Makemo, Histoire et légendes
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Makemo, Histoire et légendes
N°5 Date : 06/02/2015 Les journalistes : la classe de 3e1 Avec la participation d’élèves de 4e1 et 4e2 pour la rubrique « Métiers » Notre dossier : Makemo, Histoire et légendes 1 Léon Tufaunui, mécanicien au CED Le mercredi 19 novembre nous avons rencontré monsieur Léon Tufaunui pour lui poser des questions à propos de la mécanique, dans son atelier au CED. Quels débouchés peut-on avoir en faisant de la mécanique ? Nos élèves de CAP ne trouvent pas de travail, mais c’est très important pour la vie dans les atolls. C’est un domaine très vaste : hors-bords, voitures, avions… Seulement les meilleurs auront du travail, en allant le plus loin possible : bac pro. Quelle est ta spécialité en mécanique ? Comment es-tu devenu mécanicien ? La mécanique générale, il faut savoir tout faire. Par exemple, réparer une porte de four à pain. Mais je fais surtout Je suis devenu mécanicien à votre âge, grâce à mon père qui bricolait. Je voulais être autonome. l’automobile : vidange, filtre à huile, freins, pneus… Les voitures ont beaucoup évolué : avec l’ Après la 3e, j’ai passé des véhicules automobiles. électronique, il faut un scanner. mon BEP maintenance Qu’est-ce que tu apprends Qu’est-ce que tu aimes dans ce métier ? J’aime « tâtonner », et toucher tout ce qui est aux élèves à réparer ? Les véhicules : pneus, mécanique, je suis passionné dans mon travail, parce que j’aime bien faire de la récupération. Par tuyaux de frein (faire une soudure acétylène), utili- exemple, j’ai fait remarcher le groupe d’Opareke. Chez moi, j’ai un groupe vieux de 30 ans, j’ai reçu de nouvelles pièces, et depuis ce temps-là il ser le chalumeau… fonctionne toujours (14 ans). J’ai récu- Quels sont les risques dans ce métier ? péré la remorque de M. Brasier. La réparation a coûté 100 000 F, en Tu peux même mourir si tu ne fais pas attention. Je suis très sévère sur la sécurité, racheter une aurait coûté 500 000 F. Aux il faut toujours faire attention. Par exemple pour changer Tuamotu, il débrouiller. faut se une roue, utiliser la tronçonneuse à métaux. Il faut porter des protections : tablier, gants, chaussures. Est-ce que ce métier permet de bien gagner sa vie ? Oui, pour certains. J’ai travaillé chez Toyota, Pour finir, M. Dunlop. On gagne bien à Tahiti. Si un employé est rentable, il peut avoir des augmentations. Il n’y conseils : il faut être curieux, touche-à-tout. Les Paumotu sont très manuels. Il faut être « bosseur » a pas de secret : il faut vraiment bosser, être à 200 %. tous les jours car nous sommes l’avenir des Tuamotu ! Rereata, Viriamu 2 Tufaunui nous a donné quelques Les pompiers de Makemo Les pompiers d’aérodromes de Makemo sont venus au collège pour répondre à nos questions. Les Pompiers sont : Pito Gustave (responsable), Frogier Billy et Tauroura Raimana (itinérant). Est-ce que c’est un métier difficile ? Non si tu aimes ce métier et si tu connais bien le matériel. Il faut être au point, toujours être prêt physiquement . Dans quelles matières faut-il être bon ? Il faut être bon en sport, avoir le niveau DNB en culture générale, un permis côtier. Quelle est la formation ? Nous devons faire une visite médicale d’ aptitude après le concours. Puis nous devons faire une formation de 105 h en France (3 semaines) à Châteauroux qui permet de nous donner un diplôme agréé par l’Etat. Il n’y a pas d’école en Polynésie. Tous les 3 ans, nous faisons un stage de 35 h en France. Tous les ans, Comment as-tu fait pour être pompier ? nous allons à une visite médicale et nous maintenons des compétences en secourisme. Les for- Donc d’abord j'ai suivi la formation des sapeurs pompiers de Paris. J'ai passé le service militaire mateurs locaux nous rendent visite une fois par an pour les exercices. Nous avons un statut de fonc- puis le concours. Les Conditions sont d’avoir le permis poids lourds, le brevet national de secourisme (PSE1 – PSE2), et avoir entre 21 à 45 ans. Le tionnaires territoriaux. Concours est constitué de QCM de culture générale et d'épreuves physiques. Il y a eu le feu à la mairie, puis une fois, il y a eu un petit incident d’avion, ou sinon, des feux Quelles grosses interventions avez-vous faites ? d’habitations. Quel matériel utilises-tu ? J'utilise le Camion VIM 24. Il contient 2400 litres Que veulent dire les lettres SSLIA sur le camion ? d’eau, 250 kg de poudre composée d'agents complémentaires pour éteindre le feu, 350 litres d’ Service de Sécurité et de Lutte contre les incendies dans les Aérodromes : le camion est aux nor- émulseur avec de l’eau et de l’air : c’est la mousse pour étouffer le feu. Nous avons des appareils respiratoires isolants pour aller dans les mes. avions en feu, une tronçonneuse pour couper l’ avion, des échelles, des tuyaux avec dévidoir, des Les déplacements en France, les rencontres, découvrir différentes îles. raccords, une bouteille de chasse avec du CO2 pour amener la pression (baromètre à 15 bars). Sur le C’est une passion : on aime la connaissance du matériel, les entraînements, on aime le sport. Il y a toit, il y a une tourelle pour attaquer les feux d’avions. Nous avons aussi du matériel de secourisme. beaucoup d’attente, mais s’il y a un problème, il faut dans les 3 minutes déployer 50 % des capacités. Nous devons sauver des vies humaines. 