Ramadan et trouble bipolaire : exemple de perturbation du rythme

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Ramadan et trouble bipolaire : exemple de perturbation du rythme
L’Encéphale (2013) 39, 306—312
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP
MISE AU POINT
Ramadan et trouble bipolaire : exemple de
perturbation du rythme circadien et son
impact sur la maladie
Ramadan and bipolar disorder: Example of circadian rhythm disturbance
and its impact on patients with bipolar disorders
S. Eddahby b, N. Kadri b,∗, D. Moussaoui a
a
Centre psychiatrique universitaire Ibn Rochd, Casablanca, Maroc
Laboratoire de santé mentale, cognition et psychopathologie, faculté de médecine et de pharmacie, université Hassan II, centre
psychiatrique universitaire Ibn Rochd, Casablanca, Maroc
b
Reçu le 26 janvier 2012 ; accepté le 26 novembre 2012
Disponible sur Internet le 30 mars 2013
MOTS CLÉS
Ramadan ;
Rythme circadien ;
Troubles de
l’humeur ;
Patients bipolaires ;
Rythme social ;
Horloge biologique
∗
Résumé
Objectif. — Le but de cet article est d’explorer l’impact du jeûne du mois de Ramadan sur le
trouble bipolaire, à travers les données de la littérature.
Matériels et méthodes. — Une revue de littérature à partir des mots clés Mesh dans la banque
de données Medline a été effectuée. Une sélection de 66 articles en français et en anglais de
1970 à 2011, dont quatre abordent spécifiquement l’impact du jeûne du mois de Ramadan sur
les patients bipolaires, 14 Ramadan- santé et rythme circadien et 48 articles le rythme circadien
et/ou trouble de l’humeur a été réalisée.
Résultats. — Plusieurs auteurs stipulent que le cours de la maladie bipolaire peut être perturbé
par les changements du rythme social qui surviennent, par exemple, pendant le Ramadan (mois
de jeûne). Cependant les études qui y ont été consacrées sont peu nombreuses. Kadri et al.
2000 ont étudié 20 patients bipolaires jeûneurs durant le mois de Ramadan de l’an 1417 de
l’hégire (janvier 1997) ; les évaluations ont eu lieu une semaine avant le mois de jeûne, les
deuxième et quatrième semaines du mois de jeûne et la première semaine après la fin du
mois. La symptomatologie dépressive a été évaluée par l’échelle de Hamilton et celle de la
manie par l’échelle de Bech-Rafaelsen ; la lithiémie a également été mesurée. Le résultat le
plus important était que 45 % des patients avaient rechuté, 70 % durant la deuxième semaine,
et le reste à la fin du mois. Farooq et al. en 2010, ont étudié 62 patients bipolaires jeûneurs
durant le mois de Ramadan de l’an 1427 de l’hégire (du 25 septembre au 24 octobre 2006). Les
évaluations ont eu lieu une semaine avant le mois de jeûne, la deuxième semaine du mois
de jeûne et la première semaine après la fin du mois. La symptomatologie dépressive a été
Auteur correspondant.
Adresses e-mail : [email protected] (S. Eddahby), [email protected] (N. Kadri).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2013.
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2012.11.008
Ramadan et trouble bipolaire
307
évaluée par l’échelle d’Hamilton et celle de la manie par l’échelle de Young et la lithiémie a
été mesurée. Aucun des patients n’a rechuté au cours de l’étude.
Conclusion. — Ces deux études importantes donnent des résultats contradictoires. Des études
supplémentaires de contrôle avec au moins une centaine de patients et stabilisés depuis au
moins deux ans.
© L’Encéphale, Paris, 2013.
KEYWORDS
Ramadan;
Circadian rhythm and
mood disorder;
Bipolar patients;
Social rhythm;
Biological clock
Summary
Introduction. — Fasting during the Ramadan month is a cornerstone of Islam. Several disorders
of the chronobiological rhythms occur during this month and impact on mood. Through this
paper the authors provide a literature review of the impact of fasting on patients with bipolar
disorders.
