1 Chapitre 18 Paul A. Lamarche et Adriana Trigub Clover: La

Transcription

1 Chapitre 18 Paul A. Lamarche et Adriana Trigub Clover: La
Chapitre 18
Paul A. Lamarche et Adriana Trigub Clover: La propriété privée des organisations de
santé : quels effets sur les services?
1
Table des matières
Introduction
1- Pourquoi des effets différents selon le type de propriété ?
2- Aspects méthodologiques
3- Description des variables
4- Résultats
- Comparaison des organisations sans but lucratif et des organisations à but lucratif
- Comparaison des organisations publiques et des organisations à but lucratif
- Comparaison des organisations publiques et des organisations sans but lucratif
- Effets des services selon le type de propriété des organisations productrices
5- Implications des résultats
- Implications théoriques
- Implications pour le Québec
Bibliographie
Annexe : Liste des recherches retenues
Liste des tableaux
2
Liste des tableaux
Tableau 1 : Comparaison des organisations sans but lucratif et à but lucratif
Tableau 2 : Comparaison des organisations publiques et à but lucratif
Tableau 3 : Comparaison des organisations sans but lucratif et publiques
Tableau 4 : Rang des organisations dans l’atteinte des effets selon le type de propriété
3
Introduction
Le recours accru aux organisations privées de santé est avancé comme une solution aux
difficultés que rencontre le système public de soins québécois. Les arguments en sa
faveur sont entre autres l’accessibilité aux services et le contrôle des dépenses. Le recours
accru à ces organisations est susceptible d’accroître la production totale de services et
ainsi répondre à une partie de la demande qui s’exprime au système public et réduire les
listes et temps d’attente. Leur productivité est aussi postulée supérieure aux organisations
publiques.
Les opposants de cette mesure considèrent que, pour assurer leur rentabilité, ces
organisations se limiteront à offrir des services financièrement rentables mais pas
nécessairement pertinents socialement. Les dépenses de santé ne seront pas mieux
contrôlées parce que les cas les plus complexes et les plus coûteux demeureront ou seront
transférés au système public. La recherche n’a pas encore démontré que ces organisations
sont plus productives que les organisations publiques pour fournir des services de santé.
Le présent chapitre entend apporter un éclairage à ce débat. Il présente une synthèse de
recherches publiées récemment qui ont cerné les effets associés à la fourniture des
services de santé selon trois types de propriété des organisations productrices : privée à
but lucratif, privée sans but lucratif et publique. Il se divise en cinq parties. La première
résume les raisons ou théories permettant d’escompter des effets différents selon le type
de propriété des organisations. Les trois parties suivantes présentent respectivement la
sélection, le résumé et l’analyse des recherches sélectionnées, l’opérationnalisation des
variables et les résultats de cette synthèse. La dernière discute des implications des
résultats pour l’avenir du système de soins québécois.
5- Pourquoi des effets différents selon le type de propriété ?
Plusieurs raisons et théories sont proposées pour appréhender les effets des services
associés au type de propriété des organisations productrices (Becker et Potter, 2002). La
recherche du profit est la raison la plus souvent évoquée, la plus débattue mais aussi la
plus acceptée comme influençant le comportement des organisations et les effets des
services. Le profit est considéré l’incitation majeure des organisations à but lucratif
surtout dans les théories économiques classiques. Il les incite à rechercher la plus petite
combinaison de ressources permettant de satisfaire les clients. Ces organisations sont
donc perçues comme étant plus performantes, plus rentables et plus productives que les
organisations sans but lucratif (Clark, 1980 ; Cutler et Horwitz, 2000). Les organisations
qui ne subissent pas l’influence du profit sont considérées presque naturellement comme
non performantes et non productives (Gray et al., 1991 ; Hassan, 1996 ; Wilder, 1996).
Mais, le profit est aussi vu comme pouvant inciter les organisations à adopter des
comportements qui vont à l’encontre des intérêts d’autres acteurs. À titre d’exemples, il
peut les inciter à facturer des frais maximum et même démesurés aux compagnies
d’assurance et aux assurés (Sloan et al., 2001 ; Rotarius et al., 2005 ; 2006), à couper les
dépenses en deçà de ce qui est requis pour maintenir la qualité des services (Parker et al.,
1997) ou encore à ne pas référer des patients, sources de revenus, vers des services qui
4
pourraient leur être bénéfiques (Pushkal et al., 1999). L’influence du profit est certes
reconnue mais son impact peut être différent selon les théories avancées.
Les intérêts des détenteurs d’enjeux (stakeholders) constituent une autre raison
permettant d’appréhender les effets des services selon le type de propriété des
organisations. Un détenteur d’enjeux est une personne ou un groupe qui peut influencer
ou être influencé par l’atteinte des objectifs d’une organisation (Freeman, 1984). Les
intérêts des détenteurs d’enjeux des organisations à but lucratif sont perçus comme les
incitant à maximiser le profit. Ceux des organisations sans but lucratif sont perçus comme
les incitant à poursuivre et à maximiser l’atteinte d’objectifs à connotation davantage
sociale tels la santé et le bien-être de la communauté, la qualité des services ou encore
l’accès aux soins des plus démunis. Pour certains auteurs, ce n’est pas la recherche du
profit qui distingue surtout les organisations à but et sans but lucratif. Toutes les
organisations tentent de générer un excédent des revenus sur les dépenses (profit). Les
organisations sans but lucratif sont souvent considérées à cet égard comme des
organisations à but lucratif déguisées (Steinberg, 1993 ; Weisbrod et Schlesinger, 1986 ;
Weisbrod, 1998). Ce qui semble distinguer le plus ces organisations, c’est l’utilisation de
cet excédent. Dans les organisations à but lucratif, cet excédent est versé principalement
aux propriétaires ou aux actionnaires. Dans les organisations sans but lucratif, il doit être
utilisé pour des finalités à connotation sociale afin de conserver les avantages, entre
autres fiscaux, associés au statut sans but lucratif (Hansmann, 1996 ; Irving, 2000 ; Sloan
et al., 2001). Les intérêts des détenteurs d’enjeux permettent donc de s’attendre à une
meilleure performance sociale des organisations sans but lucratif comparativement aux
organisations à but lucratif.
La diversité des intérêts des détenteurs d’enjeux semble influencer la performance
relative des organisations privées sans but lucratif et des organisations publiques. Aux
yeux de plusieurs, ces deux organisations accomplissent sensiblement les mêmes
fonctions. Toutefois, dans une société où les attentes et préférences des citoyens sont
relativement homogènes, il semble avoir moins de justifications pour des organisations
privées sans but lucratif surtout si les organisations publiques accomplissent leurs
fonctions de manière satisfaisante. Dans des sociétés pluralistes, les organisations
publiques peuvent satisfaire les attentes et préférences de la majorité des citoyens tout en
laissant d’importants groupes insatisfaits. Dans ce contexte, les organisations sans but
lucratif deviennent des remplacements ou des compléments intéressants aux
organisations publiques (Weisbrod, 1997). Leur diversité permet de répondre
simultanément et de façon satisfaisante à des attentes et des préférences de sous-groupes
très variés de la population (Crampton et Lay-Yee, 2005).
