ÉVALUATION IN VIVO DE LA RÉPONSE DU TISSU

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ÉVALUATION IN VIVO DE LA RÉPONSE DU TISSU
© Masson, Paris, 2004
Neurochirurgie, 2004, 50, n° 2-3, 320-326
L’expérience radiochirurgicale
Résultats
ÉVALUATION IN VIVO DE LA RÉPONSE
DU TISSU TUMORAL À LA RADIOCHIRURGIE
Application aux schwannomes vestibulaires
M. LEVIVIER, N. MASSAGER, P. DAVID
Centre Gamma Knife, Hôpital Erasme, Université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique.
SUMMARY: In vivo evaluation of tumor response to
radiosurgery: application to vestibular schwannomas
RÉSUMÉ
Key-words: vestibular schwannoma, radiosurgery, metabolism, spectroscopy,
PET, MRI, SPECT.
Le suivi par imagerie classiquement réalisé après le
traitement des schwannomes vestibulaires (SV),
comme le CT ou l’IRM, ne permet pas d’évaluer la réponse du tissu tumoral à la radiochirurgie. Des modifications de la prise de contraste sont fréquemment
observées, avec diminution de la prise de contraste au
sein du SV traité. Toutefois, cet aspect sémiologique
assez caractéristique et assez précoce ne semble pas
présenter de caractère prédictif du succès à long terme
de la radiochirurgie des SV. Les nouvelles techniques
d’imagerie métabolique et fonctionnelle pourraient
s’avérer utile pour essayer d’évaluer in vivo les modifications induites par la radiochirurgie. Des données
existent déjà par études en spectroscopie MR, en tomographie par émission de positons (TEP) ou en SPECT,
mais elles concernent quasi essentiellement l’étude des
tumeurs primitives du système nerveux central et les
métastases de néoplasies systémiques. Il existe toutefois très peu de données métaboliques et fonctionnelles
sur l’étude in vivo de la réponse du tissu tumoral à la
radiochirurgie, en particulier en ce qui concerne les SV.
Dans d’autres pathologies, les données de la TEP et de
la spectroscopie par IRM, en particulier, ouvrent des
pistes intéressantes pour le suivi de tumeurs traitées
par radiochirurgie. Compte tenu de l’apport prédictif
que constitue l’étude en spectroscopique protonique et
en TEP pour les tumeurs primitives du système nerveux central, il serait probablement pertinent d’envisager une étude prospective afin d’évaluer l’apport
potentiel de ces investigations in vivo dans l’évaluation
pré-traitement et le suivi des SV après radiochirurgie.
Lars Leksell définit la radiochirurgie comme
une technique permettant « l’administration d’une
dose unique et élevée de radiations au niveau
d’un volume intracrânien de petite taille et situé
au niveau d’une zone critique, à travers le crâne
intact » [16]. À l’origine, la radiochirurgie avait
été conçue pour réaliser des interventions de neurochirurgie fonctionnelle (en particulier pour
M. LEVIVIER, N. MASSAGER, Ph. DAVID (Neurochirurgie, 2004, 50, 320-326)
Imaging follow-up of vestibular schwannomas (VS),
such as CT or MR, does not allow assessing the response of the tumor tissue to radiosurgery. Changes in
contrast enhancement are frequently observed, with a
loss of contrast enhancement within the treated VS.
However, this typical aspect does not anticipate the longterm success of radiosurgery for VS. New functional and
metabolic image modalities could be useful to assess in
vivo radiosurgery-induced tissue changes. Such data already exist, using techniques such as MR spectroscopy,
positron emission tomography (PET) and SPECT, but
they concern almost exclusively the evaluation of primary SNC tumors and metastases of systemic cancers.
There are, however, very sparse metabolic and functional data concerning the in vivo evaluation of the response of the tumor tissue to radiosurgery. Moreover,
such information is only anecdotal in VS. In other disorders, PET and MR spectroscopy data suggest interesting new directions for the assessment of radiosurgery
follow-up. Based on the predictive information provided
by PET and MR spectroscopy in primary CNS tumors,
it would be worthwhile to design a prospective study
evaluating the role of these imaging modalities for in
vivo assessment of radiosurgery-treated SV.
Tirés à part : M. LEVIVIER, Service de Neurochirurgie et Centre Gamma Knife, ULB - Hôpital Erasme, 808 route de Lennik, B-1070
Bruxelles, Belgique.
e-mail : [email protected]
Vol. 50, n° 2-3, 2004
RÉPONSE TISSULAIRE À LA RADIOCHIRURGIE
remplacer la thermocoagulation stéréotactique,
utilisée pour réaliser des thalamotomies pour le
traitement des mouvements anormaux et de la
douleur) et, comme telles, avait pour but de générer des lésions de nécrose au sein du volume irradié. Dans ces cas, la formation d’une lésion
nécrotique fut confirmée par des observations
autopsiques [17, 32] ainsi que dans des modèles
expérimentaux [14, 37]. L’expérience des pathologies tumorales accumulée en radiochirurgie démontra rapidement que l’utilisation de doses
élevées, à visée de nécrose tumorale, était associée à un taux de complication fortement élevé.
