médicale et la connaissance de la
pratique de la télé médecine ont encore beaucoup de progrès à faire, et c’est un peu le message qui
va être développé aujourd’hui, cette journée étant placée sous le signe de la prévention.
Je présente très rapidement nos invités. Le Dr Jean-Yves Chauve, spécialiste de la médecine à
distance et notamment dans le domaine de la course au large, le Dr Christophe Berranger, chef du
service des urgences du CHU de Saint-Nazaire et patron de la vedette SNSM de Pornichet, le Dr JeanMarc Le Gac, urgentiste à Quimperlé et également président de l’Association Med-Mer, le Dr Charles
Hudelo, cardiologue et médecin référent de la SNSM, et le Dr Patrick Roux, médecin praticien dans
un hôpital toulousain et adjoint du CCMM ou Centre de Consultations Médicales Maritimes de
Toulouse. Nous avons aussi un grand témoin en la personne de madame Josiane Coupel-Pacaud,
psychologue, qui nous fera part d’une aventure de mer très malencontreuse qui lui est arrivée il y a
un peu plus d’un an.
Intervention du Dr Jean-Yves Chauve, spécialiste de la médecine à distance
Les problèmes médicaux sur la course au large, c’est un peu comme la Formule 1, on a des gens qui
se mettent dans des conditions extrêmes. Ce ne sont pas celles des plaisanciers, mais on en tire des
enseignements intéressants. Différents facteurs entrent en jeu dans la course au large : d’abord un
bateau navigue 24 h sur 24 en course, donc la voile est le seul sport où on intègre sa récupération à
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sa performance, c'est-à-dire que le sommeil fait partie de la performance. Si on ne dort pas bien, ou
si on dort trop ou pas assez, cela peut avoir une incidence sur la performance. De nombreux facteurs
interviennent ici, le sommeil désynchronisé, le bruit (jusqu’à 120 décibels sur les chocs), les
mouvements violents, le danger, la nutrition anarchique, la chaleur ou le froid, l’isolement, la
solitude, le stress de la compétition, la pression des sponsors et des media. Ce n’est pas ce que
rencontrent les plaisanciers, mais il y a quand même des éléments ci-dessus que l’on peut aussi
trouver dans la plaisance, et ce sont ces éléments qui sont intéressants à développer et à mieux
comprendre, car cela peut être utile à tous.
Pour moi, il ya un point zéro qui est l’accident ou la maladie, et il y a tout ce qu’on peut faire avant,
c'est-à-dire tout ce qui est prévention. On dit souvent qu’un accident n’arrive pas par hasard. C’est
vrai que quelqu’un qui va être en hypovigilance, c'est-à-dire fatigué, va être davantage sujet à un
accident, d’autant plus que le bateau est par définition un milieu instable. Donc il faut être
extrêmement affuté sur le plan mental, à 100% de ses capacités, car on peut chuter ou faire une
mauvaise manœuvre. Evidemment la nutrition, si on se nourrit mal, a aussi une incidence, et si l’ on
n’ est physiquement pas en forme, cela peut jouer aussi. Le bateau lui-même, s’il est mal conçu,
peut constituer un facteur d’accident. Tous ces éléments sont importants, et si malgré tout, la
maladie ou l’accident se produit, -et sachant qu’on est en autonomie sur un bateau, la mer étant un
espace de liberté avec une certaine autonomie-, le fait d’être capable de prendre en charge un
soucis médical est très important. En conséquence, la formation médicale est un élément
fondamental. Et puis il ya cette relation à distance avec le médecin. Il faut être en quelque sorte ses
yeux pour expliquer au médecin à distance ce qui se passe et également ses mains pour agir à sa
place, sachant qu’en bateau on rencontre plutôt de la traumatologie.
Il faut savoir qu’au bout de seize heures sans sommeil, on commence déjà à être moins bien, à avoir
des réflexes ralentis, un rendement qui baisse, et l’on rentre tout de suite dans un cercle vicieux. Sur
une course au large, cela peut avoir une incidence, mais également pour un plaisancier qui effectue
une sortie en mer durant un weekend. Il a pu mal gérer son sommeil, accumuler en mer son
hypovigilance, et c’est en rentrant chez lui en voiture au terme de sa navigation que l’accident peut
se produire. Cette hypovigilance, ce sommeil mal géré, la fatigue liée à une navigation un peu dure
par mauvais temps, peuvent avoir des conséquences graves après la navigation.
Le sommeil s’installe vite, l’humeur devient négative- on voit souvent en course des gens un peu
dépressifs en raison d’un problème de sommeil-, et puis, si on va plus loin, on a des hallucinations.
Dix sept heures de sommeil correspondent à une alcoolémie de 0,50gr d’alcool, c'est-à-dire que celui
qui n’a pas dormi durant ce temps peut être aussi dangereux que quelqu’un qui a bu. Le manque de
sommeil a aussi une incidence sur la vision. On perd le champ visuel, la vision en relief, on est
davantage sujet à l’éblouissement. Tout cela forme un cortège d’éléments pouvant conduire à
l’accident. Et puis si on utilise des excitants tel que le café, il y a des effets rebonds, c'est-à-dire que
le sommeil peut être plus fort que la caféine et puis les temps de réaction peuvent être perturbés,
d’où le danger. Elément très important également, tout ce qui est sucre rapide fait dormir. On a
étudié la Solitaire du Figaro et l’on s’est rendu compte que quelqu’un en hypoglycémie résistait
mieux au besoin de sommeil. L’attitude des coureurs tient compte de ce fait. Ainsi Michel Desjoyeaux
ne va presque rien manger durant une étape du Figaro, car il pense que s’il mange beaucoup, il va
s’endormir.
Dans la course au large, on a maintenant des bateaux de plus en plus rapides, qui vont à plus de 30n,
et on en arrive à l’accidentologie automobile, c'est-à-dire comportant des chocs violents identiques à
ceux que l’on rencontre sur la voie publique. Les zones les plus exposées sont la tête, les mains et les
épaules, la voile étant un sport qui fait travailler principalement la partie supérieure du corps. Sur les
monocoques, on a aussi le thorax et les jambes, sur les multicoques, les chevilles, très exposées
lorsque l’on court sur le trampoline. Voilà les sortes de traumatisme que l’on peut rencontrer, des
plaies, des contusions, tout ce qu’il y a de plus classique. Il n’y a pas de pathologie typique sur la
course au large, mais on trouve un peu de tout.
Quand on navigue, il faut donc être en bonne santé, surveiller ses dents, savoir si l’on n’ a pas besoin
de se faire opérer de l’appendicite, disposer d’un bon bilan cardiaque. Puis il faut savoir agir, d’où
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l’intérêt des stages de formation destinés à apprendre à effectuer un certain nombre de gestes,
sachant que ce n’est pas en ouvrant sa trousse à pharmacie qu’on sait l’utiliser. Le fait d’avoir
anticipé les accidents, d’avoir appris à faire un pansement ou utiliser un porte-aiguille pour faire un
point de suture, est un élément utile.
Avec Voiles et Voiliers, nous avons réédité un DVD de premier secours présentant des mises en
situation. On décrit par exemple le coup de baume, et donc toute la réaction en chaîne qui en
résulte, pour expliquer comment réagir face à cet accident, et quelles précautions doivent être
prises. Encore une fois, les situations maritimes sont des situations particulières, et il est vraiment
important de pouvoir les anticiper, de se faire l’histoire dans sa tête avant l’accident, pour être
capable de réagir dans de bonnes conditions au moment ou cela arrive.
Pour les navigations plus longues, on utilise des outils de recherche clinique, c'est-à-dire on met à la
disposition des gens un certain nombre d’outils pour recenser les symptômes qu’ils peuvent ressentir
et savoir comment agir. Et puis il faut disposer d’une trousse à pharmacie qui soit à la fois simple,
polyvalente et complète, et on utilise des systèmes de codification des médicaments afin d’éviter des
erreurs d’utilisation. On met donc à la disposition des navigateurs des outils à la fois simples et
efficaces.
André Thomas
Je voudrais maintenant passer la parole à quelqu’un qui a été victime d’un accident et qui va nous
raconter son expérience. Donc, Josiane Coupel-Pacaud, vous avez vécu un premier contact avec l’eau
glacée dans de mauvaises circonstances. Pouvez-vous nous raconter cela et nous dire ce que vous
avez ressenti ?
Intervention de Josiane Coupel-Pacaud, psychologue
Nous étions trois sur un petit trimaran plutôt prototypique et naviguions dans l’estuaire de la
Gironde. Il faisait beau, l’eau était très opaque et fraîche. Sans doute à la suite d’une manœuvre
inadéquate et aussi d’un faiblesse dans la conception du bateau, nous nous sommes retrouvés
debout en trois secondes et là, au lieu d’avoir un trampoline, c’était une toile beaucoup trop serrée
qui a donné prise au vent, on a volé comme une plume et on s’est tous retrouvé sous l’eau. Au
moment de l’accident, nous étions tous les trois à l’extérieur, j’avais gardé l’appareil de photo à la
main et filmais les gerbes d’eau. Quand on a chaviré, j’ai continué à filmer et donc on nous voit
passer à la baille. Mon mari s’est trouvé coincé sous ce fameux trampoline étanche dont il a eu
beaucoup de mal à sortir. Le propriétaire du bateau, un marin aguerri, a eu le réflexe magnifique de
m’attraper par la main, mais je suis restée coincée dans un paquet de drisses et d’écoutes. Je l’ai
donc lâché et il est remonté assez vite. Et moi je me suis retrouvée comme dans une lessiveuse et
j’ai été emportée par la masse d’eau qui a rempli le bateau quand il s’est renversé. J’ai alors pensé
que c’était fini et que j’allais me noyer. J’avais un foulard sur le visage, que j’ai rabattu, et à ma
grande surprise, je respirais. J’étais dans la cabine du bateau dont je pouvais toucher le plafond en
tapant de temps en temps dessus, et j’avais une bulle d’air d’environ 40 cm de haut sur la longueur
du bateau. Me rendant compte de cette situation, j’ai calmé ma respiration, et me suis dit que je
pouvais attendre. Comme je suis psychologue, j’utilise certains outils, notamment la relaxation. Et je
me suis mis instinctivement en relaxation. J’utilise différentes méthodes que les médecins
connaissent peut-être, et je me suis mis immédiatement en pose avec une visualisation autour du
soleil. J’ai eu chaud et suis resté ainsi longtemps.
J’avais compris que l’un des deux dangers qui me guettaient, outre le problème d’oxygène, était
l’hypothermie, d’autant que j’avais vu un téléfilm quelques mois auparavant, qui précisait qu’il ne
fallait pas avoir la tête trop longtemps dans l’eau froide. J’ai eu le temps de tapoter autour de moi
dans l’obscurité et de tomber sur une bouée fer à cheval dans son sachet. Nous n’avions pas de gilets
de sauvetage et j’étais partie en chaussures de ville. J’ai utilisé le sachet pour caler la tête hors de
l’eau. Je nageotais et j’ai pu tenir une heure trois quarts dans mon film de bien-être et de soleil .
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Quand on pratique cela, on arrive très bien à se couper de la réalité, tellement que je ne sentais plus
rien et n’avais aucune idée du temps que j’avais pu passer dans le bateau.
Heureusement, j’ai des sauveteurs merveilleux, et l’un d’entre eux présent ici a eu la seule bonne
idée qui était de crever la coque du bateau retourné. Des plongeurs avaient bien cherché à me
joindre, et j’avais essayé de replonger, mais je suis tombée à nouveau sur les drisses et suis remontée
dans le bateau, tandis que les plongeurs n’ont pas pu trouver l’entrée du bateau.
La coque du bateau a été crevée en deux endroits à la hache, après qu’on m’ait demandé de ma
protéger. L’un des sauveteurs me parlait régulièrement, et c’est très important, car seule, je me
serais laissée partir beaucoup plus. Quand ils ont pris la décision d’ouvrir le bateau, ils
commençaient à m’énerver. Je crois que je partais car la bulle d’air avait des limites et puis le froid
m’endormait. Ce n’était pas déplaisant et j’avais oublié que j’avais froid. Ils m’ont arraché à la coque,
et là, j’ai vu qu’il y avait beaucoup de monde et un hélicoptère. J’étais très surprise. Ils m’ont
entourée tout de suite de gentillesse et d’un gros blouson. On m’a collé un harnais et j’ai été
hélitreuillé –mon premier baptême de l’air en hélicoptère- on m’a déposé sur un parking où il y avait
un second hélicoptère et un camion du SAMU. Là, ils m’ont réchauffée pendant un bon moment. Je
suis revenu très vite à moi et c’est là que j’ai commencé à avoir de sacrées secousses nerveuses.
Voyant que j’étais dans cet état, je suis repartie dans ma petite méditation. On m’a lâchée de
l’hôpital à une heure et demie du matin après quelques examens, et j’ai effectué ensuite des
examens cardiaques.
André Thomas
Je vais vous poser une question que sans doute beaucoup ici doivent se poser. Il faut quand même
un certain entraînement personnel de la pratique de la relaxation pour arriver à lancer ce processus
alors qu’on est dans la situation où vous étiez ! Est-ce quelque chose que vous pratiquez
régulièrement ?
Josiane Coupel-Pacaud
Cela fait plus de dix ans que j’en fais régulièrement. Je l’ai appris pour mon travail mais aussi pour
des raisons personnelles car j’ai un syndrome de douleurs chroniques. Et c’est un moyen excellent
qui évite que je me gave de pastilles miracle. Quand j’ai des pics de douleur, je me mets en
méditation ou en relaxation et cela fonctionne très bien.
Intervention du Dr Christophe Berranger, chef du service des urgences CHU de Saint-Nazaire
Personnellement, je n’avais jamais entendu parler de ces possibilités préventives de pratique de la
relaxation. Mais je crois qu’effectivement la question du mental est quelque chose de fondamental.
Je vais revenir sur la question des hypothermies et d’une façon générale sur l’intervention
d’urgence.