Les intérêts des gestionnaires sont aussi utilisés pour appréhender le comportement et la
performance des organisations publiques. Leur influence est surtout mise en évidence par
les théoriciens de la nouvelle administration publique. Ils considèrent que le principal
intérêt des gestionnaires des organisations publiques est d’accroître les budgets dont ils
sont responsables. Il en résulte un développement de ces organisations et une ampleur de
leur budget qui sont supérieurs à ce qui est requis pour répondre aux besoins des
consommateurs. Selon cette théorie, la performance et la productivité des organisations
5
publiques sont inférieures à celles des organisations à but lucratif mais aussi aux
organisations sans but lucratif.
Les imperfections du marché des services de santé sont aussi avancées comme facteur
permettant d’appréhender la place et la performance des différentes organisations
(Steinberg et Gray, 1993). Une première imperfection est la capacité limitée des patients
d’apprécier la qualité des services qu’ils reçoivent. Cette imperfection est amplifiée par la
présence de tiers payants qui fait en sorte que la personne qui reçoit les services n’est pas
celle qui les paie. Ces imperfections diminuent les incitatifs des organisations à maintenir
la qualité des services. Ce sont ces imperfections qui justifient et expliquent la présence
des organisations sans but lucratif en santé (Sloan et al., 2001 ; Hart et al., 1997). Parce
qu’elles n’ont pas d’obligation envers des actionnaires, elles ont moins d’incitatifs à
utiliser ces imperfections à leur avantage. En présence d’imperfections du marché, les
organisations sans but lucratif sont dites plus performantes que celles à but lucratif.
Le profit
Les intérêts
Rationalité
économique
sociale
La rationalité des organisations constitue une dernière raison (Weber, 1947). Il existe
deux types de rationalité : économique et sociale. Ces deux rationalités sont deux faces de
la même pièce : si l’une augmente, l’autre tend à diminuer. Cette théorie laisse donc
présager que les organisations à but lucratif sont plus performantes économiquement et
moins socialement. Les organisations sans but lucratif et publiques sont à l’inverse moins
performant économiquement mais plus socialement.
2- Aspects méthodologiques
Les recherches sur les effets des types de propriété des organisations prestataires de
services de santé ont été répertoriées à partir des moteurs de recherche EconoLit, ISI Web
of Science, PubMed et OVID Medline en utilisant des mots-clés reliant des types de
propriété et des effets. Cent onze recherches ont ainsi été recensées, dont 24 ont été
retenues. Elles répondent aux critères suivants : publiées en français, anglais ou espagnol
entre les années 1997-2007, effectuées dans un ou des pays de l’Organisation de
Coopération et de Développement Économique (OCDE); comparent des organisations
privées à but lucratif, privées sans but lucratif et publiques sur au moins un effet
concernant les patients, le personnel, les organisations ou les milieux dans lesquelles elles
opèrent; contrôlent l’influence de caractéristiques des patients sur les effets les
concernant et sont disponibles via la base de données Maestro de l’Université de
Montréal.
Pour chacune de ces recherches, les informations suivantes ont été recueillies : les
objectifs poursuivis, les types de propriété analysés, les effets considérés, les
caractéristiques des patients qui ont été contrôlées, les effets observés et les facteurs
associés à ces effets.
L’analyse des études a procédé en deux étapes. La première a consisté à regrouper les
indicateurs qui portent sur les mêmes effets. Cette étape est nécessaire parce que les
mêmes indicateurs servent à apprécier, selon les études, des effets différents. La
deuxième étape consiste à agréger les résultats. Elle consiste, pour chacun des effets
6
analysés, à apprécier la performance des organisations de chaque type de propriété en
comparaison à celle des deux autres types de propriété. Cette appréciation est faite sur la
base du pourcentage des observations qui révèlent une performance supérieure, égale ou
inférieure des organisations d’un type de propriété par rapport à celle d’un autre type de
propriété. Une observation est une comparaison des organisations de deux types de
propriétés sur un indicateur d’un effet donné.
Les tableaux 1 à 3 présentent les pourcentages des observations qui permettent
d’apprécier les effets associés aux organisations sans but lucratif (SBL) comparativement
aux organisations à but lucratif (BL) et aux organisations publiques (PUB) ainsi qu’aux
organisations publiques comparativement aux organisations à but lucratif. Ils présentent
aussi le nombre d’études et d’observations sur lesquelles repose cette appréciation. Plus
ces nombres sont élevés, plus ces appréciations sont considérées fiables et valides.
3- Description des variables
Dans les articles sélectionnés, trois types de propriété sont analysés : publique, privée
sans but lucratif et privée à but lucratif. Les organisations publiques appartiennent à une
instance gouvernementale de niveau national, subnational (état, région ou province) ou
local. Ces organisations sont sans but lucratif. Les organisations privées sans but lucratif
appartiennent à des corporations privées caritatives, religieuses ou communautaires. Leur
but n’est pas le profit, mais bien de desservir les milieux dans lesquels elles s’insèrent.
Elles sont dirigées par des conseils d’administration qui sont composés généralement de
représentants de leur milieu d’appartenance qui y siègent bénévolement. Les
organisations privées à but lucratif appartiennent à des corporations privées en vue de
faire des profits en offrant des services.
Les effets sont regroupés en trois grandes catégories. La première catégorie regroupe les
effets reliés à la santé des personnes c’est-à-dire à l’efficacité (Slee et al., 2001). Deux
types d’efficacité sont considérés : l’efficacité-santé et l’efficacité-services. L’efficacitésanté réfère à la contribution des services à l’amélioration et au maintien de la santé des
personnes et des populations (Pineault et Daveluy, 1996). Dans le cadre de cette synthèse,
elle est appréciée par la mortalité, les risques de décès, les taux de survie, la morbidité et
la fonctionnalité physique et cognitive des personnes. L’efficacité-service est appréciée
par la contribution des services de santé au contrôle de maladies. Dans le cadre de cette
synthèse, elle porte plus spécifiquement sur l’asthme, le diabète et l’hypertension.
La deuxième catégorie d’effets qualifie l’expérience de soins des personnes. Elle
regroupe les indicateurs reliés à l’accessibilité, la globalité, la qualité et la réactivité des
services. L’accessibilité réfère à la facilité d’entrer en contact avec les services de santé
(Pineault et Daveluy, 1996). Elle comprend trois dimensions. L’accessibilité
organisationnelle réfère à la facilité avec laquelle les services sont obtenus. Elle est
généralement mesurée par les délais pour l’obtention des services. L’accessibilité
financière réfère à la fourniture de services à des clientèles financièrement vulnérables.
