Makemo, Histoire et légendes

Transcription

Makemo, Histoire et légendes
N°5
Date : 06/02/2015
Les journalistes : la classe de 3e1
Avec la participation d’élèves de 4e1 et 4e2 pour la rubrique « Métiers »
Notre dossier :
Makemo, Histoire et légendes
1
Léon Tufaunui, mécanicien au CED
Le mercredi 19 novembre nous avons rencontré monsieur Léon Tufaunui pour lui poser des questions à
propos de la mécanique, dans son atelier au CED.
Quels débouchés peut-on avoir en faisant de la mécanique ?
Nos élèves de CAP ne trouvent pas de travail, mais
c’est très important pour la vie dans les atolls.
C’est un domaine très vaste : hors-bords, voitures, avions… Seulement les meilleurs auront du
travail, en allant le plus loin possible : bac pro.
Quelle est ta spécialité en mécanique ?
Comment es-tu devenu mécanicien ?
La mécanique générale, il faut savoir tout faire. Par exemple, réparer une porte de four à pain. Mais je fais surtout
Je suis devenu mécanicien à votre âge, grâce à mon
père qui bricolait. Je
voulais être autonome.
l’automobile : vidange, filtre à huile, freins,
pneus… Les voitures ont beaucoup évolué : avec l’
Après la 3e, j’ai passé
des véhicules automobiles.
électronique, il faut un scanner.
mon BEP
maintenance
Qu’est-ce que tu apprends
Qu’est-ce que tu aimes dans ce métier ?
J’aime « tâtonner », et toucher tout ce qui est
aux élèves à réparer ?
Les véhicules : pneus,
mécanique, je suis passionné dans mon travail, parce que j’aime bien faire de la récupération. Par
tuyaux de frein (faire une
soudure acétylène), utili-
exemple, j’ai fait remarcher le groupe d’Opareke.
Chez moi, j’ai un groupe vieux de 30 ans, j’ai
reçu de nouvelles pièces, et depuis ce temps-là il
ser le chalumeau…
fonctionne
toujours
(14 ans). J’ai récu-
Quels sont les risques dans ce
métier ?
péré la remorque de M.
Brasier. La réparation
a coûté 100 000 F, en
Tu peux même mourir si tu ne
fais pas attention. Je suis
très sévère sur la sécurité,
racheter une aurait
coûté 500 000 F. Aux
il faut toujours faire attention. Par exemple pour changer
Tuamotu, il
débrouiller.
faut
se
une roue, utiliser la tronçonneuse à métaux. Il faut porter des protections :
tablier, gants, chaussures.
Est-ce que ce métier permet de bien gagner sa vie ?
Oui, pour certains. J’ai travaillé chez Toyota,
Pour finir, M.
Dunlop. On gagne bien à Tahiti. Si un employé est
rentable, il peut avoir des augmentations. Il n’y
conseils : il faut être curieux, touche-à-tout. Les
Paumotu sont très manuels. Il faut être « bosseur »
a pas de secret : il faut vraiment bosser, être à
200 %.
tous les jours car nous sommes l’avenir des Tuamotu !
Rereata, Viriamu
2
Tufaunui
nous
a donné
quelques
Les pompiers de Makemo
Les pompiers d’aérodromes de Makemo sont venus au
collège pour répondre à nos questions. Les Pompiers sont : Pito Gustave (responsable), Frogier
Billy et Tauroura Raimana (itinérant).
Est-ce que c’est un métier difficile ?
Non si tu aimes ce métier et si tu connais bien le
matériel. Il faut être au point, toujours être prêt
physiquement
.
Dans quelles matières faut-il être bon ?
Il faut être bon en sport, avoir le niveau DNB en culture générale, un permis
côtier.
Quelle est la formation ?
Nous devons faire une visite médicale d’
aptitude après le concours. Puis nous devons faire une formation de 105 h en
France (3 semaines) à Châteauroux qui
permet de nous donner un diplôme agréé
par l’Etat. Il n’y a pas d’école en
Polynésie. Tous les 3 ans, nous faisons
un stage de 35 h en France. Tous les ans,
Comment as-tu fait pour être pompier ?
nous allons à une visite médicale et nous
maintenons des compétences en secourisme. Les for-
Donc d’abord j'ai suivi la formation des sapeurs
pompiers de Paris. J'ai passé le service militaire
mateurs locaux nous rendent visite une fois par an
pour les exercices. Nous avons un statut de fonc-
puis le concours. Les Conditions sont d’avoir le
permis poids lourds, le brevet national de secourisme (PSE1 – PSE2), et avoir entre 21 à 45 ans. Le
tionnaires territoriaux.
Concours est constitué de QCM de culture générale
et d'épreuves physiques.
Il y a eu le feu à la mairie, puis une fois, il y a
eu un petit incident d’avion, ou sinon, des feux
Quelles grosses interventions avez-vous faites ?
d’habitations.
Quel matériel utilises-tu ?
J'utilise le Camion VIM 24. Il contient 2400 litres
Que veulent dire les lettres SSLIA sur le camion ?
d’eau, 250 kg de poudre composée d'agents complémentaires pour éteindre le feu, 350 litres d’
Service de Sécurité et de Lutte contre les incendies dans les Aérodromes : le camion est aux nor-
émulseur avec de l’eau et de l’air : c’est la
mousse pour étouffer le feu. Nous avons des appareils respiratoires isolants pour aller dans les
mes.
avions en feu, une tronçonneuse pour couper l’
avion, des échelles, des tuyaux avec dévidoir, des
Les déplacements en France, les rencontres, découvrir différentes îles.
raccords, une bouteille de chasse avec du CO2 pour
amener la pression (baromètre à 15 bars). Sur le
C’est une passion : on aime la connaissance du matériel, les entraînements, on aime le sport. Il y a
toit, il y a une tourelle pour attaquer les feux
d’avions. Nous avons aussi du matériel de secourisme.
beaucoup d’attente, mais s’il y a un problème, il
faut dans les 3 minutes déployer 50 % des capacités. Nous devons sauver des vies humaines.