En ce qui concerne l’organisation du secours en mer, on rencontre plusieurs acteurs. On a les acteurs
de la régulation médicale, mais là je laisserai mon collègue de Toulouse le rappeler. Puis il y a les
moyens nautiques d’intervention, les moyens aériens, et en bout de chaîne l’intervention des
médecins spécialisés. Les acteurs de la régulation, c’est bien sûr les CROSS mais ces derniers n’ont
pas de médecins à l’écoute, ce qui veut dire que lorsqu’ils ont une sollicitation d’ordre médical ou
traumatique, ils ont souvent besoin d’une expertise médicale pour savoir quels moyens il va falloir
adjoindre à la simple évacuation. Et c’est là que la régulation du CCMM (Centre de Consultation
Médicale Maritime) intervient. Et s’ils jugent éventuellement important de médicaliser l’intervention,
on a désormais des SAMU de coordination maritime-il y en a d’ailleurs peu : Bayonne, Brest, Le
Havre, Toulon- qui vont ensuite prendre en mains l’intervention médicale comme un SAMU normal.
Et puis en bout de chaîne, les moyens nautiques, c’est bien sûr la SNSM qui réalise 60% des
interventions en milieu maritime, mais c’est aussi les moyens de l’Etat en mer, ce sont tous les
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navires sur zone. On a également les moyens aériens, probablement l’élément le plus important pour
nous médecins dans des zones qui peuvent aller jusqu’à une centaine de nautiques au large, voire
parfois plus, avec des moyens que l’on est susceptible de médicaliser 24 heures sur 24.C’est l’un des
messages forts que je veux faire passer , notamment aux patrons de vedettes : si vous êtes au large
avec un blessé à bord et en situation de transit qui peut frôler la demie heure, voire l’heure, il ne faut
pas hésiter à solliciter les moyens pour qu’on puisse éventuellement médicaliser la victime
directement sur place et lui donner toutes les chances de s’en tirer sans trop de séquelles. Les
moyens aériens sont destinés essentiellement pour les interventions tout temps, c’est la Marine
nationale avec maintenant des hélicoptères extrêmement performants.
Les moyens médicaux représentent le bout de la chaîne. On va distinguer les SMUR côtiers et les
SMUR maritimes. Les SMUR côtiers sont dispersés sur le littoral et sont susceptibles d’armer y
compris les moyens nautiques de la SNSM, parce que les délais d’intervention sont rapides. On peut
être rapidement sur zone et embarquer éventuellement, si on a prévu les choses assez tôt et
notamment s’il y a eu une coordination médicale maritime en amont. On peut donc armer ces
moyens nautiques avec un équipage de SMUR.
Les SMUR maritimes ont une spécificité qui est d’armer essentiellement les hélicoptères de la Marine
nationale, ou éventuellement les Dragons de la Sécurité Civile, avec des équipages qui sont cette fois
beaucoup plus restreints, la plupart du temps un médecin tout seul, mais des moyens lourds du
SMUR. Cela nécessite pour les intervenants un entraînement au cours duquel on a répété les choses
dans la mesure où la spécificité de ces interventions réside essentiellement dans le temps que l’on va
rester en stationnaire sur zone. A terre on va pouvoir éventuellement prendre 30 minutes sur place
pour un infarctus avant de transporter la victime, c'est-à-dire le « stabiliser ». Alors qu’en milieu
maritime, et plus on est loin, moins on a de temps sur place pour repartir avec l’hélicoptère, dans la
mesure où l’on ne peut ravitailler ce dernier en carburant en pleine mer. On a soit la solution de
rester à bord si la situation le nécessite vraiment, soit on dispose d’un temps très court, ce qui
nécessitera de travailler dans l’hélicoptère.
Il y a un temps de mise en place qui est long, faire décoller un hélicoptère médicalisé va prendre du
temps, mais par contre on va en gagner par la suite. Le message est donc de transmettre ses bilans
au CROSS en demandant éventuellement l’intervention ou la régulation médicale, pour qu’on soit le
mieux à même de juger si l’on peut apporter une plus-value avec une médicalisation sur zone, ce qui
est désormais possible. La bonne personne qui va évaluer la nécessité ou pas de demander l’envoi
d’une équipe médicalisée est l’interlocuteur qui sera en communication avec le témoin, c'est-à-dire
le médecin du centre de régulation maritime qui posera toutes les questions nécessaires, en s’aidant
au besoin des moyens modernes de communication.
Dr Patrick Roux, du CCMM Toulouse
Il faut savoir qu’il existe des textes réglementaires, entre autres une circulaire de l’OMI de 2000 qui
impose au CROSS, à partir du moment où il est sollicité pour un problème médical survenu à bord
d’un navire- un problème médical n’étant pas pour nous synonyme de maladie mais pouvant aussi
représenter un traumatisme ou un accident- de mettre l’appelant en relation avec un médecin. Or
chez nous, le médecin référent est celui du CCMM, qui est le centre officiel désigné en France. Des
centres identiques existent dans d’autres pays européens, voire dans d’autres pays.
Cet objectif de régulation peut donner à l’appelant l’impression de perdre du temps, alors qu’on en
gagne au final. Notre souci permanent, c’est l’intérêt du patient. Ce n’est pas parce qu’on se situe à
un mille de la terre qu’on est forcément sauvé. L’objectif consiste pour nous à acheminer le patient
vers la structure qui va être véritablement capable de le prendre en charge, et celle-ci n’est pas
nécessairement la structure de proximité. La proximité en mer est donc parfois trompeuse, que ce
soit en termes de délai de déclenchement des secours, ou en termes de possibilité pour un navire
d’accéder aux quais.
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Il est donc important d’avoir un médecin en ligne, qui puisse rassurer des gens qui se trouvent dans
un environnement hostile. Avoir quelqu’un au téléphone qui va vous rassurer, vous dire qu’on
s’occupe de vous et qu’on va mettre en place une stratégie constitue un point fondamental.
Dr Christophe Berranger
En relation avec un SOS, différents acteurs vont être sollicités et vont engager via la régulation
maritime, éventuellement mais pas toujours, une médicalisation en mer, soit côtière, soit
hauturière. On peut en effet aller relativement loin avec les machines modernes, et là on va gagner
un temps important sur le retour, y compris sur le point de chute car tout sera préparé à l’arrivée du
patient.
Concernant l’hypothermie, les mécanismes du refroidissement sont assez complexes mais on peut
les résumer assez simplement en sachant que lorsqu’on est immergé, on va se refroidir grosso modo
à peu près 25 fois plus vite que dans l’air. Il faut faire passer un message fort aux sauveteurs en ce
qui concerne le temps de survie : une victime étant dans l’eau, on sait que son temps de survie va
être compté, mais il est important de souligner qu’il peut être relativement prolongé. Il ne faut donc
pas baisser les bras, mais organiser sa recherche sous l égide du CROSS, utiliser plusieurs moyens de
sauvetage, engager des moyens lourds, car même au bout d’une heure, on peut avoir de très bonnes
surprises. Même si la personne est retrouvée en situation de mort apparente ou presque, on dispose
de techniques de médicalisation et de réanimation qui permettent de lui préserver ses chances de
survie. Pour donner un ordre d’idée, dans de l’eau entre 15 et 20°, la période de survie est
relativement longue, soit environ deux heures, variant évidemment suivant la tenue de la victime
(équipement de flottabilité, port de vêtements chauds). On n’a donc pas le droit de baisser les bras
lorsqu’on est sauveteur et il faut se donner tous les moyens.
Un deuxième message à faire passer concerne les moyens de défense qui passent par l’isolement du
froid. Il vaut mieux sortir de l’eau quand on le peut, se sécher, s’abriter du vent qui entraîne un
refroidissement, se mettre en position latente, essayer si l’on s’endort de trouver quelque chose qui
va vous maintenir en surface, même si l’on est amené à perdre conscience, car ce n’est pas parce que
l’on perd conscience et que l’on va descendre en température au-dessous de 28°que toutes les
chances de survie sont abandonnées.
L’intervention médicale lorsqu’on ira chercher la personne et qu’on la retrouve sera fondamentale.
Parmi les réactions de la victime, on remarquera le frisson au réchauffement qui est très
impressionnant. Il faut le respecter car c’est un mécanisme de défense qui va consommer de
l’énergie mais qui produit de la chaleur. Et puis bien sûr, la victime ne doit pas boire d’alcool ni faire
d’efforts physiques car ceux-ci augmentent le débit cardiaque, et le refroidissement est accéléré.
Enfin lorsque l’on porte un vêtement sec dans lequel on met de l’air (à destination professionnelle),
on multiplie par 2, 3 voire 4 sa durée de survie lors d’une immersion. Le massage est donc qu’il faut
adapter sa tenue vestimentaire aux conditions dans lesquelles on navigue.
Intervention du Dr Jean-Marc Le Gac, de l’Association Med-Mer, médecin urgentiste
L’Association Med Mer dont j’assure la présidence a fait de la prévention des plaisanciers un de ses
credo. Elle a dix ans d’existence. Nous sommes quatre médecins, et y participent des coureurs au
large et des plaisanciers de façon à ce qu’elle soit une plate-forme d’échanges pour avancer en
termes de formation. Les formations sont prodiguées à Lorient sur l’ancienne base sous-marine.
La formation est faite pour éviter l’accident, comprendre au moins ses conséquences et voir
comment on peut en limiter les effets. Lorsqu’il y a des accidents, les gens qu’on rencontre nous
expliquent souvent « j’ai provoqué quelque chose, j’aurais pu éviter la chose », et c’est là- dessus
qu’on les fait réfléchir. C’est une partie de la formation. On insiste sur la prévention qui commence
par la préparation. On a parlé ainsi des dotations médicales de bord. Avoir une bonne dotation c’est
compliqué, la faire quand on n’est pas médecin, c’est difficile, et avoir une dotation qui soit connue
de l’organe de régulation de façon à ce qu’on ne passe pas du temps pour énumérer les
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médicaments qui sont à bord et peuvent éventuellement être utilisés, c’est déjà quelque chose qui
fait partie de la formation. Et on voit aussi qu’avant l’accident il y a des choses simples qui peuvent
être analysées, à savoir maitriser l’énergie. A partir du moment où l’on explique à un plaisancier la
conséquence d’attraper une courroie de moteur, un bout qui file, les conséquences que ce la peur
avoir sur un doigt, une fracture ouverte, des plaies, c’est très difficile à réparer et peut-être que
lorsqu’on comprend ces conséquences, on évite de faire des gestes qui éventuellement ne seront pas
résolubles à bord.
On a d’autres choses qui sont simples, c’est séparer dans l’espace. Ainsi, le match du pied contre la
poulie est perdu d’avance, sauf si on met quelque chose entre les deux comme une chaussure, ou
sauf si on déplace la poulie. Pour cela il faut réfléchir avant, et ce n’est pas le travail du médecin mais
celui du marin. Et quand le médecin explique les conséquences du traumatisme ou de la fracture
ouverte, le marin se demande comment il va faire pour réparer cela à bord. « Peut-être vais-je
essayer d’éviter l’accident, et je peux le faire ! »
Il faut éviter la libération d’énergie connue. A bord, il n’y a que de l’énergie, ce qui fait avancer les
bateaux. Parer à virer permet d’éviter le coup de baume, mais peut être qu’il y a autre chose. Ainsi si
l’on parle d’hypothermie, en cas de chute à l’eau, maîtriser l’énergie, c'est-à-dire éviter d’avoir la
perte d’énergie. Donc s’équiper de vêtements si je risque de tomber à l’eau. Séparer dans l’espace,
ce sont les filières de sécurité, c’est avoir une ligne de vie. Et si jamais je tombe à l’eau, séparer dans
l’espace les voies aériennes de l’eau qui va me noyer, donc avoir un vêtement adapté de façon à ce
que l’eau ne pénètre pas dans mes voies aériennes. Eviter la libération d’énergie connue, c’est
l’hypothermie, une perte d’énergie du corps humain, de façon à ce que lorsqu’on récupère la
victime, on la récupère vivante. Donc avoir des vêtements adaptés, ce qui est valable notamment
pour les kite-surfers et les véliplanchistes. On explique tout cela, et l’on s’aperçoit que l’accident
n’est plus rarement une fatalité, et que nous n’avons plus grand-chose à faire. Sauf que
malheureusement, de temps en temps, malgré toutes ces précautions, l’accident arrive. Mais la
prévention continue avec la connaissance de la chaîne de secours. Ce n’est pas au moment où le
problème survient qu’il faut découvrir ce qu’est le CCMM, le CROSS, la VHF et son fonctionnement,
qui appelle t’on en fonction de la distance à la côte, a-t-on les moyens de communication, les a-t-on
testés avant de partir. Et la prévention continue encore, car sachant qu’il faut du temps, une heure
environ avant que l’hélicoptère ou la vedette de la SNSM n’arrivent et qu’il y ait un docteur à
proximité pour prodiguer les premiers soins, il faut savoir entre temps faire des soins. Prévention
encore dans le fait d’avoir une bonne assurance. Si l’on est loin des côtes françaises et qu’on doit
être rapatrié, on peut avoir de très mauvaises surprises si l’on n’ a pas prévu cette assurance.
On enseigne donc tout cela aux plaisanciers. Pour les professionnels, il existe une réglementation très
rigoureuse et complète, alors que pour les plaisanciers, c’est un peu plus erratique, mais il existe
cependant des règles internationales de la régate, et l’on se fie à ces dernières pour inventer
quelque chose et édulcorer une formation pratique, formation qui est habilitée en France par la FFV.
On pratique la formation avec le CEPS (Centre d’Etude et de Pratique de la Survie) La formation ISAF
comporte deux parties, une partie sauvetage avec des actions telles qu’enfiler une combinaison de
survie, mette des gens dans l’eau avec une combinaison de survie, monter dans un radeau de
survie, utiliser des feux à main, et une partie médicale, savoir faire un bilan, savoir pratiquer les
premiers gestes de secours et parfois des gestes un peu plus poussés. Il y a deux niveaux dans cette
formation médicale. Le niveau basique d’abord, qui est sanctionné par un papier que tous les
coureurs au large sont censés détenir pour partir en course. Ce niveau comporte une demie journée
au cours de laquelle on explique ce qu’est un bilan médical, avec la particularité qu’on se trouve au
loin et que ce n’est pas uniquement l’urgence vitale qui est concernée, mais également la façon dont
on surveille une maladie, sachant qu’on va pouvoir peut-être bénéficier d’instructions données par la
CCMM. Il faut savoir donner les signes pour pouvoir être dans les mains du médecin à distance, et
surveiller l’évolution de la pathologie. On donne aussi des conseils sur la façon de constituer une
dotation médicale de bord, à partir de pharmacies existantes, et en particulier de dotations
médicales de bord proposées par le CCMM, sachant qu’en utilisant les drogues proposées par
l’organe régulateur, on parle le même langage que lui.
