BORIS GARDINER : Soulful Experience (Dynamic 1970)

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BORIS GARDINER : Soulful Experience (Dynamic 1970)
BORIS GARDINER : Soulful Experience (Dynamic 1970)
Byron et Boris : Pour le meilleur et le pire !
Après la série noire de cette fin d'année - déjà chargée en disparitions
d'artistes majeurs de l'Atlantique noir - nous venons d'apprendre le décès
du musicien et producteur jamaïcain Byron Lee (de son vrai nom Byron
Aloysius Lee) des suites d'un cancer. Bassiste né le 27 juin 1935, il fonde
les Dragonaires en 1957. Touche à tout : pop, rhythm & blues, calypso,
mento, soca, et bien sur ska (sous les noms de Ska Dancers ou Ska Kings)
il vient des quartiers chics et côtoie les milieux aisés de Kingston pour
lesquels sa formation joue dans les clubs huppés et les hôtels. Lors de
l'indépendance de l'île (1962), il touche le jack pot en apparaissant dans le
film « James Bond 007 contre Dr. No ». En effet, Mr Lee n'échappe pas à
la distinction de classe et de race, à peine feutré, qui à l'époque, sévie partout sur le nouveau continent : A la place
des vrais fondateurs de la musique moderne jamaïcaine « les Skatalites », le gouvernement leurs préfèrent Les
Dragonaires pour l'exposition universelle de N.Y. (1964)...
A retenir : Les fameuses productions de son label Dynamic (WIRL - label de l'homme politique néo-libéral E. Seaga)
avec des pointures comme Toots and the Maytals, The Blues Busters ou Ernest Ranglin. La crème du label nous est
servie par l'incontournable collaborateur Boris Gardiner, grand magicien des arrangements pop/jazz sur des reprises
reggae de standard.
Jean Bernard BASSACH
BLACK SLAVERY DAYS Clappers records were never meant to
be entertainment, it's a weapon without compromise.
Le label britannique Honest Jones (fondé entre autre par Damon Albarn,
leader du groupe Blur et chanteur de Gorillaz) spécialisé dans la réédition
d'albums obscurs, vient de re-sortir un ovni qui fait exception dans la
galaxie du roots rock reggae: "Black Slavery Days", signé en 1975 par
Jack Ruby, (producteur de "Marcus Garvey", "Garvey Ghost" et "Man In
The Hills" de Burning Spear). C'est justement de l'un des inventeurs du
terme Rockers (à l'origine du film du même nom) que nous viens cette
perle sortie de derrière les fagots: the dub organizer de son vrais nom Lister
Hewan-Lowe fondateur du label Clappers Records. Label iconoclaste si il
en ait, cette compagnie indépendante officiant dans les années 70 à pour
unique objet, la promotion des artistes et la préservation de la musique avec à sa tête un authentique rasta athée se
revendiquent ouvertement du maoïsme ! Les artistes présent sur l'album font partie de la fine fleur des musiciens
instrumentistes de l'âge d'or du reggae: Vin Gordon, Bobbie Ellis, Leroy "Horsemouth" Wallace, Robbie
Shakespeare, Augustus Pablo, Tony Chin, Earl Chinna Smith, Elias Rodney (frère de Burning Spear)… Clappers
produira seulement 5 album, tirés à une centaine d'exemplaires, renforçant son image de rare label mythique.
Un album en forme de compilation qui se compose de 10 titres (dont 5 dubs) pour un son sans concessions.
Assurément à ne pas oublié sur son île déserte.
CLPS - 1975 - Black Slavery Days, Honest Jones records
Jean Bernard Bassach.
SOUL SYNDICATE - Harvest uptown, famine dowtown
(Epiphany records 1977 - rééditon/la baleine)
Plus connu pour leur collaboration aux côtés de chanteurs et toasters de
renoms que pour les albums édités en leur nom propre, les Soul Syndicate
représentent la formation instrumentale typique de la période dite du
"roots rock reggae", au même titre que les Revolutionaries ils réalisent
des sessions studios pour le compte des producteurs Winston ‘Niney’
Holness, Keith Hudson et Bunny Lee, ce dernier leur préférant le nom
d’Aggrovators. En 1972 ils entament leur 1ère tournée en Jamaïque et en
1974 une tournée aux USA avec Big Youth et Donovan Carless. Aussi
c'est l’incontournable guitariste Earl Chinna Smith qui est à l’origine
avec son frère Warren de cette première production studio indépendante du groupe élaborée en 1977, au moment où
l’essor du mouvement religieux rastafari dans les ghettos de Kingstown se conjugue avec l’invention du reggae
moderne. Leur efficacité dans la construction de ce style musical unique est un savant dosage entre les musiques
rythm & blues, reggae et traditionnel africain.
A l’écoute de cet album, 2 titres attirent particulièrement notre attention. "Fade Away" standard soul de facture
exceptionnelle où sur une lourde basse jouée par George ‘Fully’ Fullwood se pose agréablement la voix de Donovan
Carless, chanteur attitré du groupe. Le deuxième, "Red, Gold and Green", développe le thème du nationalisme panafricain en plein essor dans les années 70 et révèle une texture sonore peu présente sur le marché des productions
commerciales à destination du grand public. Notons que certains titres frôlent des arrangements funky/reggae
hybrides comme "Mariwana" qui vise le jeune public de la classe moyenne nord américaine.
Enregistré à Harry J (Kingston, JA) & Aquarius (Kingston, JA) & Indigo Ranch (Malibu, USA), 1977.
www.cityhallrecords.com
Jean Bernard Bassach.
CLANCY ECCLES & THE DYNAMITES - Herbsman reggae
Producteur émérite, promoteur de spectacles et militant politique il restera
dans l’ombre jusqu’à sa mort survenue ce 30 juin 2005, des suites d'une crise
cardiaque. Il est pourtant l’un des plus grands contributeurs à la musique
reggae. Son heure de gloire se situe entre la 2ème moitié des années 60 et le
début des 70’s, âge d’or de la musique populaire jamaïcaine. Entre les styles
« rock steady » et « early/skinhead reggae » Entre autres, il produit des artistes
tel que les « Dynamites » sur son propre label « Clandisc ». Il réalise surtout
avec le chanteur trinidadien Lord Creator, le fameux tube reprit par UB40
« Kingston Town », disque de UB40 sur lequel, d’ailleurs, ne figure même pas
son nom!