3
Quels sont les aspects positifs du métier ?
Etre moniteur de plongée
Mercredi 26 novembre 2014, nous avons fait un interview de Ludo sur le métier de moniteur de plongée. Nous sommes partis au club de plongée.
Quels sont les sites de plongée ?
Les sites de plongée sont la pas-
Comment es-tu devenu plongeur ?
Je suis devenu plongeur à mon arrivée en Polynésie
en découvrant les lagons, l’océan Pacifique.
têmes : Rikiriki. Il y a aussi la
pointe : Pohue.
se Arikitamiro : 4 sites, la 2e
passe : Tapuhiria. Pour les bap-
Il existe 2 voies différentes : une formation de
plongeur professionnel (travaux sous-marins) et une
Qu’est-ce que tu préfères dans la plongée ?
formation de plongée loisir, pour le plaisir
(encadrer des touristes). Pour être moniteur de
Je préfère avoir des relations avec les gens et
faire de nouvelles rencontres, faire de belles
plongée loisir en étant rémunéré, il faut passer le
brevet d’Etat et avoir une carte professionnelle. L’
apprentissage est long et coûteux, mais le centre
plongées et les partager. Par contre, je n’aime pas
le risque, la responsabilité si quelqu’un a un problème.
de plongée peut financer en échange du travail
fourni, ou des organismes comme le SEFI.
Y a-t-il des risques dans la plongée ?
Que découvres-tu dans la mer ?
Je découvre des poissons, le relief, des grottes,
Les dangers qu’il y a dans la plongée sont les dangers du milieu : la faune, les requins (mais pratiquement pas d’accidents), murènes, poissons pierres,
des canyons. Ce qu’on recherche surtout, c’est les
requins, les thons, les gros poissons (napoléons,
poissons scorpions, le fort courant ; mais surtout
les dangers liés à la plongée elle-même : les acci-
carangues…), mais aussi le corail, les petits poissons. Il y a peu de flore, les coraux font partie
dents de décompression, l’air qu’on respire peut
devenir toxique.
de la faune. A Makemo, on a un très beau corail et
beaucoup de poissons, mais on est loin de Tahiti.
Qu’as-tu comme bateau ?
J’ai un bateau de 24 pieds Blouin, homologué pour 7
plongeurs et un pilote, avec un moteur 150 chevaux.
Depuis combien de temps fais-tu ce métier ?
Depuis 23 ans. J’ai commencé à Tahiti.
Quels
sont
les
matériels
de
Quelle est la profondeur où tu plonges ?
plongée ?
La bouteille gonflée avec un
compresseur, le gilet qui se
La profondeur où je plonge c’est entre 0 et 60 m,
pas plus profond en plongée loisir.
gonfle et sert de bouée, le
détendeur, les palmes, le mas-
Est-ce que ça fait mal aux oreilles ?
Non, ça ne fait pas mal aux oreilles, c’est seule-
que, le tuba, la combinaison,
le couteau, le profondimètre,
les plombs, le parachute pour
ment si on est enrhumé ou si on fait mal l’
équilibrage.
se signaler.
A quels moments vas-tu plonger ?
Est-ce qu’on gagne sa vie avec ce métier ?
Lorsque j’ai des demandes, des clients. Quand le
courant est entrant, je vais dans la passe. Quand
il est sortant, je vais plonger vers l’extérieur.
Oui, mais c’est d’abord une passion. Il fait beaucoup d’investissements. S’il n’y a pas de plaisir,
ce n’est pas la peine de le faire.
Junior, Elodie, Jean-Baptiste, Poeragi
4
Le métier de greffeur
Le mercredi 19 novembre 2014, nous avons rencontré
monsieur Taiho pour lui poser des questions à propos de la perliculture.
port permet de mettre la nacre pour regarder.
Pour le greffon : on a des petits ciseaux pour le
Comment es-tu devenu
couper, une pince pour l’accrocher, une lame de 25,
comme un scalpel, pour le découper de façon bien
perliculteur ?
J’ai appris avec mes
parents. J’ai commen-
précise. Le pique-greffon permet de le prendre et l’
injecter dans la poche perlière.
Pour le nucléus : le couteau de greffe permet d’
cé à Ahe à l’âge de
15 ans. J’étais as-
inciser. Le porte-nucléus permet d’injecter. La spatule a un côté plat et un crochet pour écarter l’
sistant avec mon cousin. Puis j’ai com-
endroit où on fait l’incision. On range dans un boîtier les différentes tailles de nucléus, selon la
mencé à travailler
dans la
ferme de
Jean-Claude
Müller.
taille de la poche perlière
Le miroir sert à ne pas gaspiller les nacres : on
cherche une nacre porteuse de greffon, au lieu de
J’y suis resté pendant 12 ans puis j’ai
découper. On met le manteau sur des plastiques pour
le découper en carrés. C’est utilisé aussi pour les
monté ma ferme perlière depuis 2005. Pour devenir
greffeur, il faut travailler sur le tas. On est d’
abord assistant. On fait les chapelets et on les
greffes en chirurgie.
Pour les perles : on utilise un écarteur, un couteau (faucille) avec spatule et crochet, un anneau
met dans une protection. Le phytoplancton arrive
dans la protection. Quand la taille atteint 4 cm,
pour injecter la perle.
on fait un chapelet technique pour faire de l’
élevage. Il faut atteindre la taille de 8, 9 ou 10
Quels sont les différents types de perles ?
Les différents types de taille dépendent du choix
cm pour faire la greffe. L’assistant prépare l’
ouverture et coupe le byssus (ce qui s’accroche sur
le support et permet à la nacre de se situer dans
du nucléus, ordinaire ou bio. Il y a des petites
perles comme les keshis, formées seulement avec le
manteau. Il y a des perles rondes, en poires ou en
le courant). Puis je suis devenu greffonnier, je
devais découper le manteau pour obtenir un greffon.
boutons, cerclées, de basse qualité (rebuts). Les
perles cerclées sont dues aux impuretés quand tu
Et maintenant je suis greffeur.