Dans les pathologies bénignes en particulier, l’utilisation de doses plus faibles s’avéra tout aussi efficace pour obtenir une inactivation biologique
des cellules tumorales et pour maintenir un
contrôle tumoral élevé. Ceci est bien illustré par
l’évolution progressive de la prescription de doses
dans les schwannomes vestibulaires (SV). En effet, aux doses actuellement utilisées par la plupart
des équipes (12 à 14 Gy, en fonction des protocoles de traitement), la réponse du tissu tumoral à la
radiochirurgie est telle que le contrôle tumoral
reste optimal (aux environs de 97-98 %) tout en
permettant d’administrer une dose minimale aux
tissus environnants, comme les nerfs crâniens et le
tronc cérébral, ce qui a permis de réduire considérablement le risque d’effets secondaires [6, 29].
La conséquence cellulaire physique principale
de la radiochirurgie se manifeste au niveau de
l’ADN. Les radiations ionisantes engendrent des
cassures au niveau d’un ou des deux brins de la
double hélice. La lésion des deux brins ne permet
plus de réparation endogène et l’atteinte de
l’ADN est, en général, permanente. Hormis une
réparation physique spontanée qui, si elle survenait dans un nombre suffisant de cellules, signerait
l’échec du traitement, trois types de réponses radiobiologiques peuvent être attendues au niveau
des SV traités par radiochirurgie [18]. Premièrement, l’atteinte de l’ADN peut s’accompagner
d’une activation des systèmes de surveillance endogène du génome cellulaire. Ceci a pour conséquence d’activer les mécanismes de cascades liées
à la mort cellulaire programmée, ou apoptose. Cliniquement, ce phénomène pourrait être associé à
une diminution de volume rapide du SV, en rapport avec une perte cellulaire précoce. Deuxièmement, l’atteinte de l’ADN pourrait n’entraîner le
déclenchement des phénomènes d’apoptose qu’au
moment où les cellules entreraient dans la phase
active de la division cellulaire. Ainsi, cliniquement,
la perte cellulaire et la diminution du volume tumoral ne se produiraient que plus tardivement.
Comme les SV ont des cycles cellulaires particulièrement longs et un index de prolifération très bas
[2, 34], cela expliquerait la diminution lente et
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progressive du volume tumoral, se poursuivant
plusieurs années après le traitement de radiochirurgie. Ce phénomène a été bien décrit dans les
suivis à long terme par imagerie des SV traités par
Gamma Knife [23, 28]. Troisièmement enfin, l’atteinte de l’ADN peut conduire à un état irréversible d’arrêt de la croissance cellulaire. Dans ce cas,
les cellules du SV resteraient vivantes mais ne seraient plus capable de se diviser. Dans une telle situation, l’analyse histologique de VS réséqués
après radiochirurgie apparaîtrait inchangée, mais
des études de viabilité cellulaire montreraient l’absence de potentiel prolifératif. Cliniquement, cette
situation correspondrait à un arrêt de croissance
après radiochirurgie, d’une tumeur dont l’évolutivité avait été préalablement bien documentée. Ce
phénomène est également bien connu dans les suivis à long terme par imagerie des SV traités par
Gamma Knife [23, 28]. Les lésions de l’ADN directement induites par les radiations ionisantes sur
les cellules ne sont pas les seuls phénomènes pouvant entrer en ligne de compte dans le contrôle tumoral des VS après radiochirurgie. En effet, la
vascularisation tumorale est également sensible
aux radiations ionisantes. Ces dernières peuvent
générer une hyalinisation artériolaire et des lésions
cellulaires des myoblastes et de l’intima. Ces lésions entraînent une prolifération cellulaire intravasculaire qui, associée aux phénomènes de
hyalinisation, sont responsables de l’occlusion des
petites artères et des artérioles. Ces mécanismes
participent certainement aux phénomènes de mort
cellulaire par nécrose, et interviennent donc cliniquement dans la perte cellulaire et la réduction du
volume tumoral. Le rôle relatif de l’atteinte cellulaire directe par rapport à l’atteinte vasculaire
dans la diminution du volume tumoral reste débattu.
