«Le Christ seul peut nous inspirer une vie d`amour»

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«Le Christ seul peut nous inspirer une vie d`amour»
LE ROYAUME, N° 167, Mai-Juin 2004
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«Le Christ seul peut nous inspirer une vie d’amour»
Vers la seconde moitié du siècle
dernier, le Cardinal Garonne déclarait
avec un accent prophétique: «Notre
capacité de Rédemption, c’est capacité d’amour. C’est le Christ seul qui
peut nous inspirer une vie d’amour.»
(Au Fil des jours, 5 juin 2001) De toute
évidence, seulement le Christ pouvait
inspirer l’Oeuvre magistrale de Vie
d’Amour, une suite livresque qui fait
tant de bien aux âmes, au point qu’une
Autorité religieuse de Rome a pu dire
en connaissance de cause: «Vie d’Amour aurait le pouvoir de convertir le
monde entier, même les Évêques.» Et
même les détracteurs de cette Oeuvre, en rejetant l’arbre, en apprécient
les fruits chez les fidèles formés à
cette école de spiritualité. Karl Rahner
a déjà signalé que l’Église devait redécouvrir l’apport théologique des femmes mystiques. Il en est de même
pour le Cardinal Urs von Balthasar,
dont Son Éminence le Cardinal Ouellet a bien voulu transmettre la pensée:
... nul n’a su mettre à profit comme
lui le trésor de la théologie des femmes. Bien avant que la montée féministe n’en dénonce ouvertement
l’oubli, Balthasar se tenait à l’écoute
de théologiennes comme Catherine
de Sienne, Thérèse d’Avila, Adrienne von Speyr et tant d’autres qui font
avancer la sagesse de l’amour et
l’audace de l’espérance dans l’Église. («Hans Urs von Balthasar, théologien de l’an 2000», dans L’Église canadienne, 7 septembre 1989, p. 692)
CRITÈRES DE DISCERNEMENT
À n’en pas douter, Marie-Paule est
de celles «qui font avancer la sagesse
de l’amour et l’audace de l’espérance
dans l’Église». Pour se convaincre de
la validité de son apport spirituel, il suffit de cibler quelques critères de discernement. Il convient de retenir que
les mystiques sont habituellement
soumis(es) à l’épreuve du silence,
comme Catherine Labouré le fut pendant trente ans. La signataire de Vie
d’Amour a gardé le secret pendant
quarante ans sur les grâces spéciales
qui ont jalonné son parcours, jusqu’au
jour où, par obéissance à son directeur spirituel, elle en fit publier, avec
grande hésitation, le récit édifiant. Le
Christ seul a pu inspirer une telle
«Vie», car cette âme a toujours voulu
devenir un «Calque divin» en acceptant de Le suivre jusqu’au bout, dans
son amour de la Croix.
Durant sa vie publique, Jésus a eu
des activités, mais sa vie d’amour,
la source prochaine de sa prédication, fut toujours la même. (...)
Menée, dès le premier instant, avec
Marie, elle (sa vie mystique) fut, durant sa vie terrestre (pendant trente
ans), ignorée de tous. (Père Thomas
Philippe, Calendrier Saint-Paul, 3 oct.
1997)
Mis à part la fécondité du silence,
les mystiques doivent passer par
l’épreuve de l’obéissance, et c’est
Jean-Paul II qui nous en rappelle l’opportunité en nous donnant comme
exemples Marie et Joseph qui, sans
comprendre, ont toujours obéi aux ordres d’En-Haut:
Tous les saints sont passés par l’épreuve parfois héroïque de l’obéissance; comme la Très Sainte Vierge
Marie, comme saint Joseph qui n’ont
fait qu’obéir à la voix de Dieu qui les
appelait à une mission sublime, mais
aussi déconcertante et mystérieuse... (Au Fil des jours, 10 mars 2001)
Toute la spiritualité de Marie se résume en Jésus. Le centre de la vie
de Marie, c’est Jésus. (Dieu plus merveilleux que les rêves, p.134)
Urs von Balthasar
Ste Catherine
de Sienne
Comme eux, notre Fondatrice a
poussé l’obéissance jusqu’à l’héroïcité. Née sous le signe de la Croix glorieuse (le 14 septembre 1921), la signataire de Vie d’Amour a toujours
conservé l’Espérance en faisant un
saut dans l’inconnu, s’abandonnant
sans comprendre à la Volonté divine,
comme Marie qui a cru jusqu’à la fin au
Triomphe de la Croix.