3 Quels sont les aspects positifs du métier ? Etre moniteur de plongée Mercredi 26 novembre 2014, nous avons fait un interview de Ludo sur le métier de moniteur de plongée. Nous sommes partis au club de plongée. Quels sont les sites de plongée ? Les sites de plongée sont la pas- Comment es-tu devenu plongeur ? Je suis devenu plongeur à mon arrivée en Polynésie en découvrant les lagons, l’océan Pacifique. têmes : Rikiriki. Il y a aussi la pointe : Pohue. se Arikitamiro : 4 sites, la 2e passe : Tapuhiria. Pour les bap- Il existe 2 voies différentes : une formation de plongeur professionnel (travaux sous-marins) et une Qu’est-ce que tu préfères dans la plongée ? formation de plongée loisir, pour le plaisir (encadrer des touristes). Pour être moniteur de Je préfère avoir des relations avec les gens et faire de nouvelles rencontres, faire de belles plongée loisir en étant rémunéré, il faut passer le brevet d’Etat et avoir une carte professionnelle. L’ apprentissage est long et coûteux, mais le centre plongées et les partager. Par contre, je n’aime pas le risque, la responsabilité si quelqu’un a un problème. de plongée peut financer en échange du travail fourni, ou des organismes comme le SEFI. Y a-t-il des risques dans la plongée ? Que découvres-tu dans la mer ? Je découvre des poissons, le relief, des grottes, Les dangers qu’il y a dans la plongée sont les dangers du milieu : la faune, les requins (mais pratiquement pas d’accidents), murènes, poissons pierres, des canyons. Ce qu’on recherche surtout, c’est les requins, les thons, les gros poissons (napoléons, poissons scorpions, le fort courant ; mais surtout les dangers liés à la plongée elle-même : les acci- carangues…), mais aussi le corail, les petits poissons. Il y a peu de flore, les coraux font partie dents de décompression, l’air qu’on respire peut devenir toxique. de la faune. A Makemo, on a un très beau corail et beaucoup de poissons, mais on est loin de Tahiti. Qu’as-tu comme bateau ? J’ai un bateau de 24 pieds Blouin, homologué pour 7 plongeurs et un pilote, avec un moteur 150 chevaux. Depuis combien de temps fais-tu ce métier ? Depuis 23 ans. J’ai commencé à Tahiti. Quels sont les matériels de Quelle est la profondeur où tu plonges ? plongée ? La bouteille gonflée avec un compresseur, le gilet qui se La profondeur où je plonge c’est entre 0 et 60 m, pas plus profond en plongée loisir. gonfle et sert de bouée, le détendeur, les palmes, le mas- Est-ce que ça fait mal aux oreilles ? Non, ça ne fait pas mal aux oreilles, c’est seule- que, le tuba, la combinaison, le couteau, le profondimètre, les plombs, le parachute pour ment si on est enrhumé ou si on fait mal l’ équilibrage. se signaler. A quels moments vas-tu plonger ? Est-ce qu’on gagne sa vie avec ce métier ? Lorsque j’ai des demandes, des clients. Quand le courant est entrant, je vais dans la passe. Quand il est sortant, je vais plonger vers l’extérieur. Oui, mais c’est d’abord une passion. Il fait beaucoup d’investissements. S’il n’y a pas de plaisir, ce n’est pas la peine de le faire. Junior, Elodie, Jean-Baptiste, Poeragi 4 Le métier de greffeur Le mercredi 19 novembre 2014, nous avons rencontré monsieur Taiho pour lui poser des questions à propos de la perliculture. port permet de mettre la nacre pour regarder. Pour le greffon : on a des petits ciseaux pour le Comment es-tu devenu couper, une pince pour l’accrocher, une lame de 25, comme un scalpel, pour le découper de façon bien perliculteur ? J’ai appris avec mes parents. J’ai commen- précise. Le pique-greffon permet de le prendre et l’ injecter dans la poche perlière. Pour le nucléus : le couteau de greffe permet d’ cé à Ahe à l’âge de 15 ans. J’étais as- inciser. Le porte-nucléus permet d’injecter. La spatule a un côté plat et un crochet pour écarter l’ sistant avec mon cousin. Puis j’ai com- endroit où on fait l’incision. On range dans un boîtier les différentes tailles de nucléus, selon la mencé à travailler dans la ferme de Jean-Claude Müller. taille de la poche perlière Le miroir sert à ne pas gaspiller les nacres : on cherche une nacre porteuse de greffon, au lieu de J’y suis resté pendant 12 ans puis j’ai découper. On met le manteau sur des plastiques pour le découper en carrés. C’est utilisé aussi pour les monté ma ferme perlière depuis 2005. Pour devenir greffeur, il faut travailler sur le tas. On est d’ abord assistant. On fait les chapelets et on les greffes en chirurgie. Pour les perles : on utilise un écarteur, un couteau (faucille) avec spatule et crochet, un anneau met dans une protection. Le phytoplancton arrive dans la protection. Quand la taille atteint 4 cm, pour injecter la perle. on fait un chapelet technique pour faire de l’ élevage. Il faut atteindre la taille de 8, 9 ou 10 Quels sont les différents types de perles ? Les différents types de taille dépendent du choix cm pour faire la greffe. L’assistant prépare l’ ouverture et coupe le byssus (ce qui s’accroche sur le support et permet à la nacre de se situer dans du nucléus, ordinaire ou bio. Il y a des petites perles comme les keshis, formées seulement avec le manteau. Il y a des perles rondes, en poires ou en le courant). Puis je suis devenu greffonnier, je devais découper le manteau pour obtenir un