Notice nécrologique Jean-François Geleyn C`est avec une grande

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Notice nécrologique Jean-François Geleyn C`est avec une grande
Notice nécrologique Jean‐François Geleyn C’est avec une grande tristesse que nous annonçons que Jean‐François Geleyn est décédé le 8 janvier 2015, au terme d’un courageux combat contre la maladie. Nombreux parmi nous se souviendrons longtemps de Jean‐François, une figure marquante de la prévision numérique du temps. Il a été l’un des étudiants les plus brillants de sa génération. A sa sortie de l’Ecole Polytechnique en 1971, il choisit de faire carrière dans la météorologie, à la surprise de ses camarades : son rang de classement lui permettait d’entrer dans les corps de hauts fonctionnaires les plus prestigieux de l’Etat. Mais il avait réalisé que la science météorologique était en plein développement, et offrait des opportunités pour les meilleurs chercheurs du temps. Il était aussi attiré par un domaine où la science était mise directement au service des intérêts de la société, et où toute théorie nouvelle serait confrontée sans délai à la réalité. Jean‐François rejoint rapidement le CEPMMT, où il est chargé du développement du schéma de rayonnement et d’autres aspects de la physique. Son passage dans cet institut prestigieux lui permet d’acquérir une grande familiarité avec tous les aspects de la prévision numérique du temps. Il rentre à Paris en 1982 pour prendre en charge la réécriture homogène de l’ensemble de la physique des modèles de Météo‐France. En 1985, il devient chef du groupe de recherche en prévision numérique et commence à développer des projets ambitieux. Par son enthousiasme, il attire de nombreux jeunes chercheurs prometteurs, et les forme à l’écriture efficace des codes de prévision numérique, en mettant toujours en avant son « principe de parcimonie ». Il réalise rapidement que l’assimilation variationnelle est la voie d’avenir pour extraire l’information des nouvelles observations de satellites. Mais son idée la plus brillante est d’écrire un modèle en grille étirée sur la sphère, en utilisant les propriétés remarquables de la transformation conforme de Schmidt (Courtier et Geleyn, 1988). Cela forme la base du modèle ARPEGE de Météo‐France. Cette approche a permis à Météo‐France de développer une coopération de long terme avec le CEPMMT, autour du projet commun ARPEGE‐IFS, et de disposer d’un modèle économique pour la prévision à courte échéance sur l’Europe, avec un rapport qualité‐prix imbattable. A la fin de la guerre froide en 1989, Jean‐François réalise que l’Europe Centrale et Orientale dispose de nombreux chercheurs excellents, qui veulent se lancer dans la prévision du temps. Il leur propose une collaboration pour développer ensemble un système générique de prévision du temps sur aire limitée, que chaque pays pourra adapter à ses propres besoins : le consortium ALADIN est né. Ce développement n’est pas indépendant de la coopération avec le CEPMMT : bien au contraire, les codes des systèmes globaux et aire limitée seront complètement intégrés, tant pour les aspects modèle que pour les aspects assimilation de données. Le développement d’un tel système par un groupe réparti dans les différentes capitales d’Europe n’a pas été une affaire facile, mais Jean‐
François a réussi à faire fonctionner ce consortium année après année, et à surmonter tous les obstacles. Le code ALADIN est rapidement devenu une référence, qui a intéressé des pays de plus en plus nombreux. Fort de cette réussite, Jean‐François a lancé un pari encore plus audacieux, développer une dynamique non‐hydrostatique pour les très petites échelles, dans le même cadre que le système hydrostatique de départ, grâce à la coordonnée « pression ». Ce pari est à l’origine des actuels systèmes de méso‐échelle AROME, ALARO et HARMONIE, qui sont exploités dans les divers pays d’Europe. En 2005, un accord de coopération est signé entre les consortia ALADIN et HIRLAM : les pays HIRLAM acquièrent le droit d’utiliser les codes ALADIN et commencent à contribuer à leur développement. Cette coopération s’est intensifiée d’année en année. En 1991, le groupe de recherche en prévision numérique est envoyé à Toulouse. Jean‐François le restructure et développe des coopérations avec les autres groupes de recherches de Météo‐France et de la « Ville Rose ». Des idées nouvelles commencent à faire leur chemin plus rapidement vers les codes opérationnels. En 2003, Jean‐François est nommé « responsable du programme ALADIN », et déménage à Prague. Il développe un style de vie « européen », avec de fréquents voyages entre Prague et Toulouse. Il passe aussi du temps à l’Université de Gand, où il est nommé professeur associé, un poste dont il est très fier. A travers les postes qu’il a tenus, ses articles scientifiques et son enseignement, Jean‐François a exercé une influence durable sur le monde de la prévision numérique du temps. Il a continué à travailler jusqu’à ses derniers jours sur la turbulence, le rayonnement et la convection. Ses derniers papiers ont été publiés la semaine de sa mort. Il avait reçu en 2011 la Médaille d’Argent qui est la plus haute distinction de la Société Européenne et Météorologie. Jean‐François avait beaucoup d’autres passions : beaucoup savent qu’il était un sportif accompli, champion universitaire de judo et lancer du poids, et qu’il avait également acquis un excellent niveau en décathlon. Mais il se passionnait aussi pour l’histoire