En 1972, lors de la première campagne du socialiste Michael Manley, il organise un plateau d'artistes
jamaïcains pour le PNP ce qui explique peut-être aussi qu’il n’est quasiment jamais réapparu sur le devant de la
scène dans les années 80/90, période d’hégémonie pour la droite néolibérale jamaïcaine qui ne pardonne pas à ceux
qui ont crus au socialisme dans les années 60/70... On conseillera pour approcher l’œuvre, une des compilations(aux
pochettes horribles) Jamaican Gold avec des titres très divers, et, pour les néophytes, un album très soul produit par
Clancy Eccles et chanté par Tito Simon. Enfin n’oublions pas le prolifique label de supermarché Trojan qui dispose
d’une multitude de titres du producteur prodige sur d’innombrables compilations.
CD Jamaican Gold : Clancy Eccles/Joshua's Rod Of Correction, 1967/83
CD Jamaican Gold : Clancy Eccles - Nyah Reggae Rock, 1969/70
CD Jamaican Gold : The Dynamites - The Wild Reggae Bunch, 1967/71
LP Trojan : Clancy Eccles & The Dynamites - Herbsman Reggae, 1970
LP Trojan Horse : Tito Simon - Just Tito Simon - Produit par Joe Sinclair & Clancy Eccles, 1973
Jean-Bernard Bassach.
LAUREL AITKEN : The PAMA years ('69-'71) - grover rec.
Né à Cuba en 1927, Laurel Aitken, migre en Jamaïque en 38. Il débute sa
carrière dés les années 40 dans la chanson à thèmes autour du répertoire alors
en vogue (Nat King Cole/Louis Jordan) qu’il adapte sur les styles boogie, R &
B, soul, calypso, mento. Après avoir percé dans les charts dés 1957, il réalise
le 1er single du label Island fondé par Chris Blackwell qui promotionne alors
la musique jamaïcaine en GB et Laurel va être l’un de ses meilleurs
chanteur/promoteur, en particulier dans le nouveau style musical élaboré au
moment de l’indépendance de l’île: le ska. En débarquant en 1960 à Londres il
change à jamais la face de cette musique. En effet depuis la 2ème Guerre
Mondiale les jamaïcains sont la main d’œuvre Nouvrière d’un Empire
Britannique incapable de faire face aux nouvelles aspirations de sa population,
usée par la guerre et les privations. Cette main d’œuvre caribéenne qui comble la demande des industriels à aussi son
pouvoir d’achat: C’est d’abord l’incontournable label Blue Beat (Melodic) qui va capter cette demande. Après une
longue période chez Blue Beat, Laurel travaille pour EMI, Ska Beat, Nu Beat, Direct Records et Doctor Bird
Records. La liste des titres d’avant-gardes qu’il réalise alors est sans communes mesures avec ses concurrents. Il
performe autant dans les styles ska et rock steady que dans le reggae naissant, dont il est l’un des créateurs. Fin 60 il
est particulièrement apprécié du jeune public anglais et arrive à transcender les clivages raciaux au sein de la classe
ouvrière. Avec l’arrivée d’une nouvelle scène « revival » anglaise à la fin des années 70, il démarre une 2éme
carrière qui le place à la source des artistes de référence. Décédé cet été à 78 ans, il n’a quitté la scène que contraint
et forcé fin 2003, suite à une crise cardiaque.
http://www.groverrecords.com
Jean-Bernard Bassach.
ALTON ELLIS : Arise black man 1968-1978 (Moll selecta
1999)
Alton Ellis vient de nous quitter ce 10 oct. à l’âge de 74 ans. Considéré
comme l’un des plus aimés et influents chanteur de Soul que la Jamaïque ait
jamais connu. Sa carrière coïncide avec l’avènement de la musique moderne
jamaïcaine et l’indépendance de l’île (1962). Il enregistre dés 1959 et réalise
des singles ska pour Studio One. Au cours de L’âge d’or du rocksteady
(1967-72), il s’approprie des sons de soul U.S qu’il adapte en chansons
spécifiquement jamaïcaines. Pour le plus grand bonheur des aficionados de
musiques afro-modernistes, Ellis réalise «Mr Soul of Jamaica» (LP-1968)
qui fait de lui le leader incontestable et incontesté des chanteurs de
rocksteady avec le label fondateur de ce style,Treasure Isle et Sunday
coming (LP-1970), chez Studio One. Les perles rares réalisés pour Keith Hudson ou Lloyd « Matador » Daley au
début des 70’s, dévoilent une autre facette de son talent: le chanteur romantique laisse la place au militant
panafricaniste convaincu. Cette époque obscure pour beaucoup de grand artistes "early", éclaire le mieux sa
personnalité de crooner. Une ambiance "deep & roots" sans égale. Inclus: Des enregistrements au Black Ark de L.
Perry.
Jean Bernard Bassach
UPSETTERS - 14 Dub Blackboard Jungle (Auralux Recordings,
Licensed from Lee Perry/SRD)
(original - 1973/ré-édition 2004).
Crédité comme l’une des œuvres fondatrices du style dub (au même titre que
l’Aquarius dub, de Carlton Lee) cette ré-édition et passé relativement
inaperçu dans le milieux des néophytes. Et pour cause : il n’y a qu’à voir le
nombre démesuré de références éditées sous le nom de Lee Perry et/ou des
Upsetters. Bref si vous ne connaissez pas encore le maître du dub, créateur
de la formation des Upsetters (les énervés), plus connu sous le nom des
Waillers, et si vous ne savez que choisir, de ce prolifique surréaliste de la
musique jamaïcaine : n’hésitez plus c’est Le Black Board Jungle Dub qu’il
vous faut à tout prix (enfin presque…). Non seulement l’album à était réédité dans son intégralité, mais en plus il est agrémenté de 4 titres inédits
tous accompagné par la basse funky de Boris Gardiner dont le titre Happy Roots, tiré d’un titre des Upsetters, Bird in
Hand lui-même inspiré de la musique d’un film sortie tout droit des productions indienne made in Bolliwood. Mixé
pour la première fois dans son intégralité en stéréo (les concepteurs n’ont pas lésinés sur le mixage afin de restituer la
texture sonore originale de l’œuvre), cette pièce sonore, sans équivalence, donne à écouter la collaboration de Lee
Perry avec l’autre co-créateur du dub : King Tubby assassiné par balle devant sa maison en 1989…
Jean Bernard Bassach.
DEADBEAT Something borrowed… (Scape 2004/la baleine)
Après avoir vue et écouté un de ses lives Barcelone, il y a quelques mois,
nous avions été très fortement impressionné par le travail de ce Canadien sur
le très bon Label allemand - Scape. Cela fait longtemps que le dub
électronique cherche, avec plus au moins de bonheur à être convaincant. Avec
POLE, TSE et DEADBEAT on a bien envi de croire c’est le cas maintenant.