greffon. boutons, cerclées, de basse qualité (rebuts). Les perles cerclées sont dues aux impuretés quand tu Et maintenant je suis greffeur. Que fais-tu spécialement dans ce travail ? injectes. Il est difficile d’être propre à 100 %. Les petites sont de 1re greffe, les grosses sont de surgreffe (2e greffe dans une même nacre). Au début, je faisais tout : ouvrir, découper le byssus, placer sur le support, faire l’opération Les couleurs dépendent du greffon. Les qualités sont : A+, A, B, C. La qualité dépend de la (incision et injection du nucléus). Le nucléus est taillé dans un coquillage. Une entreprise taille les formes. Le nucléus peut être marron ou blanc. ferme, du lagon, du greffeur. On injecte dans la gonade un morceau de manteau, le greffon, et un nucléus. Quand on découpe le greffon, il faut qu’il reste frais. Si le manteau sèche, la perle est de mauvaise qualité. La perle se forme grâce au nucléus et au greffon. De quel matériel as-tu besoin ? On a les pinces (écarteur), qui servent à ouvrir et voir la gonade pour couper le byssus. Le sup5 Est-ce que c’est un métier difficile ? Y a-t-il une formation pour devenir greffeur ? Une école est basée à Rangiroa : le CMNP. On peut Oui et non. Si tu n’ aimes pas ce métier, être rémunéré. c’est difficile, mais si tu es passionné, ce n’est pas diffici- Noé, Teheimana le. De combien de nacres se compose un chapelet ? Un chapelet fait 10 nœuds de 10 ou 20 nacres. Le métier d’infirmière Le mardi 18 novembre à 9h, nous sommes partis faire un interview sur le métier d' infirmière avec madame Leroux à l' infirmerie. d’infirmières et après au concours pour être infirmière dans la Marine nationale. J'ai fait 3 ans d’ études pour avoir mon diplôme d’Etat d’infirmière. Est-ce que ce métier permet de bien gagner sa vie? Oui, il permet de bien gagner sa vie, surtout à l’ hôpital. Nous sommes bien payées, il y a des primes quand on travaille la nuit et le week-end. Mais il faut être toujours disponible. Qu’est-ce qui est difficile dans ce métier? Quand tu travailles à l’hôpital, c'est difficile de gérer la vie professionnelle et la vie familiale. Tous les horaires changent souvent. La charge de travail est assez lourde Pourquoi as-tu voulu devenir infirmière? J’aime le contact humain et soigner les gens. J’aime Quel matériel utilises-tu le plus souvent? Le matériel que j’utilise souvent est : les compresses, de quoi faire des pansements, prendre la tem- un métier où nous ne sommes pas enfermés et où on sent qu’on sert à quelque chose. pérature. Je me sers aussi de tout le matériel médical de base. Est-ce que tes parents t’ont poussé à choisir un Quels métiers peut-on avoir dans le milieu médi- métier médical? Non, pas du tout. Ma mère travaillait à la cantine scolaire et mon père dans une usine de pneus et cal ? On peut avoir de nombreux métiers comme personnel de service, brancardier (déplacer les malades), ai- personne de ma famille dans le milieu médical .J’ai moi-même voulu faire ça. de-soignante, auxiliaire de puériculture (enfants). Dans l’aide à la personne, il y a beaucoup de débouchés. Comment es-tu devenue infirmière? Après mon bac, j'ai participé aux concours d’écoles 6 Elodie, Vahine M. Manuireva, enseignant et apiculteur M. Martin Manuireva nous a montré comment on élevait des abeilles pour avoir du miel. Il a apporté les éléments d’une ruche et les a assemblés devant nous. A la fin de la démonstration, chacun d’entre nous a eu droit à une petite bouteille de miel ! construisent elles-mêmes les alvéoles en forme d’ hexagones réguliers : c’est la meilleure forme pour avoir le plus de solidité avec le moins de matériau (ex : ailes d’avion). Comment as-tu appris à être apiculteur ? Les abeilles remplissent les alvéoles de miel, les alvéoles servent aussi à la reine pour pondre ses œufs. Quand le miel est bon, elles ferment les al- C’est venu par hasard. Un ami m’a emmené faire du miel. Ça fait six ans maintenant. véoles. On peut voir dessus le pollen récolté sur les fleurs de cocotier. Comment as-tu attiré les abeilles dans la ruche ? On met encore une autre hausse avec 10 cadres quand la colonie bien développée. Les deux premières Il faut déjà avoir une colonie qu’on trouve dans la nature, on la met dans une autre ruche et on fabrique une reine (secret professionnel !). hausses sont pour les abeilles, les larves, les œufs. On place une grille à reine pour empêcher la reine de remonter dans la 3e hausse et d’y pondre Est-ce qu’il y a des risques dans ce métier ? des œufs. Dans la 3e hausse, on n’a que du miel, c’est pour l’ Oui, si on est allergique aux piqûres d’abeilles, il ne faut pas le faire. apiculteur. On ajoute un couvre-cadre, un toit, et la ruche est complète. Une colonie complète comprend 60 000 à 80 000 Est-ce qu’être apiculteur permet de gagner sa vie ? Oui, on peut gagner sa vie. En Polynésie, on manque abeilles, dont 1 reine, 2000 mâles, et des ouvrières. d’apiculteurs. Marc, Jean Est-ce que tu connais des recettes avec du miel ? Ça peut remplacer le sucre, par exemple dans la sauce sashimi, les gâteaux au miel… On peut aussi guérir les blessures et les brûlures avec le miel. Y a-t-il des formations d’apiculteur ? Il n’y a pas d’école, mais il y a des stages de formation dans les communes. Qu’est-ce qui fait un bon miel ? C’est l’environnement, ça dépend des