Que fais-tu spécialement dans ce travail ?
injectes. Il est difficile d’être propre à 100 %.
Les petites sont de 1re greffe, les grosses sont de
surgreffe (2e greffe dans une même nacre).
Au début, je faisais tout : ouvrir, découper le
byssus, placer sur le support, faire l’opération
Les couleurs dépendent du greffon. Les qualités sont : A+, A, B, C. La qualité dépend de la
(incision et injection du nucléus). Le nucléus est
taillé dans un coquillage. Une entreprise taille
les formes. Le nucléus peut être marron ou blanc.
ferme, du lagon, du greffeur.
On injecte dans la gonade un morceau de manteau, le
greffon, et un nucléus. Quand on découpe le greffon, il faut qu’il reste frais. Si le manteau sèche,
la perle est de mauvaise qualité. La perle se forme
grâce au nucléus et au greffon.
De quel matériel as-tu besoin ?
On a les pinces (écarteur), qui servent à ouvrir et
voir la gonade pour couper le byssus. Le sup5
Est-ce que c’est un
métier difficile ?
Y a-t-il une formation pour devenir greffeur ?
Une école est basée à Rangiroa : le CMNP. On peut
Oui et non. Si tu n’
aimes pas ce métier,
être rémunéré.
c’est difficile, mais
si tu es passionné,
ce n’est pas diffici-
Noé, Teheimana
le.
De combien de nacres se compose un chapelet ?
Un chapelet fait 10 nœuds de 10 ou 20 nacres.
Le métier d’infirmière
Le mardi 18 novembre à 9h, nous sommes partis faire
un interview sur le métier d' infirmière avec madame Leroux à l' infirmerie.
d’infirmières et après au concours pour être infirmière dans la Marine nationale. J'ai fait 3 ans d’
études pour avoir mon diplôme d’Etat d’infirmière.
Est-ce que ce métier permet de bien gagner sa vie?
Oui, il permet de bien gagner sa vie, surtout à l’
hôpital. Nous sommes bien payées, il y a des primes
quand on travaille la nuit et le week-end. Mais il
faut être toujours disponible.
Qu’est-ce qui est difficile dans ce métier?
Quand tu travailles à l’hôpital, c'est difficile de
gérer la vie professionnelle et la vie familiale.
Tous les horaires changent souvent. La charge de
travail est
assez lourde
Pourquoi as-tu voulu devenir infirmière?
J’aime le contact humain et soigner les gens. J’aime
Quel matériel utilises-tu le plus souvent?
Le matériel que j’utilise souvent est : les compresses, de quoi faire des pansements, prendre la tem-
un métier où nous ne sommes pas enfermés et où on
sent qu’on sert à quelque chose.
pérature. Je me sers aussi de tout le matériel médical de base.
Est-ce que tes parents t’ont poussé à choisir un
Quels métiers peut-on avoir dans le milieu médi-
métier médical?
Non, pas du tout. Ma mère travaillait à la cantine
scolaire et mon père dans une usine de pneus et
cal ?
On peut avoir de nombreux métiers comme personnel
de service, brancardier (déplacer les malades), ai-
personne de ma famille dans le milieu médical .J’ai
moi-même voulu faire ça.
de-soignante, auxiliaire de puériculture (enfants).
Dans l’aide à la personne, il y a beaucoup de débouchés.
Comment es-tu devenue infirmière?
Après mon bac, j'ai participé aux concours d’écoles
6
Elodie, Vahine
M. Manuireva, enseignant et apiculteur
M. Martin Manuireva nous a montré comment on élevait des abeilles pour avoir du miel. Il a apporté
les éléments d’une ruche et les a assemblés devant
nous. A la fin de la démonstration, chacun d’entre
nous a eu droit à une petite bouteille de miel !
construisent elles-mêmes les alvéoles en forme d’
hexagones réguliers : c’est la meilleure forme pour
avoir le plus de solidité avec le moins de matériau
(ex : ailes d’avion).
Comment as-tu appris à être apiculteur ?
Les abeilles remplissent les alvéoles de miel, les
alvéoles servent aussi à la reine pour pondre ses
œufs. Quand le miel est bon, elles ferment les al-
C’est venu par hasard. Un ami m’a emmené faire du
miel. Ça fait six ans maintenant.
véoles. On peut voir dessus le pollen récolté sur
les fleurs de cocotier.
Comment as-tu attiré les abeilles dans la ruche ?
On met encore une autre hausse avec 10 cadres quand
la colonie bien développée. Les deux premières
Il faut déjà avoir une colonie qu’on trouve dans la
nature, on la met dans une autre ruche et on fabrique une reine (secret professionnel !).
hausses sont pour les abeilles, les larves, les
œufs. On place une grille à reine pour empêcher la
reine de remonter dans la 3e hausse et d’y pondre
Est-ce qu’il y a des risques dans ce métier ?
des œufs.
Dans la 3e hausse, on n’a que du miel, c’est pour l’
Oui, si on est allergique aux piqûres d’abeilles, il
ne faut pas le faire.
apiculteur. On ajoute un couvre-cadre, un toit, et
la ruche est complète.
Une colonie complète comprend 60 000 à 80 000
Est-ce qu’être apiculteur permet de gagner sa vie ?
Oui, on peut gagner sa vie. En Polynésie, on manque
abeilles, dont 1 reine, 2000 mâles, et des ouvrières.
d’apiculteurs.
Marc, Jean
Est-ce que tu connais des recettes avec du miel ?
Ça peut remplacer le sucre, par exemple dans la
sauce sashimi, les gâteaux au miel… On peut aussi guérir les blessures et les brûlures avec le
miel.
Y a-t-il des formations d’apiculteur ?
Il n’y a pas d’école, mais il y a des stages de
formation dans les communes.
Qu’est-ce qui fait un bon miel ?