L’accessibilité culturelle réfère à la fourniture de services aux minorités culturelles. La
globalité indique la gamme de services offerts par les organisations productrices. Plus la
7
gamme de services est large plus la globalité est grande. Dans de tels cas, les services
offerts débordent les services médicaux de nature purement curative. Elle peut inclure des
services préventifs ou palliatifs ainsi que des services sociaux ou communautaires ou
encore des services aux aidants naturels. La qualité réfère au degré avec lequel les
services sont conformes aux normes professionnelles, guides de pratique et lignes
directrices qui prévalent au moment de l’étude ainsi qu’à leur pertinence c’est-à-dire à la
justesse du service compte tenu de la condition de la personne (Slee et al., 2001).
L’appréciation de la qualité repose généralement sur l’avis de professionnels ou
d’experts. La réactivité réfère au degré avec lequel les attentes et préférences des
personnes sont rencontrées et satisfaites (OMS, 2000). Dans le cadre de cette étude, elle
est appréciée selon le point de vue de trois acteurs : les utilisateurs des services, le
personnel qui les fournit et les milieux dans lesquels s’insèrent les organisations
productrices. La réactivité des utilisateurs est appréciée par leur satisfaction des services
reçus ou du respect manifesté à leur endroit par le personnel des organisations. La
réactivité du personnel soignant est appréciée par leur degré de satisfaction au travail, la
collaboration perçue entre les professionnels et leur sentiment d’autonomie et de contrôle
de leur pratique. La réactivité du milieu regroupe les indicateurs déterminant le degré
avec lequel les organisations prennent des mesures pour orienter les services vers la
satisfaction des besoins des membres du milieu, pour informer et être imputable envers le
milieu et pour analyser ou traiter les plaintes formulées par les membres de ce milieu.
La troisième catégorie regroupe les indicateurs d’effets à consonance financière ou
économique. Elle comprend les indicateurs reliés à la productivité et à la rentabilité
financière des organisations. La productivité est le rapport entre les services produits et
les ressources utilisées à leur production (Contandriopoulos et al., 2000). Elle est
appréciée à partir de la quantité, du type et de la nature des ressources utilisées pour
produire les services ou pour prendre en charge un problème de santé, un épisode de
soins, une personne ou une population. Dans certaines études, elle est apprécié
globalement à l’aide d’un indice global : « efficience technique ». Dans d’autres études
elle est appréciée à partir de certaines de ses composantes : les coûts totaux ou
administratifs, la durée moyenne de séjour en centres hospitaliers ou la substitution de
services hospitaliers par des services ambulatoires. Dans le cadre de cette revue, des
coûts totaux ou administratifs moins élevés, des durées de séjour moins longues en
centres hospitaliers ou une substitution plus grande des services institutionnels par des
services ambulatoires sont considérés comme une meilleure productivité. La rentabilité
financière des organisations est appréciée à partir de la différence entre les montants
chargés aux patients et les coûts des services. Plus cette différence est grande, plus
l’organisation est dite rentable.
6- Résultats
Les résultats sont présentés en deux temps. Les effets associés aux organisations selon
deux types propriétés sont présentés tour à tour. Ces comparaisons sont ensuite
synthétisées afin d’ordonnancer les trois types de propriété des organisations selon leur
degré d’atteinte des effets analysés.
8
Comparaison des organisations sans but lucratif et des organisations à but lucratif
Le tableau 1 présente les effets des services produits par les organisations sans but
lucratif en comparaison aux organisations à but lucratif. Les résultats concernant des
composantes spécifiques de la productivité reposent sur un nombre limité d’études et
d’observations.
Insérer le Tableau 1
La majorité des observations (57 %) pointe vers une efficacité égale des services offerts
par ces deux types d’organisations. Lorsqu’une inégalité est observée, elle est presque
toujours en faveur des organisations sans but lucratif. Trente-huit pourcent des
observations révèlent une efficacité supérieure des services offerts par les organisations
sans but lucratif comparativement à 5 % qui indique une supériorité des organisations à
but lucratif à cet égard. L’efficacité des services des organisations sans but lucratif est
donc égale ou supérieure aux organisations à but lucratif.
Un fort pourcentage d’observations pointe vers une accessibilité supérieure des
organisations sans but lucratif (66 %) comparativement aux organisations à but lucratif.
Uniquement 4 % des observations pointent vers une supériorité des organisations à but
lucratif. La supériorité des organisations sans but lucratif concerne surtout les
composantes financières et culturelles de l’accessibilité. La globalité des services et la
réactivité sont supérieures dans les organisations sans but lucratif. Près de quatre-vingt
pourcent des observations pointent dans cette direction pour chacun de ces effets.
Toutefois, la réactivité des patients est égale entre ces organisations. Il en est autrement
de la réactivité du personnel et des communautés. Leur réactivité est plus grande au sein
des organisations sans but lucratif comparativement aux organisations à but lucratif. La
qualité des services est supérieure dans les organisations sans but lucratif. Plus de 60 %
des observations pointent dans cette direction, et ce, pour chacune des dimensions
considérées : conformité aux normes professionnelles et pertinence. Ces observations
révèlent donc que les organisations sans but lucratif sont plus performantes que les
organisations à but lucratif sur toutes les composantes de l’expérience de soins que sont
l’accessibilité, la globalité, la réactivité et la qualité.
Près de la moitié des observations révèlent une productivité supérieure des organisations
sans but lucratif (46 %) comparativement aux organisations à but lucratif. Par contre,
54 % des observations pointent respectivement vers une égalité de la productivité de ces
organisations (27 %) ou vers une productivité supérieure des organisations à but lucratif
(27 %). Cette agrégation des observations cache certaines variations de la performance
des organisations selon les différentes composantes de la productivité. La performance
des organisations sans but lucratif est supérieure sur toutes les composantes de la
productivité à l’exception des coûts administratifs. L’efficience technique est plus grande
(63 %), les coûts totaux plus faibles (46 %), les durées moyennes de séjour en centres
hospitaliers plus courtes (50 %) et la substitution de services hospitaliers par des services
ambulatoires plus grande (100 %). Par contre, les coûts administratifs y sont plus élevés
(75 %).
9
Enfin, toutes les observations révèlent une rentabilité financière supérieure des
organisations à but lucratif comparativement aux organisations sans but lucratif. Cette
rentabilité supérieure est attribuable tout au moins en partie aux charges plus élevées
facturées aux patients (92 %) et à une présence moins grande de ressources humaines
(100 %) de toutes sortes : médecins, personnel infirmier et autres.
