DROIT DE GARDE «RENDEZ-MOI MES GARÇONS!» Parents de

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DROIT DE GARDE «RENDEZ-MOI MES GARÇONS!» Parents de
DROIT DE GARDE
«RENDEZ-MOI MES GARÇONS!»
Parents de quatre enfants, Sandrine Babel Andrieux et son mari luttent pour la garde de trois d’entre eux et
la santé du plus jeune, enfant autiste. Mais peut-on gagner un bras de fer contre le Service de protection des
mineurs (SPMi) à Genève?
Par Laurent Favre - Mis en ligne le 26.02.2013 sur le site de « L ’illustré »
Bardonnex, paisible village genevois à quelques centaines de mètres de la frontière française. Un grand
appartement moderne, au rez-de-chaussée d’un petit immeuble agréable. Quatre enfants jouent dans le
salon: trois frères et un copain. Ecrans plats, console de jeux, ordinateurs portables, chambre avec salle de
bains privative, nounou à demeure. Du coin cuisine, leur mère les regarde tout en discutant avec un ami,
Marc Falquet, député au Grand Conseil genevois. Toutes les apparences d’une famille genevoise privilégiée.
Mais les apparences sont trompeuses. Depuis près d’un an, la famille Andrieux, le père Serge, la mère
Sandrine Babel Andrieux, les enfants Thomas (11 ans), Raphaël (10), Aurélien (8) et Matthieu (5), vit un
véritable cauchemar.
LES GENDARMES À L’ÉCOLE
Le 17 avril 2012, une assistante sociale du Service de protection des mineurs (SPMi) accompagnée de
gendarmes en uniforme est venue chercher Thomas, Raphaël et Aurélien à l’école de Compesières, puis le
benjamin Matthieu au domicile familial. Le 5 avril précédent, le tribunal tutélaire avait statué provisoirement
et en urgence sur le retrait de la garde des enfants Andrieux. Les deux aînés sont conduits au foyer de Salvan
(VS). Les deux plus jeunes sont placés au service pédiatrique des HUG de Genève, car Aurélien est victime de
neurofibromatose (une maladie génétique orpheline) et Matthieu est un enfant autiste.
Après plusieurs mois «de batailles et de peur», les parents récupèrent provisoirement la garde des trois plus
grands. Mais ils constatent des séquelles physiques et psychiques (l’aîné, Thomas, prend des antidépresseurs
et ne va plus à l’école), dénoncent des manquements graves aux codes de procédure, des rapports orientés
ou malveillants, des surdosages médicamenteux, des qualificatifs illégaux dans les diagnostics ainsi qu’une
pratique répétée du chantage au droit de visite.
En guerre contre les services sociaux, Sandrine Babel Andrieux se bat désormais pour récupérer Matthieu (5
ans), toujours placé en unité de soins psychiatriques. «C’est urgent, clame-t-elle. Chaque jour passé là-bas
aggrave son état.» Des propos corroborés par Marie-Jeanne Accietto, présidente d’Autisme Genève. «Un
seul établissement à Genève est adapté au cas d’Aurélien. Il devrait y être placé, en collaboration totale avec
la famille. Or, en raison d’une absence de communication et d’un idéologisme obtus, c’est tout le contraire
qui se passe. C’est malheureusement assez courant à Genève.»
UNE QUESTION SANS RÉPONSE
Il y aurait de quoi écrire un roman. Ou réaliser l’un de ces téléfilms de début d’après-midi sur M6 où tout est
déjà dit dans le titre: «Rendez-moi mes enfants», «Je ne suis pas une mère indigne», etc. Essayons de
résumer l’affaire sans la dénaturer. Tout débute le 5 novembre 2009 à Lausanne, où la famille réside alors.
Laissé à la garde d’une nounou, Matthieu (2 ans à l’époque) est retrouvé seul au bord de la route. Alerté, le
Service de la jeunesse de Lausanne ouvre une enquête puis transmet le dossier au SPMi lorsque les Andrieux
s’installent à Genève. L’école de Compesières alerte à son tour le SPMi. A Bardonnex, les relations se tendent
très vite entre les parents et les assistants sociaux. Sandrine et Serge Andrieux refusent toute aide et
contestent tout droit d’ingérence au SPMi. Les positions se radicalisent, jusqu’à l’enlèvement des enfants.
«Des criminels seraient mieux traités»
Sandrine Babel Andrieux
Durant les trois heures que nous avons passées avec cette famille, le comportement des enfants a été
irréprochable. Pas de cri ni de bagarre. Ils semblent être attachés à leur mère et ne pas manquer d’affection.
La question se pose: pourquoi ont-ils été et risquent-ils encore d’être placés en foyer? A lire les kilos de
paperasse qui composent ce dossier, il est parfois question d’absences et de retards à l’école, de tenues
négligées, de mauvaise collaboration des parents, de maladresses comportementales face à l’enfant autiste.
Mais rien qui nesemble valider la «clause péril» qui actionne normalement le retrait immédiat de la garde
parentale.
Au SPMi, la juriste nommée curatrice de la fratrie «est absente pour six mois». Son remplaçant nous renvoie
à ses supérieurs. Contacté, l’Office de la jeunesse explique poliment mais fermement que «la publicité faite
par les parents ne délivre pas les services sociaux du devoir de réserve». «Un signalement doit respecter un
protocole extrêmement cadré et balisé», assure Jean-Luc Boesiger, directeur à la Direction générale de
l’enseignement primaire.
L’affaire a été révélée au début du mois par l’hebdo satirique Vigousse. Le journaliste Joël Cerutti y dénonce
«une querelle d’adultes qui retombe sur la gueule des enfants» et pointe de nombreux dysfonctionnements
au sein du SPMi. «Depuis mes articles, j’ai reçu une vingtaine de témoignages spontanés. Nombre d’entre
eux interpellent...» Présidente de l’Association pères mères enfants solidaires (PMES), Leïla Elisabeth
Pellissier connaît des dizaines de cas. «A Genève, on retire facilement des enfants à leurs parents, mais on a
grand-peine à reconnaître une erreur. Alors on tergiverse, on essaie quand même de trouver quelque
chose.»
MACHINERIE INSTITUTIONNELLE
Devenu un proche des Andrieux, le député Marc Falquet confirme: «Lorsque j’étais inspecteur de police, j’ai
rencontré beaucoup de familles broyées par cette «machinerie institutionnelle» qui fonctionne pour ellemême. Lorsque le SPMi prend le pouvoir, il devient extrêmement difficile aux parents de s’en sortir.» «Les
assistants sociaux ont un pouvoir énorme et pas beaucoup de garde-fous. C’est un métier de l’humain, avec
une grande part laissée à la subjectivité et à la libre interprétation des personnels», nous confie un éducateur
de la petite enfance. Mal à l’aise avec certaines pratiques en vigueur dans les foyers d’accueil, il a changé de
travail. Son conseil: «Si vous le pouvez, évitez d’avoir affaire au SPMi. Et si vous ne le pouvez pas,
trouvezvous un très bon avocat.»

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