fleurs. Aux Tuamotu, ce sont les fleurs de cocotier et le kahaia. Et maintenant, peux-tu nous montrer comment on élève des abeilles ? Dans les îles, il faut être bricoleur, tout faire soi-même. On fait d’abord un support, on y met un plateau d’envol, puis une hausse, constituée de 10 cadres en bois, avec des feuilles de cire. Les abeilles Source : Une ruche au jardin, Henri Clément 7 La journée polynésienne Au début du mois de décembre 2014, nous avons interviewé Mme Selam, professeur de français et de reo maohi pour nous rappeler l’importance de notre journée polynésienne. Dans ton ancien collège, organisiez-vous une journée polynésienne ? Dans mon ancien collège de Tipaerui qui compte mille élèves, les journées étaient grandioses, avec plus de moyens humains et financiers. Quel est le sens de l’organisation de la journée polynésienne ? Prends-tu des décisions toute seule ou avec d’autres Elle fait partie de l’axe 1 du projet d’ établissement de cette année. En plus, cette jour- personnes en particulier ? Ce n’est pas possible de décider seule pour un pro- née est officielle et est célébrée dans tous les établissements scolaires de la Polynésie française. Nous nous devions donc au sein de l’équipe de l’ jet d’une telle envergure. D’ailleurs, heureusement que toute l’équipe est présente, ce qui permet un bon fonctionnement. organiser chaque année. Et on peut dire que c’est une réussite. Pour qui est organisée cette journée polynésienne ? En quoi consiste cette journée polynésienne ? Elle met en avant la culture polynésienne sous tou- En permier lieu pour les élèves, ensuite pour notre établissement et aussi pour valoriser notre culture, nos talents et l’amour de notre fenua ! tes ses facettes : danses, chants, déclamation de textes anciens traditionnels. Temanutea, Teragi, Poura Pourquoi avez-vous décidé de faire des groupes ? Cette année, l’équipe a décidé de faire différent en organisant un concours entre atolls. Chaque atoll devait présenter des spécificités de son île et cela a été une réussite. 8 Le korero Quels sont les types de koreros ? Il y a 3 types de koreros : Paepae, on raconte une histoire; fakatara, il y a des chants à l’intérieur; fakatiri, en langue ancienne. Nous avons rencontré Maro Milton pendant la journée polynésienne pour poser des questions sur les korero. Le classement est le suivant : 1 : Revatua 2 : Raumanu 3 : Utahia Comment faites-vous pour choisir les meilleurs candidats ? Ils ont été choisis par les professeurs du collège. Quels sont vos critères ? Nos critères pour noter sont : la langue, le texte, l’articulation, le placement de la voix, l’émotion, l’interprétation, la façon de se tenir sur scène, le regard, le costume. La perte de mémoire n’est pas ce qui sanctionne le plus. Pourquoi vous a-t-on choisi comme jury ? Je suis adjoint au maire chargé de la culture et des festivités. J’ai été président à plusieurs reprises du jury du heiva, mais c’est la première fois au collège. Est-ce que c’est difficile ? J’ai l’habitude. De toutes façons, il faut choisir. Est-ce que c’est important pour toi d’être jury ? Oui, c’est important. Quelles sont les qualités de la gagnante ? La façon de poser la voix, la gestuelle. Elle a récité un texte ancien. 9 Que penses-tu de la prestation de Tutavake ? Il y avait beaucoup d’émotion. Tout était bien fait. David, Tamati Le cross de Polynésie Le jeudi 5 décembre 2014, les élèves du collège de Makemo ont été accompagnés par M. Brasier pour participer à un grand concours de cross à l’hippodrome de Tahiti. tains avaient peur de perdre mais on s’est ressaisis parce que nous étions venus au cross pour participer. Pendant la course, on a entendu la voix de M. Bra- Nous devons rejoindre la course à 8h30, sinon on sier qui nous a encouragés avec un énorme cri et il nous a dit : « Ne perdez pas espoir ! Allez Makemo !! A serait disqualifiés. 1438 élèves ont participé au pupuhi (foncez) ! » Et après avoir entendu la voix de M. Brasier, nous cross. Tout d’abord, la course a débuté par caté- avons foncé jusqu’à la ligne d’arrivée et nous sommes arrivés parmi les dix gories, des plus petits aux plus grands. Les poussins ont débuté et plu- premiers. Nous étions tellement fatigués que nous ne pouvions plus respirer. On ne sentait plus nos jambes. sieurs d’entre eux ont arrêté, certains étaient Mais un des nôtres était toujours en forme et c’était Rémy. Après, notre M. blessés. Après, c’était les benjamins et minimes. C’était souvent des courses avec des croche-pieds et des coups de coude. Il Brasier est venu nous féliciter parce qu’il avait cru que nous serions parmi les derniers, mais il s’était complètement trompé. y a même eu beaucoup de blessés. Ensuite nous entrons dans la course avec les cadets Rémy, Hautearii, Jean-Pierre et les cadettes. Le départ est donné avec un pistolet. Beaucoup d’entre nous étaient stressés, cer- Le tournoi de rugby Yoyo Frogier. Puis il nous a annoncé les équipes. Il y avait Makemo contre Faa’a pour le premier match, Rangiroa contre Pirae pour le deuxième match. Il y a eu beaucoup d’ essais, 1 partout contre Tefana, 3 essais contre Rangiroa, 3 essais à 1 contre Pirae. Une équipe du collège a participé au tournoi de rugby à 7 organisé à Tahiti, au stade de Fautaua. Il y avait quatre équipes, Pirae, Makemo, Tefana, Rangiroa. Mais il y a eu aussi des blessés, 2 blessés de Rangiroa quand ils ont joué contre Tefana. Au moment où nous avons joué notre match contre Faa’ a, nous avons eu le stress parce qu’il y avait beau- Pour démarrer le tournoi de rugby, nous avons com- coup de supporters pour Faa’a. Et à la finale contre Pirae, nous avons cru que nous allions les aplatir mencé par une petite prière qui a été faite par parce qu’ils étaient petits. 