Comparaison des organisations publiques et des organisations à but lucratif
Le tableau 2 présente les effets des services produits par les organisations publiques en
comparaison aux organisations à but lucratif. La mesure de ces effets repose
généralement sur un nombre limité d’articles et d’observations.
Plus de la moitié des observations (54 %) révèle une efficacité supérieure des
organisations publiques comparativement aux organisations à but lucratif. Une proportion
importante des observations (46 %) pointe vers l’égalité de l’efficacité de ces deux types
d’organisations. Toutefois, aucune observation (0 %) ne révèle une supériorité des
organisations à but lucratif sur les organisations publiques. Ceci concerne autant
l’efficacité-santé que l’efficacité-services. Il est conclu que les organisations publiques
ont une efficacité au moins égale sinon supérieure aux organisations à but lucratif.
Un fort pourcentage des observations pointent vers une accessibilité supérieure des
organisations publiques (71 %) comparativement aux organisations à but lucratif. Cette
supériorité concerne surtout les composantes financières et culturelles de l’accessibilité.
Les observations ne permettent pas de différencier la globalité des services offerts par ces
organisations. Des pourcentages presque identiques d’observations pointent vers la
supériorité de l’une et de l’autre organisation à cet égard. La réactivité des organisations
publiques est supérieure à celle exprimée envers les organisations à but lucratif. La
réactivité des patients est égale entre ces deux types d’organisations. La réactivité du
personnel et des communautés est plus grande au sein des organisations publiques
comparativement aux organisations à but lucratif. La qualité des services est supérieure
dans les organisations publiques comparativement aux organisations à but lucratif.
Quatre-vingt pourcent des observations en témoignent. Il est conclu que les organisations
publiques ont une performance supérieure aux organisations à but lucratif en ce qui
concerne l’accessibilité et la qualité des services ainsi que la réactivité. Ces organisations
ont une performance égale quant à la globalité des services offerts.
Insérer le Tableau 2
La productivité des organisations publiques est supérieure (55 % des observations) à celle
des organisations à but lucratif. Cette plus grande productivité est observée surtout en ce
qui concerne la substitution des services hospitaliers par des services ambulatoires
(100 %), l’efficience technique (83 %) et aussi les durées moyennes de séjour (50 %).
Elle est inférieure aux organisations à but lucratif en ce qui a trait aux coûts administratifs
(67 %). Elle est aussi inférieure (40 %) ou égale (40 %) en ce qui concerne les coûts
totaux.
10
Toutes les observations révèlent une rentabilité financière supérieure des organisations à
but lucratif comparativement aux organisations publiques (100 %). Cette rentabilité
supérieure est attribuable, tout au moins en partie, aux charges plus élevées facturées aux
patients (100 %) et à une moins grande présence de ressources humaines de toutes
sortes : médecins, personnel infirmier et autres (100 %).
Comparaison des organisations publiques et des organisations sans but lucratif
Le tableau 3 présente les effets des services produits par les organisations sans but
lucratif en comparaison aux organisations publiques. Ces résultats reposent généralement
sur un nombre limité d’articles et d’observations.
Insérer le Tableau 3
Toutes les observations pointent vers l’égalité de l’efficacité des services offerts par les
organisations sans but lucratif et les organisations publiques. L’accessibilité aux services
des organisations sans but lucratif est soit égale (50 % des observations) ou supérieure
(42 %) à celle des organisations publiques. Elle est rarement inférieure (8 %). La
globalité des services est supérieure dans les organisations sans but lucratif
comparativement aux organisations publiques (75 %). La réactivité est égale entre ces
deux types d’organisations, et ce, autant auprès des patients, des professionnels qui y
travaillent que des communautés dans lesquelles elles œuvrent. Les observations ne
permettent pas de différencier ces organisations quant à la qualité de leurs services. Près
de la moitié (46 %) des observations révèlent une qualité des services égale de ces
organisations. De plus, près du quart des observations révèlent une qualité supérieure des
services des organisations sans but lucratif et près de l’autre quart révèlent une supériorité
des organisations publiques à cet égard. Il est conclu que les organisations sans but
lucratif ont une globalité des services plus large ainsi qu’une accessibilité et une
productivité égales ou supérieures aux organisations publiques. Ces deux types
d’organisations sont égaux en ce qui concerne l’efficacité, la réactivité et la qualité des
services.
La productivité des organisations sans but lucratif est inférieure (48 %) ou égale (44 %) à
celle des organisations publiques. Elle est rarement supérieure (8 %). Les coûts
administratifs y sont plus élevés (100 %) et l’efficience technique plus faible (57 %). Les
durées moyennes de séjour en centres hospitaliers, les coûts totaux et la substitution des
services hospitaliers par des services ambulatoires sont égaux ou supérieurs à ce qui est
observé dans les organisations publiques. La rentabilité est plus élevée (50 %) ou égale
(50 %) dans les organisations sans but lucratif comparativement aux organisations
publiques. Cette rentabilité supérieure semble être attribuable uniquement aux charges
plus élevées facturées aux patients.
Effets des services selon le type de propriété des organisations productrices
11
Le tableau 4 récapitule les effets associés aux organisations de santé selon leur type de
propriété. Il ordonne les trois types d’organisation selon le degré observé d’atteinte de
chacun des effets. Le rang 1 signifie une atteinte plus élevée. L’absence de rang signifie
la non disponibilité d’observation sur cet effet pour ce type d’organisation. Des rangs
égaux signifient une performance égale de ces organisations sur cet effet.
Insérer le Tableau 4
Aucun type d’organisation n’est associé à l’atteinte la plus élevée de tous les effets.
Toutefois, les organisations sans but lucratif sont associées à l’atteinte la plus élevée du
plus grand nombre d’effets. Elles obtiennent le premier rang sur 5 des 7 effets analysés.
Les organisations publiques suivent de très près. Elles obtiennent ou partagent le premier
rang pour 4 de ces effets. Ce qui ressort clairement, c’est que les organisations à but
lucratif obtiennent le premier rang uniquement sur un seul effet : la rentabilité. Elles
obtiennent le dernier rang sur 6 des 7 effets analysés.
5- Implications des résultats
Les résultats de cette analyse ont des implications autant théoriques que pratiques. Les
implications théoriques concernent le degré avec lequel ils confirment ou infirment les
attentes des différentes théories quant aux effets des organisations selon le type de
propriété. Les implications pratiques sont les orientations qui en découlent et que le
Québec devrait privilégier pour apporter des solutions aux problèmes que rencontre son
système de soins.