Materials and subjects. — A literature review using Mesh keywords through Medline database.
From 1970 to 2011, articles in French and English were selected.
Results. — Circadian rhythm refers to the approximately 24-hour cycles that are generated by
an organism. Most physiological systems demonstrate circadian variations. Many hormones and
other metabolisms, such as gastric pH, insulin, glucose, calcium and plasmatic gastrine, have
been shown to exhibit circadian oscillation. The role of social rhythm in behaviors and its
influence on circadian rhythms in humans is now obvious. It has been shown that the lack
of concentration and irritability increased continuously during Ramadan month and reached
its peak at the end of the month. Mood and vigilance are significantly decreased during the
fasting month. Several authors have stated that the course of bipolar illness may be affected
by the changes in social rhythm that occur during Ramadan (fasting month). Studies which have
been devoted to this topic are sparse. Kadri et al., in 2000, studied 20 bipolar patients during
the fasting month of Ramadan of 1417 (Hegirian calendar, corresponding to January 1997).
Diagnosis of bipolar disorder was made according to ICD-10 criteria. Patients were assessed
during the week before Ramadan, the second and the fourth weeks of the fasting month and
the first week after its end, with the Hamilton Depression and Bech-Rafaelsen scales. The
plasma concentration of lithium was also assessed. The main finding of the study was that 45%
of the patients relapsed, 70% during the second week, and the remaining patients at the end
of Ramadan. These relapses were not related to plasma concentration of lithium. Most of the
relapses were manic (71,4%). Patients who did not relapse had more insomnia and anxiety during
the second and third weeks of the study. The side effects of lithium increased and were seen in
48% of the sample, mostly dryness of the mouth with thirst and tremor. However, Farooq et al. in
2006 studied 62 bipolar patients during the fasting month of Ramadan 1427 (from 25 September
to 24 October 2006). Serum lithium, electrolytes, Hamilton Depression Rating Scale (HDRS) and
Young Mania Rating Scale (YMRS) were assessed, one week before Ramadan, mid Ramadan
and one week after Ramadan. The side effects and toxicity were measured by symptoms and
signs checklist. There was no significant difference in mean serum lithium levels at three time
points. The scores on HDRS and YMRS showed significant decrease during Ramadan (F = 34,12,
P = 0,00, for HDRS and F = 15,6, P = 0,000 for YMRS). Also the side effects and toxicity did not
differ significantly at the three point’s assessment.
Conclusion. — All physiologic parameters are influenced by the circadian rhythm, which is
influenced in its turn by the food rhythm. So far, the results of these two main studies, with
opposite results, do not help us advise bipolar patients to fast or not to fast. Other studies in
this field are badly needed.
© L’Encéphale, Paris, 2013.
Introduction
Pendant le mois de Ramadan, l’un des cinq piliers de l’Islam,
le jeûne est un devoir pour tous les Musulmans adultes et
sains. Durant ce mois, il y a une rupture importante et
brutale des rythmes chronobiologiques et une restriction
de sommeil avec changement de l’horaire des repas, de la
durée et l’horaire du sommeil, du cycle activité/repos. Le
rythme social joue un rôle important dans la phase de remise
à zéro des rythmes circadiens chez des sujets humains [1,2].
Plusieurs études [3—5] ont établi un lien entre les perturbations de ces rythmes et les troubles de l’humeur. L’objectif
de cet article est d’explorer l’impact du jeûne sur le trouble
bipolaire à travers les données scientifiques existantes. Nous
rappelons dans un premier temps la physiologie du rythme
circadien et l’impact du jeûne du mois de Ramadan sur celleci, puis nous analysons les études qui ont exploré l’impact
du Ramadan sur le trouble bipolaire.