C’est l’environnement, ça dépend des fleurs. Aux
Tuamotu, ce sont les fleurs de cocotier et le
kahaia.
Et maintenant, peux-tu nous montrer comment on
élève des abeilles ?
Dans les îles, il faut être bricoleur, tout faire
soi-même.
On fait d’abord un support, on y met un plateau
d’envol, puis une hausse, constituée de 10 cadres
en bois, avec des feuilles de cire. Les abeilles
Source : Une ruche au jardin, Henri Clément
7
La journée polynésienne
Au début du mois de décembre 2014, nous avons interviewé Mme Selam, professeur de français et de
reo maohi pour nous rappeler l’importance de notre
journée polynésienne.
Dans ton ancien collège, organisiez-vous une journée polynésienne ?
Dans mon ancien collège de Tipaerui qui compte mille élèves, les journées étaient grandioses, avec
plus de moyens humains et financiers.
Quel est le sens de l’organisation de la journée
polynésienne ?
Prends-tu des décisions toute seule ou avec d’autres
Elle fait partie de l’axe 1 du projet d’
établissement de cette année. En plus, cette jour-
personnes en particulier ?
Ce n’est pas possible de décider seule pour un pro-
née est officielle et est célébrée dans tous les
établissements scolaires de la Polynésie française.
Nous nous devions donc au sein de l’équipe de l’
jet d’une telle envergure. D’ailleurs, heureusement
que toute l’équipe est présente, ce qui permet un
bon fonctionnement.
organiser chaque année. Et on peut dire que c’est
une réussite.
Pour qui est organisée cette journée polynésienne ?
En quoi consiste cette journée polynésienne ?
Elle met en avant la culture polynésienne sous tou-
En permier lieu pour les élèves, ensuite pour notre
établissement et aussi pour valoriser notre culture, nos talents et l’amour de notre fenua !
tes ses facettes : danses, chants, déclamation de
textes anciens traditionnels.
Temanutea, Teragi, Poura
Pourquoi avez-vous décidé de faire des groupes ?
Cette année, l’équipe a décidé de faire différent en
organisant un concours entre atolls. Chaque atoll
devait présenter des spécificités de son île et cela a été une réussite.
8
Le korero
Quels sont les types
de koreros ?
Il y a 3 types de
koreros : Paepae, on
raconte une histoire;
fakatara, il y a des
chants à l’intérieur;
fakatiri, en langue
ancienne.
Nous avons rencontré Maro Milton pendant la journée
polynésienne pour poser des questions sur les korero.
Le classement est le suivant :
1 : Revatua
2 : Raumanu
3 : Utahia
Comment faites-vous pour choisir les meilleurs candidats ?
Ils ont été choisis par les professeurs du collège.
Quels sont vos critères ?
Nos critères pour noter sont : la langue, le texte,
l’articulation, le placement de la voix, l’émotion,
l’interprétation, la façon de se tenir sur scène, le
regard, le costume. La perte de mémoire n’est pas ce
qui sanctionne le plus.
Pourquoi vous a-t-on choisi comme jury ?
Je suis adjoint au maire chargé de la culture et
des festivités. J’ai été président à plusieurs reprises du jury du heiva, mais c’est la première fois
au collège.
Est-ce que c’est difficile ?
J’ai l’habitude. De toutes façons, il faut choisir.
Est-ce que c’est important pour toi d’être jury ?
Oui, c’est important.
Quelles sont les qualités de la gagnante ?
La façon de poser la voix, la gestuelle. Elle a récité un texte ancien.
9
Que penses-tu de la
prestation de Tutavake ?
Il y avait beaucoup d’émotion. Tout était bien fait.
David, Tamati
Le cross de Polynésie
Le jeudi 5 décembre 2014, les élèves du collège de
Makemo ont été accompagnés par M. Brasier pour participer à un grand concours de cross à l’hippodrome
de Tahiti.
tains avaient peur de perdre mais on s’est ressaisis
parce que nous étions venus au cross pour participer.
Pendant la course, on a entendu la voix de M. Bra-
Nous devons rejoindre la
course à 8h30, sinon on
sier qui nous a encouragés avec un
énorme cri et il nous a dit : « Ne
perdez pas espoir ! Allez Makemo !! A
serait disqualifiés. 1438
élèves ont participé au
pupuhi (foncez) ! » Et après avoir
entendu la voix de M. Brasier, nous
cross. Tout d’abord, la
course a débuté par caté-
avons foncé jusqu’à la ligne d’arrivée
et nous sommes arrivés parmi les dix
gories, des plus petits
aux plus grands. Les poussins ont débuté et plu-
premiers. Nous étions tellement fatigués que nous ne pouvions plus respirer. On ne sentait plus nos jambes.
sieurs d’entre eux ont
arrêté, certains étaient
Mais un des nôtres était toujours en
forme et c’était Rémy. Après, notre M.
blessés. Après, c’était
les benjamins et minimes. C’était souvent des courses avec des croche-pieds et des coups de coude. Il
Brasier est venu nous féliciter parce
qu’il avait cru que nous serions parmi les derniers,
mais il s’était complètement trompé.
y a même eu beaucoup de blessés.
Ensuite nous entrons dans la course avec les cadets
Rémy, Hautearii, Jean-Pierre
et les cadettes. Le départ est donné avec un pistolet. Beaucoup d’entre nous étaient stressés, cer-
Le tournoi de rugby
Yoyo Frogier. Puis il nous a
annoncé les équipes. Il y
avait Makemo contre Faa’a pour
le premier match, Rangiroa
contre Pirae pour le deuxième
match. Il y a eu beaucoup d’
essais, 1 partout contre Tefana, 3 essais contre Rangiroa,
3 essais à 1 contre Pirae.
Une équipe du collège a participé au tournoi de
rugby à 7 organisé à Tahiti, au stade de Fautaua.
Il y avait quatre équipes, Pirae, Makemo, Tefana,
Rangiroa.
Mais il y a eu aussi des blessés, 2 blessés de Rangiroa quand ils ont joué
contre Tefana.