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Et puis il y a le stage de secourisme qu’on appelle le PSE1, stage obligatoire mais qui présente
l’inconvénient d’être adapté au milieu urbain. Or, par exemple, l’arrêt cardiaque en pleine ville n’est
pas la même chose que l’arrêt cardiaque survenu à deux milles des côtes. Il faut donc adapter cette
réalité et expliquer aux gens la particularité de l’arrêt cardiaque, ou l’impression de l’arrêt cardiaque
dans l’hypothermie, car on peut avoir à cette occasion des gestes éventuellement inappropriés. On
adapte donc ce stage pour le rendre proche de la réalité maritime.
Puis il y a le niveau 2 destiné aux professionnels qui vont faire le tour du monde. Là il y a des gestes
techniques qui sont édictés par les règles internationales, parfois étonnantes : savoir faire une
suture, poser une intraveineuse, poser une perfusion sous-cutanée, effectuer éventuellement des
tests intra-osseux, poser des immobilisations, toutes choses qui peuvent être accessibles pour le
béotien, qui fort heureusement s’en sert rarement. Le mieux, bien entendu, c’est de venir voir et de
faire, c'est-à-dire pratiquer. On propose donc à nos stagiaires de venir deux jours aux urgences. Ainsi
ils voient et font avec nous, mettent la main sur un ventre douloureux, écoutent quelqu’un qui a du
mal à respirer, ils savent ce que c’est… La formation médicale est donc surtout de la prévention qui
repose sur la formation, la dotation médicale, les moyens de communication et la connaissance de
leur emploi. Le but du stage est d’essayer d’empêcher les stagiaires d’avoir l’impression d’être
médecin, on les met en garde sur ce point, et c’est dépister les signes de gravité de façon à alerter à
bon escient, pour que le médecin à distance ne soit pas démuni et obligé de poser quinze mille
questions pour savoir ce qui se passe, et arrive très vite à cibler la situation.
Sur les grands bateaux, cela va très vite, et la traumatologie rencontrée à bord se rapproche de celle
que l’on trouve avec les véhicules terrestres. On va donc doter les coureurs d’attelles pour
immobiliser un malade s’il a éventuellement une fracture du rachis ou du fémur. On les équipe et on
leur montre comment s’en servir. Il y a un échange qui nous permet de trouver les médicaments qui
vont bien à bord. On trouve un peu dans l’esprit marin ce qu’on trouve dans notre esprit médical en
conversations et en échanges, ce qui est assez sympathique. On est toujours un peu dans un
processus de recherche, pour essayer d’avancer au maximum et proposer pour les futurs marins des
solutions encore plus pertinentes. C’est eux qui font les courses, qui sont confrontés à ces
problématiques, qui nous apportent des témoignages importants pour faire avancer nos
connaissances en la matière.
Nous avons deux stages par mois avec une quinzaine de stagiaires par stage, moitié-moitié
professionnels et plaisanciers lambda voulant par exemple traverser l’Atlantique ou ayant un projet
familial. Le mélange est intéressant car ils s’apportent des éléments entre eux et cela fonctionne
bien. Sachant qu’il y a d’autres organisateurs de ce type de stage, il existe donc un outil susceptible
de répondre à une demande croissante de formation, si elle s’exprimait.
Pour terminer, il y un module de formation aux premiers gestes de secours à inventer chez nous qui
soit vraiment adapté mer, car les gestes de secours de base sont différents en milieu urbain et en
milieu maritime. Et comme le suggère le Dr Chauve en constatant qu’un nombre croissant de seniors
à la retraite naviguent autour du monde, et développent des pathologies liées à leur âge, une
formation spécifique pourrait être dispensée à cette catégorie de pratiquants de la mer.
Intervention du Dr Patrick Roux, du CCMM Toulouse
Le CCMM est le centre de consultation référent en France, et s’occupe très majoritairement des
professionnels de la mer. Sur l’année 2010, il a pris en charge 1900 patients au travers de 4000
consultations, soit en gros un peu plus de 10 consultations par jour. Un médecin par jour assure la
permanence, sachant que lorsqu’on parle de consultation, c’est bien une vraie consultation. Cela n’ a
rien à voir avec un appel à un SAMU dans le cadre d’une régulation faite par un centre de réception
des appels du type centre 15, où l’on va vous poser des questions pendant trois ou quatre minutes,
sachant que derrière on va se faire une idée de la pathologie, et l’on sait que dans le quart d’heure,
on aura une ambulance , un véhicule de pompiers ou du SAMU, ou un médecin de garde dans la
demie heure qui suit, ou vous serez dans un service d’accueil des urgences. C’est une vraie
consultation, un acte médical exactement comme lorsqu’on va voir son médecin. A Toulouse, on
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prend en charge en gros 20% de plaisanciers dans l’année, le volume d’activité de la plaisance
augmentant pendant la période allant du 15 juin au 15 septembre. Le CCMM est appelé pour tout,
cela va de l’otite jusqu’à l’arrêt cardio-respiratoire, en passant par tout ce que l’on peut imaginer, le
noyé, le syndrome dépressif, l’infarctus, l’infection urinaire, etc… Au départ, notre activité est
consacrée aux professionnels de la mer, parce qu’ils sont dans un cadre très réglementé. Ces derniers
ne se posent pas de question. Quand survient un problème médical à bord d’un navire, leur réflexe
est d’appeler le CCMM, parce qu’ils ont été formés. En mer, chez les professionnels, le capitaine du
bateau, en plus des missions auxquelles il est confronté, est responsable des soins à bord de son
navire, il assure la santé et la sécurité des personnes qu’il transporte, professionnels ou passagers.
Les professionnels ont donc cette culture, toute une somme de connaissances acquises peu à peu,
concernant les premiers secours, la gestion d’une dotation médicale, l’examen du patient. Les
plaisanciers ne se trouvent pas dans ce contexte là, et pourtant ils peuvent se trouver confrontés aux
mêmes problèmes. Et ce qui a été anticipé au niveau des professionnels de la mer doit à notre sens
être anticipé de la même façon par les plaisanciers, comme cela se fait, on vient de le voir, chez les
coureurs au large et les plaisanciers qui se lancent dans une transatlantique ou un tour du monde.
On commence à voir assez régulièrement des gens qui se disent « Je pars en mer, comment vais-je
gérer cette situation ? » Certains prennent contact avec le CCMM, notamment via notre site, et nous
sollicitent en nous exposant leur projet de navigation, dans telle ou telle zone, en famille , avec des
amis , avec des enfants, que doivent-ils faire ?. Tout ce qu’on vous a exposé durant cette table ronde
tient en un maître mot : anticipation. C’est ne pas se trouver confronté aux événements, et se dire
maintenant qu’est-ce que je fais ? C’est se dire avant de partir, a-t-on les capacités de partir, a-t-on
l’aptitude physique nécessaire pour assurer cette activité de navigation ? Et si l’on est capable, il faut
se dire qu’on évolue dans un milieu hostile, inhabituel, même si c’est quelque chose qu’on pratique
régulièrement. Lorsqu’on se lance un peu loin, on va se trouver confronté à des événements liés à
l’environnement. A l’analyse des chiffres, on relève moins d’accidents que de maladies, et
curieusement, dans l’intellect des gens, la seule question à laquelle on pense, c’est l’accident. On
pense à la chute, à la blessure, etc… mais pas au fait qu’on peut faire une gastro-entérite ou une
infection urinaire. Les motifs pour lesquels nous sommes le plus sollicités sont les lombalgies, les
coliques néphrétiques et des pathologies infectieuses. En mer, tout ceci évolue plus vite du fait des
caractéristiques propres à la navigation. Un premier facteur pour lequel ça se dégrade, c’est qu’on a
tendance à se dire que cela va passer. On nie un peu le problème et on retarde la prise en charge.
Quand survient un problème médical, la règle que nous donnons est donc : « Comportez vous en mer
comme vous vous comporteriez à terre. Il se passe quelque chose d’inhabituel, j’ai donc besoin
rapidement d’un avis médical, et ce n’est pas dans deux heures qu’on va me le donner. » On est apte
à naviguer, on s’approprie le fait qu’on peut tomber malade, et si l’on veut solliciter un conseil, il faut
disposer de moyens de communication. Quand on est à proximité, tout le monde en a, on en a même
trop, mais quand on est loin, on se dit souvent que de toute façon on est loin, et advienne que
pourra. Non, quand on part en mer pour un transat, pour un tour du monde, il faut se donner les
moyens de communiquer et d’entrer en relation avec quelqu’un qui puisse vous aider. Et parmi ces
moyens, il y a la télémédecine qui fait appel aux nouvelles technologies. Un appareil photo
numérique et un téléphone portable vont permettre parfois de transmettre au médecin la photo
d’une plaie, de boutons, de phénomènes visualisables, photo qui va permettre de gagner 10 minutes
surtout quand on a en face de soi une personne qui a des difficultés à transmettre des informations,
ce qui compréhensible car nos interlocuteurs ne sont pas des médecins. On peut ainsi bénéficier
d’outils qui peuvent nous aider dans la pratique dans le but d’optimiser la consultation et de parvenir
au diagnostic que seul un docteur en médecine est habilité à faire.
Notre objectif est donc que les gens nous apportent de l’information, le maximum d’informations,
pour que nous puissions arriver au plus près du diagnostic. Je dis toujours à ceux que nous formons :
« Nous sommes un logiciel, et si n’alimentez pas en données ce logiciel, il ne fonctionnera pas »
Pour finir, il ne faut pas partir sans une dotation médicale adaptée à la navigation et au type
d’activité que l’on va connaître. Plus on est près, moins on a besoin de choses. Mais ce n’est parce
qu’on est près qu’on a le droit de rien avoir. Et plus on va loin, plus on a besoin de choses dans
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l’optique où l’on va mettre plus de temps à aller vous chercher. La dotation –qui, notons le, fait
actuellement l’objet de recommandations et non d’obligations-doit être préparée. Le CCMM a mis en
place un certain nombre de dotations qui sont adaptées à ces types d’activité pour gérer l’urgence.
Mais en plus de la dotation, le médecin traitant peut préconiser un complément en face de
spécificités telles que des risques particuliers présentés par le naviguant. Pour résumer, l’idéal est
d’anticiper, ne pas attendre que quelque chose s’installe et que cela se dégrade, et ne pas croire
qu’il n’y a que des traumatismes qui peuvent vous arriver.
Intervention du Dr Charles Hudelo, cardiologue, médecin référent SNSM
En préambule, et à propos de la formation au brevet de secourisme, je rebondis sur ce qu’a dit le
Docteur Le Gac. Au sein de la SNSM, le dossier formation constitue un point extrêmement
important. Il parlait de diplômes de secourisme qui sont des diplômes terrestres, urbains pour
reprendre ses propos. Et c’est vrai que dans la pratique, nos canotiers secouristes nous disent que
cette formation est très importante mais pas forcément adaptée à l’environnement maritime.
Mettre une victime en position latérale de sécurité à terre quand ça ne bouge pas et le faire sur un
bateau dans le volume réduit d’une timonerie, c’est difficile, c’est différent. Et Il donc il faut adapter
la formation. Tous sont d’accord, le milieu associatif, le CCMM, les médecins de la course au large,
pour apporter un plus à cette formation. Au sein de la SNSM, on a lancé depuis quelques mois un
travail de réalisation de fiches réflexes et on va développer des thématiques spécifiques au
secourisme maritime, l’hypothermie, l’accident de plongée, tous ces thèmes qui ne sont pas
forcément abordés dans les diplômes de secourisme terrestre. Ces thématiques sont regroupées
sous le vocable de « premiers secours maritimes ». On va aller jusqu‘au bout, mais on ne va pas le
faire seuls, car nous devons faire participer tous nos confrères et tout le milieu associatif, parce que
nous parlons tous le même langage et on a tous pensé à la même chose. Et au plus haut de l’arbre
décisionnel, que ce soit les Affaires Maritimes, le Service de santé des Gens de mer, la Direction de la
Sécurité civile, nous sommes très écoutés sur la question, et je pense que ce dossier qui a encore été
relancé tout récemment avec des discussions qui avancent bien, aboutira. Mais c’est un travail qui
doit être collectif.
Dernier sujet de cette table ronde médicale, je vais vous entretenir du défibrillateur. Nous avons un
enjeu de santé publique qui se présente à nous, puisque la mort subite concerne dans notre pays
40.000 personnes. Quand on parle de mort subite, il s’agit de quelqu’un qui va s’écrouler devant
vous en arrêt cardiaque sans signes avant coureurs. La meilleure illustration en est le sportif de haut
niveau en pleine forme qui s’écroule subitement au cours d’un match. Sur les 40.000 victimes d’une
mort subite, seulement 3 % survivront, chiffre qui doit être rapproché des données statistiques
relevées dans certaines villes américaines où l’on a un taux de survie de 30 %, c'est-à-dire un rapport
de un à dix. La mort subite en mer est beaucoup plus confidentielle et ne concerne que quelques
dizaines de personnes. Les décès sont plus des accidents à la mer, des personnes victimes d’un
chavirage, des accidents de plongée, la noyade, soit au total selon le rapport des CROSS, 219
personnes auxquelles il faut ajouter les personnes disparues.