Rythme circadien
Le rythme circadien est l’ensemble des processus physiologiques rythmiques ayant une période d’environ 24 heures
[6]. Son rôle principal, chez l’homme, est d’optimiser le
308
métabolisme et l’utilisation de l’énergie pour soutenir le
maintien des processus vitaux de l’organisme [7]. Il permet l’adaptation d’un organisme vivant aux variations des
facteurs extérieurs, en particulier la photopériode. Pratiquement toutes les variables biologiques et les fonctions
physiologiques tels la température corporelle, le cycle
activité—repos et la sécrétion de nombreuses hormones
(mélatonine, cortisol, hormone de croissance), expriment
des fluctuations journalières prévisibles et régulières de leur
rythme [8]. Le rythme circadien est contrôlé par une horloge
interne principale localisée chez l’homme dans les noyaux
suprachiasmatiques. Ainsi, le rythme circadien est biologiquement inscrit dans le système nerveux central tout en
étant modulé par des facteurs externes appelés synchroniseurs (Zeitgebers) [9].
Rythme circadien et prise alimentaire
Chez l’homme adulte, l’un des mécanismes par lequel la
prise alimentaire pourrait constituer un synchroniseur a été
suggéré par la balance des acides aminés plasmatiques suivant un repas riche en glucides ou en protides [10]. L’heure
de la prise alimentaire entraîne une grande variété de modifications des rythmes des variables biologiques [11—13]. Une
étude des rythmes biologiques pendant le mois du Ramadan [14], portant sur le pH gastrique, l’insuline, le glucose,
le calcium et la gastrine plasmatique, a montré une modification de leur profil circadien. Cette dernière persiste
pour certaines variables un mois après le rétablissement du
nombre et des horaires des repas. Une autre étude [15],
menée avant et pendant le mois de Ramadan sur les taux
circulants de mélatonine, d’hormones stéroïdes et hypophysaires a montré également une modification de leur profil
circadien, or la qualité de synchroniseur de la prise alimentaire.
Rythmes circadiens et rythmes sociaux
Les synchroniseurs prépondérants chez l’homme sont
essentiellement de nature socio-écologique, comme les
alternances lumière—obscurité et veille—sommeil. À cet
égard, il faut souligner l’importance du sommeil dans la
structure des rythmes circadiens [16—18]. Ce rôle a été
bien mis en évidence chez l’homme par les expériences de
privation de sommeil [19,20]. D’autres études ont montré
l’importance de la lumière dans l’entraînement du système
circadien chez l’homme [21,22]. Dans les conditions de travail s’accompagnant d’une inversion ou de modifications
importantes des horaires de la vie sociale, comme le travail
posté ou de nuit, l’horloge biologique n’est plus en phase
avec l’environnement. Cela entraîne des troubles connus
sous le terme d’intolérance au travail posté [23,24]. Les facteurs exogènes interviennent de façon sensible sur le rythme
circadien de la température, de la pression artérielle, des
battements cardiaques, du calibre bronchique. Ces fonctions augmentent avec les activités physique ou mentale et
diminuent pendant le sommeil [25]. De même, on connaît
le rôle de la lumière dans la suppression de la sécrétion de
la mélatonine [26,27] ainsi que le lien entre la sécrétion de
l’hormone de croissance, de la prolactine et le sommeil [28].
S. Eddahby et al.
Certains facteurs peuvent conduire à la désynchronisation de la structure circadienne endogène. Ils peuvent être
externes concernant des modifications de l’environnement
(décalage horaire, travail posté, anesthésie...) ou interne
(vieillissement, cancer. . .) [29]. Cette désynchronisation
entraîne des perturbations des rythmes circadiens provoquant fatigue, mauvaise qualité de sommeil, ainsi que
troubles de la mémoire, de l’appétit et de l’humeur [23].
Ramadan et rythme circadien
Le mois du Ramadan est considéré dans la tradition musulmane comme étant le meilleur mois, pendant lequel se
déroule la nuit du destin (laylat al-qadr). Au cours de cette
dernière, le Coran fut révélé au prophète Mohammed. Le
Ramadan se produit au neuvième mois du calendrier lunaire.