Implications théoriques
Cette analyse n’apporte qu’un support mitigé à la théorie qui voit dans la recherche du
profit le facteur incitant les organisations à but lucratif à une plus grande performance,
productivité et rentabilité. Elle n’apporte aucun soutien à la meilleure performance des
organisations à but lucratif. Au contraire, ce sont ces organisations qui sont les moins
performantes. Elles sont moins performantes sur tous les effets à connotation sociale
telles que l’efficacité, l’accessibilité, la globalité, la réactivité et la qualité. Elles ne sont
pas les plus performantes sur tous les effets à connotation économique. Elles sont les
moins performantes sur toutes les composantes de la productivité. Elles sont les plus
performantes uniquement en ce qui à trait à la rentabilité. Toutefois, contrairement à ce
qu’avance cette théorie, cette rentabilité n’est assurée que par des charges plus élevées
aux patients et non par une meilleure productivité. Il est alors logique de croire que les
charges additionnelles ont pour principaux, et possiblement uniques, bénéficiaires les
propriétaires de ces organisations.
Cette analyse laisse aussi entrevoir que les organisations de santé les plus performantes
sont mues par des objectifs autres que le profit. Elle apporte un solide appui aux théories
qui entrevoient les intérêts des détenteurs d’enjeux des organisations sans but lucratif
comme les incitant à poursuivre et à maximiser l’atteinte d’objectifs à connotation
davantage sociale. Ce sont ces organisations qui sont les plus performantes quant à
12
l’efficacité, l’accessibilité, la globalité, la réactivité et la qualité des services. Elle apporte
aussi un appui aux théories qui présument que les organisations tentent de générer un
excédent des revenus sur les dépenses. Ce qui distingue le plus les organisations à but et
sans but lucratif c’est l’utilisation de cet excédent. Les organisations sans but lucratif
obtiennent la deuxième meilleure performance quant à la rentabilité. Tout comme dans
les organisations à but lucratif, cette rentabilité est assurée par des charges plus élevées
aux patients. Les excédents des revenus sur les dépenses semblent toutefois être utilisés
principalement au bénéfice des patients.
Cette analyse n’apporte aucune évidence à l’appui de la théorie de la nouvelle
administration publique qui laisse entrevoir que les organisations publiques sont moins
performantes à cause des intérêts des gestionnaires qui les incitent à développer leurs
organisations et les budgets qu’ils gèrent bien au-delà de ce qui est requis pour satisfaire
les besoins de leurs utilisateurs. La performance de ces organisations suit de très près
celle des organisations sans but lucratif. De plus, ce sont ces organisations qui performent
le mieux quant aux coûts totaux et aux coûts administratifs.
Cette analyse ne permet pas d’expliquer la différence de performance des organisations
sans but lucratif et des organisations publiques. Elles semblent poursuivre des objectifs
similaires. Elles performent de façon équivalente en ce qui a trait à l’efficacité et à la
réactivité. Les organisations publiques performent mieux en ce qui a trait à l’accessibilité
financière et à la productivité. Les organisations sans but lucratif performent mieux sur
les autres effets analysés et particulièrement la rentabilité. Aucune différenciation n’a été
faite du degré d’hétérogénéité des sociétés dans lesquelles ces organisations opèrent.
Aucun lien n’a donc été établi entre l’hétérogénéité des sociétés et la performance de ces
deux types d’organisations.
Cette analyse apporte un certain appui aux théories qui avancent qu’en présence
d’imperfections du marché des services de santé, les organisations sans but lucratif sont
plus performantes que celles à but lucratif. Elle procure aussi un certain appui aux
théories qui présument que les organisations à but lucratif sont plus susceptibles d’utiliser
ces imperfections à leur avantage. Leur rentabilité relative peut constituer un exemple de
ce type de comportement.
Enfin, l’analyse n’apporte pas d’appui au caractère mutuellement exclusif de l’atteinte
des objectifs économiques et des objectifs sociaux des organisations. La performance des
organisations à but lucratif s’inscrit le plus dans la pensée de cette théorie. Ces
organisations performent relativement moins bien en ce qui concerne les objectifs à
connotation plus sociale et mieux dans l’atteinte d’un des objectifs à connotation
économique : la rentabilité. La performance des deux autres types d’organisations
n’appui que très partiellement cette théorie. Les organisations sans but lucratif sont les
plus performantes dans l’atteinte des objectifs à connotation sociale et aussi dans
l’atteinte des objectifs économiques. Elles sont les deuxièmes plus rentables. Elles
performent donc bien sur les deux types d’objectifs. Les organisations publiques sont les
deuxièmes plus performantes dans l’atteinte des objectifs à connotation sociale et aussi
dans l’atteinte de l’un des objectifs à connotation économique à savoir la productivité.
13
Elles sont toutefois les moins performantes quant à la rentabilité. Il semble donc possible
de concevoir des organisations qui sont très performantes autant pour l’atteinte des
objectifs sociaux qu’économiques.
Implications pour le Québec
Les résultats de cette synthèse ont des implications importantes sur les organisations de
santé à privilégier dans l’avenir au Québec. La première implication est qu’il n’y a
aucune raison reliée aux effets pour les patients, pour les professionnels et pour les
milieux qui justifie le recours accru aux organisations privées à but lucratif. Au mieux,
ces organisations produisent des effets qui sont égaux à ceux qu’obtiennent les
organisations sans but lucratif et les organisations publiques. Au pire, elles produisent des
effets qui leurs sont inférieurs.
Le seul effet positif associé à ce type d’organisation et qui n’est certes pas négligeable est
sa rentabilité financière. Toutefois, les seuls bénéficiaires de cet avantage sont les
propriétaires de ces organisations : pas les utilisateurs des services, ni les professionnels
qui y travaillent et ni les communautés dans lesquelles elles œuvrent. Si l’objectif
poursuivi est d’accroître la rentabilité financière des propriétaires des organisations de
santé, le recours aux organisations à but lucratif est la voie. Par contre, si les effets
recherchés sont autres, le recours accru aux deux autres types d’organisations semble être
la voie à suivre.
Cette implication est importante pour le Québec compte tenu qu’un très fort pourcentage
des services médicaux est offert dans des cliniques médicales de propriété privée. Pour
estimer l’ampleur de cette implication, il faut distinguer les cliniques médicales privées à
but lucratif des cliniques privés que Robert Evans (1984) nomme « pas uniquement à but
lucratif ». Les premières ont le profit comme principal objectif. Ce sont ces cliniques qui
ne présentent aucun avenir pour le Québec. Elles pourraient être identifiées sur la base
des frais complémentaires ou accessoires qu’elles facturent aux patients. Plus ces frais
sont élevés, plus elles sont susceptibles d’être vraiment à but lucratif. Les autres cliniques
sont des lieux de pratique des médecins. Leur objectif principal est susceptible d’être de
fournir des services adéquats à la clientèle tout en permettant aux médecins de gagner
honorablement leur vie. Ce ne sont pas ces dernières organisations qui sont visées ici.