Pourquoi un taux de survie si bas et que faire ? Il est important d’exposer rapidement le concept de
chaîne de survie. Lorsqu’on est témoin d’une victime qui va présenter une détresse vitale, et en
l’occurrence l’arrêt cardiaque, la première intervention est l’alerte précoce. La seconde est la mise en
place rapide de gestes de réanimation, la troisième l’utilisation d’un défibrillateur, si l’on dispose de
cet équipement, tout ceci dans l’attente en quatrième lieu de l’arrivée des secours médicalisés. En
France, on est bon sur la première étape. L’alerte est plutôt donnée précocement que ce soit sur
terre ou en mer. Pour la quatrième étape, on dispose d’une médecine d’urgence pré hospitalière de
qualité et reconnue internationalement. Nous ne sommes pas bons sur la deuxième étape. Le
nombre de citoyens formés aux gestes qui sauvent est inférieur à 10 %, ni sur la troisième étape,
quoique les choses s’améliorent avec la mise en place de défibrillateurs dans les lieux publics. Les
deux étapes nécessitant un progrès pour faire évoluer la chaîne de survie expliquent quasiment à
elles seules ce taux de survie de 3 %.
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Je vous ai apporté un défibrillateur maritimisé tel que nous en avons à bord des canots de sauvetage
de la SNSM. C’est un outil extrêmement simple et dans certains pays, la formation à son emploi a lieu
dès l’école communale, dès que l’enfant sait lire et coordonner ses mouvements. Ici, le défibrillateur
est dans sa coque de protection prévue pour nos canots. Dans les lieux publics, le défibrillateur n’est
pas enfermé et visiblement très accessible. L’outil est constitué de deux éléments, un boîtier et un
jeu d’électrodes. Son action est de permettre la réalisation d’un choc électrique externe. Il intègre
une aide vocale pour que le secouriste ou le citoyen non secouriste diligente des gestes coordonnés,
aide vocale qui a un aspect rassurant. Très schématiquement, le cœur est une pompe, un muscle qui
a besoin d’une commande électrique pour fonctionner. Cette commande doit être synchrone, et
pour être efficace, doit être régulière. Les deux électrodes vont être placées sur le thorax du patient
et vont encadrer le cœur, et la première partie de l’action du défibrillateur va être de faire une
analyse du rythme cardiaque du patient. Dés qu’il aura repéré un trouble de ce rythme, en particulier
une fibrillation ventriculaire, il va donner un ordre vocal pour la réalisation d’un choc électrique. Ceci
est très important, car 80 % des 40.000 morts subites sont dus à ce défaut du rythme cardiaque, et
c’est donc là qu’intervient le défibrillateur en proposant la réalisation d’un choc électrique. A ce
stade, soit on dispose d’un défibrillateur semi-automatique (DSA) et lorsque le choc est proposé, on
doit faire le geste d’appuyer sur un bouton, soit on a affaire à un défibrillateur entièrement
automatique (DAE) et lorsqu’il propose la réalisation du choc, il le fait sans intervention humaine.
Dans le contexte maritime, ces défibrillateurs équipent maintenant nos canots de sauvetage et nos
postes de secours. Il faut d’emblée dire à notre population de secouristes qu’il n’y a aucun risque
pour eux à utiliser un défibrillateur en milieu humide. Il n’a aucun cas relaté dans la littérature
d’accident survenu à des gens utilisant cet équipement, et en particulier en milieu humide. Mais il y a
des règles de précaution qui sont établies, une check-list qu’il faut respecter, des règles de bon sens :
dégager la victime si elle est dans une flaque, ne pas la traîner loin, l’isoler si possible du sol, glisser
éventuellement un plan dur sous la victime, essuyer rapidement la poitrine pour que les électrodes
fonctionnent mieux, éviter que le défibrillateur traîne dans l’eau, et enfin ne pas toucher à la victime.
Où trouve t’on actuellement des défibrillateurs en mer ? Les unités en mer qui sont en charge des
secours à personnes, et en premier lieu la SNSM, sont maintenant dotées de défibrillateurs. Nous
avons eu il y a maintenant deux ans une politique très ambitieuse, avec l’aide de la Fondation Total,
d’équiper toutes nos unités avec des matériels brevetés étudiés pour une situation dans des
conditions de mer. Des questions se posaient au départ. On enseigne que sur terre un défibrillateur
doit être utilisé quand ça ne bouge pas, ce qui pouvait poser un problème en mer. Par ailleurs, les
champs électromagnétiques pouvant exister sur nos bateaux ne risquaient-ils pas d’engendrer des
interférences et fausser l’analyse des défibrillateurs ? Tout cela a été étudié avec des réglages usine
spécifiques. Si bien que l’on peut dire aujourd’hui que l’utilisation d’un défibrillateur sur un bateau
ne pose aucun problème de contre-indication. La Marine Nationale a fait la même démarche il y a
quelques années et ses bateaux sont équipés de défibrillateurs. Les remorqueurs de haute mer s’en
équipent. Dans le milieu professionnel, au niveau de la marine marchande, le seul cas où il est
obligatoire d’avoir dans la dotation un défibrillateur, est celui des navires à passagers. Dans toutes les
autres situations, navires de commerce ou de pêche, la présence d’un défibrillateur dépend d’une
décision de l’armateur. C’est de l’initiative d’entreprise, mais il n’ya aucun cadre légal d’obligation de
mise en place d’un défibrillateur. En fait, les compagnies de navigation françaises ont passé le pas
depuis longtemps et ont équipés leurs bateaux de défibrillateurs. Le coût de ces derniers varie entre
1000 et 1500 €, prix qui a tendance à diminuer avec l’augmentation de la demande.
Pour la plaisance, il n’y a aucune indication à inclure un défibrillateur dans la dotation. Les choses
évolueront peut-être. On parlait tout à l’heure de l’évolution des pratiques de la mer, avec
notamment des seniors qui ont pu avoir des antécédents cardio-vasculaires et qui souhaitent
cependant faire de la croisière. Dans quelques années, pourquoi pas, le défibrillateur fera partie
d’une dotation logique de bord. Nos amis américains ont déjà passé le pas, puisqu’on voit fleurir
cet équipement dans la dotation de leurs bateaux de plaisance. Pour le navigateur solitaire en
revanche, le défibrillateur ne présente pas d’intérêt.
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Sur la côte, en façade maritime, en dehors des postes de secours où l’équipement est présent, tous
les cas où l’on peut trouver un défibrillateur relèvent actuellement d’une initiative locale. Soit on a
au sein des communes des élus très sensibilisés par la question et qui décident de mettre en place
des défibrillateurs, soit en entreprise, cette mise en place est décidée par le chef d’entreprise ou par
son responsable sécurité. Il en est de même dans les ports de plaisance. Une mort subite survenue il
y a quatre ans sur un ponton a énormément marqué les esprits, entraînant la mise en place d’un
défibrillateur dans un yacht club du Nord et une demande de formation (PSC1) de la part des
membres de ce club. Cependant, on accuse du retard en France.
La formation de masse est très importante, et durant leurs études, les jeunes ont une formation
PSC1 rendue obligatoire en troisième. Ce qui a aussi changé la donne, c’est le décret du 4 mai 2007
qui permet à toute personne même non secouriste, si elle a un défibrillateur à disposition sur un lieu
public, de l’utiliser. Pour l’avenir, on attend des politiques qu’il y ait promulgation d’une loi obligeant
d’avoir des défibrillateurs dans les lieux publics, à l’instar de ce qui existe pour les extincteurs, et de
ce qui a été décidé récemment pour les détecteurs de fumée dans les biens mis en location. Nous
sommes actifs dans ce domaine, avec notamment nos tournées d’été avec nos partenaires de
l’association RMC-BFM. Nous allons lancer un projet collaboratif pour sensibiliser et promouvoir
l’installation de défibrillateurs. Des premiers contacts ont déjà été lancés avec l’ANEL et la FFPP.
Nous souhaitons poursuivre le mouvement, faire avancer les choses dans ce domaine, et si possible
aussi sensibiliser les élus décideurs.
En conclusion, si l’on veut augmenter ce chiffre de 3 % et tendre vers les 30 % constatés outre
Atlantique, il faut de la formation et la multiplication du nombre de défibrillateurs dans les lieux
publics.
VERS UNE PREVENTION PLUS COLLABORATIVE
Catherine Chabaud
J’invite Peter Chennell, Sea safety manager à la RNLI (Royal National Lifeboat Institution-GB), Antoine
Pichon, secrétaire général du CSNPSN (Conseil supérieur de la Navigation de plaisance et des sports
nautiques) et Bénédicte Caillé-Malpel, directrice de la communication de la SNSM, à me rejoindre
pour cette quatrième table ronde consacrée au le thème « vers une prévention plus collaborative ».
Intervention de Peter Chennell, directeur de la sécurité en mer à la RNLI
La mission de la RNLI est de mettre fin à la perte évitable de la vie en mer. Traditionnellement, elle le
fait en fournissant un service de sauvetage en mer, mais depuis les dix dernières années , la RNLI
fournit aussi un service de maîtres nageurs sauveteurs, et elle fait de l’éducation à la sécurité,
comme ses cousins de la SNSM.
Plus de la moitié de nos interventions concernent les bateaux de plaisance, et notre approche vis-àvis de la plaisance est d’utiliser six messages simples : suivre une formation adaptée à son type de
navigation, vérifier la météo et l’état des marées, contrôler votre moteur et votre carburant, disposer
d’un moyen de faire appel aux secours, informer quelqu’un où vous allez et quand vous allez, et
surtout porter un gilet de sauvetage.
Le port d’un gilet de sauvetage est ce qui a le plus d’impact sur le nombre de décès en mer, et nous
sommes tous conscients de cela. Le gilet de sauvetage n’est pas un article de mode, mais il est
aujourd’hui relativement confortable, relativement petit et discret, et on peut le porter dans un
environnement de loisirs avec confort et confiance. Il est important de penser que le gilet est un
équipement banal de navigation, -dans le passé c’était quelque chose que l’on portait quand le
navire coulait-, qu’il n’est pas une nouveauté. Ce n’est pas quelque chose difficile à porter, et c’est
un équipement de tous les jours. Tout le monde sait qu’il peut faire la différence et que c’est une
évidence. Alors pourquoi les gens ne le portent-ils pas ? Il convient ici de réfléchir sur les conditions
dans lesquelles les gens profitent de leurs loisirs et pourquoi ils ne portent pas de gilets de
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sauvetage. Voici une image classique d’un groupe de jeunes non équipés de gilets et qui manifestent
leur joie de naviguer ensemble. Ces jeune s’amusent, passent du bon temps. Il n’y a pas de risque
apparent, et la plupart du temps tout se passe bien. Les gens sont souvent inconscients qu’il y a un
risque, inconscients des suites si la situation tourne mal, et même s’ils comprennent le risque, ils ne
sont pas prêts à y porter attention. Il y a deux moyens pour obtenir que les gens comprennent la
nécessité de porter un gilet, la législation, et plus positivement, la formation, l’éducation. Et nous
qui « recollons les morceaux » pensons que nous avons ici notre rôle à jouer, car les gens nous
écoutent en raison de notre notoriété et de nos connaissances en matière de sécurité. Nous devons
comprendre la psychologie des plaisanciers, l’état d’esprit des gens dans l’environnement où ils se
trouvent, comprendre pourquoi ils semblent ignorer le risque et considérer que rien ne peut mal
tourner. Mais si nous devons leur parler, nous devons trouver le moyen de le faire dans leur propre
langage et leur propre environnement, et non dans les nôtres. Il faut être raisonnable, ne pas
offenser ou aliéner notre audience, utiliser des arguments simples et faciles. Ainsi nous utilisons
l’accroche « Useless unless wear » que l’on peut traduire par « Inutile à moins d’être porté ou sauf
s’il est porté », que nous préférons à l’accroche américaine « Wear it ». Utilisant différentes
annonces, nous avons mené avec quelque succès des campagnes dans la presse spécialisée, mais la
façon la plus efficace selon nous pour obtenir un changement de comportement, c’est le face à face à
bord ou sur les quais. La RNLI a mis au point une « clinique du VFI » sous forme d’une remorque
contenant un atelier VFI géré par des bénévoles. Les plaisanciers sont invités à y apporter leur gilet,
et les bénévoles leur montrent à quoi ressemble le gilet intérieurement, comment il fonctionne,
comment on le plie et on le déplie, comment on change le kit, quels points respecter pour qu’il
fonctionne bien quand nécessaire.
Comment pouvons-nous savoir si nous réussissons à changer l’attitude des gens et leurs conduites ?
Il faut le mesurer, mais comment le faire ? Il y a deux façons d’évaluer notre action. La première est
d’utiliser les techniques d’études de marché. C’est coûteux, mais c’est crédible si le travail est
effectué par des professionnels. Ou bien on peut recourir à des bénévoles qui vont observer si les
gens portent leurs gilets et rapporter de résultat de leurs observations. C’est rentable mais peu
rigoureux. Si les deux méthodes donnent les mêmes résultats, disent les mêmes choses, alors nous
savons que nous allons dans la bonne direction. Et c’est bien le cas. On peut observer sur nos
graphiques une légère augmentation du taux de port du gilet. Elle est lente, et il faut admettre que
pour changer les comportements, vous devez avoir une stratégie à long terme. Rien ne changera du
jour au lendemain.
Est ce que la législation pourrait faire la différence ? Là où elle existe et où le taux de port du gilet est
mesuré, on constate que le niveau de port du gilet est beaucoup plus bas. Par exemple, il est
seulement de 22 % aux USA. Dans le Royaume Uni, j’imagine qu’il se situe autour de 40 %. Mais la
législation récente en Irlande semblerait être une exception. La loi irlandaise stipule qu’un PFD
(Personal Flotation Device) ou un gilet de sauvetage doit être présent à bord pour chaque personne
et porté par chacun à bord, qu’un gilet doit être porté par les moins de seize ans, et que pour les
bateaux de moins de 7 mètres, un gilet doit être porté à bord d’un bateau ouvert ou sur le pont. Et
là, le niveau de port du gilet est considérablement plus élevé, soit environ 80 % ! Ailleurs, je ne
pense pas qu’il y ait de volonté politique de légiférer en la matière, et les fonds manquent pour
fournir les poursuites liées à une telle loi. Je ne sais comment procèdent les irlandais pour la faire
respecter. Entre temps, nous savons que nous pouvons continuer à sauver des vies. Nous allons
continuer à le faire, et jusqu’à ce que l’environnement de sécurité change, nous allons continuer de
mener une campagne sur le port de sauvetage. Et nos continuerons par ailleurs à analyser notre
retour d’expérience pour lequel nous disposons de nombreuses statistiques, lesquelles sont
excellentes pour diriger un service de sauvetage, mais le sont moins pour mettre en œuvre un
programme de prévention.