Tout au long des 10 titres qui composent ce disque on retrouve très
naturellement toutes les composantes propres au genre « dub ». Une basse
lourde et présente prend d’autant plus sa place dans un bon club barcelonais
équipé d’un bon sound-system, le skank et les divers blips passés dans des
chambres d’échos et autres delays faisant le reste. Le mariage avec la
technologie se fait alors sans aucun problème. Le choix des éléments et des
couleurs de chaque titre est cohérent et de très bon goût ; la solidité des constructions, la pertinence des
développements ne peuvent finir de convaincre l’auditeur. A écouter en priorité les 2 « tubes » : White out et le très
bon Fixed elections !
Artificiel.
www.scape-music.de
A PLACE CALLED JAMAICA vol. 2
Bunny “Striker” Lee (Les disques Makasound, 2005)
Deux ans après la compilation « A Place Called Jamaica Part.1 », qui
présentait une sélection des plus belles productions de Derrick Harriott, le
label Makasound récidive avec le second volume de cette collection. Cette
fois-ci, c’est le producteur Bunny " Striker " Lee qui est à l’honneur, autre
figure incontournable de l'industrie musicale jamaïcaine des années 60 et 70.
En effet, « A Place Called Jamaïca Part.2 » nous offre une sélection très
pointue de 17 titres reggae roots enregistrés entre 1967 et 1979 aux studios
WIRL, Dynamic, Treasure Isle, Joe Gibbs et Channel One. Tout commence
par l’hallucinant "Great Musical Battle" sur le riddim Take Five, Derrick
Morgan y commente un match de boxe virtuel entre Clement « Coxsone »
Dodd et Bunny Lee (déclaré vainqueur par KO). S'ensuivent des reprises surprenantes tel que le classique des
Beatles « I Wanna Hold Your Hand » interprété par Glen Adams, mais aussi le langoureux « Gypsy Woman » de
Curtis Mayfield repris par Slim Smith and the Uniques. Lloyd Clarke, quant à lui, offre une interprétation
personnelle et réussie du « Summertime » de Gerschwin. « A Place Called Jamaïca Part.2 » propose également
d’autres pépites, telles que le classique "Wreck Up My Life" de Leroy Smart, la version de "No Woman No Cry » de
Taper Zukie, ou encore « The Village », un des seuls morceaux que Gregory Isaacs ait enregistré pour Bunny Lee.
Sans oublier quelques belles productions réalisées pour d’autres artistes populaires de l’époque : Barry Brown, Max
Romeo, Cornell Campbell, Horace Andy, Dillinger et Big Joe ! Ainsi, cette compilation est une excellente
démonstration des nombreux talents de producteur de Bunny « Striker » Lee, qui ne l’oublions pas est également à
l’origine du morceau « Better must come » de Delroy Wilson, devenu l’hymne de la campagne électorale pour le
PNP (People’s National Party) de Michaël Manley en 1972. Respect !
Jean-Bernard Bassach.
EARL CHINNA SMITH & IDRENS Inna de Yard (Makasound
2009)
Makasound est la preuve vivante de la maturité des labels indépendants
hexagonaux. Une aventure qui débute par la volonté de 2 frenchies d'éditer
le chanteur Winston Mc Anuff. Personne ne voulait prendre le risque de le
sortir à la capitale des suffisants de la french touch... Qu'à cela ne tienne, ils
créaient leur propre structure. Un pari gagné pour ce duo de mercenaires
qui voient leurs prods diffusés dans les avions de la compagnie Air Jamaïca
! ‘’Inna de Yard’’ est un concept épuré qui joue sur l'ambiance roots et
conviviale d'une court de maison caribéenne. Quelques musiciens flirtent
avec le jazz. Une guitare sèche sur fond de percussions nyabingi et le tour
est joué. Ne nous y trompons pas, la personnalité des invités est la clef du
succès. Le dernier opus de cette série présente l'irremplaçable Earl Smith surnommé Chinna du fait de son métissage.
Après le 1er album de cette série il récidive au côté de pointures vocales telles que les Viceroys ou les Congos.
Guitariste hors norme, il est connu pour sa participation au sein de la formation Soul Syndicate. Son nom apparaît sur
plus de 500 albums. Autant dire qu'il est l'un des gardiens du bon goût jamaïcain.
LINVAL THOMPSON - Inna di Yard
Absent des studios depuis près de vingt ans, le chanteurproducteur Linval Thompson fait son grand retour en sortant un album
acoustique de neuf titres sur le label français « Inna de yard » (Makasound
). Il s’agit là du troisième opus de cette collection, qui s'inscrit dans la suite
logique des précédents (cf. Earl « Chinna » Smith et Kiddus I). L’idée de
cette série est en effet de mettre en avant des chanteurs à voix sur des
compositions musicales acoustiques relativement épurées. Pour rappel,
Linval Thompson a fait ses premiers pas en studio à New-York en 1972 au
cours de son premier long séjour hors de Jamaïque. Il y enregistre et
produit son premier morceau : « Good gracious woman ». De retour en
Jamaïque, il travaille sur de nouveaux enregistrements avec les producteurs
Lee Perry et Phill Pratt. C’est ensuite l’avènement en 1976 avec Bunny Lee et le tube « Don’t cut off your
dreadlocks ». A l’émergence du rub-a-dub à la charnière des années 70 et 80, Linval a sa place parmi les producteurs
leaders de ce style que sont Jah Life, Henry « Junjo » Lawes et son frère Melon. Il enregistre alors des albums avec
tous les artistes de cette nouvelle scène à commencer par Barrington Levy (« Poor man style »), Eek-A-Mouse,
Tristan Palmer, Sammy Dread, Barry Brown, ou encore Wayne Wade. Mais également avec des anciens comme
Johnny Osbourne, The Viceroys, The Meditations, Horace Andy, Freddie McGregor, ou Freddie McKay… Ces
production lui offrent des succès internationaux retentissants. Au milieu des années 80, à l’ère du digital, Linval
Thompson quitte la production et se contente par la suite d’exploiter son catalogue, jusqu’à aujourd’hui... Sir Linval
Thompson nous présente ainsi son nouvel album « Inna de yard », enregistré à Kingston, pour lequel il s’est entouré
de grands noms de la musique jamaïcaine tels que Earl « Chinna » Smith (guitare), Kiddus I (percussions), Jah
Youth (percussions), Lloyd Palmer (clavier), Derrick Hinds (cuivres), etc. Les morceaux qui composent cette session
acoustique sont pour l’essentiel des reprises de classiques du chanteur. On redécouvre « Good gracious woman »,
« Jah Jah dreader than dread », « Train to Zion » ou encore le rare « Inna de hills », dont les versions sont parfois
légèrement différentes de la version originale, c’est le cas notamment pour le titre « Jah guiding star ». De nouveaux
morceaux ont également été composés pour l’occasion, tel que « Mercy mercy mercy », « Hit them with the one
drop », ainsi que le titre qui conclu l’album, « Gimme Back ». Il s’agit là d’un long morceau (plus de douze minutes)
où l’on retrouve en featuring Israel Voice pour une très belle combinaison particulièrement roots. En effet,
l’ensemble des compositions de Sir Linval Thompson, qu’elles se trouvent sur « Inna de yard » ou sur d’autres opus,
reflètent l’esprit roots et mystique de leur auteur. Les thèmes rastas sont récurrents dans les lyrics de Linval : Jah, la
Ganja, les Dreadlocks, etc... Pour lui, la musique reggae est indissociable de la religion rastafari. Un autre thème
semble également important aux yeux du chanteur, il s’agit des femmes. En effet, on retrouve sur « Inna de yard » le
premier titre composé par Linval, « Good gracious woman », qu’il rechante ici pour la première fois. On se souvient
aussi du classique "Shouldn't Lift Your Hand » (sorti en 1983 sur l'album "Baby Father") qui condamne les
violences subies par les femmes. Auteur conscient, producteur de génie et chanteur talentueux, Linval Thompson
nous revient enfin après toutes ces années ! L’album « Inna de yard » constitue ainsi un projet intéressant où l’on
redécouvre une partie de l’œuvre de Linval, et notamment des grands classiques, en version acoustique. On peut
toutefois regretter le fait qu’il ne soit seulement composé de neuf titres, et que le chanteur-producteur ne nous offre
pas plus de nouvelles compositions…Toutefois, le retour de cette belle voix du reggae reste un plaisir pour nos
oreilles, d’autant plus avec ce type de production qui a pour vocation de mettre les talents du chanteur Linval
Thompson au tout premier plan.