10 Mais c’était notre match le plus dur, ils étaient tellement rapides que nous n’avons pas pu les tenir. supporters de Faa’a sont venus nous féliciter pour notre victoire contre eux. Ils avaient l’avantage avec le n°11 par rapport à son gabarit. Notre coach a hurlé pour nous replacer Tuaka, Ronny, Damien en lignes. Mais c’était trop tard, ils nous ont mis 4 essais ! A la fin du match, nous sommes retournés voir notre coach et il n’avait plus de voix… Et les Tavae, Si loin du monde Si loin du monde de Tavae Raioaoa est une histoire vraie. Tavae a dérivé pendant 118 jours. Pour survivre, il pêchait un poisson. Il le mangeait cru et il aspirait le peu d’eau qui était à l’ intérieur des arêtes pour s’hydrater. Pendant son naufrage, il parlait à sa femme, aux petits poissons, à Dieu et aux ancêtres. Il vit même des orques, un thonier et un avion. Ce qui nous a plu dans cette histoire, c’est son courage. Il gardait toujours l’espoir de retrouver son île et sa famille. Chaque jour, il s’ encourageait pour survivre même si quelquefois il pensait de façon négative. Même quand il était faible, il pêchait pour se nourrir. Nous avons éprouvé une immense pitié. La façon dont l’histoire est racontée est très simple, mais elle est pleine de suspense. Nous vous conseillons de le lire ! Haumata, Ninirei 11 Dans ce journal, les élèves de 3e1 ont choisi le thème des légendes et de l’histoire de Makemo pour que les nouvelles générations puissent connaître les légendes de leur atoll. M. Florian Prévost est venu l’an dernier pour interviewer les anciens de Makemo afin d’en savoir plus sur les légendes de notre atoll, dans le cadre de son master. Avant les vacances de décembre, il a bien voulu venir nous parler plus en détail de la légende des baleines, de celle de Moeava et de celle des Mokorea. Moeava et Patira Moeava est le héros le plus célèbre de Makemo. Voici son histoire. Moeava vit avec sa famille à Napuka. Il est toujours en pirogue pour affronter des guerriers d’autres atolls. Un jour, le géant Patira vole la femme de Moeava, appelée Huarei, qui est la reine de Napuka. Il peut faire en un seul pas la distance de Katiu à Makemo. Moeava s’en aperçoit : il le voit passer. Il le provoque et lui propose de se battre à Makemo. Patira a un pied à Vainatika, un autre à Orori. Moeava prend son lance-pierre et lance une pierre sur Patira. Le géant tombe dans la direction de Taenga. Puis Moeava offre la tête de Patira à son fils Kehauri. Le corps est mis dans un ahimaa pour être mangé. La bande de Patira tue la famille de Moeava à Napuka puis va à Punaruku. Moeava revient donc à Makemo pour se venger. Il règle le compte de tout le monde. Il prend des mikimiki et fait des brochettes de guerriers pendant qu’ils dorment, et repart à Napuka avec la bande de Patira derrière sa pirogue. Après cette deuxième vengeance, il a vécu tranquille. Tous ceux de Napuka seraient les descendants de Moeava et Huarei. la légende, à Terehega (« récif côté extérieur »), vers Tepohue, mais côté récif. « Tepohue » est le nom de la liane (« pohue ») pour faire le lancepierres (« maka »). La pierre s’appelle « amiomio o te ragi » (« qui vient du ciel »). Cette pierre a été amenée de Tahiti aux Tuamotu par Honoura, un autre grand guerrier de Tahiti. Le four où Patira a été cuit aurait servi aussi pour les baleines. Moeava est le plus grand guerrier des Tuamotu ! Il est resté aux Tuamotu, alors que Honoura a fait la guerre partout. Elisabeth, Béatrice, Haunui L’histoire et la légende... Moeava : C’est un guerrier qui a vraiment existé, vers les années 1600 (selon les généalogies). Il est descendant d’une famille de guerriers de Takaroa. Son histoire nous montre qu’on pouvait faire de très grandes distances en pirogue. Moeava pouvait faire 400 km en 4 jours, de Napuka à Makemo. Il n’y avait pas de voile, seulement une rame. Patira : Il viendrait des îles sous le vent. Il enlève Huarei pour avoir le pouvoir. Les grands guerriers volaient les femmes qui avaient du pouvoir pour contrôler les Tuamotu. Makemo : Ils se battent à Makemo parce qu’il y avait un endroit pour combattre, un tahua (place, arène) vers le trou des baleines. La pierre serait toujours visible à Makemo, selon 12 Illustration de Patrice Cablat, tirée d’Histoires et légendes des temps anciens de Tahiti et des îles , Emy-Louis Dufour, Au vent des îles La légende des baleines Nous avons ensuite posé des questions à Florian à propos de la légende des baleines de Makemo. l’autre côté de la passe. Comment s’est transmise cette légende ? La légende existe-t-elle ailleurs ? Oui, elle existe ailleurs dans le Pacifique, en Nouvelle-Zélande, aux Fidji, aux Samoa. Cette légende a été transmise à l’oral, donc il y a plusieurs versions. Elle s’est transmise de génération en génération par les descendants de Kapea Quelle était la méthode pour capturer les balei- jusqu’à aujourd’hui. Depuis 300 