Au moment où nous avons joué notre match contre Faa’
a, nous avons eu le stress parce qu’il y avait beau-
Pour démarrer le tournoi de rugby, nous avons com-
coup de supporters pour Faa’a. Et à la finale contre
Pirae, nous avons cru que nous allions les aplatir
mencé par une petite prière qui a été faite par
parce qu’ils étaient petits.
10
Mais c’était notre match le plus dur, ils étaient
tellement rapides que nous n’avons pas pu les tenir.
supporters de Faa’a sont venus nous féliciter pour
notre victoire contre eux.
Ils avaient l’avantage avec le n°11 par rapport à
son gabarit. Notre coach a hurlé pour nous replacer
Tuaka, Ronny, Damien
en lignes. Mais c’était trop tard, ils nous ont mis
4 essais ! A la fin du match, nous sommes retournés
voir notre coach et il n’avait plus de voix… Et les
Tavae, Si loin du monde
Si loin du monde de Tavae Raioaoa est une histoire
vraie.
Tavae a dérivé pendant 118 jours.
Pour survivre, il pêchait un poisson. Il le mangeait cru et il aspirait le peu d’eau qui était à l’
intérieur des arêtes pour s’hydrater.
Pendant son naufrage, il parlait à sa femme, aux
petits poissons, à Dieu et aux ancêtres. Il vit même des orques, un thonier et un avion.
Ce qui nous a plu dans cette histoire, c’est son
courage. Il gardait toujours l’espoir de retrouver
son île et sa famille. Chaque jour, il s’
encourageait pour survivre même si quelquefois il
pensait de façon négative.
Même quand il était faible, il pêchait pour se
nourrir. Nous avons éprouvé une immense pitié.
La façon dont l’histoire est racontée est très simple, mais elle est pleine de suspense.
Nous vous conseillons de le lire !
Haumata, Ninirei
11
Dans ce journal, les élèves de 3e1 ont choisi le thème des légendes et de l’histoire de Makemo pour que
les nouvelles générations puissent connaître les légendes de leur atoll. M. Florian Prévost est venu l’an
dernier pour interviewer les anciens de Makemo afin d’en savoir plus sur les légendes de notre atoll,
dans le cadre de son master. Avant les vacances de décembre, il a bien voulu venir nous parler plus en
détail de la légende des baleines, de celle de Moeava et de celle des Mokorea.
Moeava et Patira
Moeava est le héros le plus célèbre de Makemo. Voici son histoire.
Moeava vit avec sa famille à Napuka. Il est toujours en pirogue pour affronter des guerriers d’autres atolls. Un jour, le
géant Patira vole la femme de Moeava, appelée Huarei, qui
est la reine de Napuka. Il peut faire en un seul pas la distance de Katiu à Makemo. Moeava s’en aperçoit : il le voit passer. Il le provoque et lui propose de se battre à Makemo. Patira a un pied à Vainatika, un autre à Orori. Moeava prend
son lance-pierre et lance une pierre sur Patira. Le géant tombe
dans la direction de Taenga.
Puis Moeava offre la tête de Patira à son fils Kehauri. Le
corps est mis dans un ahimaa pour être mangé. La bande de
Patira tue la famille de Moeava à Napuka puis va à Punaruku. Moeava revient donc à Makemo pour se venger. Il règle le
compte de tout le monde. Il prend des mikimiki et fait des
brochettes de guerriers pendant qu’ils dorment, et repart à
Napuka avec la bande de Patira derrière sa pirogue. Après
cette deuxième vengeance, il a vécu tranquille. Tous ceux de
Napuka seraient les descendants de Moeava et Huarei.
la légende, à Terehega (« récif côté extérieur »),
vers Tepohue, mais côté récif. « Tepohue » est le
nom de la liane (« pohue ») pour faire le lancepierres (« maka »). La pierre s’appelle « amiomio o
te ragi » (« qui vient du ciel »). Cette pierre a
été amenée de Tahiti aux Tuamotu par Honoura, un
autre grand guerrier de Tahiti.
Le four où Patira a été cuit aurait servi aussi
pour les baleines.
Moeava est le plus grand guerrier des Tuamotu ! Il
est resté aux Tuamotu, alors que Honoura a fait la
guerre partout.
Elisabeth, Béatrice, Haunui
L’histoire et la légende...
Moeava : C’est un guerrier qui a vraiment existé,
vers les années 1600 (selon les généalogies). Il
est descendant d’une famille de guerriers de Takaroa. Son histoire nous montre qu’on pouvait faire de
très grandes distances en pirogue. Moeava pouvait
faire 400 km en 4 jours, de Napuka à Makemo. Il n’y
avait pas de voile, seulement une rame.
Patira : Il viendrait des îles sous le vent. Il enlève Huarei pour avoir le pouvoir. Les grands guerriers volaient les femmes qui avaient du pouvoir pour contrôler les Tuamotu.
Makemo : Ils se battent à Makemo parce qu’il y avait
un endroit pour combattre, un tahua (place, arène)
vers le trou des baleines.
La pierre serait toujours visible à Makemo, selon
12
Illustration de Patrice Cablat, tirée d’Histoires et légendes des temps anciens de Tahiti et des îles , Emy-Louis
Dufour, Au vent des îles
La légende des baleines
Nous avons ensuite posé des questions à Florian à
propos de la légende des baleines de Makemo.
l’autre côté de la passe.
Comment s’est transmise cette légende ?
La légende existe-t-elle ailleurs ?
Oui, elle existe ailleurs dans le Pacifique, en
Nouvelle-Zélande, aux Fidji, aux Samoa.
Cette légende a été transmise à l’oral, donc il y a
plusieurs versions. Elle s’est transmise de génération en génération par les descendants de Kapea
Quelle était la méthode pour capturer les balei-
jusqu’à aujourd’hui. Depuis 300 ans, elle s’est
transformée.
nes ?
Quelles sont les sources pour connaître cette léLa méthode pour capturer les baleines est vraie.