Un jour, le Seigneur a dit à cette
âme: «Viens, Je te prends maintenant
pour Mon Église.» (Vie d’Amour, vol. XV,
p. 442) Quelle prétention! penseront
certains esprits fermés au Mystère!
Mais ce sera perçu par d’autres
comme l’aboutissement normal d’une
vie toute donnée à Dieu. Et c’est le
Cardinal Charles Journet qui projette
ici un éclairage sur cette particularité
du langage mystique: «Toute l’Église
peut être (contenue) dans une âme si
son amour est intense et sa foi limpide.
En touchant Dieu, on est au point où
tous les rayons aboutissent et dont ils
s’échappent.» (Au Fil des jours, 30 août
2001)
Par ailleurs, la sublimation des
épreuves s’est avérée une constante
dans Vie d’Amour. Elles se succèdent
les unes aux autres et sont aussitôt
transformées en actions de grâce qui
montent en louanges d’un coeur
broyé. «Pour qu’une âme soit montante, il faut qu’elle soit chantante», disait le poète Paul Claudel. Et l’on verra
cette âme-victime aller chanter dans
les mariages pour gagner un peu de
pain pour ses enfants, afin de suppléer
aux manquements d’un père absent et
irresponsable. Comme autre exemple,
elle composera dans un moment de
grande déréliction, sur la table boiteuse d’un petit chalet où elle a trouvé
refuge, la musique d’un sublime chant
à Marie: «Souvenez-vous, ô NotreDame d’Etchemin!» Et l’on osera dire
que cette Oeuvre ne vient pas du
Ciel...
«CROYEZ EN MES OEUVRES!»
À partir de la petite Équipe mariale
du début, il lui sera bientôt demandé
de prendre la tête d’une grande Armée
de prières, alors qu’elle aurait voulu
plutôt disparaître sous le voile de la religieuse missionnaire en Afrique. Le
Ciel indique à sa protégée de fonder
un journal qui relierait tous les Membres. Aussitôt naquit une modeste brochure éponyme appelée L’Armée de
Marie. Ensuite, selon l’évolution mystique de l’oeuvre, trois titres se succéderont en page frontispice d’un nouveau format de journal: Marie, L’Étoile,
puis Le Royaume. Ces trois titres,
comme nous le verrons, se retrouvent
comme évoqués providentiellement
dans une simple phrase du Saint-Père
actuel:
Nous sommes un peuple en marche
vers une plénitude qui dépasse
l’horizon terrestre. (Évocation d’un
Royaume à venir) Et Marie est notre
Ste Thérèse
d’Avila
Adrienne von
Speyr
À ce propos, Marthe Robin ne disait-elle pas: «La sainteté est aux
âmes qui aiment vraiment Marie.» (Calendrier Saint-Paul, 28 juin 1997) Rappelons que cette véritable mystique, originaire de France, a jadis confirmé la
mission de notre Fondatrice, devant
témoins, en s’exclamant: «Elle est
toute perdue en Marie!» (Vie d’Amour,
vol. VIII, p. 278)
Étoile sur cette mer agitée. (Jean-
«MALGRÉ LES VENTS CONTRAIRES...»
Paul II, Au Fil des jours, 2001)
Au temps du Concile Vatican II,
Paul VI nous a prévenus que des
«vents contraires» allaient perturber la
bonne marche de l’Église. Cette constatation a été réitérée plus récemment
par Son Éminence le Cardinal Ouellet
dans son magnifique ouvrage Dieu
plus merveilleux que les rêves, quand
il écrivait: «Malgré les vents contraires
qui secouent la barque de Pierre (...)»
(p. 167).