Intervention de Bénédicte Caillé-Malpel, directrice du développement et de la communication de
la SNSM
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Avant de vous présenter rapidement l’historique de la prévention à la SNSM, je vous propose de vous
passer deux petits films qui sont des illustrations d’une campagne que nous avons menée avec l’INC
(Institut National de la Consommation) et qui fait partie du partenariat que nous avons construit avec
cet institut pour sensibiliser le public avec deux messages, le premier pour les plaisanciers, le second
pour les pratiquants du littoral.
(Textes de ces messages)
-« Aujourd’hui ConsoMag spécial sauvetage en mer vous donne des conseils pour prendre la mer en
toute sécurité. Une émission préparée avec les Sauveteurs en Mer. Nous sommes au Port Bourgenay
à Talmont Saint Hilaire. Eric Trichet dirige la station de sauvetage de cette ville balnéaire près des
Sables d’Olonne . Comme lui, 3.500 hommes et femmes interviennent toute l’année pour secourir les
vies humaines en danger sur les côtes comme au large. Mais la prévention fait aussi partie de leurs
missions. Avant d’embarquer sur un bateau, il existe des règles à suivre. Voici quelques conseils à
connaître pour prendre la mer en toute sécurité ». « Alors avant de prendre la mer, il faut s’assurer
déjà de parfait état de son embarcation, faire les contrôles de tous les équipements de sécurité, les
fusées de détresse, les gilets de sauvetage, bien s’informer des conditions de météo à venir avant de
prendre la mer. Bien entendu, il y a également la vérification de la VHF qui vous permettra en cas de
problème de pouvoir contacter le CROSS, le CROSS étant le Centre Régional Opérationnel de
Surveillance et de Sauvetage, qui coordonne tous les moyens de secours en mer. Donc cette VHF vous
permet de les contacter directement sur le canal 16. Au moment de prendre la mer, ce qui est
impératif, c’est déjà de faire porter des gilets de sauvetage aux enfants. C’est une condition de
sécurité élémentaire. Le port du gilet de sauvetage est conseillé également pour les adultes. La
plupart des noyades en mer sont dues au non-port du gilet de sauvetage ; » « Lorsque vous partez en
mer, prévenez toujours un proche de votre destination et de l’heure prévue de votre retour ». « En
cas de danger, de problème à bord, la première chose, contacter le CROSS, et surtout, tant que le
bateau flotte, rester à bord du bateau. Il est beaucoup plus facilement repérable pour les secours
qu’une personne seule sur l’eau, voire même qu’une personne montée dans un radeau de survie »
« N’oubliez pas ! Portez toujours un gilet de sauvetage à bord d’une embarcation. La radio VHF
permet de contacter les secours au 16 ; à défaut de radio, composez le 16-16 avec un téléphone
mobile. »
-« Aujourd’hui dans ConsoMag spécial sauvetage en mer, comment profiter de la plage, une émission
préparée avec les Sauveteurs en Mer. Durant la saison estivale, 1.400 nageurs-sauveteurs surveillent
les zones de baignade aménagées le long du littoral. Ils portent secours aux baigneurs en danger,
administrent les premiers soins aux victimes d’accidents, et bien souvent se chargent des enfants
égarés sur la plage. ConsoMag s’est approché du rivage pour les rencontrer ». «La mission des
nageurs-sauveteurs est la sécurité des estivants sur la plage et dans l’eau, donc du bord de l’eau
jusqu’aux 300 mètres qui sont délimités par les bouées jaunes. En général, une zone de surveillance
est de 200 à 300 mètres de part et d’autre du poste de secours. Elle peut être plus grande ou plus
petite en fonction de la dangerosité de la plage ». « Pour 36% des Français, le risque de noyade est le
principal danger lors de la pratique d’une activité en mer. Pour plus de sécurité, il ne faut pas
dépasser la zone où la surveillance est assurée par les nageurs-sauveteurs ». « Bonjour Monsieur,
vous nagez en dehors des 300 mètres, veuillez regagner la zone de surveillance, s’il vous plaît !». « Au
moment de votre arrivée, renseignez-vous sur les particularités de la plage auprès du poste de
secours. Respectez les indications fournies par les drapeaux ou les flammes hissées en haut du mât. Ils
indiquent selon un code couleur précis les conditions de la baignade ». « Bien que les gens viennent
sur une plage surveillée avec des maîtres nageurs, les gens sont responsables de leur propre sécurité
ainsi que celle de leurs enfants. Donc, nous leur conseillons de garder leurs enfants toujours à l’oeuil ,
ne jamais les laisser partir se baigner seuls, et toujours être attentifs toute la journée ». « Bien que
votre surveillance soit indispensable, vous pouvez aussi équiper les jeunes enfants de bracelets
d’identification donnés gratuitement par les nageurs-sauveteurs. Attention aux matelas gonflables et
aux canots pneumatiques qui peuvent vous entraîner rapidement vers le large ! Prudence et
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prévention restent le meilleur moyen de passer de bonnes vacances au bord de l’eau ». « N’oubliez
pas ! Baignez-vous dans les zones surveillées, restez vigilants, équipez les jeunes enfants de bracelets
d’identification. Retrouvez une version longue de l’émission sur le site de l’Institut National de la
Consommation Conso.net ».
Ces ConsoMag sont diffusés sur les chaînes de télévision du Groupe France-Télévisions : France 2,
France 3, France 5 et sur les bouquets satellites. L’an dernier, aux mois de juillet et août, période de
notre campagne, 2.000.000 de téléspectateurs ont pu voir ces reportages cautionnés par l’INC qui
nous a aidés à faire passer ces messages.
Alors arrive-t-on à ce type de messages et comment avons-nous construit notre politique de
prévention ? Au tout départ, comme à la RNLI, nous avons à la SNSM trois missions : sauvetage,
formation et prévention. La prévention, c’est avant tout prévenir plutôt qu’intervenir. C’est au départ
l’objectif prioritaire. En analysant les retours d’expérience des sauvetages, nous avons pu essayer de
construire cette politique pour sensibiliser aux bonnes pratiques les usagers de la mer et du littoral.
Quand on regarde ce qui s’est passé dans les dernières années, nous avons eu au début, à la fin des
années 70, une problématique avec les plaisanciers, et nous allons voir quelques exemples de
campagnes qui ont été mises au point avec l’ensemble des partenaires pour améliorer l’information
et la sensibilisation des plaisanciers, puisque c’était un public majeur que nous secourions dans ces
années (90% de plaisanciers parmi les bateaux assistés). Ensuite, dans les années 80, avec l’explosion
de la pratique de la planche à voile, nous avons eu une problématique véliplanchiste. Puis dans la
décennie 90, avec la démocratisation des loisirs nautiques et la baisse des prix du matériel avec
l’émergence des grandes enseignes sportives, nous avons vu un tas d’activités nautiques émerger,
qui nous ont aussi posé de nouvelles problématiques. Et enfin dans les années 2000, et encore
aujourd’hui, nous avons vu l’émergence des sports de vitesse, jet ski, semi-rigide, kite-surf, qui nous
mettent encore une fois dans un nouveau contexte.
Comment donc avons-nous essayé de sensibiliser l’ensemble de ces pratiquants de sports et de
loisirs nautiques ? Tout d’abord, nous avons essayé de décliner les bonnes pratiques par activité, ceci
en partenariat avec les associations sportives qui sont très structurées et peuvent nous aider à
construire le message et le diffuser dans leur réseau, avec les professionnels du secteur maritime,
les acteurs privés et les organisateurs d’événements sportifs, majeurs pour nous puisque c’est à
partir de ces événements que l’on peut passer les messages. Et dans la mesure du possible, nous
essayons de prendre des grands témoins tels que les skippers et les sportifs de haut niveau pour faire
passer ces messages.
Nous utilisons plusieurs vecteurs pour faire passer ceux-ci : les démonstrations sur l’ensemble du
littoral de toutes nos stations de sauvetage et centres de formation et d’intervention (CFI), les salons
nautiques, le Record SNSM, les départs de courses au large, bien sûr le Forum Mer en Sécurité, le
partenariat Tribord. Tribord est une marque de Décathlon spécifique du domaine maritime, avec
laquelle nous développons des conseils de prévention à travers son site Internet, lequel est un site
participatif avec tous les pratiquants de sports, et nous pouvons par ce biais toucher ces derniers et
les sensibiliser. De la même façon, nous développons des fiches pratiques avec des acteurs tels que
les assureurs, les mutualistes, les ports de plaisance.
Au delà des pratiquants de sports nautiques, nous avons la problématique des usagers de la mer et
du littoral, avec une approche un peu plus spécifique auprès des jeunes que nous considérons
comme prescripteurs dans la famille. Pour toucher ces derniers, nous utilisons des leviers tels que les
relais de l’Education nationale et les acteurs locaux qui nous accompagnent. Nous avons développé
des bracelets d’indentification des enfants afin de retrouver ceux qui se perdent, soit entre 1800 et
2000 enfants retrouvés chaque année dans les postes de secours. Avec les mutuelles, nous
distribuons annuellement 800.000 bracelets. C’est quelque chose qui fonctionne bien, qui rend un
bon service aux familles et est bien relayé dans les médias. En partenariat avec la Maïf, nous avons
également développé le Passeport pour la Mer, un kit pédagogique destiné aux professeurs des
écoles pour sensibiliser les enfants qui vont faire des classes de mer, ou tout simplement dans le
cadre des programmes pédagogiques. Ce kit est conçu pour que l’enseignant puisse faire travailler
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les enfants plusieurs semaines dans les différentes matières avec un fil conducteur : la mer et la
prévention. Avec le Passeport pour la Mer, 170.000 enfants ont été sensibilisés en 20 ans. Nous
avons encore développé des tournées des plages Sauvegarde Junior avec Groupama et les
collectivités locales dans le but de responsabiliser aux règles de sécurité l’enfant qui va savoir donner
l’alerte, analyser un danger, connaitre les bonnes règles pour la baignade et les règles de précaution
par rapport au soleil. Avec Sauvegarde Junior, depuis trois ans, 30.000 enfants ont bénéficié des
ateliers sur les plages et 200.000 en centres de loisirs. Puis nous avons les Journées de la Mer
organisées par les ministères et tous les institutionnels et qui nous permettent d’organiser des
démonstrations et de faire passer des messages, et puis à travers toutes nos stations et CFI (Centres
de formation et d’intervention), les animations et démonstrations locales telles que la percussion
d’un radeau de survie, le déclenchement de fusées de détresse, l’appel au secours par VHF,
l’hélitreuillage, la récupération d’hommes à la mer, les premiers gestes de secours.
Plus spécifiquement pour les publics adultes, nous nous sommes associés avec la Fondation
RMC/BFM pour passer des messages sur l’utilisation du défibrillateur, sa généralisation dans les lieux
publics, et sur les premiers gestes de secours. 7.500 vacanciers sont ainsi initiés chaque année aux
premiers gestes de secours et à l’utilisation du défibrillateur.
Après les deux films réalisés avec l’INC, la seconde étape en 2012 tourne autour des essais
comparatifs qui ont été présentés lors de la deuxième table ronde de ce forum. Et puis sur les ondes
de Radio France et de Radio Bleue, nous passons pendant toutes les vacances des conseils de
prévention sur la baignade, et un petit memo « Grandes marées » a été conçu, un petit guide des
bonnes pratiques lors des marées à fort coefficient dont 700.000 exemplaires ont été distribués sur
la façade Atlantique et Mer du Nord, grâce notamment à un partenariat avec Ouest-France.
L’Association Nationale des Elus du Littoral (ANEL) et les ports de plaisance vont aussi nous aider à le
diffuser lors de prochaines grandes marées.
En ce qui concerne la démarche collaborative du Forum Mer en Sécurité 2011, l’idée à travers cette
quatrième commission, est de pouvoir partager et diffuser des messagers de prévention mutualisés.
Nous diffusons tous dans nos réseaux des messages, et l’idée est donc de coordonner les réseaux de
diffusion pour optimiser l’impact des campagnes. Se mettre d’accord sur des messages simples et
identiques pour tous. Et si l’on est plus nombreux à porter le même message, l’impact en sera
certainement beaucoup plus fort. La première idée de campagne qui a émergé suite aux réunions de
travail est une campagne de sensibilisation au port du gilet de sauvetage, avec un message et un
visuel commun à l’ensemble des partenaires de la démarche Mer en Sécurité « Le gilet de sauvetage
peut vous sauver la vie, portez-le ». Mais au préalable, nous avons essayé de savoir quelle était la
perception du gilet de sauvetage coté utilisateurs. Qu’en pensent-ils et le portent-ils ? Une étude
menée par l’IFOP s’est terminée tout récemment, dont je vais vous donner quelques chiffres, On est
parti d’un échantillon de 3.015 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et
plus, dont on a retiré 849 pratiquants d’activités nautiques effectives, c'est-à-dire pratiquées au
moins cinq fois par an. On a retenu les activités suivantes : la pêche en bateau, la plongée sousmarine, le surf, le body board, le canoë, le Kayak, l’aviron, le pneumatique, le semi-rigide, le bateau à
moteur, le ski nautique, le wake board, la planche à voile, le bateau à voile, le kite surf, le scooter des
mers et le jet ski.