Le suivi par imagerie classiquement réalisé
après le traitement des SV ne permet bien entendu pas d’illustrer et de distinguer ces différents
types de réponse au niveau radiobiologique. La
tomodensitométrie (CT-scanner) permet, tout au
plus, d’évaluer grossièrement l’évolution du volume tumoral. L’IRM apporte déjà plus d’information quant aux modifications existant au sein
du volume traité. Elle permet surtout d’étudier
avec précision les modifications de volume tumoral survenant après la radiochirurgie. Au cours du
temps, on note fréquemment une augmentation
temporaire du volume tumoral durant les deux
premières années (41 % dans la série de Nakamura et al.) [23]. Le suivi du volume pendant 2 ans
n’est toutefois pas prédictif d’une mauvaise réponse au traitement ; en effet, la plupart des
schwannomes présentant une augmentation initiale de volume voient leur taille régresser, plus de
2 ans après le traitement radiochirurgical par
322
M. LEVIVIER et al.
Gamma Knife [23, 28]. Des modifications de la
prise de contraste sont également fréquemment
observées, avec diminution de la prise de contraste
au sein du SV. Il semble que ces modifications,
avec persistance d’une zone hypersignal et prenant le contraste en périphérie associée à une
perte de signal au centre de la tumeur, puissent
trouver une bonne correspondance histologique.
Ceci fut observé dans un cas de SV dans une neurofibromatose type 2, réséqué partiellement plusieurs mois après radiochirurgie, à la suite d’une
aggravation clinique durant la phase de « nécrose
radiologique » de la tumeur, avec importante
perte de contraste en IRM [33]. Ceci contraste
avec les quelques observations rapportées dans les
SV opérés après radiochirurgie, et qui correspondent à des situations de récidive ou d’évolutivité
secondaires. Ces cas présentent le plus souvent
une réapparition de la prise de contraste au sein
du SV, et une description histologique assez
caractéristique des SV, avec peu de stigmates résiduels du traitement radiochirurgical [15]. Toutefois, l’aspect sémiologique assez caractéristique et
assez précoce des modifications IRM ne semble
pas présenter de caractère prédictif du succès à
long terme de la radiochirurgie des SV [23]. Aussi,
serait-il avantageux de pouvoir disposer d’un outil
pronostique de la réponse thérapeutique, qui soit
plus précoce et plus précis que ce que ne permet
le suivi classique par IRM. Récemment, certains
protocoles IRM permettant d’étudier la perméabilité endothéliale ont été appliqués au suivi de l’irradiation de tumeurs, comme les méningiomes et
les gliomes de bas grade [11, 36].
Les nouvelles techniques d’imagerie métaboliques et fonctionnelles pourraient s’avérer utile
pour essayer de mieux comprendre ces phénomènes in vivo, dans le suivi des traitements radiochirurgicaux. Des données existent déjà par études
en spectroscopie MR, en tomographie par émission de positons (TEP) ou en SPECT, mais elles
concernent quasi essentiellement l’étude des tumeurs primitives du système nerveux central et les
métastases de néoplasies systémiques. Le but premier de ces études est d’évaluer la contribution de
ces techniques d’imagerie au diagnostic différentiel entre l’apparition de phénomènes de radionécrose et l’existence d’une récidive ou d’une
évolutivité tumorale. Dans ce contexte, ces différentes techniques d’imagerie peuvent s’avérer fort
utiles. Peu d’études ont, par contre, évalué la réponse, précoce ou tardive, du tissu tumoral à la
radiochirurgie, et leur éventuel potentiel pronostique pour l’évaluation de la réponse thérapeutique.
À ce jour, aucune étude n’a rapporté d’expérience concernant l’éventuel apport de la spectroscopie dans la prise en charge du traitement
Neurochirurgie
radiochirurgical des SV. Quelques communications ont rapporté des cas de patients porteurs de
SV traités par radiochirurgie et suivis par spectroscopie [19, 22]. Pour d’autres lésions tumorales
traités par radiochirurgie, comme les gliomes,
certaines études ont rapporté l’intérêt de réaliser
un suivi par IRM et spectroscopie protonique
(H1MRS) [12, 24, 25]. L’étude spectroscopique
des gliomes malins après traitement par Gamma
Knife permet de détecter précocement (c’est-àdire avant des modifications de comportement de
signal et de volume en IRM) des anomalies spectroscopiques prédictives d’une récidive tumorale
ou d’une mauvaise réponse au traitement radiochirurgical [8, 9]. On ne dispose, par ailleurs, que
de quelques séries publiées concernant l’étude
spectroscopique des SV : Poptani et al. [27], dans
une série de 120 cas de tumeurs du système nerveux central étudiés par H1MRS, décrit les spectres de 8 SV, tandis que Roda et al. [30] en
rapportent 9, et Cho et al. [3] en rapportent 13. Il
est intéressant de noter que tous les cas présentent un profil spectroscopique différent de ceux
d’une population de méningiomes ou de métastases, permettant aux auteurs de conclure à l’utilité
de la spectroscopie comme méthode diagnostique
non invasive. Ce point est particulièrement important puisque, dans la plupart des cas, l’indication
du traitement radiochirurgical des SV se fait sur la
base des caractéristiques morphologiques IRM, et
que dès lors, en cas de doute diagnostique, la
spectroscopie pourrait s’avérer utile.
