une personne handicapée mentale peut

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une personne handicapée mentale peut
UNE PERSONNE HANDICAPÉE MENTALE PEUT-ELLE ÊTRE
PARENT ?
Catherine Agthe Diserens et Françoise Vatré
Médecine & Hygiène | Thérapie Familiale
2003/2 - Vol. 24
pages 199 à 211
ISSN 0250-4952
Article disponible en ligne à l'adresse:
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-therapie-familiale-2003-2-page-199.htm
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Pour citer cet article :
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Diserens Catherine Agthe et Vatré Françoise , « Une personne handicapée mentale peut-elle être parent ? » ,
Thérapie Familiale, 2003/2 Vol. 24, p. 199-211. DOI : 10.3917/tf.032.0199
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Thérapie familiale, Genève, 2003, Vol. 24, No 2, pp. 199-212
UNE PERSONNE HANDICAPÉE MENTALE
PEUT-ELLE ÊTRE PARENT ?
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Résumé: Une personne handicapée mentale peut-elle être parent? – Parmi les nouvelles parentalités
d’aujourd’hui, il faut compter de plus en plus avec celle des personnes handicapées mentales. Etre parent
et handicapé mental ? Question complexe, rencontrée dans notre pratique de sexo-pédagogues spécialisées, qui nous incite à faire connaître toutes les nuances de ce désir d’enfant, au travers de situations de
vie et de handicaps très différents. L’expression de ce désir n’est pas nouvelle en soi, toutefois son
ampleur actuelle ne peut laisser indifférent.
« Mes frères et sœurs ont tous des enfants. Pourquoi je peux pas avoir un bébé, moi aussi ?»
Il est exprimé et entendu, grâce au respect des Droits Humains Fondamentaux dont découlent pour les
personnes vivant avec un handicap mental : l’intégration, l’émancipation, la valorisation des rôles
sociaux, la reconnaissance à la vie affective et sexuelle et le « droit à la procréation ». Ces demandes de
parentalité génèrent un incontournable questionnement éthique que nous vous proposons de partager.
Summary: Being a parent and mentally handicapped? – Today the mentally handicapped persons are
increasingly willing to become parents. As specialized sex educators we must deal in our practice with
this complex issue and help to understand and support all aspects of such maternal and paternal desires
where both the situation and the degree of handicap often differs. While this desire to have a baby isn’t
new as such, one cannot ignore its increasing importance.
« My brothers and sisters all have children. Why can’t I ?»
Such expressed desires are heeded by respecting basic Human Rights – including the right « to procreate »
– and helping handicapped persons to lead at the most their own life in society, which includes recognizing and answering their emotional and sexual needs. These parental demands create an unavoidable ethical dilemma that we would like to share with you.
Resumen: ¿ Puede una persona con discapacidad psiquica ser padre? – Entre las nuevas paternidades de
hoy, cada vez más, tenemos que hacer frente a la posibilidad de que las personas con discapacidades mentales, accedan a ser padres. ¿ Ser padre y discapacitado mental? Dificil cuestión, con la que nos encontramos en nuestras práctica taréa de sexo-pedagogos especializados, que nos induce a dar a conocer todos los
matices de este deséo de tener hijos, a través de situaciones de vida y de discapacidades muy diferentes.
« Mis hermanos tienen hijos. ¿ Por qué yo no puedo tener un bebé ?» Está establecido que los Derchos del
Hombre Fundamentales, atiendan a estas personas con discapacidades mentales para que tengan acceso a :
la integración, la emancipación y la valoración de los distintos papeles sociales, así como al reconocimiento a la vida afectiva y sexual y al « derecho a tener hijos ». Estas demandas de paternidad, generan un
cuestionamiento ético que les proponemos compartan con nosotras.
Mots-clés: Personne handicapée mentale – Parent – Affectivité – Sexualité – Accompagnement –
Ethique.
Keywords: Mentally handicapped persons – Parents – Feelings – Sexuality-ethics – Assistance.
Palabras claves: Persona discapacitada mental – Progenitora – Afectividad – Sexualidad –
Acompañamiento – Etica.
*
Sexo-pédagogues spécialisées, formatrices pour adultes.
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Catherine AGTHE DISERENS et Françoise VATRÉ*
Préambule
L’objectif fondamental développé ici, réside dans l’importance d’un approfondissement de la réflexion quant à l’accompagnement des personnes vivant avec un
handicap mental (et leur entourage) dans leurs revendications progressives quant au
droit à la parentalité, en dépit de leur déficience intellectuelle.