A la question portant sur la fréquence du port du gilet de sauvetage lors de la pratique d’une activité
nautique, on constate un déficit de conscience du danger, et notamment dans des situations dites
de confiance (par beau temps, accompagné d’amis…). En effet, si l’on relève que 66 % le portent
systématiquement par mauvais temps, 64% de nuit, 63% en famille avec des enfants, 58% seul, 48 %
entre amis, on note 46% seulement par beau temps. Sachant qu’une partie des interviewés ont
tendance à sur-déclarer des comportements vertueux (comme lors des enquêtes sur la sécurité
routière), il paraît juste d’estimer qu’il existe une importante marge de manœuvre pour améliorer les
comportements en matière de sécurité nautique. Dans le détail, il existe des différences parfois
importantes en fonction des profils des pratiquants d’activités nautiques : les jeunes constituent un
public aux comportements plus risqués face aux dangers de la mer. Ils apparaissent beaucoup moins
prudents, et de même les personnes pratiquant la voile (40% par beau temps) ou la pêche en
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bateau (44%) prennent davantage de risques en portant moins le gilet que les personnes adeptes du
scooter des mers (52%). Les personnes concernées ne savent pas toujours évaluer correctement le
rapport bénéfice/risque du port du gilet de sauvetage. Les principales raisons invoquées pour ne pas
porter le gilet sont dans l’ordre décroissant « parce qu’ils ne sont pas confortables », « par
habitude », « parce que vous n’en voyez pas l’utilité », « parce qu’ils vous rendent moins
performants », « parce qu’ils sont lourds ». A la question portant sur les principales fonctionnalités
d’un gilet de sauvetage idéal, on constate que les attentes exprimées montrent un désir de
renforcement de la fonction sécurité du gilet. En effet, on cite dans l’ordre décroissant « qui
maintient le tête hors de l’eau », « géolocalisable », « qui se déclenche au contact de l’eau », « qui
soit intégré à un vêtement », etc… Le bon sens prévaut, ce qui est esthétique passe au dernier plan,
et l’aspect sécurité est mis en avant.
A la suite de quoi nous vous proposons trois projets de visuels de campagne qui sont encore en
discussion. Un premier projet en situation « Seul en famille ou entre amis, le gilet de sauvetage sauve
la vie », un second projet « Par vent de force 1 à 11 porter un gilet sauve la vie » et un troisième
projet « Pour vous sauver la vie un seul est indispensable, gilet de sauvetage, portez-le ».
L’ensemble des participants de Mer en Sécurité ont validé le principe d’une telle campagne, et nous
allons nous réunir autour d’une table pour retravailler sur ces projets.
Catherine Chabaud
Je fais une petite incursion car Damien Grimont vient de nous rejoindre. Damien, la sensibilisation au
port du gilet est-elle quelque chose qui t’intéresse et le portes-tu ?
Damien Grimont, navigateur, inventeur du Record SNSM
Bonjour à tous. Moi, j’ai vécu une expérience dans une course, la Mini Transat, et pour arriver
premier, j’ai utilisé un élément de sécurité fondamental qui était de s’attacher au bateau. Il y avait eu
deux disparitions au cours de la première étape, ce qui avait généré pour moi une préoccupation de
la sécurité surtout dans la deuxième étape au cours de laquelle je suis tombé à l’eau, sauf que j’étais
attaché à mon bateau par l’écoute de grand voile. C’est le type d’événements qui vous arrivent dans
une vie et calment sur le fait de dire que ça n’arrive qu’aux autres.
Catherine Chabaud
Est-ce l’événement qui t’as donné envie d’agir pour la SNSM, parce que c’est toi l’inventeur du
Record SNSM ?
Damien Grimont
Très exactement, l’idée SNSM est venue justement lors du Tour de France avec Marc Thiercelin, au
cours duquel on faisait une étape Saint-Malo Saint-Nazaire. On avait remarqué que les lettres
faisaient SMSN et qu’à l’envers cela faisait un événement sympathique pour la SNSM, et c’est comme
cela qu’est née l’idée de rendre hommage aux Sauveteurs en Mer. Dans un moment autre qu’un
moment de drame. Et aussi, j’ai été sensibilisé à cette notion de prévention, parce que c’est
précisément une prévention de choc sur la première étape de ma Transat qui a fait que je me suis
attaché sur la deuxième étape, car lors de la première, par 65 nœuds de vent, je n’étais pas attaché.
J’ai eu la chance de bénéficier de la prévention de mes camarades. Plus que jamais pour moi, le
message de prévention est déterminant dans ce que j’essaye de faire modestement pour les
Sauveteurs en Mer. Et donc voilà pourquoi le Record SNSM existe.
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Catherine Chabaud
Peux-tu nous parler du programme du Record SNSM de la fin de nos travaux jusqu’à dimanche ?
Damien Grimont
Oui, ce que je voudrais dire, c’est remercier chaleureusement la SNSM et le travail qui a été fait
cette année avec deux symboles qui m’ont fait extrêmement plaisir. D’abord le centre de formation
de la SNSM, un formidable symbole pour Saint-Nazaire et sa région, sur le fait d’implanter la SNSM
un peu plus dans le coin, et je pense que le Record SNSM y a peut-être un peu contribué
psychologiquement. Et puis le fait que le Forum Mer en Sécurité se déplace cette année aussi à SaintNazaire, c’est un véritable honneur. Je peux vous dire qu’ici, non seulement pour la ville, la région,
mais aussi pour les medias, -j’ai été invité dans plusieurs plateaux, France Bleue, France 3, Ouest
France, et je peux vous dire que ça a été un geste très apprécié des medias, le déplacement de
l’intérêt de la SNSM en dehors de ses bases parisiennes. Et donc, merci à vous de vous être déplacés,
parce que vous aidez en fait mécaniquement le Record SNSM à exister. Comme le Record SNSM
travaille pour la prévention et la sécurité en mer, finalement, vous vous servez vous-mêmes, donc
c’est parfait !
Pour le programme du Record SNSM, on bat tous les records, puisque chaque année on a vingt
bateaux de plus, et cette année on a 72 bateaux. Nous avons été obligés de fermer le port, ne
pouvant plus accueillir d’autres bateaux. Il faudra agrandir le port de Saint-Nazaire pour pouvoir
accueillir d’autres bateaux l’année prochaine. On a vingt multicoques parmi les plus prestigieux dans
le port, on a quatre G-Class, avec Banque Populaire qui ne sera là que dimanche, parce qu’il ne peut
pas entrer dans le port. Et puis Lionel Lemonchois, Gitana, de grands multicoques, mais aussi et
toujours autant des bateaux amateurs, comme le souhaitait Yves Lagane lorsqu’il a pris la présidence
de la SNSM, renforcer la présence d’amateurs. Et donc, ce qui est extraordinaire dans cet
événement, c’est qu’on a autant de bateaux amateurs, parfois certains régatiers qui sont à leur
première régate, et qui vont prendre des départs à côté de gens comme Lionel Lemonchois qui ont
gagné deux fois le Rhum. C’est aussi cela qui fait la particularité du Record SNSM, et tout cela que
l’on met en lumière pendant tout le weekend. Et il y a aussi des animations SNSM toute la journée
de samedi. C’est devenu une fête populaire avec des animations pour les enfants. Les gens
maintenant aiment voir les bateaux dans le port de Saint-Nazaire, et ils viennent de plus en plus
nombreux. Et on essaye aussi de travailler toute la communication autour. Il ya un concert samedi
soir, avec des musiciens de marque, de grands musiciens de jazz, qui viennent non seulement pour
jouer mais aussi pour soutenir la SNSM. Le départ de la course a lieu dimanche à 18 heures, c’est un
peu tard et c’est à cause des marées, mais Saint-Nazaire est le seul théâtre nautique où l’on peut voir
les départs de course depuis la digue, et c’est pourquoi aussi on a choisi ce site merveilleux.
Chaque année on essaye de faire porter le gilet de sauvetage par les équipages au moment du
départ. Il faut sans cesse répéter le message. Une année, nous portions tous le gilet lors du passage
dans le sas, au moment où le public voit le mieux les bateaux. On va donc le redire, et on essaye de
faire passer les messages de prévention le mieux possible.
Intervention de Didier Moreau, directeur de la formation de la SNSM
Le pôle national de formation de la SNSM, c’est donc un lieu fédérateur pour nos sauveteurs,
puisqu’avant, le service de formation était localisé au Siège à Paris, mais ce n’était pas très pratique
de former des sauveteurs à l’Opéra, donc on a préféré leur « mettre les pieds dans l’eau ». Et on a
donc créé un lieu fédérateur pour l’ensemble de nos formateurs , de manière à ce qu’ils puissent
déjà se retrouver entre eux, avoir les moyens logistiques en termes d’embarcations, de matériel de
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secours, pour fabriquer les référentiels, monter les formations, et puis également former des
formateurs qui iront ensuite porter la bonne parole dans les stations. C’est la maison des
sauveteurs, ouverte toute l’année et dispensant des formations toute l’année.
Nous disposons de quatre volumes distincts. Le premier concerne la partie tertiaire, salles de cours
dans lesquelles on aura des formations qui se feront dans les bureaux, donc du management, des
cours théoriques ou des cours de secourisme. Une seconde partie que j’appellerai « humide » avec
toute la logistique, les vestiaires, les douches, les locaux techniques pour stocker le matériel de
manière à préparer les formations qui se font in situ, soit à bord des vedettes, soit à bord des semirigides.
Les formations sont destinées à l’ensemble de nos sauveteurs, sauveteurs embarqués comme
nageurs-sauveteurs. Ces derniers sont nos sauveteurs qui l’été vont surveiller les plages. Nous
disposons déjà de 32 centres de formation et d’intervention répartis dans les principales villes de
France. Globalement, c’est une population de2.500 personnes. Nous avons l’immense chance d’avoir
800 formateurs bénévoles qui font tourner merveilleusement bien ces centres de formation et donc
l’objectif du pôle est d’accueillir ces formateurs pour les former ici et également les aider en créant
les référentiels puisque nous avons un tas de savoir-faire particuliers comme la mise en oeuvre de jet
skis, de paddle-boards qui sont de gros surfs dédiés à la surveillance des plages. Nous avons
également introduit de nouvelles embarcations que sont les IRB – acronyme qui signifie Inflatable
Rescue Boat. Ce sont en fait de petites embarcations pneumatiques dédiées au sauvetage dans les
vagues à proximité des côtes. Et donc l’objet du pôle, c’est de créer le référentiels, former les
formateurs qui iront ensuite dans nos centres de formation afin de former les sauveteurs. Voilà pour
la partie nageurs-sauveteurs.
Pour les sauveteurs embarqués, nous partons pratiquement de zéro, puisque nous avions un stage
patrons à Saint-Malo, qui fonctionnait extrêmement bien, mais qui était un peu seul. Nous partons
de la tradition de la transmission orale du savoir-faire que l’on avait dans nos équipes
essentiellement composées de professionnels de la mer, pour aller maintenant vers une
formalisation des référentiels. Avant, nous disions à nos sauveteurs « C’est merveilleux, vous les
sauveteurs, vous savez faire plein de choses », mais rien n’était listé. Aujourd’hui, on va pouvoir les
reconnaitre et dire « Vous êtes sauveteurs, vous êtes canotiers, vous avez des compétences dans tel
ou tel domaine, et vous qui vous engagez bénévolement à la SNSM, si vous voulez devenir radio,
plongeur, nous vous proposons d’acquérir telle ou telle formation. Voilà le chemin que vous aurez à
parcourir. » Et ainsi, cela donne une meilleure visibilité, une meilleure reconnaissance à nos
bénévoles. Il était devenu important de cadrer l’enseignement et de créer des référentiels.
Quatre grands facteurs ont joué dans la création du pôle : le premier, je l’ai cité, c’est l’évolution de
la population de nos sauveteurs. Aujourd’hui, on a de plus en plus de gens qui sont issus de la
plaisance, de la pratique sportive de la mer, de la plongée sous-marine ou de la proximité des ports,
et ces gens là qui n’ont pas la formation professionnelle notamment à la sécurité à bord, à
fonctionner de manière organisée et mettre à disposition le savoir. Le second facteur, c’est
effectivement pour mieux reconnaitre nos sauveteurs, pour pouvoir dire même à notre autorité
d’emploi « voilà nos sauveteurs, voilà leurs compétences, ce qu’ils savent faire, voilà sur quoi vous
pouvez compter » et ainsi, le formaliser pour mieux le tracer. Le troisième facteur, c’est qu’on
s’aperçoit qu’on a une judiciarisation croissante de la société, et c’est vrai que devant un juge, il faut
qu’on puisse prouver les compétences de nos équipages, la manière dont ils sont formés et pourquoi
ils interviennent. C’est donc également pour armer nos bénévoles et leur donner tout le background
à ce niveau là. Le quatrième facteur, c’est de pouvoir à terme garantir une capacité opérationnelle à
nos donneurs d’ordre.
La RNLI dispose également d’une organisation et d’un centre de formation, mais à une tout autre
échelle que la notre
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Yves Lagane
Les sauveteurs de la RNLI ont une capacité à imposer à leurs bénévoles un régime de formation quasi
militaire que je ne me sens pas capable d’imposer aux bénévoles français qui ont chacun leur besoins
d’identité, d’autonomie, et donc il faut qu’on adopte des procédures différentes. C’est pour cela que
nous avons une structure beaucoup plus légère qui sera tout aussi efficace.
Didier Moreau
Le pôle sera inauguré demain 18 juin. Il a déjà démarré. L’idée n’est pas que toutes les formations
soient dispensées à Saint-Nazaire, mais qu’on regroupe à Saint-Nazaire les moyens logistiques et
humains, et que derrière, on puisse se projeter sur le meilleur site. Donc par exemple, la semaine
dernière, nous sommes allés former des formateurs IRB à Quiberon, sur la Côte Sauvage, où il y a le
plus de vagues. La première priorité va être d’écrire nos référentiels, notamment pour la partie
sauveteurs embarqués.
Un outil dont je n’ai pas parlé et qui est essentiel au pôle de formation, c’est notre centre de
simulation. Nous avons la chance absolue de disposer d’un outil ultra moderne, un centre de
simulation avec trois passerelles, deux passerelles navire et une passerelle CROSS, qui nous permet
de simuler toutes les situations, toutes les conditions de navigation. Grâce au pilote, on dispose de
zones numérisées extrêmement précises. Donc nous avons pour nos bénévoles un outil très
performant, à la fois pour les faire monter en compétence et pour les entraîner, et ceci en optimisant
le temps, puisqu’effectivement, c’est beaucoup simple d’appareiller et de refaire une situation sur
un simulateur que de le faire en réalité.
C’est génial de voir émerger ce pôle, c’est passionnant car il faut tout créer. Nous sommes partis d’un
bureau de 10 m2 Cité d’Antin pour avoir maintenant un outil de formation parfaitement adapté et
complètement opérationnel au service des sauveteurs, et qui tournera par les sauveteurs bénévoles.
L’équipe de direction est là pour l’intendance, mais ce sont les formateurs bénévoles qui vont former
leurs collègues.