Il fut une période où l’Armée de
Marie remplissait les églises. On l’en a
chassée. Et, depuis, les églises se
vident et se vendent. Et, comme la
nature a horreur du vide, tout peut y
entrer maintenant: rituels païens,
spectacles irrévérencieux, parades de
mode, etc. Et, de nouveau, le Cardinal
Ouellet nous donne une clef pour comprendre l’histoire: «Saint Grégoire le
Grand disait déjà à son époque qu’il y
avait beaucoup de fonctionnaires,
beaucoup de gens en poste dans la
vigne du Seigneur, mais peu d’ouvriers.» (Dieu plus merveilleux que les rê-
Le Pape Jean-Paul II «a l’âme mystique», disait Son Éminence le Cardinal Re. (Zenit, 26 septembre 2003) Dans
une prière formulée en gradation ascendante par le Saint-Père pourrait se
résumer l’évolution de l’Armée de
Marie depuis ses débuts, telle une remarquable synthèse: «Sois chez Toi
dans nos familles, dans nos paroisses,
nos missions, nos diocèses, dans tous
les peuples!» (Jean-Paul II, Prières à travers le monde, p. 82) De l’Armée de
Marie, quatre Oeuvres ont jailli, dont la
Famille des Fils et Filles de Marie. Ainsi que l’exprimait Madeleine Delbrel:
«C’est toujours en famille, en équipe,
en fraternité que le christianisme est
allé vers les autres.» (Au Fil des jours,
16 janvier 2001) Une autre supplique de
Jean-Paul II trouve dans la Famille des
Fils et Filles de Marie sa concrète application. Il s’agit du rituel où les Membres s’abritent sous le manteau bleu
marial bénit par un Prêtre et prenant la
dimension de sacramental au cours
d’une Cérémonie de réception solennelle. «Mère de Dieu et notre Mère
(...), accueillez sous votre manteau
protecteur les religieux, les religieuses, les familles, les enfants, les jeunes et leurs éducateurs!» (Prières à travers le monde, p. 104)
Durant tout son parcours, l’Armée
de Marie a soit anticipé sur la volonté
des Papes, soit obtempéré aussitôt à
leurs attentes. Après la réception au
manteau bleu, les Fils et Filles de
Marie peuvent effectuer un pas de plus
en se consacrant aux Coeurs unis de
Jésus et de Marie dans un élan de générosité à base sacrificielle, une dévotion recommandée par Pie XII:
Et afin que ce culte envers le Coeur
de Jésus entraîne de plus grands
avantages pour la famille chrétienne et pour le genre humain tout
entier, les fidèles auront soin d’y associer étroitement celui du Coeur
Immaculé de Marie. Dieu a voulu,
en effet, que dans l’oeuvre de la Rédemption des hommes, la Très
Sainte Vierge fût indissolublement
unie au Christ, de sorte que le salut
nous vînt de la charité et des souffrances de Jésus-Christ, intimement associé à l’amour et aux douleurs de Sa Mère. (Le Sacré-Coeur,
Ce que dit le Pape, Éd. Le SarmentFayard)
Tenant compte du fait que Marie
conduit à Jésus, nous ne pourrons jamais donner trop d’importance à Marie
et conséquemment nous trouverons
une puissante justification dans l’enseignement de Jean-Paul II, enseignement si bien exprimé ici par Son Éminence le Cardinal Ouellet qui s’abreuve à la source pure:
En nous confiant à cette Mère, il
(Jean-Paul II) nous invite à la spiritualité de Marie, c’est-à-dire Jésus.
ves, p. 79)
La signataire de Vie d’Amour a
beaucoup souffert par l’Église, alors
même qu’elle a fait don de sa vie
(d’amour) pour l’Église. Le Cardinal
Newman avait pertinemment raison de
dire: «Dieu s’est humilié jusqu’à l’Église.» Cette femme fut placée en
avant de l’Armée de Marie pour recevoir les coups afin de les épargner à
ses Membres. Mais elle aurait pu s’exclamer comme le philosophe Maurice
Blondel: «Que les coups fassent sortir
de nos âmes quelque chose de meilleur!» Et c’est bien ce qu’il advint.
Quatre fleurs (Oeuvres) sont nées du
bourgeon initial. Dans un conseil donné à une âme qu’il dirigeait, le Cardinal
Charles Journet démontre bien qu’il
avait «entrevu» le Mystère de la Corédemption et son propos serait tout
aussi applicable en notre temps et de
façon particulière à celle qui a signé
Vie d’Amour :
Votre souffrance est grande. Mais
que Jésus vous ait choisi pour porter (supporter) cette attaque contre
Son Église, contre Lui, quel mystère
de Corédemption! Quelle épreuve
«enviable» pour qui réfléchit en silence! Un jour, Il vous dira: «Ce
qu’ils t’ont fait, c’est à Moi qu’ils l’ont
fait.» (Au Fil des jours, juin 2001)
Jeannine Thiffault-Blanchette
BIBLIOGRAPHIE
Au Fil des jours, Soeurs du Bon-Pasteur,
Montréal, 2001.
Calendrier Saint-Paul, Versailles, Éd.
Saint-Paul, 1997.
Dieu plus merveilleux que les rêves, Cardinal Marc Ouellet, Québec, Éd. Anne Sigier,
2004.
Prières à travers le monde, Jean-Paul II,
Paris, Éd. Du Cerf, 1983.
Vie d’Amour, vol. VIII, XV, Marie-Paule,
Québec, Imp. La Renaissance, 1979.

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