Ils entouraient la baleine avec leurs pirogues et
un guerrier sautait sur la baleine. Le guerrier di-
gende ?
rigeait la baleine sur le banc de sable, le récif.
Le plus grand dompteur de baleines est Kapea.
teo Pahipa, Mairoto Mihimere et Tangi Apereto. Il y
a toujours des traces de la légende à Makemo.
Qu’est-ce que ça nous apprend sur l’histoire des
Tuamotu ?
« Rotoparoa » veut dire « intérieur de la baleine »
et « Vaipuna », « « se cacher dans un trou sousmarin ». Il y a même un ahima’a, un grand four tra-
Ça nous apprend qu’il y a eu une liaison entre les
ditionnel, qui serait toujours visible. Cet ahima’a
aurait servi à cuire les baleines, ce serait le mê-
Je me suis basé sur trois sources : celles de Timo-
Tuamotu et la Nouvelle-Zélande il y a environ 300
ans. Les Maoris viennent des Tuamotu. Les Paumotus
me qui aurait servi à faire cuire le géant Patira.
sont venus en Nouvelle-Zélande en pirogue. On retrouve même nos noms de famille en NouvelleZélande.
Les baleines entrent-elles encore dans le lagon ?
Les baleines entrent encore souvent dans le lagon.
En 1997, une baleine s’est échouée à l’endroit de
la légende, Pohue, et avec les vertèbres, on a fait
Qui était Kae ?
de l’artisanat.
Kae, ou Okae, montait sur les baleines. Il se mélange avec le personnage de Kapea, qui serait un
Ninirei, Haumata, Robert
sorcier originaire de Makemo. Il a même un marae de
Le mythe des baleines de Makemo
« Les baleines venaient en troupeau dans le lagon de Makemo, elles étaient guidées. L’homme qui guidait les baleines, son nom était Okae, il naviguait sur le dos des baleines. Okae était accompagné par deux femmes. Ils entraînaient les baleines à Vaihumu qui est l’ancien nom du Roto Paraoa, il y a un chemin entre les bancs de sable pour
que les baleines puissent s’y rendre [cf. comme un chenal au nord de Vaihumu]. Là, Okae choisissait l’une d’entre
elles pour qu’elle soit mangée. La baleine se sachant choisie allait se cacher sous le troupeau mais après elle acceptait
son sort et remontait à la surface. Elle était ensuite tuée au harpon puis amenée à Tepohue où elle était ensuite mise
au four de terre puis mangée par les habitants de Makemo. »
Récit mis en forme par Florian Prévost à partir d'entretiens réalisés avec Mere Mairoto, Apereto Tangi et Pahipa Timoteo. Extrait de "Eléments
d'ethnohistoire de Makemo", Florian Prévost, Mémoire de Master 2 LCSO, UPF, p. 74
13
Les Mokorea
Qui étaient les Mokorea ?
océan sans sa bourre.
« Vainatika » signifie « extrémité ». Vers 1800, une
Les Maokorea n’étaient pas des sirènes, c’était une vingtaine de personnes habitaient là-bas.
sorte de monstre poilu, avec de longs cheveux, de Certaines personnes de Makmo disent qu’ils ont déjà
longues griffes d’au moins trois mètres de long pour vu des Mokorea.
chasser le poisson et pour ouvrir le ventre des mères.
La légende existe-t-elle ailleurs ?
Ces créatures
du Po (monde
viennent
du des-
La
légende
existe
sous).
Les
Mokorea
étaient aussi bien des
dans tous les atolls
des
Tuamotu;
aux
hommes que des femmes.
Ils montent à la surface pour aller chercher
Australes où les Mokorea ont des écailles de poisson; à
un homme ou une femme
pour
leur
apprendre
Huahine.
A Faaite, Hao et Fa-
comment sortir du ventre un bébé Mokorea.
Car leur méthode est de
karava, les Mokorea
sont situés dans des
kokos,
des
trous
couper le ventre de la
mère, et la mère meurt.
dans le récif.
A Anaa, ils passent
Ils ont le pouvoir de
respirer sous l’eau et
par une grotte.
de changer d’apparence
quand ils sont à la
surface. Ils remontent
Ronny, Damien
à la surface pour aller
pêcher du poisson ou
voler la nourriture des
paysans (pommes de terre, patates douces, manioc…). Quand ils
font prendre, ils
se
se
font massacrer par les
hommes qui les attachent sur un cocotier Jean-Louis Saquet in "Les Mokorea", Corinne McKittrick, BSEOn°320,
p. 23
et les brûlent vifs.
Vainatika, le trou des Mokorea
Il y a un proverbe qui dit que « pour être de Makemo, il faut sauter dans le trou ». Le trou est directement relié à l’océan. Pour le prouver, on peut
mettre un coco dans le trou, et il ressort dans l’
14
Nous sommes également allés voir les anciens, Tagi Apereto, qui nous a parlé de son expérience de compositeur, et Tapi Sylvain, qui nous a raconté comment était Makemo dans sa jeunesse. Nous avons aussi rencontré des personnes qui en savent beaucoup grâce à leur famille, comme Moeata Citot, qui a évoqué l’
ancien village, et Frédéric Tapi, qui sait parler le « tutae auri ».
M. Tagi
Mercredi 26 novembre 2014, nous avons rencontré M.
Tagi Apereto, sous un arbre, chez lui. C’est maintenant un vieux monsieur dans un fauteuil roulant. Il
nous a accueilli avec hospitalité. Il nous a parlé
de sa jeunesse de compositeur. M. Tagi a passé son
enfance à lire d’anciens livres, notamment de Philippe Forte.
korero en 1965 à la demande du maire, M. Mariteragi
Tiave, comme « Makemo roa hua » ou « Arikitamiro »,
qui est depuis longtemps chanté par l’école primaire
de Makemo.
Il a composé environ 40 chants dont 3 chants en
français. Il composait souvent pour des mariages ou
Son père était diacre à l’église de Makemo et sa
le heiva. Il accompagnait souvent ses chants avec
une guitare ou un ukulélé.
mère faisait l’entretien des mandariniers, des
plants de maïs, et l’entretien général de l’église.