WILLI WILLIAMS - From Studio One to Drum Street
(Drum Street 2000)
« From Studio One to Drum Street » retrace le parcours artistique de Willi
Williams, dont la douce voix a été un élément fort du label de Coxsone dans
les années 70, jusqu’à ce qu’il quitte Studio One pour s'établir seul et créer
son propre label Drum Street. Surnommé « l’Armagideon Man », il est le
producteur et auteur du tube internationnal « Armagideon Time »
(Armagideon est le combat final entre le Bien et le Mal inscrit dans la Bible).
Les références mystiques sont récurrentes dans les chansons de Williams, à
travers lesquelles il exprime ses idéaux et sa philosophie. « La réalité, c'est
de ça dont la musique doit parler » explique t-il. Sur « From Studio One to
Drum Street », on retrouve ainsi des titres qui abordent des thèmes comme l’unité africaine ("Unification"),
l’oppression et la famine ("Give me bread") ou encore l’exploitation ("Blue color worker"). Musicalement, cette
anthologie est une ballade entre reggae roots et versions dub, que l’on doit à l’ingénieur son Sid Bucknor alias
Scientist. Williams a en effet su collaborer avec des artistes talentueux, notamment lorsqu’il travaillait chez Studio
One. On retrouve ici les Wailers, Jackie Mitoo, Vivian Jackson, Delroy Wilson et Robbie Shakespeare. Bref, des
références de qualité qui confortent l’idée que ce LP est indispensable pour tous les amoureux de la musique
reggae !
Annietha Gastard
MARLENA SHAW « The Spice of Life » 1969 - Cadet
Marlena Shaw, née en 1942 dans l'état de New York, a grandit dans une
famille de musiciens. Elle est initiée toute jeune à la musique jazz par son
oncle, le trompettiste Jimmy Burgess, qui va même jusqu’à la faire chanter à
l’Apollo Theater de Harlem, alors qu’elle n’a que 10 ans! Sa carrière
commence vraiment dans les années 60, grâce à des collaborations jazz, avec
notamment Howard Mc Ghee, et plus tard l'orchestre de Count Basie. En
1967, Marlena ouvre son répertoire musical lorsqu’elle signe chez Cadet, une
division de la Chess. L’album « The spice of life », qui sort en 1969, est ainsi
un mélange d’influences soul, blues et jazz, qui bénéficie des arrangements
de Richard Evans. Sa voix douce et sensuelle s’exprime à merveille sur des
titres tels que « Liberation Conversation » ou « California Soul » (samplé,
entre autres, par DJ Shadow et Cut Chemist). De plus, elle porte à travers cet album un message politique fort. Le
morceau « Woman of the ghetto », magnifique hymne aux femmes noires, en est une belle illustration. Il faut
également citer sa version du titre “I wish I knew (how it would feel to be free)”, qui tend musicalement vers le
gospel. « The spice of life » peux donc être considéré comme un classique de la musique noire américaine, à se
procurer d’urgence, si ce n’est pas déjà fait !
Annietha Gastard
SHARON JONES & THE DAP-KINGS - 100 Days 100
Nights - Daptones Records - 2007
Après Dap Dippin’ (2002) et Naturally (2005), Miss Sharon Jones est de
retour avec son troisième opus, 100 Days 100 Nights. Enregistré à Brooklyn
dans le studio du label Daptones Record, cet album se positionne dans la
continuité des précédentes collaborations entre The Queen of Funk et les
Dap-Kings. Une fois encore, nous découvrons d’excellentes productions
soul-funk, qui semblent tout droit sorti des années 70. Mais les new-yorkais
nous démontrent encore une fois qu’ils savent faire évoluer leur musique.
Gabe "Bosco Mann " Roth, arrangeur principal sur les précédents opus, a
cette fois-ci composé les morceaux de 100 Days 100 Nights avec les autres
musiciens de la formation Dap-Kings. Nous voici donc avec 11
nouveauxtitres parmi lesquels on trouve les très bons « Nobody’s baby », « Tell me », « Something’s Changed »,
« 100 Days 100 Nights » ou encore « Answer me ». Enfin, précisons qu’au delà de la version album, Sharon Jones se
doit d’être vue et écoutée en live. Son incroyable présence scénique, sa voix à la fois douce et rauque, sont d’autant
d’éléments qui lui permettent de captiver le public et bien évidemment de faire bouger les dancefloors !