Et ceci même si en Suisse pour le moment, dans notre pratique, nous sommes
très peu confrontées à des naissances d’enfant de parents handicapés mentaux.
Introduction
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En effet, la problématique de procréation s’inscrit dans un système de valeurs
qui influence notre manière de concevoir le problème et le vécu de la personne
concernée. Cette question active un éclairage en amont de tous les acquis (autonomie, intégration, estime de soi, auto-détermination, connaissance de son corps et des
origines de la vie, et toutes sortes de compétences acquises) et pourrait conduire à
une remise en question : « Si c’est pour en arriver là, avons-nous fait le bon chemin,
en aurions-nous trop dit ?»
Car, tout se passe comme si la personne handicapée se devait de tout accomplir,
comme tout le monde, même en ce qui concernerait le dernier bastion de la normalité : faire un bébé !
Or, est-ce vraiment souhaitable ?
Ce paradoxe nous interpelle, d’où cet article qui s’inspire et suit des recherches
de plus en plus diversifiées à ce sujet.
Cette réflexion :
•
inscrit tout d’abord la question de la procréation liée à la déficience mentale dans
son contexte historique, culturel, éthique et économique ;
•
inclut l’approche de la sphère affective et du champ éducatif ;
•
aborde les représentations des parents, des professionnels et de la société face à
la sexualité des personnes déficientes mentales et la manière dont elles influencent ces dernières, vis-à-vis de leur désir d’enfant ;
•
replace le désir d’enfant en lien avec les aspects de responsabilité éthique et des
devoirs impliqués par sa réalisation.
Ce questionnement délicat se posera de manière extrêmement individuelle, par
le fait même de l’infinie diversité des personnes handicapées mentales et de leurs
développements nuancés. Le conditionnement du contexte familial, socioculturel,
l’âge et le degré du handicap, l’ampleur des symptômes et leur cumul, l’institutionnalisation ou non, les méthodes soignantes et éducatives, l’avancée des sciences
pour telle ou telle maladie, sont autant de données qui fluctuent et s’influencent
mutuellement.
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La parentalité de la personne handicapée mentale soulève de nombreuses questions.
C’est pourquoi notre réflexion ne peut qu’être générale avec des points communs utiles à tous, mais dans la pratique, l’adaptation et l’adéquation sont de mise
en permanence. C’est une sorte de dialogue continu entre la pensée et l’action !
Le handicap mental
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Par extrapolation, pour tenter de quantifier cette frange, il est permis d’articuler
aujourd’hui une fourchette quantitative allant du 3% au 10% de l’ensemble des
humains. De cette nébuleuse en mouvance découle notre manière d’envisager la
personne handicapée et, par extension, de considérer sa sexualité possiblement
fécondante.
Pour revenir à la question de la parentalité, plus le handicap sera sévère et plus
les exigences seront élevées, et plus l’entourage devra s’immiscer.
Pour cela, nous avons à étudier plus finement les risques réels de transmission
génétique et les éventualités de grossesse.
Par ailleurs, au cœur de cette diversité de diagnostics souvent encore obscurs,
nous bénéficions de progrès scientifiques certains qui permettent d’aborder les
situations avec plus de justesse. Par exemple, le fait que les hommes trisomiques
soient majoritairement stériles induit plus ou moins de peurs ou de tranquillité pour
l’entourage, par rapport à la crainte de procréation.
Le plus important, toutefois, serait de travailler en amont et de décortiquer avec
soin, tact et humanisme (comme listé plus loin), tout ce qui pousserait une femme
ou un homme porteurs d’un handicap mental à vouloir procréer.
Projets où l’enfant en tant que tel peut être tout à fait absent !
Voyons comment cette problématique s’insère dans la société occidentale
actuelle.
Le contexte historique
Tout ce qui touche au domaine du handicap représente un reflet de ce qui se
passe en général dans la société ordinaire, avec quelques décalages dans le temps et
dans les mises en application.
Dans la sphère privée, relationnelle et sexuelle, le processus est le même, avec
quelques vagues et obstacles en plus, face aux principes ambiants d’excellence et de
performance.
La préoccupation actuelle de la parentalité des personnes vivant avec un handicap mental n’est pas née du néant. Elle est générée par plusieurs facteurs qui s’interpénètrent :
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Gardons à l’esprit que ce terme est une construction sociale croissante, qui permet de structurer et de classifier la réalité des individus en fonction de certaines
caractéristiques. En résumé on peut avancer que plus la technologie quotidienne
augmente, en terme d’accélération, d’abstraction et d’individuation (c’est-à-dire
aussi de solitude), plus la frange de la population potentiellement considérée comme
inadaptée augmente.
