TOPIC 4 : Urban trends driving ITS changes

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TOPIC 4 : Urban trends driving ITS changes
TOPIC 4 : Urban trends driving ITS changes :
Compte-rendu de l’ITS World Congress 2015
Irène Chatirichvili, École des Ponts ParisTech
Le monde des transports fait face depuis plusieurs années à un changement de paradigme : le glissement du
« transport » à la « mobilité ». Il ne s’agit plus simplement de construire des infrastructures performantes
permettant à l’usager de se rendre d’un point A à un point B, mais également de rendre ce voyage le plus «
intégré » possible (seamless), c’est-à-dire de simplifier au maximum son déplacement et de le rendre le plus
fluide possible. Cette modification dans la manière de conceptualiser le transport intervient en particulier
dans les pays qui font face à une saturation des réseaux de transport, qu’ils soient ferrés ou routiers, et qui,
dans un contexte économique difficile (financements de plus en plus limités) rendant très compliquée la
construction de nouvelles infrastructures, sont obligés d’optimiser les réseaux existants pour continuer à
fournir un service de qualité. La complexité du challenge provient également de la modification de la
temporalité des usagers des réseaux. Lors de la session de conférences sur l’utilisation des Big Datas en
matière de mobilité intelligente, Philippe SAJHAU d’IBM France a résumé l’évolution des usages et de la
demande des voyageurs en une phrase : il y a quinze ans, l’anticipation et la connaissance d’un itinéraire se
préparait une semaine à l’avance ; il y a cinq ans, le jour d’avant ; aujourd’hui, l’usager souhaite
l’information tout de suite. L’accès à l’information à tout moment grâce à la démocratisation des
smartphones et autres objets connectés oblige les exploitants et les collectivités à repenser leur gestion du
réseau pour satisfaire à la demande d’information en temps réel des usagers, mais ouvre aussi de
nombreuses possibilités pour profiter de ces nouvelles sources de données et de ce nouveau média
d’échange avec l’usager pour satisfaire cette nouvelle demande.
Un des défis pour la mobilité urbaine aujourd’hui et pour ceux qui organisent cette mobilité (collectivités,
exploitants, acteurs du monde des transports de manière plus générale) est donc de répondre à ce double
enjeu : optimiser les réseaux pour permettre au plus grand nombre de se déplacer dans les meilleures
conditions et satisfaire la demande d’information des usagers. Ces deux questions ont été abordées
fréquemment lors de la 22e édition de l’ITS World Congress à Bordeaux, à la fois par les chercheurs, les
collectivités publiques et les industriels, lors des sessions de conférences auxquelles j’ai pu assister.
Un certain nombre de sujets ont émané de ces sessions, et notamment :
● l’information voyageur (sous toutes ses formes) et l’apport des nouvelles technologies et appareils
connectés,
● la simplification du trajet pour l’usager (pour trouver son itinéraire, le mode de transport le plus
approprié ou pratique, les tarifs, etc. puis réaliser son déplacement) grâce au développement de
nouveaux outils (applications notamment),
● en corollaire, l’amélioration de l’intermodalité, c’est-à-dire des possibilités de combiner différents
modes de transport pour se déplacer, et donc de la répartition des flux de voyageurs sur les différents
modes et réseaux disponibles.
ATEC ITS France – Compte Rendu Congrès Mondial de Bordeaux – Octobre 2015
Au cœur de tous ces sujets, l’usager : il y a actuellement un réel changement dans la manière d’envisager
le transport, non plus comme un mouvement de masses, mais plutôt comme le déplacement simultané
d’individus. L’information voyageur devient en cela une réalité à double tranchant : si les différents orateurs
ont souvent souligné qu’elle était nécessaire pour limiter les congestions et aiguiller les usagers vers le bon
itinéraire, que ce soit en situation normale ou perturbée, et que les nouveaux objets connectés individuels
étaient un atout incroyable pour transmettre une information rapide (voire personnalisée) aux usagers, la
transmission de l’information la plus complète et exhaustive possible, notamment en situation perturbée, à
un grand nombre d’individus pouvait potentiellement conduire à une modification générale de leur
comportement ayant des impacts négatifs sur le trafic. L’exemple donné à plusieurs reprises était celui de
l’information de la congestion sur une route, qui pouvait amener de trop nombreuses personnes à changer
d’itinéraire et à congestionner une autre route, en libérant la route qui était censée être chargée au départ.
