Denise Buonomano

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Denise Buonomano
HOMMAGE à DENISE BUONOMANO (1944-2015)
Denise était née le 26 avril 1944 à Souk Ahras (Algérie), une ville proche de la
frontière tunisienne, d’une famille pied-noir modeste comme elle le rappelait
dans un article : « Mon grand-père paternel, naturalisé français à l’âge de cinq
ans, était le fils d’un matelot corailleur de Naples. Le père de ma grand-mère
paternelle arriva de métropole en Algérie dès les années 1860. Quand à la
branche maternelle de ma famille, elle est originaire de Corse. De vrais
méditerranéens donc, comme la grande majorité des Pieds-Noirs, ce qui
explique peut-être le côté viscéral des affrontements à la fin du conflit ».
Toute jeune elle se révolte contre l’ambiance colonialiste et raciste existant
néanmoins dans son milieu. Plus tard elle adhérera à l’Association des pieds
noirs progressistes et de leurs amis (ANPNPA). Elle participait à quelques
activités de l’Association des anciens appelés d’Algérie pour la paix (4ACG).
Un texte sur son expérience de jeunesse se trouve sur le blog de ce site (Denise
Buonomano : itinéraire d’une « Pied-noir »).
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Admise à l’école normale d’Annaba (ex-Bône), elle s’y préparait à devenir
institutrice. Denise vécut les évènements d’Algérie, rapportant les souvenirs
d’une violence ordinaire. « Novembre 54. Premières victimes : un instituteur
arrivé de métropole, et le Bachaga (administrateur musulman) qui voulut
s’interposer. Dans les journaux, litanie quotidienne des horreurs commises par
les fellaghas. Guérilla urbaine : jets de grenades ; une de mes copines de lycée,
musulmane, reçoit une balle dans un pied. Nuit de terreur sous notre balcon, à
Annaba (Bône). Une opération menée par les bérets rouges : quartier bouclé;
grenades et tirs de mitraillettes ; les camions de l’armée pleins de cadavres. Et
pour l’ambiance : les you-you des femmes, les casseroles scandant les slogans;
le projecteur faisant sa ronde. Pourtant, ma mère et moi, nous avons eu
l’occasion de constater que tous les musulmans n’étaient pas des égorgeurs. La
rumeur (la valise ou le cercueil) nous faisait peur ». Il faut partir et Denise doit
intégrer une école normale en France. Elle finit ses études à Nantes : « Je suis
arrivée dans un lycée huppé de Nantes, fréquenté par la bourgeoisie et la
noblesse. Mon niveau scolaire était très moyen. Mais je commençais à découvrir
plein de choses ». Denise devient donc professeure des écoles, avec un premier
poste dans le nord de la Loire-Atlantique, adhérente à l’incontournable SNI
qu’elle quitte dans les années 1970. Elle continua à s’interroger sur le racisme,
la xénophobie et son « identité » qu’elle définissait ainsi : « Longtemps j’ai eu
honte de me définir comme pied-noire. Je m’identifiais comme faisant partie
d’un bloc irresponsable et va-t-en guerre, grandement responsable de la
tournure des choses…A présent, je peux me présenter comme « une algérienne
pied-noire ».
C’est surtout à la retraite dans le Syndicats des RETRAITES SOLIDAIRES
qu’elle a pu mettre en pratique ses idées sur la culture populaire, (renouant ainsi
avec un des buts historiques des bourses du travail qui était l’éducation des
travailleurs) et ne pas laisser ainsi à la classe bourgeoise dominante le privilège
du savoir. Représentante de SOLIDAIRES au conseil d’administration du
CDHMOT, elle avait donné un texte sur la culture populaire que l’on peut lire
dans la lettre d’Information n°16 de 2010 : « Point de vue : La culture populaire,
pérégrinations et perversions d’une idée généreuse ». Denise avait co-créé dans
le syndicat un groupe de recherche économique (GRECO) qui avait la prétention
de se réapproprier et décoder le langage économique. Elle est morte le 26
décembre 2015.
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