Il dure entre 29 et 30 jours et peut débuter à n’importe
quelle saison de l’année grégorienne. Ainsi, la durée du
jeûne varie entre 11 heures et 18 heures par jour selon la
saison. Durant cette période de jeûne, il est interdit de manger, de fumer, de boire et d’avoir des relations sexuelles du
lever jusqu’au coucher du soleil.
Prise alimentaire
Les repas sont obligatoirement pris durant la nuit. Leur
fréquence varie entre deux et trois principaux selon les
cultures. Le premier, constant, est le repas de la rupture du
jeûne. Il se situe immédiatement après le coucher du soleil ;
le second, le dîner, se prend à des horaires variables selon
les coutumes de la région concernée. Il est servi en moyenne
trois à quatre heures après le premier repas mais certaines
familles le prennent une heure ou deux heures après le premier repas. Vient enfin le dernier repas qui se situe entre
une heure et une demi-heure avant le lever du jour. La qualité de ces repas change également : ils sont généralement
plus riches en glucides et en lipides et moins riches en eau
et en crudités.
Rythmes sociaux
La nécessité de se nourrir pendant la nuit influence le sommeil chez les pratiquants. Ce dernier se trouve raccourci de
deux heures environ, décalé de trois à quatre heures et souvent entrecoupé par le dernier repas en fin de nuit. Aussi,
un grand nombre de Musulmans jeûneurs passent une grande
partie de leur temps à prier le soir à la mosquée : prière
« tarawih ». C’est une prière qui se pratique au-delà des cinq
prières usuelles. Par ailleurs, les veillées « ramadanesques »
sont marquées par les réunions familiales et la multiplication
des invitations à domicile le soir et par les différentes pratiques religieuses. Les horaires de travail varient d’un pays
à l’autre. Généralement, il commence plus tard le matin
et finit quelques heures avant le Ftour, il est raccourci en
durée.
Irritabilité
Il a été démontré, dans le cadre d’un travail effectué par
Kadri et al. sur l’irritabilité pendant le mois de Ramadan
Ramadan et trouble bipolaire
[30], que celle-ci augmente régulièrement pendant la journée, durant le mois de Ramadan et atteint son pic à la fin du
mois. La consommation des psychostimulants (café et thé) et
le niveau d’anxiété suivent la même évolution. L’irritabilité
augmente de façon plus importante chez les fumeurs par
rapport aux non-fumeurs.
La concentration
Afifi [31] avait trouvé, durant le mois de Ramadan, une diminution de la capacité à se concentrer et une diminution de
l’activité quotidienne chez 50 % d’une population étudiée
composée de 265 étudiants universitaires.
L’humeur et la vigilance
D’autres auteurs ont trouvé que l’humeur et la vigilance
diminuent significativement à 9 h du matin et à 16 heures
durant le mois de Ramadan [32,33].
Le chronotype et la somnolence
Taoudi-Benchekroun M et al. [34] et Bahammam [35] ont
exploré le chronotype et la somnolence diurne, respectivement avant et pendant le mois du Ramadan. Ces travaux
ont montré que le pourcentage des sujets qui dorment
entre 22 heures et minuit diminue avec une augmentation
du nombre de personnes qui dorment au-delà de minuit.
L’heure du réveil est aussi retardée. Le chronotype a changé
significativement pendant le mois du Ramadan avec une augmentation du pourcentage du chronotype vespéral et une
diminution du pourcentage du chronotype matinal. La somnolence diurne augmente aussi d’une manière significative.
Le sommeil nocturne
Roky et al. [36] ont exploré le sommeil nocturne pendant le
mois de Ramadan. Ils ont montré que l’heure du sommeil est
retardée de 48 minutes au début et de 53 minutes à la fin du
Ramadan en comparaison avec les horaires d’avant le mois.
L’heure du lever est retardée de 49 à 65 minutes au début et
à la fin du Ramadan respectivement. Elle est restée retardée
de 29 min pendant les 18 jours de récupération après le mois
du Ramadan.
