Évaluation comparative de 29 trousses commercialisées pour

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Évaluation comparative de 29 trousses commercialisées pour
SÉROLOGIE Helicobacter pylori
Évaluation comparative de 29 trousses
commercialisées pour le diagnostic
sérologique de l’infection
par Helicobacter pylori :
étude multicentrique du Groupe
d’Étude Français des Helicobacter (GEFH)(*)
J.L. FAUCHÈRE(1), N. CHARLIER-BRET(2), A. COURILLON-MALLET(1),
J.D. DE KORWIN(1), J.RAYMOND(1) , C. BURUCOA(1), B. BOUCHER(2),
T.D. LY (3), F. ZERBIB (4), F. MÉGRAUD(1)(5), J.C. DELCHIER(1)
La sérologie a été l’une des premières méthodes utilisées pour le diagnostic de l’infection à Helicobacter pylori (3,
10, 13, 21). En effet, cette infection entraîne une réponse
immunitaire forte et durable comportant notamment une
augmentation du taux des IgG sériques, qui reste élevé
pendant toute la durée de l’infection et diminue ensuite
lentement pour redevenir, en 6 à 12 mois, comparable à
celui de sujets non infectés (4, 15). Les anticorps sériques
qui apparaissent lors de l’infection sont spécifiques des antigènes d’espèce de H pylori (1, 3, 30), ce qui fait que des
résultats satisfaisants de sérodiagnostic ont pu être obtenus
même en utilisant des extraits bactériens bruts comme
antigènes (31, 33). Toutefois, la possibilité de réaction
croisée, notamment avec certains antigènes du genre Campylobacter (2, 30), a conduit à utiliser des antigènes ou mélanges d’antigènes purifiés pour la mise en évidence de la
réponse anticorps à des fins diagnostiques. De nombreuses
trousses correspondant à des préparations antigéniques
de nature variée sont actuellement commercialisées. La
plupart utilise une technique ELISA et détecte seulement
les IgG ; certaines détectent aussi les IgA.
Le fait que la sérologie ne détecte pas seulement une
infection active mais puisse rester positive plusieurs mois
après l’éradication prouvée de l’infection, a entraîné
l’abandon de cet examen comme outil de contrôle de l’efficacité du traitement d’éradication, ce qui est justifié. Ce
discrédit a entraîné également l’abandon de la sérologie
comme outil de diagnostic initial de l’infection, ce qui
n’est pas justifié, car dans la pratique, la proportion de
faux positifs est très faible (7, 23). Du fait de sa sensibilité,
(*) Texte reproduit avec l’autorisation de l’Agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé
(Afssaps).
(1) Groupe d’étude Français des Helicobacter CHU Henri
Mondor (Créteil).
(2) Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits
de Santé.
(3) Laboratoire Biomnis (94208 Ivry sur Seine).
(4) Pôle d’hépato-gastro-entérologie Hôpital Saint André,
CHU de Bordeaux.
(5) Centre National de référence des Campylobacter et
Helicobacter, laboratoire de Bactériologie - C.H.U.
Pellegrin 33076 Bordeaux.
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feuillets de Biologie
VOL LII N° 298 - JANVIER 2011
SÉROLOGIE Helicobacter pylori
I. - INTRODUCTION
la sérologie peut être positive et témoigner d’une infection
bien réelle, alors que les tests directs, notamment la culture,
peuvent être négatifs pour différentes raisons. Le manque
de spécificité attribué à la sérologie reflète l’insuffisance
des tests dits de référence auxquels on la compare. Le
regain d’intérêt observé actuellement pour la sérologie est
lié à l’amélioration des tests sérologiques disponibles,
notamment en terme de spécificité, mais aussi au fait que
dans les pays occidentaux, de plus en plus de patients
reçoivent un traitement antisécrétoire entraînant une
diminution de la sensibilité de tous les tests diagnostiques
excepté de la sérologie (11). De plus, il existe des situations cliniques particulières : hémorragie digestive (26),
atrophie gastrique (14), lymphome gastrique du MALT
(18), carcinome gastrique (8) où la sérologie s’est révélée
comme le test diagnostique le plus performant. En effet,
la faible quantité de bactéries qui colonisent l’estomac dans
ces circonstances cliniques entraîne une diminution de la
sensibilité des méthodes directes de diagnostic. Enfin des
études récentes ont montré que les tests sérologiques
pourraient être prochainement capables de détecter des
marqueurs bactériens associés à des risques d’évolution
sévère d’une infection à H. pylori (22, 1, 32, 16, 6).