ans, elle s’est transformée. nes ? Quelles sont les sources pour connaître cette léLa méthode pour capturer les baleines est vraie. Ils entouraient la baleine avec leurs pirogues et un guerrier sautait sur la baleine. Le guerrier di- gende ? rigeait la baleine sur le banc de sable, le récif. Le plus grand dompteur de baleines est Kapea. teo Pahipa, Mairoto Mihimere et Tangi Apereto. Il y a toujours des traces de la légende à Makemo. Qu’est-ce que ça nous apprend sur l’histoire des Tuamotu ? « Rotoparoa » veut dire « intérieur de la baleine » et « Vaipuna », « « se cacher dans un trou sousmarin ». Il y a même un ahima’a, un grand four tra- Ça nous apprend qu’il y a eu une liaison entre les ditionnel, qui serait toujours visible. Cet ahima’a aurait servi à cuire les baleines, ce serait le mê- Je me suis basé sur trois sources : celles de Timo- Tuamotu et la Nouvelle-Zélande il y a environ 300 ans. Les Maoris viennent des Tuamotu. Les Paumotus me qui aurait servi à faire cuire le géant Patira. sont venus en Nouvelle-Zélande en pirogue. On retrouve même nos noms de famille en NouvelleZélande. Les baleines entrent-elles encore dans le lagon ? Les baleines entrent encore souvent dans le lagon. En 1997, une baleine s’est échouée à l’endroit de la légende, Pohue, et avec les vertèbres, on a fait Qui était Kae ? de l’artisanat. Kae, ou Okae, montait sur les baleines. Il se mélange avec le personnage de Kapea, qui serait un Ninirei, Haumata, Robert sorcier originaire de Makemo. Il a même un marae de Le mythe des baleines de Makemo « Les baleines venaient en troupeau dans le lagon de Makemo, elles étaient guidées. L’homme qui guidait les baleines, son nom était Okae, il naviguait sur le dos des baleines. Okae était accompagné par deux femmes. Ils entraînaient les baleines à Vaihumu qui est l’ancien nom du Roto Paraoa, il y a un chemin entre les bancs de sable pour que les baleines puissent s’y rendre [cf. comme un chenal au nord de Vaihumu]. Là, Okae choisissait l’une d’entre elles pour qu’elle soit mangée. La baleine se sachant choisie allait se cacher sous le troupeau mais après elle acceptait son sort et remontait à la surface. Elle était ensuite tuée au harpon puis amenée à Tepohue où elle était ensuite mise au four de terre puis mangée par les habitants de Makemo. » Récit mis en forme par Florian Prévost à partir d'entretiens réalisés avec Mere Mairoto, Apereto Tangi et Pahipa Timoteo. Extrait de "Eléments d'ethnohistoire de Makemo", Florian Prévost, Mémoire de Master 2 LCSO, UPF, p. 74 13 Les Mokorea Qui étaient les Mokorea ? océan sans sa bourre. « Vainatika » signifie « extrémité ». Vers 1800, une Les Maokorea n’étaient pas des sirènes, c’était une vingtaine de personnes habitaient là-bas. sorte de monstre poilu, avec de longs cheveux, de Certaines personnes de Makmo disent qu’ils ont déjà longues griffes d’au moins trois mètres de long pour vu des Mokorea. chasser le poisson et pour ouvrir le ventre des mères. La légende existe-t-elle ailleurs ? Ces créatures du Po (monde viennent du des- La légende existe sous). Les Mokorea étaient aussi bien des dans tous les atolls des Tuamotu; aux hommes que des femmes. Ils montent à la surface pour aller chercher Australes où les Mokorea ont des écailles de poisson; à un homme ou une femme pour leur apprendre Huahine. A Faaite, Hao et Fa- comment sortir du ventre un bébé Mokorea. Car leur méthode est de karava, les Mokorea sont situés dans des kokos, des trous couper le ventre de la mère, et la mère meurt. dans le récif. A Anaa, ils passent Ils ont le pouvoir de respirer sous l’eau et par une grotte. de changer d’apparence quand ils sont à la surface. Ils remontent Ronny, Damien à la surface pour aller pêcher du poisson ou voler la nourriture des paysans (pommes de terre, patates douces, manioc…). Quand ils font prendre, ils se se font massacrer par les hommes qui les attachent sur un cocotier Jean-Louis Saquet in "Les Mokorea", Corinne McKittrick, BSEOn°320, p. 23 et les brûlent vifs. Vainatika, le trou des Mokorea Il y a un proverbe qui dit que « pour être de Makemo, il faut sauter dans le trou ». Le trou est directement relié à l’océan. Pour le prouver, on peut mettre un coco dans le trou, et il ressort dans l’ 14 Nous sommes également allés voir les anciens, Tagi Apereto, qui nous a parlé de son expérience de compositeur, et Tapi Sylvain, qui nous a raconté comment était Makemo dans sa jeunesse. Nous avons aussi rencontré des personnes qui en savent beaucoup grâce à leur famille, comme Moeata Citot, qui a évoqué l’ ancien village, et Frédéric Tapi, qui sait parler le « tutae auri ». M. Tagi Mercredi 26 novembre 2014, nous avons rencontré M. Tagi Apereto, sous un arbre, chez lui. C’est maintenant un vieux monsieur dans un fauteuil roulant. Il nous a accueilli avec hospitalité. Il nous a parlé de sa jeunesse de compositeur. M. Tagi a passé son enfance à lire d’anciens livres, notamment de Philippe Forte. korero en 1965 à la demande du maire, M. Mariteragi Tiave, comme « Makemo roa hua » ou « Arikitamiro », qui est depuis longtemps chanté par l’école primaire de Makemo. Il a composé environ 40 chants dont 3 chants en français. Il composait souvent pour des mariages ou Son père était diacre à l’église de Makemo et sa le heiva. Il accompagnait souvent ses chants avec une