Aujourd’hui, M. Tagi Apereto continue à écrire des
Et M. Tagi était pianiste à l’église en 1950. En
1952, il y a eu une houle qui a ravagé toutes les
plantations derrière l’église.
chants, mais ses chants ne sont plus transmis. Il
Il a commencé à composer ses chants ainsi que ses
Temanutea, Teragi, Poura
écrit ses chants sur demande, mais il écrit pour
lui.
Deux chants de M. Tagi Apereto
Makemo roa hua
Arikitamiro
Makemo roa hua kitai tugata patia raina
Kitai varevare e aha ra Makemo
Vai ihoa Makemo ei tumu.
Mate fakatika ane no te faka tere
E vai tei te vaegahaga tika te henua
Hopuhopura’a ia note Mokorea
No reira teie fenua topa hia tona ioa o Vainatika
Tei te topara’a ote mahana i te hopea I raro I
Makemo
E komo Mokorea to ratou ia hopura’a e
E ua ma to tino te vahine Mokorea
Makemo il y a 60 ans...
Le village
Thomas, tout était un espace vide avec l’eau de mer
qui venait jusqu’à la maison de M. Tapi. En 1989,
Selon M. Tapi, il y avait à l’ancien village, Punaruku, une centaine de personnes. Mais son père
cet espace a été remblayé avec des cailloux et du
sable par M. Tiave.
était déjà ici. Makemo était il y a 60 ans une île
naturelle. Il n’y avait pas de quai qui la protégeait de la houle. La mairie n’était pas encore
Il n’y avait rien autour du phare, on pouvait rentrer dedans comme une maison. Les maisons étaient
de construction traditionnelle, en bois.
construite, ni le phare. De la mairie au magasin
15
Makemo il y a 60 ans...
pêchait seulement au coupe-coupe. On grattait dans
l’eau pour chasser les poissons au bord, dans les
parcs à poissons. Les rori (concombres) étaient
frottés dans l’eau : le liquide rouge est toxique et
tue les poissons. Le matériel de pêche est arrivé
seulement dans les années 70 : pupuhi, cannes, masques. Pour les nacres, on faisait des lunettes avec
du verre taillé.
L’environnement était plus présent qu’en ce moment.
La maison communale
C’était mieux avant, il n’y avait pas de structures,
que la nature, plein de poissons.
Les déplacements
Aux temps anciens, les déplacements étaient très
difficiles pour les habitants de Makemo. Ils se dé-
Les marchandises étaient importées par des goélettes. Le « Hotumaru » venait vendre sa marchandise.
Il n’y avait pas de magasin, on achetait directement
plaçaient en pirogue pour aller au secteur. La rou-
sur le bateau, on mettait dans la baleinière. La
vie était stricte : on avait seulement droit à 1
litre de vin par maison, et pas d’autre alcool.
Les parents étaient très sévères, mais les enfants
plus heureux. On était plus libres. L’école était à
la mairie, il y avait une trentaine d’élèves. Tous
les élèves s’arrêtaient au CM avec le certificat d’
études, les professeurs étaient M. Thomas Tupahururu (1970), la mère de M. Tapi (1960). La mère de M.
Tapi a été la 1re institutrice, et elle était aussi
infirmière et radio.
Le village, côté lagon
Les légendes
Les légendes étaient racontées de génération en gé-
te n’existait pas. Les prêtres l’ont construite avec
les paroissiens : tout le monde a participé au dé-
nération, les versions ont changé. M. Tapi a le nom
de tous ses ancêtres dans sa mémoire.
La légende des baleines était extraordinaire, il y
frichage, tous les jours, pendant plusieurs années.
La piste a été finie vers 1980, mais elle n’était
avait Kapea qui pouvait dompter les baleines. Il
les attirait avec un instrument, il s’approchait
pas goudronnée.
Le transport aérien se faisait avec un hydravion.
Dans les années 70, le CEP (centre d’expérimentation
puis il montait sur son dos. Avant, les baleines
étaient plus présentes dans le lagon, on en voyait
tous les jours.
nucléaire) s’est installé , avec des logements, des
bateaux militaires.
Le mode de vie
Avant, la pêche était beaucoup pratiquée parce qu’en
ce temps là, il n’y avait pas de travail à faire
pour gagner de l’argent. Bien après est venue la
coprahculture pour aider les gens sans travail. On
16
Le phare, construit en 1936
Il y a des marae à Pohue, à la pension. M. Tapi et
Fred Torrente, professeur d’université, sont allés
attrapée, elle est restée en haut pendant un mois,
elle est retournée sous l’eau, et les Mokorea ont
voir celui qui est de l’autre côté de la passe.
Le trou des Mokorea se trouvait à Vainatika. Cette
remercié avec des poissons.
Le nom de la passe était Arikitamiro, le courant s’
légende était beaucoup racontée. Il y avait des habitants là-bas. On racontait qu’une femme Mokorea
rêvait de voir les accouchements sur terre. On l’a
appelait Pekahikura. Les îles jumelles de Napahere
étaient appelées Teratagi et Ruapuni.
David, Robert
Le « reo tutae auri » : ...
Comment cette connaissance s’
est-elle transmise jusqu’à
Connais-tu des récitations dans cette langue ?
Non, mais on en connaît peut-être à Napuka, où les
toi ?
Quand j’étais jeune, j’allais
Anciens étaient très poétiques. C’était aussi des
guerriers.
toujours avec les vieux du village pour apprendre des choses.
Connais-tu l’histoire de Moeava et Patira ?
Chacun a sa version. La mienne est celle de Raihi-
A qui servait cette langue ?
D’abord, il faut distinguer le
ti, un grand-père qui vient de mourir.
Au 16e-17e siècle vivait une très belle reine, Hina,
tutae auri et le paumotu pur.