Dans ces modifications des habitudes de vie pendant le
mois Ramadan, il existe indéniablement un changement du
rythme de vie impliquant particulièrement le sommeil, les
repas et à moindre échelle l’alternance repos-activité. Il y a
une rupture importante des rythmes chronobiologiques avec
une restriction de sommeil.
Ramadan et trouble bipolaire
Plusieurs travaux ont exploré l’impact du jeûne du mois de
Ramadan sur la santé du jeûneur [37—40]. Cependant, les
études sur Ramadan et les troubles psychiatriques sont peu
nombreuses. Sur une recherche bibliographique approfondie, nous n’avons trouvé que deux études explorant l’impact
du jeûne sur l’humeur chez les patients suivis pour troubles
309
bipolaires. Par ailleurs, d’autres travaux non publiés ont
exploré l’effet du jeûne du mois de Ramadan sur l’usage
de drogues et d’alcool [41]. Cent jeûneurs consommateurs
d’au moins une substance ont été inclus dans l’étude (92 %
étaient consommateurs de cigarettes, 33 % du haschich, 6 %
du kif, 11 % de psychotropes et 39 % d’alcool avant le mois
de jeûne). La majorité (92 %) était de sexe masculin, l’âge
moyen était de 31,38 années. Les évaluations ont eu lieu
une semaine avant et les deuxième et quatrième semaines
du mois de jeûne. La consommation quotidienne de cigarettes est passée de 20 à 15 entre avant et durant le mois
de Ramadan, celle du haschich de 5,17 à 4,24 joints par jour
entre avant et durant le mois de Ramadan. En revanche, la
consommation de psychotropes a connu une augmentation
durant le mois. En moyenne, la consommation d’alcool a été
arrêtée 24,5 jours avant le début du mois. Environ la moitié
des personnes (58,5 %) ont respecté les 40 jours d’abstinence
avant le démarrage du Ramadan. À noter que cette période
d’abstinence est dictée comme nécessaire, socialement.
Elle n’a aucune base religieuse, puisque la consommation
d’alcool est interdite à tout moment de l’année. Aucun
patient n’a présenté de delirium tremens. Cependant des
répercussions négatives sur la vie sociale des participants
ont été importantes : augmentation de l’irritabilité, de
l’insomnie, du retard et de l’absentéisme professionnels.
La périodicité de certaines maladies mentales et
l’altération de certains rythmes sont décrites depuis la fin
du xixe siècle, voire le début du xxe avec Kraepelin [42].
Les premières études sur les rythmes et les troubles de
l’humeur [13,43—45] ont mis en évidence des modifications
de la distribution temporelle, de l’excrétion urinaire des
17 cétostéroïdes chez les patients cyclothymiques. Dès les
années 1960, Lobban et al. [46] et Moody et Alsopp [47]
évoquent une avance de phase du rythme biologique dans
la dépression. De ces travaux naîtra en 1975 l’hypothèse de
Papousek [48] sur l’origine chronobiologique des troubles de
l’humeur. Plusieurs études [3—5,49] ont établi un lien entre
les perturbations des rythmes circadiens et les troubles de
l’humeur. Le rythme social joue un rôle important dans la
phase de remise à zéro des rythmes circadiens chez les
humains [1,2]. Les « zeitstorers » peuvent induire des épisodes maniaques. Ces derniers englobent la privation de
sommeil [50,51], les voyages transméridiens [52], la perturbation des rythmes sociaux [53,54]. Il a été montré
que la privation de sommeil (patient que l’on empêche
de dormir, en situation très contrôlée) peut faire passer
un patient bipolaire déprimé en phase hypomane dans 6 %
des cas, voire en phase maniaque dans 5 % des cas [55].