La deuxième implication est d’orienter les décisions vers la conception et
l’expérimentation d’organisations privées sans but lucratif. Les établissements du réseau
de la santé et des services sociaux du Québec sont légalement des établissements publics
au sens de la loi sur les services de santé et des services sociaux. Toutefois, ils sont dotés
d’une entité juridique distincte du ministère de la Santé et des Services sociaux. Certains
ont même une corporation propriétaire qui désigne des membres au conseil
d’administration de l’établissement. Ils possèdent alors certaines des caractéristiques des
établissements privés sans but lucratif. Dans les faits toutefois, compte tenu de leur
entière dépendance financière du ministère de la Santé et des Services sociaux et de leur
obligation de se soumettre à ses directives, ces établissements sont considérés, et se
comportent, comme des organisations publiques. Si tel est le cas, il y a dans les faits très
14
peu d’organisations privées sans but lucratif impliquées dans la fourniture de services
professionnels et particulièrement de services médicaux au Québec. Les résultats de cette
synthèse doivent inciter à orienter la réflexion et les efforts vers la conception,
l’expérimentation et le développement de réelles organisations de santé privées sans but
lucratif au Québec.
Une première avenue est de permettre aux centres de services de santé et de services
sociaux (CSSS) d’agir réellement comme des organisations sans but lucratif en leur
permettant d’offrir, moyennant une tarification, des services professionnels qui ne sont
pas couverts par les régimes publics d’assurance. De plus, dans la mesure où les
assurances duplicatives sont permises aux Québec, ces établissements devraient aussi
pouvoir offrir les mêmes chirurgies à des patients qui sont prêts à en assumer les coûts
personnellement ou via leur assurance privée que celles qui pourraient être financées
publiquement et offertes par des cliniques à financement privé. Les hôpitaux
communautaires américains et certains hôpitaux anglais (Hospital Trusts) ont justement
cette possibilité d’être financés simultanément par des fonds publics (Medicare et
Medicaid) et des fonds privés (assurances privées). Cette double provenance de fonds est
susceptible d’augmenter la rentabilité financière des organisations québécoises qui en a
grandement besoin. Leur statut d’organisations sans but lucratif les oblige à utiliser cette
rentabilité accrue aux bénéfices des patients et des communautés qu’elles desservent et
non de leurs propriétaires. De telles initiatives ont d’ailleurs déjà été formulées au
Québec (Institut de cardiologie de Montréal). Elles n’ont toutefois pas été expérimentées
compte tenu des réactions négatives qu’elles ont suscitées à cette époque.
Une autre avenue est de permettre l’émergence de coopératives de consommateurs en
matière de fourniture de services de santé. Ces coopératives se développent beaucoup au
Québec mais dans des domaines complémentaires aux services offerts par les
établissements à financement public. Leur rôle est important mais reste encore marginal
par rapport à l’ensemble des services offerts par le système de soins québécois. Cette
avenue consiste à permettre, inciter et supporter le développement de telles coopératives
au Québec. Ces coopératives pourraient être propriétaires de cliniques médicales sans but
lucratif et recruter leur propre personnel incluant des médecins. Ces coopératives
pourraient obtenir leurs fonds de trois sources : les cotisations annuelles des membres
pour avoir droit aux services offerts; les régimes publiques d’assurance pour la fourniture
de services assurés à des personnes couvertes et les assurances privées pour l’obtention
de services complémentaires. Il est à souligner que les HMO (Health Maintenance
Organisations) américains ont initialement été formées sur la base de coopératives de
consommateurs de santé. Les effets obtenus par les premières formes de HMO faisaient
l’envie des américains. De plus, de telles propositions ont déjà été formulées au Québec :
les organisations de services intégrés de santé (Brunelle, Ouellet et Montreuil, 1988). À
cette époque, des caisses de retraites s’étaient montrées intéressées à développer de telles
organisations pour desservir leurs membres.
Une dernière avenue consiste à permettre, inciter et supporter l’expérimentation d’autres
formes d’organisations de santé à financement public au Québec. Actuellement, il en
existe qu’une seule forme. Tous les établissements de santé relèvent du gouvernement du
15
Québec et en sont financés. Certaines expériences étrangères, particulièrement dans les
pays scandinaves et nordiques, laissent croire que des organisations de santé offrant des
services de première ligne et relevant du niveau local de gouvernement sont associées à
des effets bénéfiques pour les utilisateurs et leur milieu. Certaines initiatives se sont
développées au Québec qui reposent sur une forte implication des autorités municipales
(Turso, St-Étienne des Gré). Des propositions plus formelles ont aussi été formulées pour
confier à une MRC la fourniture de services de première ligne (MRC RimouskiNeigette). Il y a donc un fondement québécois à cette alternative.
Ces propositions sont formulées simplement pour ouvrir le débat actuel entourant les
types d’organisations de santé à privilégier au Québec. Ce débat repose de plus en plus
sur l’affirmation que l’avenir de système de santé québécois passe par un recours accru
aux organisations privées à but lucratif. Il n’y a aucun fondement empirique à cette
affirmation. Ces propositions sont formulées surtout pour orienter le débat vers des pistes
qui, sur la base d’observations empiriques, semblent prometteuses pour le Québec.
Toutes ces pistes alternatives ont fait l’objet de propositions et de discussions au Québec
par le passé. Elles sont formulées pour que des efforts aussi grands soient déployés pour
concevoir, initier et appuyer l’expérimentation de ces propositions que ceux déployés à
promouvoir le recours accru aux organisations à but lucratif de santé. L’avenir du
système de santé du Québec en dépend.
La troisième implication est que le type de propriété des organisations semble être une
condition nécessaire mais non suffisante pour assurer une bonne performance de leur
part. Les observations présentées révèlent des associations entre la performance et le type
de propriété des organisations, mais elles révèlent aussi d’importantes variations de la
performance d’organisations ayant le même type de propriété. Ces observations laissent
présager que d’autres facteurs s’ajoutent au type de propriété pour influencer la
performance de ces organisations. Des efforts doivent être déployés pour cerner ces
facteurs sur une base scientifique et expérimenter leur influence sur la performance des
organisations de santé québécoises. Des pistes intéressantes se dégagent d’une analyse
des caractéristiques des huit systèmes de soins les plus performants aux États-Unis
(Brunelle, 2006). Cette liste peut constituer le point de départ à l’identification de ces
facteurs. Ce qui est déjà clair, c’est que la performance des organisations ne dépend pas
d’une seule, mais bien de plusieurs caractéristiques qui sont mises ensemble de façon
cohérente.
16
Bibliographie
Becker, R. et Potter, J. (2002), « Organisational Rationality Performance, and Social
Responsibility: Results from the Hospital Industry », J Health Care Finan, vol. 29, no 1,
p. 23-48.