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•
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Le développement de la connaissance des handicaps mentaux grâce aux nouvelles compréhensions scientifiques, aux apports enrichissants de la psychiatrie
et de la psychologie centrée sur la personne globale, aux politiques d’intégration
sociale grandissantes, à l’essor de la vision humaniste de l’âme et du corps, en
plus des seules notions de compétition et de rendement.
Après la Déclaration des Droits de l’Homme (1946), d’autres plus ciblées se
sont multipliées. Les minorités s’approprient la parole (droit de l’enfant, droit
des malades, etc.) en bénéficiant des nouvelles technologies de communication,
et s’ils ne peuvent s’exprimer directement, d’autres parlent pour eux.
Nous connaissons la Déclaration des Droits des Handicapés Mentaux (1971) et
nous devrions mettre en pratique la plus récente déclaration du Parlement Européen, qui stipule dans la Résolution A3-231/92 que: «l’éducation affective et
sexuelle des handicapés mentaux soit renforcée par une meilleure prise en compte
de la particularité de leur situation et qu’ils doivent, comme tous les autres êtres
humains, avoir la possibilité de satisfaire leurs besoins sexuels»… pour apprendre et comprendre, pour se protéger aussi des maladies et des abus, également
pour vivre en couple, et aussi pour réaliser un désir de parentalité parfois.
La place de la loi, en particulier depuis le 3 janvier 1968, selon le nouveau droit
français, qui distingue pour la protection de la personne en minorité prolongée
(terme succédant à celui d’incapable majeur désormais banni) les questions touchant aux droits matériels, financiers, juridiques et civiques de celles liées à son
intégrité corporelle et psychique. C’est pourquoi, nous encourageons l’entourage
de la personne vivant avec un handicap mental à ne pas amalgamer des niveaux
qui sembleraient aller de pair, ni s’enfermer dans une vision figée et sans appel.
Par exemple, une interdiction d’exercer le droit de vote et celle de gérer partiellement sa vie affective, intime et sexuelle. Les mesures de curatelle et de tutelle
seraient également à considérer dans la mouvance d’une existence évolutive
comme des stades progressifs, réversibles parfois ou définitifs selon les cas.
Dans le cadre de cette présente réflexion sur la parentalité, nous renforçons la
nécessité permanente de rechercher la nuance adéquate à toute situation individuelle. C’est pourquoi, nous reproduisons ici un extrait d’une communication juridique de notre collègue, Me Marie-Hélène Isern-Réal, Avocate du Droit de la
Famille au Barreau de Paris :
•
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Conséquences de la protection sur la parentalité:
Le placement sous protection judiciaire, totale ou partielle, n’entraîne pas, selon une
jurisprudence constante, la perte automatique de l’autorité parentale sur ses enfants.
Le juge des enfants, dans le cadre d’une procédure en vue d’une mesure d’assistance
éducative, apprécie la capacité des parents à s’occuper de leur(s) enfant(s) en fonction
d’autres critères, plus généraux.
D’autant qu’en droit français, les prérogatives de l’autorité parentale peuvent faire
l’objet de démembrement:
– par exemple, un parent sous tutelle n’a plus l’administration de ses biens. Il perd
d’office l’administration légale sur les biens de son enfant qui sera automatiquement confiée à son tuteur.
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•
–
en revanche il peut conserver son aptitude à collaborer à l’éducation de l’enfant
avec la personne qui en est gardien et exercer de ce fait l’autorité parentale. Il peut
tout aussi bien continuer à vivre avec son enfant. L’appréciation sera faite en fonction de l’intérêt de l’enfant et non pas de celui de ses parents.
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•
La longévité de la population en général touche de même les personnes vivant
avec un handicap mental. Ceci implique une augmentation quantitative et, souhaitons-le aussi qualitative, du temps de vie exposé à tous les aspects de la sexualité.
Cette réalité-là, interdépendante des avancées technologiques, médicales, sociales,
psychopédagogiques, sous-tendue par les années économiquement fastes de la fin
du XXe siècle, a contribué à une forte mobilisation des familles concernées.
Ces personnes qui n’étaient qu’objets aux yeux de la société d’alors, sont devenues sujets.
•
Les parents solidaires ont toujours représenté une force sociale structurée. Le
nombre de leurs associations explose, leurs influences ont ouvert bien des
portes. Ils déploient leurs compétences parentales, qui sont devenues professionnelles, aux niveaux communautaire et politique aussi.