Pour toutes ces raisons, alors que la 2ème conférence de
Maastricht (2000) avait écarté la sérologie de l’arsenal
diagnostique recommandé pour un diagnostic initial de
l’infection à H. pylori dans les cas où une endoscopie
n’était pas réalisée (19), la 3ème conférence de Maastricht
(2005) a revu cette position, et stipule que « certains tests
sérologiques ayant une bonne sensibilité et spécificité peuvent aussi être utilisés pour faire le diagnostic initial d’une
infection à H. pylori » (20). De plus, elle recommande la
sérologie comme test diagnostique quand les autres techniques diagnostiques risquent d’être faussement négatives : en cas d’ulcère hémorragique, d’atrophie gastrique,
de lymphome de MALT et en cas d’utilisation récente ou
en cours d’inhibiteurs de la pompe à proton et d’antibiotiques.
SÉROLOGIE Helicobacter pylori
Depuis plusieurs années, des tests sérologiques rapides
ont été commercialisés. Ces tests peuvent être pratiqués
sur du sang, des urines ou de la salive. Ils utilisent des techniques d’immuno-chromatographie ou d’agglutination
passive. Leur intérêt pratique est indéniable (rapidité,
facilité d’utilisation) mais, jusqu’à maintenant, leur mauvaise sensibilité les a fait réserver aux études épidémiologiques. La 3ème conférence de Maastricht ne recommande
pas leur utilisation dans le cadre du diagnostic (20).
De très nombreux tests pour le diagnostic sérologique
de l’infection à H. pylori sont aujourd’hui disponibles. Il
était donc nécessaire que leurs performances soient évaluées de façon comparative. Dans ce travail, nous avons
évalué les performances de 29 trousses commercialisées
pour le diagnostic sérologique de l’infection à H. pylori (17
tests IgG ELISA et 12 tests rapides) en utilisant un panel
de 93 sérums provenant de patients infectés ou non par
H. pylori selon des critères histologiques et bactériologiques de référence.
II. - MATÉRIEL ET MÉTHODES
Le protocole de cet essai a été conçu et réalisé par le
Groupe d’Etudes Français des Helicobacter (GEFH). Il a été
validé par l’« Agence Française de sécurité sanitaire des
produits de santé » (Afssaps) avec l’accord des industriels
commercialisant les dispositifs médicaux évalués. Il a été
également validé par le comité consultatif de protection des
personnes en recherche biomédicale d’Île de France IX.
Le protocole détaillé est consultable sur le site de l’Afssaps
(http://www.afssaps.fr).
A) Patients et sérums
Cent douze patients ont été recrutés de façon prospective dans les services de gastro-entérologie de 5 centres hospitaliers français : CHU Henri Mondor de Créteil, CHU
Pellegrin de Bordeaux, CHU Brabois de Nancy, CH intercommunal de Villeneuve Saint Georges et CH de l’Hôtel
Dieu à Paris. Les critères d’inclusion et de non inclusion
des patients dans l’essai étaient les suivants :
Inclusion : homme ou femme d’âge supérieur ou égal
à 18 ans et inférieur à 80 ans ayant une indication pour
une fibroscopie gastrique à visée diagnostique, anatomopathologique et bactériologique.
Non inclusion : grossesse ou allaitement, tentative antérieure d’éradication de H. pylori, prise d’antibiotiques
dans les 4 semaines précédant la fibroscopie gastrique,
prise d’antisécrétoires dans les deux semaines précédant
la fibroscopie gastrique, immunodéprimés, antécédent de
chirurgie gastrique.