Brunelle, Y. (2006), Retour sur certains indicateurs comparés : du mieux, du pire et du
plus troublant, Présentation au 25ième Colloque Jean-Yves Rivard, Université de
Montréal.
Brunelle, Y., Ouellet, D. et Montreuil, S. (1988), Des Organisations de soins intégrés de
santé (OSIS) au Québec, Québec, Direction générale de la planification et de
l’évaluation, Ministère de la santé et des services sociaux.
Clark, R. C. (1980), « Does the Nonprofit Form Fit the Hospital Industry? », Harvard
Law Review, vol. 93, p. 1416-1489.
Contandriopoulos, A.-P. et al. (2000), « L’évaluation dans le domaine de la santé :
concepts et méthodes », Revue d’Épidémiologie et Santé Publique, vol. 48, p. 517-539.
Crampton, P. et Lay-Yee, R. (2005), « Primary care teams: New Zealand's experience
with community-governed non-profit primary care », Health Policy, vol. 72, no 2, p. 233243.
Cutler, D. M. et Horwitz, J. R. (2000), « Converting Hospitals from Not-for-Profit to ForProfit Status : Why and What Effects ? », dans D. M. Cutler (ed.), The Changing
Hospital Industry : Comparing Not-for-Profit and For-Profit Institutions, Chicago,
University of Chicago Press.
Evans, R.G. (1984), Strained mercy, Toronto, Batterworths.
Freeman, R. E. (1984), Strategic Management: A Stakeholder Approach, Boston, MA,
Pitman.
Gray, H. et al. (1991), TheProfit Motive and Patient Care: The Changing Accountability
of Doctors and Hospital, Cambridge, MA, Harvard University Press.
Hansmann, H. (1996), The Ownership of Enterprise, Cambridge, MA, Belknap Press of
Harvard University Press.
Hassan, M. M. (1996), « Let’s End the Nonprofit Charade », New England Journal of
Medicine, vol. 334, no 16, p. 1055-1057.
Hart, O. et al. (1997), « The proper cope of government theory and an application to
prisons », Q. J. Econ, vol. 62, p. 1127-1162.
17
Irving, R. A. (2000), « Should St. Merciful Hospital Become CorpHealth Inc.?
Ownership and Quality in U.S. Health Care Organizations », Nonprofit Management and
Leadership, vol. 11, no 1, p.3-20.
Organisation mondiale de la santé (2000), Rapport sur la santé dans le monde 2000 :
pour un système de santé plus performant, Genève, Suisse.
Parker, H. et al. (1997), Comparison of Community-Owned Not-for-Profit Hospitals and
Lolumbia/HCS Facilities, Based on Data Reported to the Florida Agency for Health
Care Administration, Florida, Parker, Hudson, Rainer & Dobbs, and Kolb.
Pineault, R. et Daveluy, C. (1996), La Planification de la santé : Concepts, méthodes et
stratégies, Ed. Nouvelles.
Pushkal, P. et al. (1999), « Effect of the Ownership of Dialysis Facilities on Patients’
Survival and Referral for transplantation », N Engl J Med, vol. 341, p. 1653-60.
Rotarius, T. et al. (2005), « Not-For-Profit Versus For-Profit Health Care Providers-Part
1: Comparing and Contrasting Their Records », The Health Care Manager, vol. 24, no 4,
p. 296-310.
Rotarius, T. et al. (2006), « Not-For-Profit Versus For-Profit Health Care Providers-Part
11: Companing and Contrasting Their Records », The Health Care Manager, vol. 25, no
1, p. 12-25.
Slee, V. et al. (2001), Health Care terms, Fourth Edition, St-Paul, Minneapolis, É-U,
Tringa Press.
Sloan, F. A. et al. (1993), « Hospital ownership and cost and quality of care: is there a
dime’s worth of difference? », Journal of Health Economics, vol. 20, p. 1-21.
Steinberg, R. (1993), « Public Policy and the Performance of Nonprofit Organizations: A
General Framework », Nonprofit and Voluntary Sector Quaterly, vol. 22, n o 1, p. 13-31.
Steinberg, R. et Gray (1993), « The Role of Nonprofit Entreprise in Hansmann Revisited
», Nonprofit and Voluntary Sector Quaterly, vol. 22, no 4, p. 297-316.
Weber, M. (1947), The Theory of Social and Economic Organizations, traduit par A.M.
Henderson et T. Parsons, New-York, Free Press185.
Weisbrod, B. A. (1997), «The Future of the Nonprofit Sector: Its Entwining with Private
Enterprise and Government », Journal of Policy Analysis and Management, vol. 16, no 4,
p. 541-555.
18
Weisbrod, B. A. (1998), « Institutional Form and Organizational Behaviour », dans W.
W. Powell et E. S. Clemens (ed.), Private Action and the Public Good, New-Haven: Yale
University Press.
Weisbrod, B. A. et Schlesinger (1986), « Public, Private, Nonprofit Ownership and the
Response to Asymmetric Information: The Case of Nursing Homes », dans S. RoseAckerman (ed.), The Economic of Nonprofit Institutions: Studies in Structure and Policy,
New-York, Oxford University Press.
Wilder, T. (1996), « Non-Profit Conversions: Conversion of Non-for-Profit Hospitals to
For-Profit Status Stirs Up Concerns », Health Care Policy, vol. 4, p.34.
19
Annexe : Liste des recherches retenues
Baker, C. M. et al. (2000), « Hospital ownership, performance, and outcomes: assessing
the state-of the-science », Journal of Nursing Administration, vol. 30, no 5, p. 227-240.
Becker, E. R. et Potter, S. J. (2002), « Organizational rationality, performance, and social
responsibility: results from the hospital industry », Journal of Health Care Financing,
vol. 29, no 1, p. 23-48.
Boscarino, J. et Chang, A. (2000), « Nontraditional services provided by nonprofit and
for-profit hospitals: Implications for community health », Journal of Healthcare
Managementnt, vol. 45, no 2, p.119-136.
Carlson, M. D., Gallo, W. T. et Bradley, E. H. (2004), « Ownership status and patterns of
care in hospice: results from the National Home and Hospice Care Survey », Medical
Care, vol. 42, no 5, p. 432-438.
Crampton, P. et al., « Does community-governed nonprofit primary care improve access
to services? Cross-sectional survey of practice characteristics », International Journal of
Health Services, vol. 35, no 3, p. 465-478.
Davis, G. E., Lowell, W. E. et Davis, G. L. (1998), « Comparing the value of service
between a state hospital and a private, for-profit psychiatric hospital: a clarified role for
tertiary care », American Journal of Medical Quality, vol. 13, p.147-157.