•
Les congrès locaux, nationaux et internationaux ciblant les thématiques au sujet
de la sexualité, en lien avec les handicaps, se multiplient et la diversité croissante
de leurs contenus montre une volonté sociale de promouvoir l’épanouissement,
le bien-être et le plaisir de la personne handicapée.
•
Les rôles de la sexualité dans l’histoire humaine ont été successivement axés sur
la seule procréation, puis sur l’organisation sociale et, plus près de nous, toujours davantage centrés sur les besoins individuels d’identité sexuée, d’affirmation de soi, pour s’apaiser, pour ne pas être seul, pour lutter contre les pulsions de
mort, pour être touché et pour toucher, pour communiquer ses sentiments amoureux, pour se développer…
Et enfin, il y a encore eu la très courte révolution sexuelle, la pilule, et depuis
1980 nous avons abouti au sexe reconnu « bon » s’il est «safer», avec le SIDA.
Toutes ces étapes ont considérablement enrichi les rôles de la sexualité humaine
et les personnes vivant avec un handicap en deviennent acteurs, au même titre que
tout le monde.
Le contexte culturel
Le contexte culturel influence l’expression de nos désirs affectifs et sexuels.
Nous pouvons d’ailleurs constater que les évolutions culturelles jouent sur notre
vécu en général. Ainsi sommes-nous passés, en matière de sexualité et de vie de
couple, d’une traditionnelle culture de l’obligation de se marier et de procréer, à une
nouvelle culture du désir-plaisir en soi, à l’état pur.
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L’autorité parentale peut aussi être déléguée, à la demande des parents, à un tiers
selon une procédure qui vient d’être assouplie par la loi du 4 mars 2002 sur l’autorité
parentale.
On pourrait traduire ce changement par le passage d’un devoir de procréation à
un désir de procréation. Le changement est également vécu autour de la place de
l’enfant dans notre société : de l’enfant-fatalité des familles nombreuses, presque
sans statut, nous avons passé à celle de l’enfant désiré, attendu, rare, devenu
l’enfant-roi. La personne handicapée l’est de fait aussi cet enfant-là, même si
l’accueil qui lui est réservé variera de cas en cas et que sa vie se déroulera sous
régence prolongée… voire permanente !
Qu’est-ce être un adulte capable de procréer ?
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Tout d’abord, le désir d’être parent recouvre plusieurs significations dans la
société occidentale : au niveau de l’individu, le désir d’enfant prend racine dans sa
propre expérience et dans la volonté de se prolonger soi-même ; au niveau du
couple, l’enfant est perçu comme un accomplissement de l’amour, le fruit d’un désir
partagé ; au niveau social, la parentalité est valorisée par le fait qu’elle donne accès à
de la reconnaissance, à un réel statut et qu’elle contribue à sauvegarder l’équilibre
démographique.
A cela toute personne handicapée peut sporadiquement s’identifier.
De plus, ces différents sens donnés au fait d’être parent sont également inscrits
dans la conception d’un système familial nucléaire et de moins en moins entouré
d’un réseau de soutien effectif (ce qui peut d’ailleurs aussi être handicapant pour des
parents ordinaires !). Le couple est de plus en plus seul à assurer son rôle familial.
Ces éléments nous aident à situer la place possible pour un couple de personnes
handicapées mentales d’avoir un enfant et d’en assumer l’éducation.
Ce à quoi viennent s’ajouter les éléments propres au handicap, ainsi que les
représentations sociales qui jouent une influence considérable puisque la personne
handicapée mentale aura grandement tendance à s’y conformer.
Le permis d’enfanter vient s’affronter à la dépendance évidente de ces personnes.
Le contexte des représentations
Les représentations sociales conditionnent toute inter-relation humaine.
Actuellement la majorité des professionnels, parents et société perçoivent le
désir d’enfant de la personne déficiente mentale souvent comme « peu raisonnable »
et « comportant trop d’inconnues pour l’enfant à naître ».
Il est incontournable d’aller en amont de cette réflexion pour savoir ce que
l’entourage éducatif et parental pense de la sexualité effective, et non seulement
rêvée, respectivement pour leurs résidents et leurs enfants !
Une dichotomie apparaît entre déni et acceptation et nous rappelle l’importance
de travailler les représentations et les ressentis de chacun afin d’aborder plus librement, en soi-même et avec la personne handicapée, inquiétudes, désirs et besoins
(Mercier, 2001).
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Qu’est-ce que devenir parent aujourd’hui ?