Aux Tuamotu, il y avait 7 lan-
une de mes ancêtres. Moeava était un dieu de Napuka
et Hao, un guerrier. Il était amoureux de Hina. Pa-
gues, une pour chaque secteur.
Le tutae auri servait aux guerriers. Il est très différent de
tira, qui est un géant, aussi. Moeva lui lance un
défi. Patira y va en un seul pas. Moeava réfléchit
pendant tout le trajet. Il arrive sur Otiri
la langue de tous les jours. C’
est une langue codée, pour que les adversaires ne
(Otitoi). Il lève les yeux et voit les « boules »
de Patira. Il fabrique un maka (lance-pierres). Il
comprennent pas.
Par exemple, iaorana devient iaora – pa- na.
E (oui) devient e – pe (= ke-pe en vrai paumotu).
est grand aussi, fort. Il tue Patira en touchant
ses deux « boules ». Patira tombe entre Marutea et
Makemo. La pierre a formé le trou des baleines. Pa-
Oia (oui) devient oi-pi-a (= koi-pi-a).
Aore (non) devient ao-po-re (= ka-po-re).
tira a été mangé dans un four.
Est-ce que cette langue est différente de celle d’
Que sait-on sur la guerre et les guerriers ?
Makemo était allié avec tous les atolls, sauf Tata-
aujourd’hui ?
Oui, elle est très différente. Le pur paumotu est
déjà très différent. Aujourd’hui, on mélange plu-
koto, qui était un atoll ennemi. Par exemple, en
arrivant dans un nouveau lieu, pour pêcher, il fallait se battre pour en mériter le droit. Toutes les
sieurs langues : paumotu, français, tahitien. Il y
a 30 ans, la langue pure était celle de tous les
îles sont taboues. On faisait la guerre pour le
pouvoir, la pêche, les femmes. A Anaa, il y avait
jours. C’était le langage des ancêtres.
Avant, les guerriers sortaient de leur île en pirogue à voile. Ils gardaient toujours le contact avec
beaucoup de sorciers, qui utilisaient la magie.
Le dernier guerrier de Makemo (Taha’e) a vécu au 18e
ou au 19e siècle. Il s’est battu contre le grand
leur île spirituellement. Ils avaient des connaissances, et grâce à la lecture de la nature (arbres,
guerrier de Tatakoto. La paix était revenue, les
goélettes popa’a faisaient des tournées, mais à Ta-
poissons, étoiles…), ils pouvaient savoir ce qui
les attendait.
takoto, on vivait encore comme aux temps anciens.
Les guerriers paumotu mangeaient les autres guerriers !
Elisabeth, Béatrice, Haunui
17
L’ancien village, Punaruku
Pourquoi le village était-il à cet emplacement ?
Tout d’abord, chaque famille a sa version. Mes
Que faire s’il y a un cyclone ?
Les vagues venant du lagon sont inoffensives, mais
grands-parents me disaient que la terre y était
fertile. « Punaruku » veut dire « fertilité ». La
quand les vagues viennent du large, il faut prendre
ses précautions. Maintenant, on sait quand un cy-
terre y est plus large.
clone arrive, mais aux temps anciens, on savait
tout avec la lune, le soleil, le vent, pour le coprah, la pêche, pour planter. Moi-même, je me base
encore sur le soleil.
Comment se sont transmises les légendes ?
Les légendes se sont transmises à l’oral, de génération en génération. Avant, il n’y avait pas de télé,
pas de radio… On allait à l’école et au coprah. Le
soir, on s’asseyait, et les grands-parents racontaient les histoires et légendes d’ici. Mon grand
-père écrivait tout sur le sable. J’ai appris à
écrire avec un oursin mauve comme crayon, sur des
pierres blanches et lisses. On apprenait la généalogie. Mon grand-père nous disait d’ouvrir une
Pourquoi le village a-t-il été abandonné ?
oreille et de fermer l’autre pour ne pas que ça sorte. J’ai aussi un livre familial qui remonte à dix
L’ancien village a été abandonné parce qu’il y avait
un gros cyclone qui l’a ravagé. Une grosse vague est
générations avant moi.
venue de l’océan, les gens se sont attachés aux cocotiers, mais des familles entières ont été emportées, et aussi les gens attrapèrent une maladie, la
Je vais maintenant vous raconter l’origine de
l’expression « Kura Ora ».
lèpre, c’est pour cela qu’ils sont partis. Beaucoup
de personnes sont mortes à ce moment-là, il restait
peu de gens.
L’ancien village est-il hanté ?
L’ancien village n’est pas hanté, c’est aujourd’hui
que les gens disent cela. Il faut seulement respecter le lieu. Un jour, un professeur, M. Cholleau,
est parti couper un arbre à Punaruku, et il n’a pas
respecté le lieu, alors l’arbre est tombé sur lui.
Sur n’importe quel atoll, il faut respecter les histoires et les légendes, on peut y croire ou pas,
mais quand les familles les racontent, il faut les
retenir. Par exemple, à Marutea, un ancien village
a aussi été détruit par un cyclone, et on dit qu’il
est hanté.
Ce mot veut dire « Bonjour », mais tout dépend
de l’intonation. Un jour, à Punaruku, un pêcheur va au récif avec son fils. Il voit arriver un
guerrier sauvage de Takapoto. Le pêcheur dit
« Kura ora », qui veut dire « que tu vives », l’autre répond « Kura mate » qui veut dire « Je vais
te tuer ». Le sauvage blesse le père et le fils. Mais
le père défend son fils et tue le sauvage. Puis il
revient blessé au village en disant : « il y a un
sauvage ». Des gens de Anaa vivaient à Punaruku. Ils vont secourir le petit et ramènent le
sauvage, l’attachent à un cocotier et font du javelot sur lui.
Donc on ne dit plus « Kura ora », mais « Kia
ora ». Aujourd’hui encore, pour les personnes
âgées, l’intonation est importante. Si on dit
« Kura ora » sur un ton brusque, on répond
« Kura mate » !
Ravahere, Ura, Fakaariki
18

Documents pareils