Annietha Gastard « Partition urbaine »
RODRIGUEZ : Cold Fact (réedition Light In The Attic 2008)
Cold Fact est un joyau oublié de 1970, composé par Sixto Diaz Rodriguez et
réédité par Light In The Attic. Une musique où se mêle intelligemment, folk,
rock, blues et soul. Peut être trop en avance sur son temps, l'album est passé
inaperçu à l'époque. Pourtant Rodriguez est un humaniste dont les textes
engagés sont autant de brûlots qui portent sur l'agitation sociale, l'inertie des
politiques et la désillusion des masses. Né en 1942, il est le sixième enfant
d'une fratrie de migrants Mexicains. C'est aussi cette identité métisse de
latino nord-américain qui le rend si perméable à la plèbe du Tiers Monde. En
effet, il décroche plusieurs disques de platines dans l'Afrique de Sud de
l'apartheid ! Pourquoi et comment a-t-il pu touché un peuple soumis et
honnis de son élite blanche tel que l'étaient alors les sud africains des années
70 ? Les Australiens ne sont pas en restes puisque sous Goose Recordings ils
sortent Alive en 1979, l'album live de sa tournée australienne. Toujours est-il qu'en 2002, Large Professor,
producteur de hip hop, sample le titre Sugar Man pour Nas et son You're Da Man.
Preuve si il en est, que le temps joue en faveur des prodiges.
Labels: Original sur Sussex - Blue Goose/RCA (Australia) - A&M Records (South Africa)
HIGHLIFE TIME
Nigerian & ghanian sounds from the 60s & early 70s
Enième compilation de musique moderne africaine fraîchement sortie des
presses. En fait de fraîcheur, parlons plutôt de réchauffé : quoi de plus aisé
que de faire peau neuve en grattant les vieilleries de l'Afrique post-coloniale en ces temps de marasme économique - avec une jaquette réalisée à moindre
frais, sans parler des droits que la plupart des artistes (décédés ou disparues)
ne percevront jamais. Malgré ces faiblesses, la compilation reste un
investissement moins risqué que l'album ''concept'' dans la mesure ou l'on
tombe toujours sur une perle rare au milieu de titres de factures plus
classiques. Le High Life émerge en Afrique de l'Ouest anglophone grâce aux
influences caribéennes dont s'imprègnent les fanfares militaires et autres groupes de "ballrooms" au contact de
l'armée coloniale britannique majoritairement constituée de soldats jamaïcains aguerris, plus aptes à supporter la
dureté du climat et la rudesse des combats. Fourre tout de l'Atlantique noire, le High Life s'inspire donc de plusieurs
styles de musiques afro-américaines comme le jazz, le mento et/ou calypso tout en gardant ses influences
typiquement
continentales
qui
laissent
transparaîtes
les
prémices
de
l'Afro-beat.
Jean Bernard BASSACH
CHOUBI CHOUBI ! : Folk and Pop Sounds from IRAQ
(Sublime
Frequencies
2008)
Le label Sublime Frequencies et l'exemple type d'un collectif de fanatiques
près à se dévouer corps et âmes pour restituer l'essence des musiques
populaires avant-gardistes des 5 continents. Les fondateurs du label Hisham
Mayet et Alan Bishop, membres du groupe Sun City Girls, collectent films,
documents radios, cassettes audio ou vinyles poussiéreux trouvées sur les
marchés du monde entier pour en restituer la sève. Pas moins de 43
compilations ont déjà été réalisés. Choubi Choubi présente 16 titres extraits de
cassettes et vinyles vintages, enregistrés entre 1970 et 2002. Loin des clichés
éprouvés cet hommage au pays de Babylone présente les musiques irakiennes
(Choubi, Bezich, Hecha, Mawal) comme autant de documents historiques et
de témoignages sonores d'une époque révolue. L'un des rares artistes identifiés sur cette compilation Ja'afar Hassan
n'est autre qu'une figure incontournable du mouvement socialiste en Irak. Violon, oud et instruments à anches
doubles côtoient les instruments électriques modernes pour le plus grand plaisir de nos oreilles averties. Une façon
de résister efficacement aux tenants de l'ordre établie qui voudraient nous acculer au stéréotype d'un monde arabe
réactionnaire
et
dénué
de
modernité
artistique
propre.
Jean Bernard BASSACH
MICHAEL PROPHET : Righteous Are The Conqueror
(Greensleeves 1991)
Bien qu’actif depuis plus de 30 ans sur la scène reggae, le chanteur
jamaïcain Michael Prophet de son vrais nom Michael Haynes (né en 1957),
reste peu connu du grand public. Les amateurs de soul jamaïcaine
connaissent pourtant bien cet artiste formé par Yabby You (qui lui donne son
surnom rasta). En 1979 il est salué par ses pairs pour son album
Consciousness, produit par Yabby You (et mixé par King Tubby). En 1980,
il sort l’album Righteous Are The Conqueror qui s’inscrit dans l’évolution
des enregistrements studios opérée à la fin des 70. Une facture roots rock
reggae qui marque l’âge d’or de se style ou les arrangements et le mixage très dub - du producteur Junjo Lawes et de l’ingénieur Barnabas sont aussi
essentiels que les compositions. Un album backé par les Roots Radics et la section rythmique des indécrottables Sly
Dunbar (batterie) et Robbie Shakespeare (basse). Même la pochette Greensleeves est une perle d’art naïf rasta pétrie
de syncrétisme religieux et présentant un groupe de survivants s’extirpant d’une ville en ruine, prémisse d’une
apocalypse à venir. Comme d'autres chanteurs conscious, Michael dénonce le racisme et prône les valeurs d’un
rastafarisme révolu : spiritualité, paix, justice, tolérance, écologie.
SOUL MESSAGES FROM DIMONA (Numero Group 2008 )
Un pur groove soul funk à la sauce gospel pour un collectif de musiciens aux
noms évocateurs tel que The Tonistics, The Soul Messengers, The Spirit Of
Israël ou Sons Of The Kingdom. A Dimona en Israel, des migrants afroaméricains de la communauté juive noire reprennent leur soul de Detroit et
Chicago. Répondant au message politico-religieux du leader du mouvement
Black Hebrew Ben Ammi Carter, ils s'installent en Palestine à partir de
1975. Largement inspiré de l'Ancien Testament leur message spirituel est
tourné vers la terre promise. Fameux label de ré-édition de Chicago, Numero
Group nous abreuve ici d'un album d'exception. Bien qu'agrémenté d'une
forte dose de propagande religieuse, c'est une prod majoritairement dance
floor et sans concession. Un bel objet au packajing impeccable,
accompagnée d'un beau livret illustrant en photos ce pan ignoré de l'histoire contemporaine des Noirs américains.
HISTORY
OF
SKA,
BLUE
BEAT
&
REGGAE
(Culture Press 2000)
Blue Beat représente pour le reggae ce que la Tamla Motown est à la soul.