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Les représentations des professionnels
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Les représentations des parents
Certains d’entre eux, en revanche, oscillent :
– entre un mouvement de négation de la sexualité de leur fille/fils qu’ils considèrent comme un « ange asexué », donc sans idée de procréation possible, et
– la reconnaissance d’une sexualité effective mais dont ils écartent tout projet
de procréation : ils n’imaginent pas de devoir recommencer le processus
d’éducation pour le bébé à naître, ni d’être à nouveau confrontés à une
équipe d’aide psycho-sociale à cette occasion.
Néanmoins, les temps changent : que penser alors du renversement potentiel qui
pourrait s’opérer dans le cœur des parents lorsque l’enfant serait né, normal de surcroît, parce que le couple handicapé n’aurait pas attendu la permission de l’entourage pour le concevoir : « elle/lui handicapé(e) a réussi ce que nous, nous n’avions
pas réussi : mettre au monde un enfant normal …»!
Est-ce de la fiction ?
•
Les représentations de la société
Elles, par ailleurs, prolongent et cristallisent la première négation.
En effet, même si nous savons qu’une évolution s’est amorcée en matière de
sexualité en lien avec le handicap mental, nous devons également rappeler que
celle-ci émane encore du monde scientifique et professionnel, c’est-à-dire de personnes soucieuses de répondre aux diverses lacunes de l’accompagnement des personnes handicapées. Le grand public demeure majoritairement dans une position de
peur ancestrale face au handicap, liée à la survie de l’espèce, peur de l’inconnu et
encore peur de trouver cette ressemblance déjà mentionnée, vis-à-vis d’eux en cas
de possibilité de devenir parents.
Ces sentiments de peur rendent tout simplement impossible d’accepter, ni même
de penser à la réalisation d’un désir d’enfant pour une personne handicapée.
1
« Du cœur au corps, formons-nous, puis… formons-les !»: programme suisse de formation destiné aux
professionnels en éducation et enseignement spécialisés, soignants et thérapeutes dans la vie affective,
intime et sexuelle des personnes vivant avec un handicap. Auteures : Mmes Catherine Agthe Diserens et
Françoise Vatré, sexo-pédagogues spécialisées et formatrices pour adultes.
Prix Suisse 2001 de Pédagogie Curative (SPC/SZH, Luzern, 2001)
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Ils reconnaissent l’existence de la sexualité de leurs résidents et en gèrent tant
bien que mal les manifestations du cœur et du corps dans la proximité quotidienne
du lieu de vie. Mais actuellement, les professionnels n’imaginent guère de parentalité possible au sein des institutions, parce que dans leurs représentations la personne handicapée continue d’être très différente d’eux-mêmes.
Or, la question de la parentalité les renvoie directement dans ce que cette dernière possède de semblable à eux, ce qui peut être très déroutant. C’est pourquoi une
sensibilisation ou/et une formation spécifiques aident grandement à dépasser ces
craintes et résistances premières.1
Le contexte éthique
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Rappelons ici que la procréation s’inscrit dans un contexte de droit universel.
De plus, nous vivons en régime démocratique où la personne déficiente mentale
est considérée comme un citoyen disposant de droits.
La procréation étant considérée comme un droit, on ne peut donc pas obliger une
personne à y renoncer. Or, la personne handicapée mentale ne dispose pas toujours
d’un jugement moral qui lui permettrait de poser des actes responsables.
Selon Albert Jacquard : «Etre responsable, c’est accepter de supporter personnellement le poids des conséquences de ses actes.»
En ce qui concerne le désir d’enfant et la procréation de la personne vivant avec
un handicap mental, le problème d’assumer ou non les conséquences se pose de
manière évidente (on peut être capable de pouponner, mais incapable de remplir une
demande de fiche de vaccination, pour ne citer qu’un simple exemple !).
L’épanouissement dans la procréation existe si la personne concernée est valorisée, confortée et galvanisée par son entourage dans ses droits d’être parent, en y
mettant du sens pour le reste de sa vie.
Par contre, s’il se sent disqualifié et incompétent, le parent ne pourra établir de
relation positive avec l’enfant. Il n’y aurait alors pas, ou beaucoup moins, d’épanouissement généré par la parentalité.
Cet épanouissement dépendrait-il donc davantage de la qualité de l’accompagnement que de la présence réelle de l’enfant? Serait-il même premier? Autre paradoxe !
Même si la procréation est un droit universel à l’épanouissement, il n’est pas dissociable du respect des droits de l’enfant à naître.