Les patients inclus et ayant signé un consentement
éclairé ont bénéficié d’une fibroscopie gastrique avec prélèvement de biopsies antrales et fundiques pour la réalisation d’un examen histologique, d’un test rapide à l’uréase
et d’une culture. Un test respiratoire à l’urée marquée
était également réalisé. Un prélèvement de sang total était
effectué le jour de la fibroscopie. Le sang était immédiatement centrifugé et le sérum aliquoté et stocké à - 80°C
jusqu’à la réalisation des tests sérologiques. Chaque sérum
était étiqueté avec un numéro d’anonymat.
Les résultats des examens pratiqués ont permis de qualifier chacun des patients inclus comme infecté ou non
infecté par H. pylori. Le diagnostic d’infection à H. pylori
était basé sur les résultats de tests de référence dont la technique est précisée plus bas et selon les critères suivants :
– Un patient était considéré comme infecté si la culture
de sa biopsie était positive à H. pylori. En cas de résultat
négatif de la culture, un patient était considéré comme
infecté si la recherche histologique de H. pylori et le test
rapide à l’uréase ou le test respiratoire à l’urée marquée
étaient positifs.
– Un patient était considéré comme non infecté si tous
les tests diagnostiques pratiqués étaient négatifs et si
l’examen histologique montrait une absence de gastrite
active.
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Helicobacter pylori
B) Tests diagnostiques de référence
– Recherche de H. pylori par culture dans des biopsies gastriques :
Cette méthode a été mise en œuvre en suivant le protocole décrit précédemment (5, 29). Les cultures étaient
incubées pendant 12 jours à 37°C sous atmosphère microaérobie et examinés toutes les 48 H. Les colonies obtenues
étaient identifiée comme H. pylori sur la base des marqueurs habituels d’identification (5).
– Recherche de H. pylori par examen histologique de biopsies gastriques :
Le diagnostic d’infection à H. pylori sur la base de l’examen histologique était établi selon les critères de Sydney
(12). Les coupes de biopsies étaient colorées par la méthode de Romanovsky ou Giemsa modifié (9). L’infection
à H. pylori était objectivée par la présence de bâtonnets de
morphologie évocatrice au niveau de la surface luminale.
La densité en bactéries était exprimée par un score de 0 à 3.
– Recherche de H. pylori par le test respiratoire :
Ce test a été pratiqué selon le protocole recommandé
(29, 25). Brièvement, le patient ingérait successivement
1,4 g d’acide citrique en solution et 75 mg d’urée marquée
au 13C. Après 30 minutes, un échantillon de l’air expiré
par le patient était recueilli et analysé par spectrométrie
de masse afin d’établir le ratio 13C/12C de l’échantillon. Ce
ratio était comparé à celui obtenu dans les mêmes conditions sur un échantillon recueilli juste avant l’ingestion
d’urée marquée. L’infection à H. pylori était considérée
comme avérée si le ratio 13C/C12C augmentait de plus de
4 ‰ après l’ingestion d’urée.
– Recherche de H. pylori par le test à l’uréase :
Une fraction de la biopsie gastrique était placée dans
un milieu contenant de l’urée et un indicateur de pH
(Helikit® laboratoire Mayoly Spindler Chatou France).
L’activité de l’uréase de H. pylori était objectivée par une
alcalinisation du milieu mise en évidence par son virage
au rouge en moins de 2 heures à 37°C.
– Évaluation histologique de H. pylori et de la gastrite :
Les coupes de biopsies étaient fixées au formol et colorées par l’Hématéine-Eosine-Safran. Les lésions étaient
évaluées selon le système de Sydney (12). Les bâtonnets
évocateurs de la bactérie dans le mucus gastrique étaient
recherchés sur les biopsies fundiques et antrales et leur
abondance quantifiée selon un score de 1 à 3. L’existence
d’une gastrite était objectivée par la présence de polynucléaires neutrophiles (PNN) au niveau du chorion de la
muqueuse et l’inflammation était définie par la présence
d’une infiltration de cellules lympho-plasmocytaires. Les
densités en PNN et en cellules lympho-plasmocytaires
étaient évaluées par des scores de 0 à 3. Un score ≥ 1 pour
ces 2 paramètres était interprété comme un signe d’infection active à H. pylori.