Il est, au début des 60's, le label jamaïcain le plus influent d'Angleterre
quant apparaît l'After-Beat. Plus connu en France sous le nom de ska, le
style blue beat amalgame les musiques ska mais aussi jazz, rock steady ou
rhytm & blues. Originaire d'Europe Centrale, le distributeur puis
producteur Shallit popularisa - au côté du jamaïcain blanc Siggy Jackson la musique moderne des West Indies bien avant son principal concurrent
Chris Bl ackwell de Island. D'abord sous licence, Shallit édite sur Blue
Beat la musique de l'île puis produit ses propres perles de vinyles noirs à
destination de la communauté caribéenne d'Angleterre et par ricochet pour
la classe ouvrière britannique. Rare parmi les justes de la musique
indépendante d'outre Manche à rétribuer correctement les artistes on lui doit l'un des plus beaux catalogue de early
reggae sur lequel on peut re-découvrir le James Brown jamaïcain Prince Buster. Ce double cd compile plusieurs
artistes et labels pour un répertoire de facture classique. Il permet d'avoir un aperçu honnête et peu coûteux de cette
musique moderne difficilement dépassée.
BEST OF THE LONDON BASED ‘SIOUX’ LABEL
A
selection
of
Heavy Reggae
From
1971-72 (Jet
Set
1997)
Sioux est un label légendaire dédié à la soul caribéenne. La majorité des
titres de son catalogue furent édités sur format 45 tours vinyles à
destination du marché britannique. Proche de Pama record ou Blue Beat
c’est une pièce maîtresse dans l’invention du reggae moderne. Les
nouvelles générations de jeunes prolétaires anglais vont s’identifier très
rapidement à cette musique populaire qui s’écarte des standards
commerciaux en vogue de 67 à 72. Le tempo s’accélère, les lignes
basse/batterie se complexifient et la guitare rythmique se fait plus
agressive. Le reggae est né. Le mélange des communautés londoniennes
permet l’émergence d’une contre culture populaire et moderne. Un
courrant artistique et militant issu du mouvement culturel mod, porte en
GB, le flambeau de cet art. Au commande de ‘Sioux’, Jack Price nourrit jamaïcains et skinheads de ses galettes
noires à la plume d’indien. Une compilation de quelques bijoux du catalogue dont on peut déplorer qu’elle n’existe
qu’en cd. Avec des thèmes précurseurs sur Pharoah's Walk des Exodus ou African Peoples des Funky Brown. Sans
parler du compositeur interprète Joe Gibbs ou des Twinkle Brothers.
MELISSA LAVEAUX - Camphor & Copper (No Format 2008)
Un des symboles récurrents que nous renvoie la musique populaire, réside
dans sa représentation de l’artiste folk accompagné de sa guitare. Depuis
une vingtaine d’année les rôles évoluent et l’image de la song writer
s’impose. Que l’on apprécie l’artiste ou non, l’exemple de Tracy Chapman
est révélateur de ce changement de perception des masses.
Malheureusement, il est aussi difficile pour le deuxième sexe de
s’émanciper des stéréotypes, que pour les émules masculin de Bob Dylan
de ne pas tomber dans la caricature. Une pléthore de nouvelles chanteuses
de toutes provenances n’échappent pas aux poncifs de la pop attitude.
Souvent elles passent complètement à côté de la création pour ne proposer
que du réchauffé avec des moyens promotionnels démesurés comme
Norah Jones sur Blue note. En revanche, la canadienne d’origine
Haïtienne Mélissa Laveaux nous fait voyager dans l’intimité de son univers franglo-caraïbéen. Des influences
folk/blues et soul/poetry sur des compositions enregistrés à l’origine en auto-prod. Camphor & Copper est son 1er
disque. Un packaging soigné où l’on retrouve ses textes écrits et chantés en français, anglais comme créoles.
PRINCE BUSTER - Fabulous Greatest Hits (Diamond Range
2001)
Prince Buster n’est pas mort.Surnommé Buster, Cecil Bustamente
Campbell est le porte flambeau de la musique jamaïcaine. Ancien chef
de gang juvénil puis boxeur, il devient l’un des gardes du corps attitré
des sounds organisés par Coxsone Dodd. En 1957, il ouvre son magasin
de disques (PB Record Shack) et son propre Sound System Voice of the
People. Sans complaisance, il revendique sa négritude et le ska comme
musique identitaire jamaïcaine. Précurseurs du rap il est l’un des 1ier à
parler sur des sons instrumentaux. Il contribue à l’éviction du jazz au
bénéfice des styles d’abord ska, puis rock steady et reggae. Il comprend
très tôt le pouvoir de séduction de cet art populaire qui touche le jeune
public européen (migrants comme autochtones). Chanteur, DJ,
compositeur et producteur comparable à James Brown, il est peu réédité en cd. Malgré le succès international de "Ten Commandements" dans les charts US, ils sera évincé des
musiciens porte parole de son pays en raison de ses origines modestes et de son penchant avoué pour l’Islam.
JOE HIGGS - Life Of Contradiction (pressure sound
2008)
Entre souffrance et liberté. Chanteur, guitariste et compositeur, Joe
Higgs (né le 3 juin 1940), est considéré par Jimmy Cliff comme le
"père du reggae". Un nom indissociable de celui de Bob Marley. Les
deux stars le solliciteront régulièrement. Présent dans les moments
clefs de l’évolution du reggae, il débute dés 1960, d’abord dans le ska
avec le duo Higgs & Wilson puis dans le rock steady avec Lyn Tait.
L’album majeur de sa carrière Life of Contradiction (sortie en 1975),
hymne folk/blues, transpire amour et misère. Le titre There's a
Reward est l’image-son type du poète maudit de la négritude
caribéenne. Aucun excès de style. Juste une rythmique épurée des
Now Generation sur un chant calme et posé. Un témoignage unique
d’une aire révolue ou la détresse sociale n’entravait pas l’espoir de
changements. « L’amour vient de luttes difficiles, de longues souffrances. L’amour surgit de la peine, emplit d'un
espoir de liberté...». Démuni et oublié, il décède d’un cancer le 18 décembre 1999 à Los Angeles. 12 titres (+ 2
inédits) remasterisé par le label Pressure Sound et un livret accompagne cet excellente ré-édition.
FRANCOIS DE ROUBAIX - Le Vieux fusil (emarcy 2003)
L’homme Orchestre. François de Roubaix restera dans l’histoire du
7ème Art français comme ce musicien de la pellicule, météore arrivé
sans prévenir dans l’hombre de la toile sonore et disparu au fond des
abîmes de l’océan. Fils d’un producteur de films, il s’illustre autant
pour la variété des thèmes composés (Les Grandes Gueules, Les
aventuriers, de son ami Robert Enrico, Samouraï de Melville ou
L'homme orchestre de Serge Korber) que dans le choix des formats
éprouvés (film d’animation Chapi Chapo). Fait rare, ce multiinstrumentiste interprète l’essentiel de ses compositions et développe
une technique de collage sonore en découpant ses bandes Revox. Sa
collaboration avec le comique Louis Defunés lui donne l’occasion de
créer une fresque groove pour une comédie musicale loufoque
L’homme Orchestre. Il meurt en 1975 dans un accident de plongée
après avoir composé son plus grand succès public, la musique du film Le vieux fusil qui obtient le César de la
meilleure musique en 1976. Un incontournable en somme.