et pour la création de cartes originales. Nous adressons nos condoléances à sa femme Radmila et à ses trois fils Erik, Yves et Denis. Philippe Bougeault et Alain Joly, Janvier 2015 Jean‐François Geleyn With great sadness we announce that Jean‐François Geleyn passed away on 8 January 2015 after a courageous fight against illness. Many of us will remember Jean‐François as a strong figure in Numerical Weather Prediction. One of the most brilliant students of his generation, he graduated from Ecole Polytechnique (Paris) in 1971 and his choice of meteorology for a career was a complete surprise for his fellow students: after all, he was then in a position to access some of the most prestigious functions in the French Public Service. But he had this vision that meteorology was “on the move” and in demand of first class scientists. It also appeared to him as a science that was useful in daily life as well as a science where theory was to be immediately checked against reality. Soon thereafter, he joined the recently created ECMWF in Reading and became a distinguished member of this famous team, taking in charge the development of the radiation scheme and other parts of the physics of the first ECMWF model. In parallel, he was learning all aspects of NWP and preparing for a strong role. He returned from Reading in 1982, to lead the complete and consistent rewriting of the physical packages of Météo‐France models. In 1985, he became head of the NWP research group at Météo‐
France, and started to develop great ambitions for our service. His enthusiasm was able to attract many excellent young scientists and train them in the spirit of efficiency and parsimony that he had pioneered. He was not long to realize that variational assimilation was offering great opportunities to take advantage of the new satellite data and improve weather forecasts. His most brilliant idea was the “stretched grid on the sphere” based on the Schmidt conformal transform (Courtier and Geleyn, 1988) that became the heart of the French ARPEGE global model. It was brilliant because it made possible the development of a close cooperation with ECMWF for the development of a common integrated code (IFS‐ARPEGE), facing the needs of variational assimilation, and at the same time, allowed us to operate an original model, with unsurpassed quality‐price ratio for short‐range forecasts over Europe. In 1989 the cold war ended, and Jean‐François realized that Central and Eastern Europe had many bright scientists longing to learn NWP. He offered them collaboration and created the ALADIN consortium, with a goal to jointly develop an NWP limited‐area system that each country may easily adapt to its own needs. This collaboration was not to be a separate venture from the one going on with ECMWF. The limited area model was to be fully included in the IFS‐Arpege code, sharing many common parts with it, thus allowing at the same time both modelling and data assimilation. It was a difficult enterprise to develop a common code without a common place to work, but Jean‐François was able to manage this collaboration over the years, and ALADIN became one of the best limited‐
area NWP systems in the world, attracting soon the interest of more countries. It is in this situation that he launched another highly risky but bold gamble: very early in the development of Aladin, he thought that a non‐hydrostatic version of the model should be prepared for future use. It was a gamble because for the first time the non‐hydrostatic dynamics was to be an option fully embedded in an environment primarily designed for hydrostatic modelling, using pressure‐based coordinates. From these ideas emerged the systems that are now running as Arome at Météo‐France or Harmonie or Alaro in a number of other countries. In 2005 an agreement was signed between the ALADIN and HIRLAM consortia, whereby HIRLAM acquired the right to use all ALADIN codes, and started to contribute to development. The ALADIN‐
HIRLAM collaboration has constantly intensified over the years. In 1991, the NWP research group moved to Toulouse, and was expanded. Jean‐François created a new organization and continued developing the group, establishing good working relationship with the rest of the research department of Météo‐France and the rich scientific community of “La Ville Rose”, and accelerating the intake of new ideas and techniques into operational NWP systems. In 2003 he moved to Prague in his new position as “ALADIN Program Manager”, which he held until 2010. He developed a “European lifestyle”, commuting frequently between Prague and Toulouse, and also accepting an Associate Professor position in Ghent (Belgium), of which he was very proud. Through his various positions, his scientific papers and his teaching, Jean‐François has been very influential in NWP all over the world. Until his last month, he worked on scientific papers on turbulence, radiation and convection, and one has been published almost at the time he passed away. In 2011 he received the Silver Medal, the highest distinction granted by the European Meteorological Society. Jean‐François had many other passions: sport is the best known, as in his youth he was a beacon in Judo and Shot Put and later developed an excellent level in Decathlon. For leisure he spent time learning History and creating original hand‐drawn maps. Our thoughts go to his wife Radmila, and his three sons Erik, Yves and Denis. Philippe Bougeault and Alain Joly, January 2015