C) Tests sérologiques évalués
Vingt neuf trousses commercialisées en France ont été
évaluées (Tableau). Quinze d’entre elles utilisaient une
technique ELISA classique recherchant des IgG, 2 utilisaient des techniques ELISA sur automates « fermés »,
9 étaient des tests de diagnostic rapide (TDR) utilisant
l’immuno-chromatographie, 2 étaient des TDR utilisant
l’agglutination passive et un était un TDR utilisant une
technique ELISA (Tableau). Ces tests ont été réalisés de
manière centralisée dans le laboratoire de l’UECM-DIV de
l’Afssaps en suivant les recommandations des fabricants
telles qu’elles apparaissent dans les notices fournies aux
utilisateurs.
III. - RÉSULTATS
Au total, 113 malades ont été recrutés : 50 hommes et
63 femmes, âgés de 22 à 87 ans (âge moyen : 48,8 ans).
Parmi ceux-ci, 10 présentaient à l’endoscopie, un ulcère
gastroduodénal et les 103 autres une muqueuse normale
ou simplement érythémateuse. En utilisant les critères décrits plus haut, 3 groupes de patients ont été constitués :
44 patients infectés (25 femmes et 19 hommes ; 42 cultures
positives et 2 cultures négatives mais test à l’uréase et examen histologique positifs), 53 patients non infectés (29
femmes et 24 hommes) et 16 patients dont l’infection était
douteuse qui n’ont pas été pris en compte dans l’analyse
finale. Après l’étude technique, 4 sérums provenant de
patients non infectés ont été trouvés positifs par 28 des
29 dispositifs testés. Une analyse des anticorps sériques par
western blot réalisée sur chacun de ces 4 sérums a mis en
évidence la présence d’anticorps anti H. pylori (données
non montrées). Une enquête rétrospective a montré que
chez ces patients, les anticorps sériques anti-H. pylori
provenaient d’une immunisation ancienne. Ces patients
auraient donc pu être considérés comme non infectés au
jour de l’inclusion. Ils ont néanmoins été exclus de l’analyse finale.
Au total, l’analyse des performances des 29 tests a porté
sur les sérums de 93 patients (44 infectés et 49 non infectés). La prévalence de l’infection était donc de 47,3 % dans
la population étudiée. Les 44 patients infectés étaient âgés
de 22 à 87 ans (moyenne 48,8 ans). Les 49 patients non
infectés étaient âgés de 23 à 65 ans (moyenne 47 ans).
Les performances diagnostiques des 29 tests sérologiques sont résumées dans le tableau. Pour les 17 tests
ELISA, les valeurs de l’index de performance (proportion
de sérums correctement classés par le test) varient entre
73,9 (R10) et 97,8 % (R8). Les sensibilités varient de 86,7
(R1) à 100 % (R3, R9, R13 et R17). Les spécificités varient
de 57,4 % (R13) à 97,9 % (R1, R8), Les valeurs prédictives
négatives (VPN) varient de 93,2 (R2) à 100 % (R3, R9,
R11, R13 et R17). Les valeurs prédictives positives (VPP)
varient de 75 (R13) à 100 % (R1).
Pour les 12 TDR, les performances sont moins bonnes
et plus hétérogènes. Les index de performances varient
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SÉROLOGIE Helicobacter pylori
– L’infection était considérée comme douteuse dans tous
les autres cas et en particulier si un seul test diagnostique
autre que la culture était positif (histologie, test rapide à
l’uréase, test respiratoire, présence d’une gastrite active).
de 73,9 (R25) à 87,9 (R18). Les sensibilités varient de 46,7
(R28 lot 2, R29 lot 2) à 97,8 % (R24). Les spécificités
varient de 70,2 (R24) à 100 % (R28 lot 2 et R29 lot 2). Les
VPN varient de 67,1 (R28 lot 2, R29 lot 2) à 97,5 % (R20).
