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Dialogues
0123
Dimanche 25 - Lundi 26 mars 2007
Images
du « Monde »
Médiatrice
Véronique Maurus
T
ordons d’emblée le cou à une
légende : Le Monde n’a pas
toujours refusé la photographie. Il y est venu tard et à
tout petits pas. La première
photo a été publiée le 3 mars
1949 et annonçait le Salon des arts ménagers, la deuxième, sept mois plus tard, le
Salon de l’automobile. Pendant un quart
de siècle, l’image, vue comme un accessoire coûteux et un peu futile, resta cantonnée aux loisirs, à la mode, à la télévision.
Elle ne gagna, timidement, l’actualité que
le 22 septembre 1974 sous le titre : « La
photo de la semaine » (en l’occurrence
une manifestation antijaponaise à Séoul),
et ne conquit la « une » que le 27 décembre 1983, pour la mort de Joan Miro.
Le vrai tournant n’a été pris que fort
récemment, en novembre 2005, avec la
nouvelle formule conçue par Eric Fottorino. La photo, devenue une information
à part entière, mérite désormais sa place à
la « une » comme dans les pages d’actualité. Bousculant une culture bien ancrée,
cette révolution de palais ne s’est pas faite
sans grognements. Au sein de la rédaction comme parmi les lecteurs, les nostalgiques de l’ancien Monde ont beaucoup
regretté la « place perdue » par la nouvelle maquette, ses gros titres et ses images.
Mais le pari semble aujourd’hui gagné.
Le journal reçoit encore, de-ci de-là,
quelques lettres déplorant « l’utilisation
aussi excessive qu’inutile que [Le Monde]
fait de la photographie » (M. Le Gendre,
Milan, Italie), ou regrettant, comme
Anne Guérin (courriel), que « des articles
parfois passionnants [soient] réduits à la
portion congrue, le reste étant mangé par
une énorme photographie ». Mais elles se
font rares. Semaine après semaine, les
regrets cèdent la place aux critiques, de
plus en plus affûtées. Les images sont
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désormais scrutées comme les articles et,
comme eux, surinterprétées. Preuve, s’il
en faut, qu’elles intéressent et même passionnent en ces temps de fièvre électorale.
« Une des photos, choisie pour illustrer
un article consacré à Ségolène Royal,
m’amuse, écrit par exemple Philippe
Delaite (Liège, Belgique). Elle me fait
immanquablement penser à une malheureuse religieuse – Sœur Marie-Ségolène de
l’Immaculée Conception – égarée, seule,
loin de son couvent. » Rassurons notre lecteur belge : il n’y avait dans cette image
aucune malice. Prise, en exclusivité pour
Le Monde, quelques minutes avant une
interview parue le 6 mars, elle ne témoignait que d’une chose : le trac intense de
la candidate.
Les stars de la politique verrouillent de
plus en plus leur image. « Ségolène Royal
a interdit qu’on la saisisse en train de manger et Nicolas Sarkozy a imposé un cordon
de sécurité autour de lui pour éviter “l’effet
grand angle” des photos prises de très près,
explique Frédérique Deschamps, responsable de la photo, mais, à l’exception de
François Bayrou, qui entretient un rapport
de charme avec les photographes, ils sont
souvent très mal à l’aise seuls, face à face
avec un professionnel. » Un malaise aggravé par le temps, trop bref, qu’ils accordent à la prise de vue. « Ségolène Royal, ce
jour-là, n’avait donné que huit minutes à
la photographe, celle-ci a fait de son mieux
pour la détendre, mais elle était pétrifiée,
hyper stressée. Ça se voit. Nous ne cherchons pas à fabriquer une image, c’est elle
Mugabe par Joep Bertrams
Aucourrier
deslecteurs
La phrase de trop
Dans un article relatif à Yves Bot
(Le Monde du 16 mars), je lis cette
phrase superbe de contradiction
« “C’est un magistrat politique”,
tranche Dominique Barella, ancien
président de l’Union syndicale des
magistrats, aujourd’hui conseiller
de Ségolène Royal. » Autrement
dit, Dominique Barella, magistrat, aujourd’hui conseiller de
Ségolène Royal, reproche à Yves
Bot d’être un magistrat politique.
Vous apprécierez le caractère surréel de cette phrase.
Jean-François Blanchet
Mougins (Alpes-Maritimes)
Scandale
politico-judiciaire
Alors qu’une magistrate de Colmar vient d’être rappelée à l’ordre pour avoir fait connaître ses
préférences pour Ségolène
François Charmot
Incarville (Eure)
Bayrou et le MRP
Le MRP, dont François Bayrou se
dit l’héritier, a été l’adversaire
implacable de Pierre Mendès France. (…) Pierre-Henri Teitgen poursuivra les soutiens de Pierre Mendès France de sa hargne. Il se fera
parachuter tête de liste MRP aux
législatives de 1956 dans le Doubs
pour tenter de battre le marquis
de Moustier, leader de la droite
locale, qui avait commis le crime
de soutenir Pierre Mendès France
au point d’entrer dans son gouvernement. (…) Il faut donc un
incroyable culot pour oser se réclamer de Pierre Mendès France
quand on appartient à la famille
politique qui a tout fait pour abat-
C
’est pour rompre avec l’image,
devenue banale, d’une Mme Royal
« transcendée » par la foule, qu’a
été choisie, le 18 janvier, une photo qui a
fait réagir. Ce portrait, capturé lors de
son voyage en Chine par un photographe local, montrait la candidate un peu
lasse, fragile mais superbe. « Ségolène en
madone gitane », ironise Christian Jeanbrau (Courriel). L’image était d’autant
plus frappante, dit-il, qu’elle succédait à
celle, peu flatteuse, publiée la veille en
première page, de « François Hollande,
illuminé, façon imbécile heureux, bref ridicule ». « Qui a choisi ces photos ?, poursuit M. Jeanbrau. Le Monde est-il sous le
charme et, se le reprochant, se venge-t-il
sur le compagnon ? »
Rien de tel puisque les photos des
pages intérieures sont sélectionnées par
le service photo et celles destinées à la
« une », vitrine du journal, choisies par
la rédaction en chef.