LA MUSE HARPISTE
Reconnu tardivement comme une musicienne d’exception au même
titre qu’Alice Coltrane, Dorothy Ashby retrouve une postérité à titre
posthume grâce aux artistes du mouvement hip hop qui puiserons
allègrement dans son répertoire. Pianiste, son apport majeur réside
dans l’emploie de la harpe dans le jazz et le style be-bop. Une griffe
qui découlent de son identité d’afro-américaine de Détroit. C’est
surtout sur des standards de rythms & blues dans les 60’s puis de
funk après 68 qu’elle excelle. Ce qui ne l’empêche pas d’explorer
d’autres univers tel que la musique ethnique et le koto. Un instrument
japonais, qu’elle intègre avec succès au répertoire jazz. Elle pratique
l’art dramatique avec son mari dans le collectif Aid to Creative Arts
et leur troupe de théâtre the Ashby Players. Parallèlement, elle joue
pour le film Valley of the Dolls en 1967 et soutient le chanteur de soul
Bill Withers. Travaille avec Stevie Wonder, Dionne Warwick, Barry Manilow et Earth, Wind & Fire… Ashby
décède des suites d’un cancer le 13 avril 1986 à Santa Monica, Californie. L’album expérimental de Stevie Wonder
« Songs in the Key of Life » sortie en 1976, lui donne l’occasion de nous léguer une de ses dernière plus belle
création contemporaine sur le titre If It's Magic.
CD Album : Afro Harping [1968] ré-édition Universal. CD Album Rubaiyat Of Dorothy Ashby [1970] Chess rec.
LE NEGRE DES LUMIERES
Quoi de plus naturel que de croiser les domaines musicaux quant ceuxci dépasse le cadre étroit de préjugés tenances. La musique classique
occidentale fait partie de ces idiomes artistiques archivés dans le rayon
des vieilleries pour européens décadents. Une fois n’est pas coutume,
l’esprit d’un homme hors du commun hante ses pages : L’un des plus
vieux musicien d’origine africaine de la culture classique occidentale.
Guadeloupéen noir, Joseph Bologne est à la fois fils d’une esclave
africaine et d’un noble. Musicien, violoniste, compositeur, cavalier et
escrimeur français. Sous le règne du Roi Louis XVI, il est un chef
d’orchestre respecté. Plus connu sous le titre de Chevalier St Georges,
il dirige les formations les plus prestigieuses de France et d’Europe.
Après 1789, il rejoint le camp des sans culottes comme colonel de La
Légion Franche des Américains et du Midi, en partie composée d’AfroAntillais ou il se bat au côté du père d’Alexandre Dumas. Un appel à l’écoute d’une oeuvre propre à exciter la fibre
musicale de tout bon amateur de bonne musique - classique ou moderne, noire ou blanche - qui se respecte.
CD Album : Concertos pour violon, Arion - 1990.
Coffret 4 CD : Le Chevalier de Saint Georges - Un antillais à Versailles, Arion Classics - 2007.
LE ROSSIGNOL BRUN DU CAIRE
Abdelhalim Chabana dit Abdel Halim Hafez (‫)ظفاح ميلحلا دبع‬,
mythe de l’Egypte Nassérienne. Rossignol brun à la voix envoûtante des
années 50, 60 et 70, acteur de renom et chanteur le plus populaire du
Moyen Orient, faisait s’évanouir les femmes dés qu’il entonnait ses solos
magiques de plus de 30 minutes ! Initié dés l’âge de 11 ans, il sort
diplômé de l’école du Caire au moment de l’indépendance. La pratique
du hautbois et les reprises du répertoire de Mohammed Abdel Wahab
lui confèrent de solides bases. C’est en chantant en direct sur les ondes de
la radio nationale que son ascension commence. Contemporain de la diva
de l’orient Oum Kalthoum, de Mohammed Abdel Wahab ou de Farid
El Atrache il renouvelle l'art de la chanson « El Tarab ». Décontracté et
souriant, il aimait jouer avec le public tel un chef d'orchestre moderne.
Cet amour de la scène, rompt avec l'attitude de ses concurrents. Un révolutionnaire de la world music avant l’heure.
Ses performances scéniques et cinématographiques passionnelles impressionnent. Abdel Halim souffrait… Atteint de
la bilharziose et asthmatique il dissimulait la douleur d'une fracture à la jambe. Après une prestation à l'Olympia en
1974 et une dernière apparition en 1976, il meurt le 30 mars 1977 à Londres. Ses funérailles au Caire, sont les plus
grandes d'Égypte après celles du président Nasser et de la chanteuse Oum Kalthoum. Quatre femmes se suicident à
l'annonce de sa mort. En 1999 le chanteur Jay-Z reprend la musique de la chanson Khosara pour sa chanson Big
Pimpin. Il laisse un répertoire de 300 chansons d’amours éternelles. CD : Min Ghir Leih - Editeur : Rotana - 2008
BLACK MARKET CLASH
Marcher Noir pour Prolos Blancs
En 1980 sort le disque pirate Black Market Clash. Contenant seulement
9 titres cet opus du groupe punk/skin le plus influent aura un tel succès
que la maison de disque Epic sera obligée de sortir l’album officiel (un
mini lp au format 25cm). La pochette montre à voir Don Letts, dj anglais
d’origine jamaïcaine connu pour ses prestations reggae au sein du
mouvement Oï/punk et sa participation dans la formation Big Audio
Dynamite. Un hommage aux musiques afro-américaines et caribéennes
sans concession : Une version instru de « Time Is Tight » de Booker T.
& the M.G.'s. « Pressure Drop » de Toots & the Maytals et le fameux
dub « Armagideon Time » de Willie Williams, intitulée « Justice
Tonight/Kick It Over » sont les titres phares de ce précieux legs d’outre
Manche. En 1994, suivra Super Black Market Clash, album posthume
des Clash qui compile plusieurs faces B et titres inédits jamais gravés sur leur 1ier album.