Grilli, R. G. et Taroni, F. P. (2007), « Effect of hospital ownership status and payment
structure on the adoption and use of drug-eluting stents for percutaneous coronary
interventions », Canadian medical association journal, vol. 176, no 2, p. 185-190.
Gruca, T. S. et Tippie, N. D. (2001), « The technical efficiency of hospitals under a single
payer system: the case of Ontario community hospitals », Health Care Management
Science, vol. 4, p. 91-101.
Harrington, C. et al. (2001), « Does Investor Ownership of Nursing Homes Compromise
the Quality of Care? », American Journal of Public Health, vol. 91, no 9, p. 1452-1455.
Helmig, B. et Lapsley, I. (2001), « On the efficiency of public, welfare and private
hospitals in Germany over time: a sectoral data envelopment analysis study », Health
services Management Research, vol. 14, p. 263-274.
Irvin, R. A. (2000), « Should S. Merciful Hospital Become CorpHealth, Inc.? Ownership
and Quality in U.S. Health Care Organizations », Nonprofit Management and
Leadership, vol. 11, no 1, p. 3-20, Base de données EconLit, 7 mai 2007.
20
Laamanen. R. et al. (2006), « Client perceptions of the performance of public and
independent not-for-profit primary healthcare », Scandinavian Journal of Public Health,
vol. 34, no 6, p. 598-608.
Meurer, J. R. et al. (2006), « Charges for childhood asthma by hospital characteristics »,
Pediatrics, vol. 102, no 6, p. 1-7.
Milcent, C. (2005), « Hospital ownership, reimbursement systems and mortality rates »,
Health Economics, vol.14, p.1151-1168.
Rosenau, P. V. (2003), « Performance Evaluations of For-Profit and Nonprofit U.S.
Hospitals », Nonprofit Management and Leadership, vol.13, no 4, p. 401-23.
Singh, H. et Kalavar, J. (2004), « Quality of care for hypertension and diabetes in federalversus Commercial -managed care organizations », American Journal of Medical
Quality, vol. 19, p. 19-24.
Sloan F. A. et al. (2001), « Hospital Ownership and Cost and Quality of Care: Is There a
Dime's Worth of Difference? », Journal of Health Economics, vol. 20, no 1, p. 1-21.
Sloan, F. A. et al. (2003), « Does the ownership of the admitting hospital make a
difference? Outcomes and process of care of medicare beneficiaries admitted with acute
myocardial infarction », Medical Care, vol. 41, no 10, p. 1193-1205.
Thomas, E. J., Orav, E. J. et Brennan, T. A. (2000), « Hospital ownership and preventable
adverse events », International Journal of Health Services, vol. 30, no 4, p. 745-761.
Weisbrod, B. A. (1997), « The future of the nonprofit sector: Its entwining with private
enterprise and government », Journal of Policy Analysis and Management, vol. 16, no 4,
p. 541-555.
Wheeler, J. R. et Nahra, T. A. (2000), « Private and public ownership in outpatient
substance abuse treatment: do we have a two-tiered system? », Administration and Policy
in Mental Health, vol. 27, no 4, p. 197-208.
Woolhandler, S. et Himmelstein, D. U. (1997), « Costs of Care and Administration at
For-Profit and Other Hospitals in the United States », The New England Journal of
Medicine, vol. 336, no 11, p. 769-774.
21
Tableau 1
Comparaison des organisations sans but lucratif et à but lucratif
Nb
Nb
Études
Observations
> Organisations
à but lucratif
Organisations sans but lucratif
= Organisations
à but lucratif
< Organisations
à but lucratif
Efficacité
8
21
38 %
57 %
5%
Accessibilité
6
48
66 %
30 %
4%
Globalité
3
17
84 %
5%
11 %
Réactivité
5
14
79 %
21 %
0%
Qualité
Productivité
10
10
89
147
61 %
46 %
26 %
27 %
13 %
27 %
Coûts totaux
7
72
46 %
28 %
26 %
Coûts administratifs
2
6
25 %
0%
75 %
DMS
2
4
50 %
25 %
25 %
Substitution
2
4
100 %
0%
0%
Efficience technique
5
69
63 %
30 %
7%
Rentabilité
3
11
0%
0%
100 %
Charges aux patients
4
13
8%
0%
92 %
Ressources humaines
5
8
100 %
0%
0%
Tableau 2
Comparaison des organisations publiques et à but lucratif
Nb
Nb
Organisations publiques
Études
Observations
> organisation
but lucratif
= organisation
but lucratif
< organisation
but lucratif
Efficacité
4
13
54 %
46 %
0%
Accessibilité
3
7
71 %
29 %
0%
Globalité
1
13
46 %
0%
54 %
Réactivité
3
8
62 %
38 %
0%
Qualité
Productivité
2
8
5
31
80 %
55 %
0%
28 %
20 %
17 %
Coûts totaux
5
15
20 %
40 %
40 %
Coûts administratifs
2
4
33 %
0%
67 %
DMS
2
4
25 %
25 %
50 %
Substitution
1
2
100 %
0%
0%
Efficience technique
5
6
83 %
17 %
0%
Rentabilité
2
10
0%
0%
100 %
Charges aux patients
3
11
0%
0%
100 %
Ressources humaines
3
4
100 %
0%
0%
22
Tableau 3
Comparaison des organisations sans but lucratif et publiques
Nb
Nb
Études
Observations
Organisations sans but lucratif
> organisations
publiques
= organisations
publiques
< organisations
publiques
Efficacité
4
8
0%
100 %
0%
Accessibilité
5
12
42 %
50 %
8%
Globalité
1
4
75 %
25 %
0%
Réactivité
5
11
9%
82 %
9%
Qualité
Productivité
3
9
15
27
27 %
8%
46 %
44 %
27 %
48 %
Coûts totaux
6
13
46 %
46 %
8%
Coûts administratifs
2
3
100 %
0%
0%
DMS
2
2
50 %
50 %
0%
Substitution
1
2
0%
100 %
0%
Efficience technique
4
7
14 %
29 %
57 %
Rentabilité
2
2
50 %
50 %
0%
Charges aux patients
1
1
100 %
0%
0%
Ressources humaines
2
5
40 %
0%
60 %
Tableau 4
Rang des organisations dans l’atteinte des effets selon le type de propriété
Effets
Efficacité
Accessibilité
Globalité
Réactivité
Qualité
Productivité
Total
Total
Total
Total
Total
Total
Coûts totaux
Coûts administratifs
DMS
Substitution
Efficience technique
Rentabilité
Type de Propriété
BL
SBL
PUB
3
1
1
3
1
2
2
1
2
3
1
1
3
1
1
3
2
1
3
2
1
3
2
1
2
3
1
3
1
1
3
2
1
1
2
3
23

Documents pareils