guitare ou un ukulélé. mère faisait l’entretien des mandariniers, des plants de maïs, et l’entretien général de l’église. Aujourd’hui, M. Tagi Apereto continue à écrire des Et M. Tagi était pianiste à l’église en 1950. En 1952, il y a eu une houle qui a ravagé toutes les plantations derrière l’église. chants, mais ses chants ne sont plus transmis. Il Il a commencé à composer ses chants ainsi que ses Temanutea, Teragi, Poura écrit ses chants sur demande, mais il écrit pour lui. Deux chants de M. Tagi Apereto Makemo roa hua Arikitamiro Makemo roa hua kitai tugata patia raina Kitai varevare e aha ra Makemo Vai ihoa Makemo ei tumu. Mate fakatika ane no te faka tere E vai tei te vaegahaga tika te henua Hopuhopura’a ia note Mokorea No reira teie fenua topa hia tona ioa o Vainatika Tei te topara’a ote mahana i te hopea I raro I Makemo E komo Mokorea to ratou ia hopura’a e E ua ma to tino te vahine Mokorea Makemo il y a 60 ans... Le village Thomas, tout était un espace vide avec l’eau de mer qui venait jusqu’à la maison de M. Tapi. En 1989, Selon M. Tapi, il y avait à l’ancien village, Punaruku, une centaine de personnes. Mais son père cet espace a été remblayé avec des cailloux et du sable par M. Tiave. était déjà ici. Makemo était il y a 60 ans une île naturelle. Il n’y avait pas de quai qui la protégeait de la houle. La mairie n’était pas encore Il n’y avait rien autour du phare, on pouvait rentrer dedans comme une maison. Les maisons étaient de construction traditionnelle, en bois. construite, ni le phare. De la mairie au magasin 15 Makemo il y a 60 ans... pêchait seulement au coupe-coupe. On grattait dans l’eau pour chasser les poissons au bord, dans les parcs à poissons. Les rori (concombres) étaient frottés dans l’eau : le liquide rouge est toxique et tue les poissons. Le matériel de pêche est arrivé seulement dans les années 70 : pupuhi, cannes, masques. Pour les nacres, on faisait des lunettes avec du verre taillé. L’environnement était plus présent qu’en ce moment. La maison communale C’était mieux avant, il n’y avait pas de structures, que la nature, plein de poissons. Les déplacements Aux temps anciens, les déplacements étaient très difficiles pour les habitants de Makemo. Ils se dé- Les marchandises étaient importées par des goélettes. Le « Hotumaru » venait vendre sa marchandise. Il n’y avait pas de magasin, on achetait directement plaçaient en pirogue pour aller au secteur. La rou- sur le bateau, on mettait dans la baleinière. La vie était stricte : on avait seulement droit à 1 litre de vin par maison, et pas d’autre alcool. Les parents étaient très sévères, mais les enfants plus heureux. On était plus libres. L’école était à la mairie, il y avait une trentaine d’élèves. Tous les élèves s’arrêtaient au CM avec le certificat d’ études, les professeurs étaient M. Thomas Tupahururu (1970), la mère de M. Tapi (1960). La mère de M. Tapi a été la 1re institutrice, et elle était aussi infirmière et radio. Le village, côté lagon Les légendes Les légendes étaient racontées de génération en gé- te n’existait pas. Les prêtres l’ont construite avec les paroissiens : tout le monde a participé au dé- nération, les versions ont changé. M. Tapi a le nom de tous ses ancêtres dans sa mémoire. La légende des baleines était extraordinaire, il y frichage, tous les jours, pendant plusieurs années. La piste a été finie vers 1980, mais elle n’était avait Kapea qui pouvait dompter les baleines. Il les attirait avec un instrument, il s’approchait pas goudronnée. Le transport aérien se faisait avec un hydravion. Dans les années 70, le CEP (centre d’expérimentation puis il montait sur son dos. Avant, les baleines étaient plus présentes dans le lagon, on en voyait tous les jours. nucléaire) s’est installé , avec des logements, des bateaux militaires. Le mode de vie Avant, la pêche était beaucoup pratiquée parce qu’en ce temps là, il n’y avait pas de travail à faire pour gagner de l’argent. Bien après est venue la coprahculture pour aider les gens sans travail. On 16 Le phare, construit en 1936 Il y a des marae à Pohue, à la pension. M. Tapi et Fred Torrente, professeur d’université, sont allés attrapée, elle est restée en haut pendant un mois, elle est retournée sous l’eau, et les Mokorea ont voir celui qui est de l’autre côté de la passe. Le trou des Mokorea se trouvait à Vainatika. Cette remercié avec des poissons. Le nom de la passe était Arikitamiro, le courant s’ légende était beaucoup racontée. Il y avait des habitants là-bas. On racontait qu’une femme Mokorea rêvait de voir les accouchements sur terre. On l’a appelait Pekahikura. Les îles jumelles de Napahere étaient appelées Teratagi et Ruapuni. David, Robert Le « reo tutae auri » : ... Comment cette connaissance s’ est-elle transmise jusqu’à Connais-tu des récitations dans cette langue ? Non, mais on en connaît peut-être à Napuka, où les toi ? Quand j’étais jeune, j’allais Anciens étaient très poétiques. C’était aussi des guerriers. toujours avec les vieux du village pour apprendre des choses. Connais-tu l’histoire de Moeava et Patira ? Chacun a sa version. La mienne est celle de Raihi- A qui servait cette langue ? D’abord, il faut distinguer le ti, un grand-père qui vient de mourir. Au 16e-17e siècle vivait une très belle reine, Hina, tutae auri et le paumotu pur. Aux