Les VPP varient de 75,9 (R24) à 100 % (R28 lot2, R29 lot 2).
titude liée aux méthodes de référence. Les 4 patients non
infectés dont les sérums contenaient des anticorps anti-H.
pylori révélés par immunoblotting (28) ont également été
exclus de l’étude puisque on se proposait d’évaluer la capacité des tests à prédire une infection active et non leur
capacité à prédire la présence d’anticorps dans le sérum.
IV. - DISCUSSION
Le protocole utilisé prévoyait la participation effective
des fabricants qui pouvaient contester les conclusions de
l’étude ou apporter des arguments explicatifs ou des mesures correctives visant à améliorer les performances de
leur matériel. Dans ce dernier cas, la trousse était retestée
dans les mêmes conditions et les résultats présentés étaient
ceux correspondant au matériel amélioré, sous réserve
que l’ensemble des dispositifs distribués bénéficie de
l’amélioration. Cette procédure a été appliquée pour les
dispositifs R7, R8, R17 et R18. Les améliorations apportées
étaient, soit des modifications de réactifs, soit des modifications du seuil de positivité du test.
SÉROLOGIE Helicobacter pylori
L’évaluation d’un test de diagnostic doit permettre de
connaître sa capacité à prédire l’existence d’une maladie
chez un patient. Pour cela on utilise un groupe d’individus
dont on sait s'ils ont ou non la maladie et on détermine
les paramètres quantitatifs de performances du test (24).
La sensibilité qui mesure la proportion de malades (infectés) ayant un test positif et la spécificité qui mesure la proportion de sujets sains (non infectés) ayant un test négatif
sont les deux paramètres les plus souvent déterminés. Ces
deux paramètres qui s’influencent mutuellement doivent
être pris en compte ensemble pour l’évaluation des performances d’un test. Un test de bonne qualité doit réaliser
un bon compromis entre une sensibilité élevée et une
bonne spécificité. Ces paramètres sont distincts de la valeur prédictive positive qui est la probabilité que la maladie
soit présente lorsque le test est positif et la valeur prédictive
négative qui est la probabilité que la maladie ne soit pas
présente lorsque le test est négatif. Ces deux derniers
paramètres permettent au médecin d’évaluer la fiabilité
clinique de la réponse fournie par un test en fonction de
la prévalence de la maladie dans la population. Ainsi, pour
une même sensibilité et spécificité, la valeur prédictive négative d'un test donné va être d'autant élevée que la maladie est rare et la valeur prédictive positive du même test va
être d'autant plus élevée que la maladie est fréquente.
Enfin l’index de performance d’un test permet de savoir
avec quelle fréquence le test est capable de classer correctement un patient comme porteur ou non de la maladie.
C’est un index d’évaluation globale très utile pour comparer les tests entre eux.
La qualité de l’évaluation d’un test est très dépendante
de la méthodologie utilisée (17). Le groupe de patients
utilisé comme référence doit évidemment être constitué
avec soin. Les critères qui permettent de classer un patient
comme malade ou non malade doivent se rapprocher le
plus possible de la définition de la maladie. Dans ce travail,
l’infection à H. pylori a été définie comme la présence de
bactéries cultivables dans un échantillon de muqueuse gastrique. En l’absence de culture positive, la positivité de
deux tests parmi les tests suivants : histologie, test rapide à
l’uréase, test respiratoire à l’urée marquée au C13, était
requise pour affirmer l’infection. Le nombre de patients
infectés (44) et non infectés (49) étaient voisins ce qui a
permis de faire une évaluation satisfaisante compte tenu
de la prévalence de l’infection dans la population de
patients justiciables d’une fibroscopie gastrique à la
recherche de H. pylori. Nous avons éliminé de l’étude les
16 patients chez qui l’infection était douteuse. En effet,
cette catégorie ne rend pas compte des performances
diagnostiques des tests évalués mais reflète plutôt l’incer-
Chaque dispositif a été utilisé dans les strictes conditions
recommandées par le fabricant et mentionnées sur la notice d’emploi et de description du matériel accompagnant
la trousse. En particulier, les seuils de positivité des tests
étaient ceux recommandés sur les notices même si dans la
plupart des cas, les méthodes pour déterminer ces seuils
n’étaient pas précisées. Pour beaucoup de tests évalués, il
aurait sans doute été intéressant d’établir ces seuils par la
construction de courbes ROC (27).