Un enfant né de parents handicapés mentaux court des risques de transmission
du handicap mais surtout des risques de contexte familial inadéquat. Comment
l’identité d’un enfant né de parents handicapés peut-elle se construire ? Comment
soutenir un enfant qui côtoie des parents vus comme incompétents aux yeux de
tous ? Et peut-être actuellement plus que jamais, en ce temps historique qui prône la
perfection et le culte obsessionnel du risque zéro en tout et partout !?
Si selon Ricoeur (1990), l’éthique est «le souhait d’une vie bonne, avec et pour
autrui, dans des institutions justes», nous avons à nous situer face à trois dimensions :
– la réalisation de soi, y compris comme corps propre et comme identité personnelle ;
– la rencontre de l’autre, dans l’amitié et dans l’amour ;
– les institutions (accompagnants) qui doivent favoriser ce double projet.
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Cette problématique vient de plein fouet nous interroger sur le droit fondamental
à la vie et à la transmission de cette vie. Au nom de quoi poser des critères, des permissions, et donc des interdits ?
C’est quoi être un parent suffisamment bon ? Qui faut-il être pour savoir être
aimant, protecteur et responsable des besoins vitaux d’un tout petit ? Puis, pour la
suite, quand ce petit devient grand ?
Nous voici donc obligés de nous positionner en acceptant une réflexion personnelle indispensable (3) avec au cœur de cette dernière la notion de responsabilité.
Selon Duchêne (1998) : «Avoir le sens des responsabilités, c’est être capable de
s’imposer volontairement des limites: en matière d’éthique, l’illimité est la négation
de l’humain».
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Sommes-nous d’accord d’accompagner la personne handicapée dans un agir
émancipatoire, au-travers duquel elle nous apprend aussi quelque chose de nousmêmes ?
Le contexte économique
De surcroît, la société se positionne aussi en fonction d’arguments économiques : « Qui paierait l’accompagnement de l’enfant né de parents handicapés
mentaux ?». Sans oublier tout le débat sur les assurances qui tendent à réduire leurs
prestations, et qui paradoxalement mettent ainsi en péril les fruits de l’essor de ces
dernières décennies.
Avons-nous les idées et les convictions de nos portes-monnaie gouvernementaux ?
Les approches affectives et sexuelles
La question de la parentalité prend place alors, plus ou moins directement, dans
l’accompagnement global de la personne déficiente mentale, dans la gestion des éléments et événements qui s’y relient, aux différents stades de sa vie.
Comment, dans un tel contexte où la négation de sa sexualité domine, la personne déficiente peut-elle exprimer un désir d’enfant ?
Pour y avoir été confrontées plus d’une fois, nous pouvons dire que le désir
d’enfant répond à plusieurs critères, présentés ici en ordre de fréquence d’observation :
– Imiter, « faire comme ma sœur, mon cousin, etc.».
– Prolonger la suite logique du mouvement d’intégration : « Je travaille, je voyage,
j’ai des loisirs comme tout le monde, donc je veux un enfant comme tout le
monde… et je veux même conduire une voiture !».
– Affirmer un état adulte, en dépit de la déficience mentale et rechercher ainsi une
reconnaissance sociale.
– Correspondre à la norme sociétale, voire imaginer que par la conception le handicap serait gommé (pensée magique).
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Les professionnels, les parents ont le devoir de donner des permissions et de
poser des limites. Le renoncement doit s’accompagner d’une prise de conscience
des limites à assumer la responsabilité associée au droit de procréer. Et pour travailler cela, quelles modalités de rencontre sont-elles prévues actuellement entre
personnes concernées et tout leur entourage éducatif ?
–
–
–
–
–
Exprimer de vouloir un enfant peut exprimer le besoin d’un vécu affectif et sexuel.
Avoir envie de pouponner (comme une petite fille, mais avec du vivant !).
Se convaincre que parce qu’il y a enfant, le partenaire va rester avec soi.
Chercher un sens à sa vie et à son corps : « mon ventre ne sert à rien ».
Se sentir « pleine », remplie, fière d’un gros ventre (et sans forcément anticiper
une maternité au-delà de ce seul but).
– Faire plaisir à ses parents, déçus que la lignée s’arrête là.
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L’accompagnement adéquat, mais délicat
Accompagner la personne déficiente pour ce chapitre de sa vie, revient à parler
le plus souvent d’accompagnement au renoncement de la parentalité, et devrait lui
donner l’occasion d’imaginer et de verbaliser son désir d’enfant.