Tuamotu, il y avait 7 lan- une de mes ancêtres. Moeava était un dieu de Napuka et Hao, un guerrier. Il était amoureux de Hina. Pa- gues, une pour chaque secteur. Le tutae auri servait aux guerriers. Il est très différent de tira, qui est un géant, aussi. Moeva lui lance un défi. Patira y va en un seul pas. Moeava réfléchit pendant tout le trajet. Il arrive sur Otiri la langue de tous les jours. C’ est une langue codée, pour que les adversaires ne (Otitoi). Il lève les yeux et voit les « boules » de Patira. Il fabrique un maka (lance-pierres). Il comprennent pas. Par exemple, iaorana devient iaora – pa- na. E (oui) devient e – pe (= ke-pe en vrai paumotu). est grand aussi, fort. Il tue Patira en touchant ses deux « boules ». Patira tombe entre Marutea et Makemo. La pierre a formé le trou des baleines. Pa- Oia (oui) devient oi-pi-a (= koi-pi-a). Aore (non) devient ao-po-re (= ka-po-re). tira a été mangé dans un four. Est-ce que cette langue est différente de celle d’ Que sait-on sur la guerre et les guerriers ? Makemo était allié avec tous les atolls, sauf Tata- aujourd’hui ? Oui, elle est très différente. Le pur paumotu est déjà très différent. Aujourd’hui, on mélange plu- koto, qui était un atoll ennemi. Par exemple, en arrivant dans un nouveau lieu, pour pêcher, il fallait se battre pour en mériter le droit. Toutes les sieurs langues : paumotu, français, tahitien. Il y a 30 ans, la langue pure était celle de tous les îles sont taboues. On faisait la guerre pour le pouvoir, la pêche, les femmes. A Anaa, il y avait jours. C’était le langage des ancêtres. Avant, les guerriers sortaient de leur île en pirogue à voile. Ils gardaient toujours le contact avec beaucoup de sorciers, qui utilisaient la magie. Le dernier guerrier de Makemo (Taha’e) a vécu au 18e ou au 19e siècle. Il s’est battu contre le grand leur île spirituellement. Ils avaient des connaissances, et grâce à la lecture de la nature (arbres, guerrier de Tatakoto. La paix était revenue, les goélettes popa’a faisaient des tournées, mais à Ta- poissons, étoiles…), ils pouvaient savoir ce qui les attendait. takoto, on vivait encore comme aux temps anciens. Les guerriers paumotu mangeaient les autres guerriers ! Elisabeth, Béatrice, Haunui 17 L’ancien village, Punaruku Pourquoi le village était-il à cet emplacement ? Tout d’abord, chaque famille a sa version. Mes Que faire s’il y a un cyclone ? Les vagues venant du lagon sont inoffensives, mais grands-parents me disaient que la terre y était fertile. « Punaruku » veut dire « fertilité ». La quand les vagues viennent du large, il faut prendre ses précautions. Maintenant, on sait quand un cy- terre y est plus large. clone arrive, mais aux temps anciens, on savait tout avec la lune, le soleil, le vent, pour le coprah, la pêche, pour planter. Moi-même, je me base encore sur le soleil. Comment se sont transmises les légendes ? Les légendes se sont transmises à l’oral, de génération en génération. Avant, il n’y avait pas de télé, pas de radio… On allait à l’école et au coprah. Le soir, on s’asseyait, et les grands-parents racontaient les histoires et légendes d’ici. Mon grand -père écrivait tout sur le sable. J’ai appris à écrire avec un oursin mauve comme crayon, sur des pierres blanches et lisses. On apprenait la généalogie. Mon grand-père nous disait d’ouvrir une Pourquoi le village a-t-il été abandonné ? oreille et de fermer l’autre pour ne pas que ça sorte. J’ai aussi un livre familial qui remonte à dix L’ancien village a été abandonné parce qu’il y avait un gros cyclone qui l’a ravagé. Une grosse vague est générations avant moi. venue de l’océan, les gens se sont attachés aux cocotiers, mais des familles entières ont été emportées, et aussi les gens attrapèrent une maladie, la Je vais maintenant vous raconter l’origine de l’expression « Kura Ora ». lèpre, c’est pour cela qu’ils sont partis. Beaucoup de personnes sont mortes à ce moment-là, il restait peu de gens. L’ancien village est-il hanté ? L’ancien village n’est pas hanté, c’est aujourd’hui que les gens disent cela. Il faut seulement respecter le lieu. Un jour, un professeur, M. Cholleau, est parti couper un arbre à Punaruku, et il n’a pas respecté le lieu, alors l’arbre est tombé sur lui. Sur n’importe quel atoll, il faut respecter les histoires et les légendes, on peut y croire ou pas, mais quand les familles les racontent, il faut les retenir. Par exemple, à Marutea, un ancien village a aussi été détruit par un cyclone, et on dit qu’il est hanté. Ce mot veut dire « Bonjour », mais tout dépend de l’intonation. Un jour, à Punaruku, un pêcheur va au récif avec son fils. Il voit arriver un guerrier sauvage de Takapoto. Le pêcheur dit « Kura ora », qui veut dire « que tu vives », l’autre répond « Kura mate » qui veut dire « Je vais te tuer ». Le sauvage blesse le père et le fils. Mais le père défend son fils et tue le sauvage. Puis il revient blessé au village en disant : « il y a un sauvage ». Des gens de Anaa vivaient à Punaruku. Ils vont secourir le petit et ramènent le sauvage, l’attachent à un cocotier et font du javelot sur lui. Donc on ne dit plus « Kura ora », mais « Kia ora ». Aujourd’hui encore, pour les personnes âgées, l’intonation est importante. Si on dit « Kura ora » sur un ton brusque, on répond « Kura mate » ! Ravahere, Ura, Fakaariki 18