Par ailleurs, lorsque le sommeil est déplacé de façon brutale, la relation temporelle entre le cycle veille/sommeil et
l’horloge interne est perturbée. Ce changement peut altérer
l’humeur pendant la période d’éveil. La prévalence élevée
des troubles de l’humeur chez les travailleurs postés va dans
le sens de cette hypothèse [56]. Il semble que les sujets
avec trouble bipolaire présentent au cours des périodes
intercritiques une instabilité émotionnelle qui les rendrait
plus vulnérables au stress [57]. Les épisodes thymiques des
troubles bipolaires peuvent être déclenchés par le stress et
les événements de vie [58]. Le stress quotidien et les perturbations des routines peuvent générer des troubles du spectre
bipolaire [59]. Ainsi des thérapies basées sur la stabilisation des rythmes sociaux et des relations interpersonnelles,
310
associées au maintien du traitement pharmacologique habituel, réduisent les symptômes dépressifs. Ces interventions
minimisent aussi le risque de virage de l’humeur maniaque
et améliorent la qualité de rémission des patients [60,61].
Le modèle de compréhension étiopathogénique des troubles
bipolaires fait référence au modèle biopsychosocial. Sur un
plan théorique, on peut décrire une succession causale : les
événements de vie sont à l’origine des dérèglements des
rythmes sociaux, générateurs de perturbation des rythmes
biologiques, qui entraînent des récurrences dépressives et
maniaques [62].
Pendant le mois de Ramadan, l’inversion des rythmes
alimentaires et sociaux favorise un coucher plus tardif.
Associés aux modifications du sommeil, on observe des perturbations du rythme circadien et de température [45].
Kadri et al. [63] ont étudié des patients bipolaires jeûneurs qui étaient euthymiques sous lithiothérapie pendant
au moins trois mois avant le démarrage de l’étude, et avant
l’inclusion. Vingt patients bipolaires ont été inclus durant le
mois de Ramadan (1417, année hégirienne) correspondant
à janvier 1997. Les évaluations ont eu lieu une semaine
avant le mois de jeûne et les deuxième et quatrième
semaines du mois de jeûne ainsi que la première semaine
après la fin du mois de Ramadan. La symptomatologie
dépressive a été évaluée par l’échelle d’Hamilton et celle
de la manie par l’échelle de Bech-Rafaelsen. L’évaluation
du taux plasmatique du lithium a suivi le même schéma.
Le résultat le plus important était que 45 % des patients
avaient rechuté ; 70 % durant la deuxième semaine et le
reste à la fin du mois. Ces rechutes n’étaient pas corrélées aux variations des taux plasmatiques du lithium. La
plupart des rechutes étaient de type maniaque (71,4 %).
Ceux qui n’ont pas rechuté se sont plaints d’insomnie et
d’anxiété durant les deuxième et troisième semaines du
mois. Les effets secondaires du lithium avaient augmenté
et ont été observés dans 48 % de l’échantillon. Ils étaient
à type de sécheresse de la bouche, soif et tremblement.
Les résultats de cette étude pilote indiquent que le mois
de Ramadan peut perturber l’état de l’humeur des patients
bipolaires.
Farooq et al. en 2006 [64] ont étudié des patients bipolaires jeûneurs qui étaient euthymiques sous lithiothérapie
pendant au moins trois mois avant le démarrage de l’étude,
et avant l’inclusion. Soixante-deux patients bipolaires ont
été inclus durant le mois de Ramadan de l’an 1427 de
l’hégire (du 25 septembre au 24 octobre 2006). Les évaluations ont eu lieu une semaine avant le mois de jeûne, la
deuxième semaine du mois de jeûne et la première semaine
après la fin du mois de jeûne. La symptomatologie dépressive a été évaluée par l’échelle d’Hamilton et celle de la
manie par l’échelle de Young. L’évaluation du taux plasmatique du lithium et des électrolytes (sodium, potassium et
chlore) a suivi le même schéma. Cette étude n’a pas relevé
de différence significative pour la lithiémie ni pour le taux
plasmatique des électrolytes aux trois points d’évaluation.
Aucun patient n’a rechuté au cours de l’étude. Il y avait
des différences statistiquement significatives sur les deux
scores HDRS et YMRS montrant une amélioration dans la
dépression et la manie, pendant et après le Ramadan. Il n’y
avait pas de différence significative pour les effets secondaires du lithium entre les trois points d’évaluation sauf
pour trois paramètres : réduction de la prise du poids et de
S. Eddahby et al.
l’œdème pendant et après Ramadan et une augmentation
de l’agitation au cours du Ramadan.