Nonobstant cette question de l’influence potentiellement néfaste de l’information lorsqu’elle s’adresse à
des masses importantes d’usagers, l’information voyageur comme outil d’aide à la décision pour l’usager
(choix modal et d’itinéraire) est l’objet de nombreuses innovations et recherches. A Vienne ou Lyon de
manière concrète, ou encore au stade du développement chez certains industriels français, les calculateurs
d’itinéraires multimodaux sont devenus une réalité. Plusieurs options existent (a priori pour le moment non
simultanées) : quand l’application Optimod pour Lyon permet de calculer son itinéraire en tenant compte
du trafic en temps réel, le calculateur de Vienne (qui n’est pas en temps réel), en plus de donner l’ensemble
des combinaisons modales permettant de rejoindre la destination désirée, ainsi que le temps nécessaire pour
chaque itinéraire, met l’accent sur la problématique de l’achat de tickets (transports en commun, parking,
etc.). En permettant, une fois la combinaison de mode choisie, d’acheter directement tous les titres de
transport nécessaires sans avoir besoin de chercher les tarifs, les lieux d’achats, ou d’avoir le bon support,
cette application simplifie grandement la pratique intermodale, souffrant parfois de sa complexité due à des
acteurs divers aux politiques tarifaires et commerciales différentes. En plus de proposer un service objectif
d’aide à la décision et de simplification du déplacement, d’autres applications envisagées par des acteurs
industriels vont plus loin : par le biais d’incitations sous forme de bonus ou de points, l’idée à terme est, via
les informations données par ces applications, d’inciter les usagers à privilégier un mode plutôt qu’un autre.
Par exemple, l’usager fréquent du vélo pourrait engranger des points qui lui serviraient à payer un ticket de
bus les jours de pluie. L’information voyageur pourrait ainsi avoir un côté actif, soutenant les politiques
publiques d’incitation à l’utilisation des modes doux ou moins polluants.
Une autre tendance qui est ressortie des conférences est le fait que le temps de transport a matière et vocation
à être valorisé. Une heure dans un train peut être mise à profit pour travailler, lire, jouer avec ses enfants.
Une heure dans une voiture peut être vue comme du temps perdu. Le développement des voitures
autonomes, innovation très présente sur le congrès correspond à une volonté de conserver la flexibilité de
l’itinéraire permise par le véhicule particulier tout en permettant d’occuper son temps de trajet de manière
plus efficace. Enfin, la sécurité des usagers reste une question fondamentale, et des innovations répondant
à des besoins spécifiques (par exemple dans des pays aux conditions climatiques parfois difficiles, comme
la Finlande) peuvent contribuer à améliorer la sécurité des usagers des réseaux. Ainsi, il existe déjà des
systèmes permettant d’une part de transmettre des informations sur la qualité des routes (en particulier de
la tenue de route et des conditions atmosphériques) à des voitures connectées dans des zones définies, et
d’autre part qu’hors de ces zones, les voitures équipées du système s’échangent des informations
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lorsqu’elles se trouvent à proximité. Ce partage d’information permet une meilleure connaissance des
conditions climatiques, et donc une anticipation des difficultés potentiellement rencontrées et une plus
grande prudence du conducteur.
Pour conclure, le monde des transports fait face actuellement à des changements fondamentaux dans la
manière d’envisager les réseaux et les interactions avec les usagers. Ces changements de paradigme ainsi
que le développement rapide des nouvelles technologies et l’augmentation de la masse de données
disponibles pour mieux comprendre les comportements de mobilité entrainent l’ouverture de tout un champ
des possibles pour le développement d’innovations dans le domaine des ITS, en particulier dans tout ce qui
concerne le Transportation Demand Management, c’est-à-dire l’ensemble des stratégies visant à organiser
et gérer la demande de transport.
ATEC ITS France – Compte Rendu Congrès Mondial de Bordeaux – Octobre 2015