Par exemple, pour aller dans la voie de la preuve…, voire de l’épreuve, par le
réel, il existe déjà des initiatives immergeant une jeune femme handicapée dans une
pouponnière, ou chez des amis, cousins, voisins, en lui demandant de prendre la responsabilité du « pouponnage », pour un moment plus ou moins long.
La personne handicapée peut se responsabiliser par l’acceptation de ses limites.
Plus elle sait les reconnaître et les accepter, plus elle pourrait devenir apte à assumer
un enfant ! «Elle était, à mon sens, devenue capable d’être mère lorsqu’elle a su y
renoncer!» dira une éducatrice.
C’est apparemment paradoxal, et cette aptitude initiale ne suffirait bien sûr pas
au fil du temps, et au fur et à mesure de la croissance de cet enfant potentiel.
Mais quoi d’homologue pour aider le jeune homme… en pareille demande
d’être père ?
Cet accompagnement au renoncement devient très délicat lorsqu’il nécessite de
mettre le doigt sur le handicap, davantage que sur les conditions de vie (manque
d’habiletés et d’autonomie, de moyens financiers, etc.).
Pour Adrienne2, femme trisomique 21, co-habitant en appartement protégé avec
Raoul également handicapé mental, la piqûre contraceptive trimestrielle était à
chaque fois un calvaire : elle devait être conduite par 2 éducatrices jusqu’au Centre
de Planning familial et elle y développait des colères terribles. Elle refusait cette
injection, car disait-elle : « Je veux un bébé avec Raoul !»
Adrienne avait eu réponse à tous les questionnements sensés lui faire prendre
conscience qu’elle ne pourrait pas s’occuper d’un bébé :
2
Tous les prénoms sont fictifs.
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Et parfois aussi, mais beaucoup plus rarement :
– Vouloir un enfant pour un véritable projet de maternité responsable, voire de
couple et pour l’enfant à naître.
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Etc. etc.
Puisque Adrienne contournait de manière très convaincante les obstacles qui
souvent amènent les personnes handicapées concernées à renoncer assez paisiblement (ou de manière résignée) au projet d’enfant, il fallait dans cette situation
emprunter un chemin sensible et souvent très douloureux dans ce qu’il implique :
soit celui de travailler avec elle la prise de conscience de sa condition de femme
vivant avec un handicap trop sévère pour assumer l’éducation d’un enfant.
Cet accompagnement-là ne relève pas de l’implication des éducateurs du quotidien, car il s’agit pour ces dernier(e)s de sauvegarder une bonne relation avec
Adrienne.
Cette tâche serait à confier à une personne professionnelle affectivement neutre
dans sa relation à la personne concernée. En tant que sexo-pédagogues spécialisées
nous sommes occasionnellement interpellées pour un tel suivi et nous reconnaissons
que toucher à ces zones de vulnérabilité est un parcours de longue durée et souvent
ardu : il induit tristesse et révolte parfois, mais il est le seul qui à la longue, permet à
la personne handicapée de mettre un certain sens sur cette impasse.
Informer sur la sexualité et le désir d’enfant ne constitue pas une incitation à
franchir le pas vers la parentalité, mais a pour effet de diminuer les angoisses qui
accompagnent les questions de la personne handicapée quant à son désir d’enfant.
Pouvoir verbaliser avec tout l’entourage est également une authentique et sympathique reconnaissance d’émotions, de désirs et de tristesses aussi. C’est formateur.
C’est être pleinement reconnu.
Voici une parole d’un père d’une jeune femme (vivant en résidence) dans le
contexte d’une soirée réservée aux parents.
Lorsque fut évoqué de manière assez triste, le deuil de l’enfant que doivent faire
un grand nombre de personnes handicapées mentales, ce Monsieur nous a dit :
« Certes, renoncer au projet d’enfant doit être difficile et je ne veux pas le banaliser. Mais peut-être devrions-nous aussi ne pas oublier que nos enfants handicapés,
ont fait et font toujours des deuils depuis qu’ils sont tout petits: notre fille a dû renoncer à monter à cheval, à suivre l’école comme tout le monde, à sortir en discothèque,
etc. Maintenant elle réalise qu’elle ne pourra pas avoir un enfant comme son frère et
sa sœur. Je veux croire qu’il s’agit pour elle d’un deuil comme tous les autres deuils
déjà traversés, un de plus, mais il n’est pas forcément pire que les autres…»
Pour conclure
Nous pensons que la personne handicapée a le droit de faire un choix de parentalité ; même si la notion de choix est relative, étant donné les limites qu’elle peut
vivre. Cette prise de conscience des facteurs en jeu remet la personne intéressée en
position d’acteur de son développement.