Il est difficile d’expliquer ces résultats ; Kadri et al.
[63] avaient un petit échantillon de 19 patients (un patient
ayant abandonné l’étude pour une raison sociale avant la
deuxième évaluation). Ils ont préconisé deux évaluations
durant le mois de Ramadan. Farooq et al. [64] ont évalué
les patients une seule fois durant le mois de Ramadan à la
deuxième semaine et n’attribuent donc pas l’absence de
rechute dans leur étude à un manque d’observation ou de
déclaration.
Farooq et al. ont observé une baisse continue des scores
HDRS et YMRS même après le Ramadan, ce changement
dans les scores est probablement dû aux effets physiologiques du jeûne sur les symptômes somatiques de troubles
de l’humeur d’où l’intérêt d’évaluer la spiritualité sur un
plus grand nombre de patients. Bien que dans ces deux
études le taux moyen de lithium soit resté dans la fourchette thérapeutique, il faut souligner que la dose moyenne
de lithium a été relativement faible. Les patients avec des
doses plus élevées auraient peut-être plus d’effets secondaires. De plus, la température moyenne pendant la période
de l’étude pakistanaise était autour de 30 ◦ C. Dans beaucoup
de pays tropicaux avec une grande population musulmane,
les températures pendant l’été peuvent être beaucoup plus
hautes. Il est donc important d’étudier l’effet de jeûne dans
des conditions climatiques différentes et d’évaluer aussi les
rythmes sociaux par des mesures spécifiques. Hosseini et al.
en 2010 [65] ont évalué la prévalence du trouble bipolaire
(phase maniaque) chez les patients hospitalisés au service
psychiatrique de l’hôpital de Zare (Iran) durant le mois de
Ramadan en comparaison avec les autres mois du calendrier
lunaire pendant quatre années successives de 2003 à 2006.
L’étude n’a pas trouvé de différence significative pour le
nombre de patients hospitalisés pendant le mois de Ramadan par rapport aux autres mois lunaires. Cependant, le
taux d’hospitalisation avait particulièrement augmenté au
mois de Chawal (le premier mois suivant le Ramadan). Le
changement du rythme du sommeil (réduction de sommeil)
pendant le mois de Ramadan est fortement suspecté dans
la rechute maniaque des patients bipolaires. L’impossibilité
de prise médicamenteuse au cours de la journée, la déshydratation et les autres changements des rythmes sociaux
influent le métabolisme des médicaments et les symptômes
d’exacerbation du trouble bipolaire [66].
La validité du Ramadan comme modèle pour étudier
l’impact des rythmes sociaux sur les patients bipolaires
demande encore à être confirmée sur des effectifs plus
importants mais elle apparaît dès à présent comme un paradigme de recherche intéressant.
Conclusion et recommandations
Pratiquement tous les paramètres physiologiques humains
sont soumis à un rythme circadien quotidien, qui est luimême influencé par le rythme alimentaire. Ces rythmes
se trouvent altérés lors du mois de Ramadan et peuvent
affecter le cours de la maladie bipolaire. À ce jour, les
données de la littérature ne permettent pas d’aboutir à un
consensus sur l’impact du mois de Ramadan sur les patients
bipolaires. Conseiller les patients bipolaires sur le jeûne de
Ramadan et trouble bipolaire
Ramadan à l’instar des patients diabétiques est difficile. Le
rompre peut provoquer de la culpabilité, de la stigmatisation et un mauvais lien socioreligieux. Ainsi, des réunions de
consensus entre psychiatres et représentants de l’autorité
religieuse sont fortement suggérées. Des études ultérieures
sont nécessaires pour évaluer l’impact des variations des
rythmes sociaux pendant le mois de Ramadan sur l’évolution
du trouble bipolaire avec un plus grand nombre de malades.
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
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