Les notices des fabricants étaient de qualité très inégale
et, très souvent, les performances qui y étaient annoncées
étaient supérieures à celles que nous avons mises en évidence dans cette étude. Les différences portaient le plus
souvent sur la sensibilité et la spécificité des tests. Ces
paramètres étaient dans la plupart des notices issus de la
littérature ou calculés à partir d’un nombre d’échantillons
variant selon les cas entre 17 et 382. Le plus souvent, le test
de référence choisi était contestable. Souvent il s’agissait
du résultat fourni par la seule recherche de H. pylori sur
les coupes destinées à l’examen histologique ou des résultats fournis par un autre test sérologique déjà existant sur
le marché. À la suite de cette étude, les échanges entre
l’Afssaps et les fabricants ont permis de mettre la plupart
des notices en conformité avec la réglementation européenne.
Parmi les 17 tests ELISA, le meilleur compromis de performances a été obtenu avec R8 après une 2ème détermination pratiquée sur un matériel amélioré. Cette trousse a
fourni un index de performance de 97,8 %, une sensibilité
de 97,8 % et une spécificité de 97,9 %. Sa VPP était de 97,8
et sa VPN de 97,9. On n’a observé aucun résultat douteux,
un seul faux positif et un seul faux négatif.
Des valeurs de sensibilité et spécificité supérieures à
90 % ont été observées pour R5, R6, R8, R16. La meilleure
VPP (100 %) était observée pour R1. Des VPN de 100 %
étaient observées pour R3, R9, R11, R13 et R17 mais
souvent au prix d’un nombre important de réponses
douteuses ou faussement positives.
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Helicobacter pylori
Tableau I - Performances diagnostiques de 29 trousses dédiées au sérodiagnostic de l’infection par H. pylori.
Codes et noms
commerciaux
Index
performance
(%)
Sensibilité
(%)
Spécificité
(%)
VPP
(%)
VPN
(%)
Nb.
faux
négatifs
Nb.
faux
positifs
Nb
résultats
douteux
Tests ELISA (n = 17)
R1
Helicobacter pylori IgG Elisa
(IBL Allemagne)
NovaLisa Helicobacter pylori
IgG (Novatec Allemagne)
Ridascreen
(R.Biopharm Alemagne)
Premier HP (Meridian
Bioscience Europe Italie)
92,4
86,7
97,9
100,0
93,9
3,0
0,0
4
89,1
91,1
87,2
87,2
93,2
3,0
6,0
1
83,7
100,0
68,1
91,8
100,0
0,0
4,0
11
91,3
97,8
85,1
86,3
97,6
1,0
7,0
0
94,6
97,8
91,5
91,7
97,7
1,0
4,0
0
94,6
97,8
91,5
91,7
97,7
1,0
4,0
0
92,4
95,6
89,4
93,5
97,7
1,0
3,0
3
97,8
97,8
97,9
97,8
97,9
1,0
1,0
0
R9 Captia (Trinity Biotech)
88,0
100,0
76,6
84,9
100,0
0,0
8,0
3
R10 GAP (Biomerica USA)
73,9
88,9
59,6
86,9
93,3
2,0
6,0
16
87,0
93,3
80,9
97,7
100,0
0,0
1,0
11
90,2
95,6
85,1
89,6
97,6
1,0
5,0
3
78,3
100,0
57,4
75,0
100,0
0,0
15,0
5
92,4
95,6
89,4
95,6
95,5
2,0
2,0
3
91,3
96,6
87,2
89,6
95,3
2,0
5,0
1
94,6
93,3
95,7
95,5
93,8
3,0
2,0
0
89
100
78,7
89,8