CD album : Super Black Market Clash - Sony music - 1999
XAVIER CUGAT : Bread, love and chachacha (columbia)
La rumba catalane est l’un des phénomène identitaire et culturel les plus
particulier d’Europe. Contribuant à sa préservation tout au long du XXe
Siècle, puis à sa renaissance au tournant des années 90, c’est au sein de la
communauté gitane de Perpignan que la rumba tire ses lettres de
noblesse. L’histoire de la rumba est intrinsèquement liée aux migrations
nord-sud et vice versa. Son nom vient du mot africain « danser autour de
son nombril ». Plusieurs formes coexiste : La Colombia, la plus ancienne.
La rumba Yambú, plus sensuelle et sa petite sœur, appelée Guaguancó.
Au XVIIIe, elle débarque en Espagne et au Portugal. Les gitans de Séville
la pratique sous le nom de rumba flamenca. Vers 1930, le géroné Xavier
Cugat « roi de la rumba », l’exporte aux USA. La rumba est une musique
festive, qui intègre des éléments de son et de salsa cubaine et même du
rock. Dans la Barcelone des années 50, apparaissent Peret l’un des
célèbres musiciens de rumba de Barcelona et l’incontournable Pescailla. On ne peut énumérer ici, la pléthore
d’artistes qui ont contribué à sa diffusion. Citons l’école de Montpellier et Manitas de Plata ou les Gipsy King. Dans
les années 90, Tekameli ou les Rumberos Catalans sont issus de cette mouvance. Dès lors, les échanges entre
musiciens des 2 mondes vont s’intensifier pour culminer avec le fameux duo Los Compadres composé de Compay
Segundo (du fameux Buena Vista Social Club) et de Lorenzo Hierrezuelo qui réalise Sarandonga titre phare
indispensable lors des mariages !
JAMES BROWN : In the jungle groove (polydor)
Comment retranscrire cette sensation inimitable de votre arrivée sur
les lieux d’une soirée où vous percevait le son d’un rythme chaleureux
qui s’amplifie pour inonder votre corps d’un groove inégalé. Cette
sensation vous la devait au « Grand Père de la Soul musique »
monsieur James Brown. Né en Caroline du Sud en 1933 et mort à
Atlanta, Géorgie le 25 décembre 2006. De condition modeste, il se
retrouve pour la 1er fois en prison dés l’âge de 16 ans. Il aura connu
tout les évènements les plus marquants de son époque : De l’abolition
de la ségrégation dans les Etats du Sud à la fin de la Guerre Froide.
Au vu du peu d’éloge posthume exprimé dans la presse européenne
lors du décès d’un des 10 plus important musicien populaire du XXe
Siècle (il figure toujours dans les charts US); un hommage à cet artiste
d’exception tombe à point nommé alors que cela fera 3 ans qu’il nous a quitté en laissant un répertoire
impressionnant de plus d’une centaine d’albums ! Et ne parlons pas des milliers de titres qui s’inspirent ou copient
carrément le son des fameux JB’s, formation qui enregistre les instrumentaux les plus terribles des années 60/70.
Après avoir crée plusieurs formation tel que les Famous Flames encré dans le Rythm & Blues aux influences « New
Orleans » c’est à partir de la fin des 60’s qu’il s’établie en posant les bases du style Funk. Impossible d’énumérer ici
le nombre impressionnant de collaboration réalisés pendant près de 50 ans mais si vous décidez de vous initié,
arrêtez vous à la fin des années 70 et vous n’aurez que l’embarra du choix pour 25 années de pur groove soul/funk.
FRANCOISE HARDY : La question (Virgin [Sonopresse]
ré-édition 1995)
La plus modette de nos égéries sixties enregistre en 1970 un album
unique. Françoise Madeleine Hardy à 20 ans en 1964. La guerre
d’Algérie viens de se terminer et l’explosion contestataire de 68 pointe
son nez. Après un rapide succès, elle délaisse la scène pour se consacrer
à sa carrière discographique. Répertoire mélodique emprunt de
mélancolie, reflet de ses doutes. Interrogations et anxiété que suscitent
en elle les tourments de ses relations sentimentales. A l’image de
Gainsbourg - pour qui elle enregistre le fameux « comment te dire
adieu » - elle développe un talents d’écriture et de composition, peu
courants chez les nouveaux interprètes de ce début des sixties. Françoise
c’est aussi une apparence. Les minijupes, les boots blanches et le visage
sous la frange des cheveux. En 71 sort La Question, sans titre, enregistré aux studios CBE dans une atmosphère
musicale rare. La guitariste brésilienne Tuca (Valeniza Zagni da Silva, 1944-1978), feu follet exilé en France est
chargée des arrangements avec Raymond Donnez, créditée à la direction artistique. Francis Moze est à la guitare
basse et Guy Pedersen à la contrebasse. Les cordes sont de Catherine Lara. L’ingénieur du son est Bernard Estardy
secondé de Davout et René Ameline. Un disque bossa nova sensible. Osmose entre le phrasé pop de Françoise et des
cordes fiévreuses. Rien d’étonnant à ce que Hardy évoque l’album comme celui qui l’a rendue la plus heureuse : « Il
y a dans ce disque une atmosphère, une homogénéité entre la composition et la réalisation musicale. » Au moment où
l’on loue sans modération la chanson française intimiste, il est bon de puiser à la source. A l’été 2009, la chanteuse
débutait son 26e album studio.
THE JAM: In the city (Polydor1977)
Confort Moderne et Classe Ouvrière. Rien d’étonnant à ce qu’il
soient absent de toutes les encyclopédies et dictionnaires punks/rock.
Les Jam sont issues du mouvement "Mod" qui émerge en Angleterre
dans les années 60 dans le sillage des Who. Fanatique des Kinks,
Small faces et autres Yarbirds, ce trio revival relance la musique
"moderne" à la fin des années 70 avec l’album In The City. En 78, le
groupe publie l’album All Mods Cons (abréviation de l’expression :
« tout le confort moderne » et jeu de mot sur le second sens, en
Anglais, de « mods » et « cons »). Fort des influences afroaméricaines des labels Stax et Tamla, leur musique est de facture
classique. Il s’apparente à du rythm & blues de type garage avec un
son de guitare distordue. Paul Weller chante tout en assurant les
parties de guitare dans un style rageur qui le rapproche de guitaristes
tel que Pete Townshend ou Wilko Johnson. Dans les années 80 le
leader du groupe s’affirme comme un détracteur du National Front et s’engage dans les mouvements antiracistes (il
rejoindra également le Red Wedge, en 86, une association d’artistes qui militent pour faire battre Thatcher aux
élections). L’un des groupes d’outre-manche les plus populaire reste peu connu à l’étranger. Représentant d’une
conscience de classe prolétaire anglaise, ils disparaissent en 1982 peu après l’arrivé au gouvernement britannique de
l’hystérico-libérale dame de fer. A la fin des années 80, la formation évolue vers une formule plus pop-rock sous le
nom des Style Council.

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