« Nous n’essayons pas de faire dire à des
photos, prises hors contexte, ce qu’elles ne
disent pas », explique la responsable des
photos. Les lecteurs le comprennent encore mal. D’où beaucoup de malentendus.
Exemple : une photo de Nicolas Sarkozy
parlant, le doigt levé, mise à la « une » le
1er mars. Dans « cette immense et avantageuse photo, publiée en première page pour…
dénoncer certaines irrégularités dans l’achat
de son appartement », Maguy Sauvagnac
(Paris), voit la preuve du « glissement [du
journal] en faveur du candidat ». Or, en
optant pour une photo d’actualité, prise la
veille, lors d’une conférence à Madrid, le
quotidien voulait précisément éviter
l’« effet de sens » – ce qui aurait été le cas
s’il avait exhumé des archives un portrait
du même Nicolas Sarkozy accablé ou
maussade pour illustrer l’affaire révélée
par Le Canard enchaîné.
Un autre portrait du candidat UMP, fait
pour Le Monde à l’occasion de son interview, le 23 janvier, a été interprété à l’envers. « Grande photo à la Ceausescu, la soupe est bien servie », s’indigne Annie Briand
(Courriel). Pas du tout : « Sarkozy était très
mécontent de cette photo, prise de près, au
grand angle, raconte Frédérique Deschamps. Il a trouvé qu’elle le rapetissait et
lui faisait un gros nez. » De fait, c’est peutêtre cette image qui, par la suite, a conduit
à la mise en place du cordon sanitaire pour
échapper à l’effet « grand angle » – et
« grand nez »… a
Cette chronique reprendra le 14 avril
RECTIFICATIFS ET PRÉCISIONS
Dessin de Joep Bertrams publié par « Het Parool » (Amsterdam). [email protected]
Royal, le trop « fameux » juge
Bruguière est déjà en campagne
législative sous les couleurs
UMP, à Villeneuve-sur-Lot. Sans
même s’être mis en disponibilité.
Et sans que cela ne choque ni la
chancellerie ni même le garde
des sceaux. C’est tout bonnement scandaleux.
qui a choisi sa coiffure, ses vêtements, sa
pose, un peu raide, ajoute Frédérique Deschamps. L’étonnant, c’est que, à l’inverse,
dans les meetings, elle est comme transcendée. Elle rayonne. »
Mme Royal n’est pas la seule à se pétrifier devant l’objectif. Deux photos en pied
d’Angela Merkel, accompagnant son
interview, le 15 janvier, illustrent ce phénomène. L’une « excellente, pleine de vie et
de symboles », remarque Claude Gintz
(Ivry-sur-Seine), a été prise à la volée,
devant son bureau, alors qu’elle ne s’y
attendait pas. L’autre, où la chancelière
allemande apparaît raide, grincheuse et
« un peu lourdaude », a été posée. CQFD.
tre le député de l’Eure. Il est vrai
que M. Bayrou a confondu, ce qui
est tout de même un peu gros,
Pierre Mendès France et Edgar
Faure, attribuant au premier une
formule qu’il n’a jamais employée
et dont la paternité revient au
second. (Ah, si Ségolène Royal
avait commis cette erreur, comment elle aurait été promptement
exploitée !) Pierre Mendès France
n’a jamais parlé de « majorité
d’idées », ancré qu’il était à gauche
alors qu’Edgar Faure savait se
montrer d’une souplesse à toute
épreuve (…).
Joseph Pinard
Besançon (Doubs)
Trahison
Chaque époque a eu son félon :
Charlemagne a eu Ganelon,
Jeanne d’Arc l’évêque Cauchon,
Bayard eut le duc de Bourbon,
Napoléon a eu Marmont, et
Ségolène Eric Besson ! A mon
avis, les imprécations de M. Besson n’appellent guère d’autre commentaire.
Emmanuel Terray
Chatou (Yvelines)
Les intellectuels. Dans le
supplément consacré aux intellectuels (Le Monde du 22 mars), la
romancière indienne s’appelle
Abha Dewasar et non Dawesar
comme écrit fautivement.
« la terre est bleue comme une orange » à André Breton. C’est en réalité le titre et le premier vers d’un
poème de Paul Eluard tiré de son
recueil L’Amour, la poésie (éd. Gallimard).
Paul Eluard. Dans son point
Yuans. Une erreur de conver-
de vue publié dans les pages
Débats (Le Monde du 20 mars),
Jean-Louis Guigou attribue le vers
sion a été commise dans l’article
consacré aux manifestants du
Hunan en Chine (Le Monde du
15 mars). La taxe de 50 yuans
imposée à un lycéen pour pouvoir
prendre le bus avec son bagage
équivaut à près de 5 euros et non à
« 50 centimes d’euro ».
Débats. La lettre de l’avocat
syrien Anwar Al-Bounni (Le Monde du 13 mars) était adressée à
Louise Arbour et non pas Harbour
comme écrit par erreur.