100
0
5
0
R2
R3
R4
R5 BioElisa (Biokit Espagne)
Pyloriset EIA IgG
(Orion Finlande)
Helicobacter pylori IgG
R7
(Virion Serion Allemagne)
Enzygnost
R8
(Siemens Allemagne)
R6
R11
Helicobacter pylori IgG ELISA
(MP BIO Allemagne)
R12 Platelia (BioRad)
Helicobactor pylori Elisa Test
R13
system (ZeusScientific Allemagne)
Immulite 2000
R14
(Siemens Allemagne)
R15 Vidas (BioMérieux)
Helicobacter pylori IgG
R16
(Biohit Finlande)
Helicobacter pylori IgG
R17
Elisa ref 1503Z
«new»
(Dg Automation Cortez USA)
R18 Assure (MP Bio Asie)
87,9
91,1
84,8
85,4
90,7
4
7
9
80,4
71,1
89,4
94,1
85,7
7
2
9
88
93,3
83
85,7
97,5
1
7
3
82,6
66,6
97,9
96,8
75,4
15
1
0
88,9
77,8
93,6
94,6
84,6
8
2
3
86,8
81,8
91,5
90
84,3
8
4
0
83,2
97,8
70,2
75,9
97,1
1
14
0
73,9
55,6
91,5
92,6
66,3
20
2
2
Clear view
(Unipath Ltd -Inverness)
85,9
86,7
85,1
84,8
93
3
7
3
One step H Pylori rapicard R27 Serum insta test
«new» Ref 118561-L
(Diagnostic Automation Cortez)
80,2
65,9
93,6
90,6
74,6
15
3
0
91,3
84,4
97,9
97,4
86,8
7
1
0
73,9
46,7
100
100
67,1
23
0
1
82,6
66,7
97,9
96,8
75,4
15
1
0
73,9
46,7
100
100
67,1
23
0
1
R19
R20
R21
R22
H.pylori rapid test device
(Coffret) ref IHP402 (ACON)
One step Hp Test device
ref IHP 302 (ACON)
Immunocard
(Meridian Bioscience)
H.pylori Rapid Test Strip ref
IHP 401 (ACON)
R23 Aurodex (Dexall Biomedical)
R24
Immunocomb II card
(Orgenics Israel )
R25 Pyloritop Ab (All Diag)
R26
Pylori Test (Oxoid)
Lot 1 lecture à 3 mn
Pylori Test (Oxoid)
Lot 2 lecture à 3 mn
Pyloriset Dry (Orion)
R29
Lot 1 lecture à 3 mn
Pyloriset Dry (Orion)
Lot 2 lecture à 3 mn
R28
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feuillets de Biologie
VOL LII N° 298 - JANVIER 2011
SÉROLOGIE Helicobacter pylori
Tests rapides de diagnostic (n = 12)
Les performances des TDR étaient beaucoup moins
bonnes et beaucoup plus hétérogènes avec aucune valeur
d’index de performance supérieure à 87,9 % (R18), des
valeurs de sensibilité ou de spécificité toutes inférieures à
90 % et des fréquences de faux négatifs et de faux positifs
élevées. Aucun de ces tests rapides ne paraît réaliser un
bon compromis de performances pour le diagnostic de
l’infection à H. pylori.
Remerciements :
Nous remercions Julia Frances pour son efficace gestion
logistique dans ce travail.
Nous remercions les évaluateurs scientifiques de l’Afssaps
(M. Duran-Cordobes, M. Fromage, F. Poisson) qui ont aidé
à la réalisation de ce travail.
Nous remercions C.J. Soussy pour son expertise.
Ce travail a permis de mieux situer les niveaux de
performances des tests pour le diagnostic sérologiques de
l’infection par H. pylori. Il donne aux utilisateurs des indications qui leur permettront de mieux choisir les matériels
disponibles sur le marché français.
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