Intervention d’Antoine Pichon, secrétaire général du CSNPSN
Le Conseil Supérieur de la Navigation de Plaisance et des Sports Nautiques au sein duquel un groupe
de travail œuvre depuis deux ans développe aussi des actions en matière de prévention.
Je voudrais vraiment féliciter la SNSM, parce que même si vous considérez tous que c’est normal,
« c’est notre travail, c’est le bénévolat », ce que vous faites aujourd’hui est tout à fait intéressant
pour l’ensemble des administrations qui ont à travailler sur le problème de la sécurité en mer. C’est
bien parce qu’on se parle, mais aujourd’hui encore chacun peut découvrir et apporter des choses
nouvelles.
Je me permettrai de citer trois noms. D’abord mon président, Gérard d’Aboville, qui n’a pas pu être
présent aujourd’hui, et qui rappelle toujours deux choses : d’abord, en mer, c’est la liberté. On a
beaucoup parlé de réglementation, de lois, mais la liberté pour lui, c’est important. Ensuite la
responsabilité, qu’il cite tout de suite en même temps. Et dans la responsabilité, la responsabilité
individuelle. Vous avez vu comment la réglementation a beaucoup évolué en ce qui concerne les
navires de plaisance. Il est effectivement largement à l’origine de cela, mais avec le CSNPSN, pour
faire avancer les choses, je pense que dans la responsabilité, il y a vraiment des comportements et
des leçons à tirer. Et la SNSM qui est en train de nous faire travailler tous ensemble sur la nature du
message qu’on veut faire passer, la façon dont on veut le faire passer, je crois que c’est remarquable,
très bien, parfait !
Le deuxième nom que je voudrais citer, c’est celui de Damien Grimont qui vient de nous parler. Il
nous a dit « Quand j’étais sur la Mini-Transat, heureusement que j’ai été accroché, parce que sinon,
je ne serai pas là aujourd’hui pour vous en parler. » Et ça, c’est un thème que reprend souvent la FFV
qui est membre du CSNPSN, et qui dit « Plutôt que tomber à l’eau, il vaut mieux ne pas tomber ».
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C’est vrai que c’est bien de porter le gilet de sauvetage, c’est évident, mais plutôt que de tomber à
l’eau, faire en sorte que le gilet soit également un harnais. Evidemment, tous les plaisanciers n’en ont
pas, mais je crois que c’est important aussi, de se dire « quelles sont les actions de prévention que
l’on va faire là-dessus ? »
Le CSNPSN rassemble des fédérations sportives, des associations dont la SNSM, des administrations,
et tout ce monde là travaille ensemble pour essayer de progresser, d’améliorer et faire avancer les
choses. Les fédérations sportives font déjà beaucoup de choses, et font bien sûr de la publicité pour
la SNSM, contribuant à la faire connaître. Il faut s’appuyer sur elles, elles sont très utiles et
fonctionnent bien.
Je remarque que la petite enquête que vous avez réalisée est tout à fait intéressante. Elle nous dit
que sur le port du gilet, les gens se posent quand même des questions sur la mauvais temps, sur la
nuit, donc des circonstances particulières dans lesquelles effectivement, la responsabilité
individuelle, personnelle, fera que vous mettrez le gilet, ou que le chef de bord vous imposera de
mettre un gilet. Je pense donc qu’il est important de rester sur cette idée de la responsabilité
individuelle.
Le troisième nom que je veux citer, c’est Bernard Vibert, président de l’UNAN. Il nous a parlé de
fiches, mais il y en a d’autres. Je le cite parce que nous avons édité ces petites fiches, mais
évidemment, tout ce que vous faites sur les plages avec la SNSM, tout ce qui est fait
systématiquement dans les ports de plaisance, dans les capitaineries, tout cela est parfait. Mais
malheureusement, il faudrait réussir à atteindre les gens que l’on-atteint jamais. Les sauveteurs de la
SNSM le savent, un certain nombre ne lisent pas la presse spécialisée, ne sont pas dans les
associations, et donc, c’est ceux-là qu’il faut réussir à atteindre. Et avec le spot que vous réalisez, là
vous arrivez à les atteindre. Et mon président Gérard d’Aboville avait une idée, que je suggère aux
représentants de la FIN et qui est la suivante : lorsqu’on achète un bateau - mais il y en a beaucoup
qui s’achètent d’occasion- si le revendeur pouvait simplement abonner à Sauvetage la personne à
qui il a vendu le bateau, ce serait une excellente chose. Enfin, Gérard d’Aboville n’est pas contre, au
contraire, le gilet de sauvetage. Il dit simplement qu’effectivement à plusieurs reprises il n’y a pas
forcément nécessité de le porter. En revanche, il dit « Vous l’emportez, portez-le ».
Guy Sallenave, de la commission sécurité de la FFV
Je représente le président de la Fédération Française de Voile qui ne pouvait être présent
aujourd’hui. Je voulais renforcer ce qu’a dit Antoine Pichon. Je me demande si ce n’est pas un peu
excessif de ne focaliser que sur le port du gilet. Aujourd’hui, on a entendu parler que de cela. Alors
que ce soit fondamental, je suis d’accord avec vous, mais c’est encore plus fondamental de
s’amarrer. J’en ai l’expérience, j’ai eu deux chutes à la mer comme skipper sur un bateau, une de
nuit, une autre par mauvais temps, avec 3 à 4 mètres de creux et force 8. Or, je pense que si dans les
deux cas ces équipiers n’avaient pas été amarrés, je n’aurais jamais été capable de les récupérer.
Bien sûr, il faut porter le gilet, mais essayer aussi d’inciter sur la nécessité de s’amarrer.
Catherine Chabaud
Je vos expliquerai après pourquoi nous avons focalisé aujourd’hui sur le gilet de sauvetage, parce que
c’est dans la démarche de Mer en Sécurité. Je remercie les participants de cette table ronde. Juste un
mot sur le projet Mer en Sécurité qu’on ne vous a pas présenté. Dans le travail qu’a réalisé la SNSM,
celle-ci s’est dit qu’il y a vraiment deux axes sur lesquels il faut qu’on s’améliore. Le premier axe, c’est
une démarche de progrès, un axe un peu technique avec les trois commissions qui ont été nos trois
premiers groupes de travail, le premier sur le retour d’expérience des accidents en mer, le second sur
les équipements au sens large, et il est vrai, Monsieur Sallenave, que nous avons focalisé sur le VFI
que nous avons décidé d’appeler le gilet de sauvetage gonflable . Pourquoi ? Parce que dans les
chiffres, on a beaucoup d’accidents qui se passent sur les semi-rigides, sur les annexes etc… et il y a
des décès dus au non port du gilet. Peut-être pouvons nous réfléchir à ce qu’une autre fois, un des
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axes sur lesquels on souhaite travailler soit « comment s’attacher sur le bateau ? ». Je veux juste
vous livrer un détail. C’est que sur notre bateau, on a décidé de mettre comme on fait sur les bateaux
de course en général une ligne de vie au fond du cockpit, ce qui n’est absolument pas réclamé par
aucun texte, sauf sur la Transquadra, de manière à pouvoir s’amarrer aussi au fond du cockpit et pas
uniquement sur les extérieurs du bateau. Donc, je partage votre réflexion, mais il est vrai qu’on avait
décidé pour l’instant au sein de cette deuxième commission de travailler spécifiquement sur le gilet
de sauvetage gonflable idéal. Et il y aura, j’espère, bien évidemment d’autres sujets à venir dans les
travaux de la commission dans les mois à venir. Le troisième groupe de travail a traité de la
prévention médicale, un groupe de travail piloté par le Docteur Hudelo, médecin référent de la
SNSM.
Et puis le deuxième axe, c’est davantage un axe prévention, communication, sensibilisation, que nous
avons évoqué au cours de la table ronde pilotée par Bénédicte Caillé, et sur lequel on s’aperçoit que
toutes les institutions, les organismes qui s’intéressent à la sécurité de l’homme en mer développent
leurs propres outils de communication et de sensibilisation, leurs propres démarches, et on se dit
que là, encore une fois, si l’on est plus nombreux autour de la table, si l’on, essaye d’avoir les mêmes
messages, messages qu’il convient d’affiner, d’améliorer, on sera plus pertinents, plus entendus si
nous travaillons ensemble. C’est vraiment l’ambition du projet Mer en Sécurité. Et j’aimerais que
Chantal Plessier-Dauvergne qui a été la cheville ouvrière des précédents forums et a mis vraiment en
œuvre celui-ci, je ne suis qu’un pilote stratégique, mais c’est vraiment elle qui a fait le travail, nous
dise comment elle a vécu cette journée.
Chantal Plessier-Dauvergne, Chef de projet Mer en Sécurité
Je crois que pour ce troisième forum, on peut vraiment se réjouir de l’intérêt de chacun. On avait
senti lors du premier forum une très belle adhésion et au second, on sait que nous avons été trop
bavards, et on a eu le même défaut cette année. Nous n’avons pas pu vous donner suffisamment la
parole. C’est un gros défaut contre lequel nous devons lutter. On s’aperçoit simplement quand on
prépare ces rencontres qu’on a tellement d’échos à vous faire entendre avant d’en discuter qu’on a
envie de faire parler chacun et il est vrai que c’est un plaisir pour nous d’entendre ce que chacun
d’entre vous dans son domaine propre en ce qui concerne la prévention en général. Et on a
beaucoup de mal à se restreindre au niveau des échanges. C’est vraiment un gros défaut, parce ce
que je sais que dans la salle, cela a été sûrement très long pour vous, que beaucoup de vous sont des
experts, ont préparé beaucoup de choses, il y a des fédérations sportives qui ont fait beaucoup de
choses, qui pourraient nous le raconter, cela nous ferait gagner du temps. Il y a des équipes qui sont
très en avance sur nous sur les équipements, je pense à la Fédération de canoë-kayak, ou le kite-surf
qui est très bien organisé. C’est vrai que nous pourrions les écouter longuement. Je pense que lors
des conclusions, notre Président va réussit à faire émerger quelques échos qui sont latents dans la
salle, parce qu’en continuant ces contributions communes, le projet peut vraiment devenir un projet
très partagé par beaucoup d’acteurs qu’on a pas encore vus aujourd’hui.
Catherine Chabaud
Moi, j’invite d’ailleurs , s’il y a des organismes, des institutions ici présentes qui n’ont pas participé
aux groupes de travail, je les invite à venir voir le Président ou Chantal Plessier-Dauvergne à la fin de
la journée et nous dire « moi j’ai vraiment envie de participer à ce groupe de travail, car nous avons
des choses à apporter. » Le forum est un moment de restitution, mais pour essayer d’aller plus loin,
les travaux vont continuer.
CONCLUSIONS PAR MM LAGANE, BABKINE ET LAINE
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Yves Lagane, Président de la SNSM
La prétention de la SNSM n’est pas de diriger, de régenter cette démarche- elle est consciente qu’il y a
effectivement des problèmes à résoudre, je vais en citer trois ou quatre que j’ai retenus de nos débats
d’aujourd’hui- mais plutôt à faire en sorte qu’on se rencontre, de faire en sorte que cette démarche de
concertation ayant fait l’objet déjà de deux forums qui étaient des points d’information, devienne une
démarche de progrès réel, c'est-à-dire qu’on avance. Nous sommes donc preneurs de toute
participation aux travaux que Chantal Plessier-Dauvergne et Catherine Chabaud ont animés avec
brio.
Je cite quand même en passant , je peux en oublier, de mémoire un grand nombre d’acteurs qui se
sont manifestés pour nous accompagner soit sur la démarche de prévention qu’a présentée
Bénédicte Caillé tout à l’heure, soit dans les groupes de travail dont on a rendu compte aujourd’hui :
la FIN, le CSNPSN, la FFV, le Comité National des Pêches, la FFPP, le Secrétariat Général de la Mer, la
DAM, l’UNAN, la Fédération française de motonautisme, la Fédération française de canoë-kayak, la
Fédération française de vol libre, des sociétés d’assurance, des mutuelles d’assurances, et j’en oublie
certainement plein, et tous ces gens là ont apporté chacun leur pierre. Et donc, s’il y en a d’autres
dans la salle, venez vous manifester et on est prêts à travailler avec vous sur ces projets comme sur
d’autres sujets que vous trouverez importants de faire avancer.
En synthèse, simplement et très brièvement, je retiens cinq points. Le premier, il n’était pas l’objet de
nos débats, mais cela a été annoncé ce matin par Monsieur Paolantoni, et d’ailleurs on a vu qu’on
n’était pas toujours cohérents dans nos messages, c’est la manière d’appeler les CROSS. Vous avez vu
qu’on a parlé du 16-16, et puis il y a eu des flottements sur le 16-16, parce que Monsieur Paolantoni
nous dit tout d’un coup que le 16-16 n’est plus en vigueur ou du moins il est appelé à disparaitre petit
à petit. Ce n’est pas un numéro d’urgence et les conventions qu’il y avait avec les opérateurs
téléphoniques ne sont pas toutes renouvelées, donc il va continuer à tourner. C’est pas trop inquiétant
dans la mesure où je vois, et j’ai été content d’observer- je parle sous couvert du CSNPSN et de Gérard
d’Aboville, car tous les deux nous avons mobilisé énormément d’énergie pour promouvoir la VHF,
qu’il est l’outil de la solidarité en mer. Mais c’est aussi inquiétant, parce que le téléphone reste une
source très importante d’appeler le CROSS. Et ce que je retiens, c’est que le 112 devient le numéro
d’urgence pour tout le monde, et que pour ceux qui sont concernés par un problème en mer, il faut
faire le 112 et demander à avoir le CROSS. Dans le centre de traitement des signaux d’urgence, des
appels d’urgence à terre, on ne sait pas forcément ce qu’est un CROSS, ce que c’est que la mer. Donc,
je conseille de faire le 112 et demander à avoir le CROSS. Ils se débrouilleront pour vous le trouver.