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« Oui, je saurais lui donner à manger, je le fais déjà pour Raoul et moi !»
« S’il pleure la nuit, Raoul n’aura qu’à se lever !»
« Pour lui mettre les couches, ma sœur m’apprendra, elle a aussi des enfants !»
« Lorsque je serai à l’atelier protégé, il ira à la crèche.»
Entendre ce qu’elle veut dire de ses besoins, désirs et limites contrecarre le déni
de la sexualité, et peut parfois suffire en soi à calmer des demandes irréalisables.
Nos actions accompagnantes et éducatives dans le domaine de la vie affective,
intime et sexuelle ont naturellement emboîté ce courant général. Les prises de
conscience, les indignations, les coups de cœur pour ou contre… peuvent parfois
s’avérer fulgurants ! Pour que nos actes portent leurs fruits, le temps s’impose et il a
encore besoin de temps. Notre société en marche ne peut si vite transgresser les
étapes ou choisir de les éviter. La phase dans laquelle nous avançons tous demeure
encore pionnière, malgré tous les pas accomplis.
Nous travaillons pour le futur.
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Notre auto-critique
Aujourd’hui, nous pouvons nous interroger en quoi la reconnaissance respectueuse des besoins et désirs affectifs et sexuels légitimes peut à la fois augmenter
l’efficacité de cet accompagnement, et à la fois le compliquer, ou encore apaiser les
ignorances et les interrogations, mais aussi induire un processus d’escalade des
désirs et des demandes, et présentement jusqu’à celui du souhait de parentalité.
C’est à ce titre, que nous avons pensé utile de proposer notre participation aux
2èmes Journées Suisses de Thérapies Familiales et d’Interventions Systémiques à
Genève, en avril 2002, sur le thème « Parentalités d’Aujourd’hui ». Car l’élan vital
omniprésent, le goût intense de vouloir se conformer (souvent) aux modèles et de se
réaliser (parfois) dans un enfantement, n’épargne pas la personne handicapée,
qu’elle soit femme ou homme.
La parentalité est-elle vraiment un phénomène nouveau ?
Non, du moins pour des personnes dont les déficiences, surtout intellectuelles et
relationnelles, n’étaient pas visibles d’emblée dans les siècles précédents : à l’abri
des attentes de l’école obligatoire encore inexistante, elles vivaient leur vie dans la
communauté et procréaient sans critère pointu, sauf les plus atteintes qui en étaient
naturellement dispensées.
La vie, qu’elle soit considérée au niveau cellulaire ou macro-social, est en mouvement, elle est mouvement de balancier, de paradoxe, de contraste et constituée de
multiples changements, tout en aspirant passionnément à un équilibre idéal et utopique : entre espoir réalisé et renoncement accepté.
Nouveau questionnement prospectif
Nous sommes conscientes d’être au cœur d’un paradoxe.
Parce que l’émancipation légitime et le nouveau savoir des personnes handicapées leur confèrent des compétences et des revendications pouvant aller jusqu’à
celle décrite dans ce texte.
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Allons ensemble, ni trop vite ni trop lentement.
Parce que longtemps contrôlées et réfrénées pour ne pas penser à ça, elles bénéficient actuellement de nouveaux droits, dont celui d’accéder à la meilleure intimité
possible… voire à une éventuelle procréation, alors que le taux de natalité dans la
population générale s’abaisse dangereusement !
Parce que l’instinct de survie du groupe social, à travers toute la technologie
assourdissante et séduisante à la fois, crie tout de même comme il le peut, et son cri
prend des masques variés et déroutants, du genre :
«Oui pour un enfant, mais alors pas pour deux!» (une équipe de professionnels)
«On te stérilise, et puis, si jamais plus tard tu es mieux développée, tu pourras
adopter un enfant» (une mère d’une jeune fille légèrement trisomique)…
Catherine Agthe Diserens
Ch. du Couchant 14
CH-1260 Nyon
E-mail : [email protected]
BIBLIOGRAPHIE
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Bienne, Suisse.
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12. Müller D., (2000) : Les passions de l’agir juste. Fondements, figures et épreuves. Ed. Universitaires,
Fribourg, Ed. du Cerf, Paris.
13. Müller D. (1998) : Les éthiques de responsabilité. Dans un monde fragile. Ed. Fides, Québec.
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… alors que parallèlement à cela, les progrès du diagnostic prénatal rend désormais justement possible d’éradiquer les handicaps !