En second point, on a bien vu au cours de nos échanges ce matin qu’on a commencé à faire beaucoup
de travail sur le recueil des données et le traitement du retour d’expérience, mais que là, on a des
progrès énormes à faire. On est restés très pudiques sur tout ce qui concerne les approches
immédiates du littoral et sur tout ce qui concerne les sports de baignade, les sports qui sont à moins
de 1500, 2000 mètres du littoral. Je considère aujourd’hui, je parle sous couvert des CROSS, que dans
les statistiques des CROSS, dès que l’on parle de baignades et d’accidents nautiques très proches du
littoral, les CROSS n’en connaissent que 25%, parce ce que c’est principalement traité par les autorités
de la terre, c'est-à-dire les maires, les SDIS, et que là, on a beaucoup de mal pour l’instant à avoir de
l’information. A la louche, ces chiffres qui montrent qu’il faut absolument continuer à travailler dans
ce domaine là, on estime avec un peu de recul , et on essaye de faire se recouper des sondages et des
données glanées à droite et à gauche, qu’i l y a entre 350 et 400 morts par an dans les approches
maritimes, je me limite aux morts, et là dedans il ya les 2/3 qui se passent à moins de 1500 mètres
de la plage. C’est cela qui est très important. Retenez que l’activité pêche au cours des six dernières
années a vu son activité accidentogène diminuer considérablement, de 60%, c’est considérable, grâce
à tout ce qu’on vous a présenté ce matin. La plaisance, ce sont les bateaux à moteur et les voiliers qui
vont au large, continue à augmenter son taux d’accidents mais elle représente 50, 60, 70 décès par an
sur les 400-450 sur le total des décès, et ceci avec une forte proportion moteur, la plaisance voile
provoquant très peu d’accidents. Tous les autres accidents sont liés aux loisirs nautiques, à la
plongée en apnée ou avec bouteilles, à la baignade, et quand Charles Hudelo parlait des morts
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subites, je suis certain qu’il y en a beaucoup qui sont liées à la baignade. Des gens de mon âge et qui
continuent à se baigner, le choc thermique fait que je suis certain qu’on a beaucoup à la fois de
noyades et de morts subites qu’on ne connait pas. Dons on a vraiment un effort très important à faire
sur ce point là.
En troisième point, j’ai été très intéressé par les débats sur le gilet de sauvetage et sur les
perspectives de développement. On a parlé de flottabilité, de la capacité de retournement, mais je
pense que dans le futur, il faut aussi parler de sa capacité à être un système complet de sécurité de
la personne, capable de diffuser une situation de détresse, une localisation, de permettre de
communiquer pour la personne porteuse du gilet. Et je pense que les développements technologiques
dans les années à venir vont le permettre sans trop de difficultés.
En quatrième point, la notion de secours d’urgence mer qui a été évoquée par plusieurs d’entre vous
me parait très importante, puis le dernier point, c’est « portez le gilet », que vous soyez au large ou
près du littoral. Il faut être simple dans le discours. Portez le gilet de sauvetage, que vous soyez sur un
bateau à voile, un bateau à moteur, sur un engin pneumatique, sur une planche à voile, que vous
soyez travailleur dans les ports de plaisance et en permanence sur les pontons, que vous soyez
lamaneurs dans des ports qui transportent des passagers par milliers pendant l’année, portez le gilet.
Portez-le quand vous allez pêcher, à marée basse. Portez le gilet, ça ne coûte rien, et aujourd’hui
porter le gilet, c’est vous donner la possibilité et l’assurance que vous serez capable de flotter pendant
les quelques dizaines de minutes qui vous seront nécessaires à partir du moment où votre situation
de détresse sera connue pour qu’on mette des moyens de secours à votre disposition. Et moi, je
pense qu’il faut être très clair sur ce sujet. Portez le gilet, le harnais de sécurité aussi. Il y a plein
d’autres choses à faire, mais commencez par porter le gilet. Vous vous donnez les moyens de flotter,
et aujourd’hui les secours sont tellement efficaces que dans 95% des cas, on sera capable de mettre
en moins d’une heure les moyens de vous sauver. Voilà ce que je voulais vous dire. Merci
Michel Babkine, Administrateur en chef des Affaires maritimes- Secrétariat Général de la Mer
D’abord, au nom du Secrétaire Général de la Mer qui n’a pu être des nôtres aujourd’hui, et qui le
regrette bien, je voudrais remercier l’Amiral Lagane de sa contribution collaborative, donc votre
contribution à tous à l’amélioration de la sécurité en mer qui est une priorité de la politique maritime
que le Secrétariat Général de la Mer anime. Mer en Sécurité, c’est la troisième édition, et comme on
l’a dit ce matin, c’est désormais quelque chose qui est ancré dans la vie maritime. Et je crois qu’à
l’occasion de ces travaux, on martèle évidemment les idées, mais il faut le faire, car il faut faire en
sorte que la sécurité en mer ne soit plus une contrainte, mais soit une évidence. Parce que
finalement l’homme n’est pas un oiseau, je fais alors le parallèle avec la sécurité aérienne, le
transport aérien, mêmes les activités de loisirs aériens, qui sont construits autour de la sécurité, ni
un poisson, donc effectivement il faut quand on prend la mer, qu’on se mette en sécurité et que
l’activité maritime, quelle soit professionnelle ou de loisir, se construise autour de la sécurité. Et
comme vient de a dire le Président Lagane, il faut porter le gilet, et je rajoute, il faut porter ceinture
et bretelles, c'est-à-dire porter le gilet et s’amarrer. Parce qu’effectivement, nous, notre métier est
d’organiser au mieux le sauvetage, mais on aura beau accentuer tous nos efforts pour faire en sorte
que toute détresse connue puisse être prise en charge, encore faut-il que la personne qui est
bénéficiaire de ces opérations de sauvetage soit encore en vie lorsque les moyens arrivent. Et donc il
faut porter le gilet, je crois que c’est fondamental. Donc merci vraiment de tout ce qui est fait pour
renforcer la sécurité, pour renforcer la sensibilisation, et le Secrétaire Général de la Mer sera
toujours à vos côtés, Président, pour vraiment cheminer ensemble sur ce grand ouvrage qui est
vraiment l’amélioration de la sécurité des usagers de la mer.
Et pour terminer mes propos, je voudrais vous donner un exemple de ce que l’on fait au Secrétariat
Général de la Mer pour accompagner vos idées, parce que c’est vous qui avez été porteurs d’un
certain nombre d’idées que nous avons reprises avec d’autres, la DAM, le CSNPSN. Tout d’abord en
ce qui concerne l’amélioration de la statistique, on a mis au point il y a deux ans à la demande de la
FIV un outil statistique qui permet d’améliorer notre perception des accidents, dans la bande des
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300 mètres ou la zone littorale dans laquelle les organismes de sauvetage et les intervenants sont
multiples et où ils ne sont pas tous coordonnés par les CROSS. Or la statistique Secmar est tenue
par les CROSS au vu des opérations qu’ils coordonnent, et l’on sait bien que les CROSS ne
coordonnent pas tout. Il y a des opérations qui se développent sur initiatives promptes de secours
et qui échappent à la connaissance des CROSS. Donc, nous avons mis en place une fiche, en priant à
titre expérimental d’abord l’ensemble des sauveteurs de la remplir. Cela a plus ou moins bien
marché, mais le but d’une expérimentation est bien de prouver là où sont les difficultés. Cela a
quand même au moins apporté un élément de conclusion, à savoir que c’était tout à fait pertinent,
car là où la fiche a pu être mise en pratique, essentiellement sur la façade atlantique, on est arrivé à
augmenter le nombre des accidents que nous avons perçus de 15%. Cela signifie que le CROSS Etel a
traité 1.000 opérations l’an dernier mais il y a 15% d’opérations en plus que ce CROSS n’avait pas
traitées localement, mais qui ont été portées à notre connaissance parce que ces opérations ont
donné lieu à des fiches qui ont été renseignées. Donc je crois véritablement, cela fait quinze ans que
je m’occupe de ces affaires là et quatorze que chaque année on nous dit qu’on ne sait pas tout, je
peux vous dire que pour la quinzième année, on sait maintenant qu’il y a 15% d’opérations qui sont
traitées hors CROSS et traitées dans des situations où les personnes sont véritablement en danger. Je
crois par conséquent que c’est extrêmement utile pour améliorer la perception des accidents en
frange littorale notamment, pour sensibiliser les usagers, les pouvoirs publics et en particulier les
maires qui sont responsables de la zone littorale. C’est intéressant qu’on puisse dire aux maires
«Vous avez des situations d’accidents là où peut-être vous n’avez pas pris toutes les précautions
pour mettre en place un dispositif de surveillance des plages. Je crois que c’est également utile pour
inciter les pouvoirs publics à prendre en charge leurs responsabilités, et puis, c’était une demande de
la FIN, on a là des éléments statistiques supplémentaires qui vont nous permettre d’améliorer nos
connaissances sur les risques survenus à des personnes en mer.
Qu’allons- nous faire maintenant ? Nous n’allons pas reproduire l’expérience cette année, puisqu’elle
a été faite l’an dernier. Au lieu de mettre en place une expérience pendant la période toujours
sensible qu’est la saison estivale où il y a beaucoup d’activités à la fois, nous allons au contraire
mettre en place dès le 1er janvier prochain (2012) et à titre permanent une fiche d’intervention sur le
domaine maritime qui sera remplie tout au long de l’année et qui trouvera une utilité plus forte
pendant la saison estivale. Nous allons vraiment mettre en place cet outil parce que l’expérience
nous a paru pertinente. Le Secrétariat Général de la Mer a pris en charge cette idée, mais ce n’est pas
lui qui va la conduire jusqu’au bout. Nous savons qu’il faut disposer d’une fiche qui soit concise, qui
puisse être remplie par des secouristes qui sont des opérationnels et qui ne veulent pas trop faire de
papier. Il faut donc vraiment cibler la fiche aux sorties qui n’ont pas été prises en compte par les
CROSS, c'est-à-dire les sorties qui ont été assurées depuis les postes de plage, par les maîtres
nageurs, par les CRS, par les pompiers. On doit également y ajouter les opérations qui ne relèvent
pas des postes de plage et qui sont cependant liées à des événements littoraux au profit des
baigneurs et des usagers, des engins nautiques qui peuvent évoluer ailleurs que dans la zone des 300
mètres. Et puis, c’est une demande particulière des CROSS, nous allons également demander aux
équipages des hélicoptères de la Sécurité Civile de remplir cette fiche.
Cette fiche devra être exploitée par les CROSS, et il faudra que ceux-ci bénéficient d’un outil
approprié pour leur permettre d’agréger à la statistique Secmar la statistique issue de ces fiches. Puis
il va falloir mettre en place une procédure d’exploitation au niveau de la DAM, puisque l’on sait que
ces fiches ont été mises en place à la demande de la SNSM, de la FIN, et soutenues par le CSNPSN.
Donc que la DAM exploite cette fiche en liaison avec les partenaires que je viens de citer. Et puis il
faut aussi que cette fiche puisse donner lieu si besoin à des investigations, et nous avons dans nos
services un Bureau Enquêtes après Accidents (BEAmer) dont ce n’était pas le métier initial de faires
des enquêtes sur les loisirs nautiques, qui est certes indépendant mais pas totalement autonome, et
qui doit pouvoir intervenir là où il apparait nécessaire aux yeux du Ministère pour améliorer la
prévention des risques, que les accidents survenus à proximité immédiate des côtes et qui
n’impactent pas sur la navigation, puissent quand même être investigués.
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Et pour terminer, je vous dirai aussi, pour faire allusion à la table ronde sur l’aide médicale urgente,
que nous avons enfin réussi à sortir une nouvelle instruction du Premier Ministre sur l’aide médicale
en mer, qui rafraîchit considérablement l’instruction en cours qui remonte à 1983 et qui sera signée
dans les jours qui viennent par le Premier Ministre . Nous aurons donc toiletté notre arsenal
réglementaire en la matière.
Loïc Lainé, Administrateur Général des Affaires maritimes- Préfecture maritime Atlantique
L’Amiral de Saint-Salvy aurait voulu être présent aujourd’hui. Il n’a pu l’être, mais il sera présent
vendredi à une journée sécurité dans le Finistère, parce que la prévention est l’une de nos
préoccupations constantes. Et nous faisons passer le message, mais ce n’est pas suffisant. Les
institutionnels font passe le message, ils sont fort bien relayés par les medias, mais je crois qu’il faut
aller plus loin, et de votre très intéressant forum d’aujourd’hui, je retiendrai deux interventions
principales.
Celle du président de la station de Lancieux sur le terrible événement de ce jeune qui est tombé à
l’eau en faisant cinq cent mètres sur un zodiac. Je rappellerai que depuis le début de l’année, il y a eu
plusieurs accidents de ce type, il y a eu aussi deux hommes qui sont décédés à Saint-Malo en
tombant d’une embarcation, et il y en a eu un ici dans la Loire. Et à chaque fois, il ne portaient pas le
gilet de sauvetage. Le message du port du gilet est donc essentiel.
La deuxième intervention que je retiendrai est celle de Pierre-Georges Dachicourt. La pêche est un
milieu que je connais particulièrement bien et j’ai relevé un fait important en allant aux Journées de
la mer dans les Côtes d’Armor. On a parlé avec l’unité littorale des Affaires maritimes et ils nous ont
fait part de leur constatation que les marins pêcheurs portent maintenant le gilet de sauvetage
gonflable. Or c’était quelque chose qui était relativement rare il y a cinq ans. Cela veut dire qu’un
travail de long terme , comme l’a souligné notre ami de la RNLI, paye toujours, qu’il faut que le
message soit constant, et que nous avons besoin, en plus des communications institutionnelles, que
vous soyez nos relais et que la culture de sécurité passe sur les pontons, sur les quais, et qu’en
particulier dans le domaine de la plaisance, on ait cette culture de la sécurité qui se diffuse. On voit
encore trop souvent une personne qui va rejoindre sur son youyou son mouillage qui se trouve à
vingt mètres. Il y a cinq, six mètres de fond, il ne fait pas très chaud, elle ne porte pas de gilet. On sait
que s’il y a un accident, elle coulera à pic dans le port, et on voit cela tous les ans. Donc nous
apprécions complètement l’implication de la SNSM dans cette action de prévention. Il faut aller
parler avec les gens pour faire diffuser ce massage.
Saint-Nazaire, 20 juin 2011
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