La TEP permet d’évaluer in vivo le métabolisme des tumeurs cérébrales bénignes [5]. La TEP
permet d’analyser l’activité du métabolisme glucidique en utilisant le fluoro-déoxy-glucose (FDG)
comme radiotraceur ; l’activité de synthèse protéique peut être étudié à l’aide d’acides aminés radiomarqués, comme la 11C-méthionine [5]. La TEP
n’a été que rarement utilisée pour le suivi des SV
[2]. Dans cette étude de 5 cas, les auteurs notent
une grande variation dans la captation de FDG et
l’absence de corrélation de ce paramètre avec l’index de prolifération évalué par immunomarquage
du Ki-67. À Bruxelles, nous avons récemment eu
l’occasion d’évaluer par TEP au FDG l’évolution
d’un SV traité par Gamma Knife 3 ans auparavant.
La tumeur avait montré des signes de régression
volumétrique durant la première année après la
radiochirurgie, puis avait augmenté régulièrement
de volume, signant une progression tumorale et
nécessitant un traitement chirurgical. L’imagerie
TEP pré-opératoire a montré une captation hétérogène de FDG intratumoral, compatible avec une
tumeur proliférante (figure 1). La TEP peut aussi
être utilisée de manière répétée, après un traitement comme la radiochirurgie, pour apprécier la
réponse métabolique du processus tumoral à ce
Vol. 50, n° 2-3, 2004
RÉPONSE TISSULAIRE À LA RADIOCHIRURGIE
323
FIG. 1. — Co-registration des images IRM (en haut, à gauche) et TEP au FDG (en bas, à droite) chez une patiente traité par
Gamma Knife pour un schwannome vestibulaire, 3 ans auparavant. La tumeur avait montré des signes de régression volumétrique durant la première année après la radiochirurgie, mais par la suite avait augmenté régulièrement de volume, signant
une progression tumorale et nécessitant un traitement chirurgical. L’imagerie TEP réalisée avant la chirurgie montre une
zone de métabolisme hétérogène au sein du schwannome. Cette captation de FDG, qui est faible par rapport aux structures
corticales environnantes, est supérieure à celle de la substance blanche. La localisation de cette augmentation hétérogène de
la captation de FDG correspond bien au schwannome vestibulaire, tel que démontré par la fusion des images co-registrées
(en haut, à droite).
FIG. 1. — Co-registration of the MRI (upper left) and FDG-PET (lower right) images in a patient treated with Gamma Knife for
a vestibular schwannoma three years earlier. The tumor showed signs of size regression during the first year after radiosurgery
but then increased in volume regularly, a sign of tumor progression requiring surgical treatment. PET imaging performed before
surgery showed a zone of heterogenous metabolism within the schwannoma. FDG uptake, which was low compared with the
neighboring cortical structures, was higher than in the white matter. This zone of heterogeneous FDG uptak corresponded well
with the vestibular schwannoma as was demonstrated on the co-registered fused images (upper right).
324
M. LEVIVIER et al.
traitement [4]. Néanmoins, jusqu’à présent, la TEP
a été principalement utilisée dans le suivi après
traitement radiochirurgical par Gamma Knife des
malformations artério-veineuses [10] et des tumeurs malignes [13, 38], ou pour différencier une
nécrose post-radique d’une récidive tumorale [1,
21]. Il n’existe, par contre, que peu de données
dans la littérature concernant l’évolution métabolique évaluée par la TEP de tumeurs bénignes
après un traitement radiochirurgical. Pan et al. [26]
ont utilisé la TEP au FDG au cours du suivi postradiochirurgical de deux méningiomes bénins, lors
de la phase de majoration de l’œdème péritumoral
visible à l’IRM, quelques mois après le traitement
radiochirurgical ; ils ont montré que l’imagerie par
la TEP répétée permettait de s’assurer d’une réduction progressive du métabolisme tumoral malgré une évolution transitoirement défavorable de
l’imagerie par IRM ainsi que de l’état clinique des
patients. Nous avons récemment rapporté l’observation de l’évolution de l’activité métabolique de
la méthionine au cours du suivi post-radiochirurgical de patients traités par Gamma Knife pour un
gliome de bas grade [20]. Nous avons montré que
la réponse métabolique précoce après le traitement radiochirurgical semblait inversément proportionnelle à l’évolution à long terme du
métabolisme tumoral ; en d’autres termes, une
augmentation précoce et transitoire du métabolisme protéique post-radiochirurgical pourrait être
associé à une réduction secondaire de ce métabolisme qui persisterait à long terme, alors qu’une réponse post-radique caractérisée par une réduction
initiale du métabolisme de la méthionine semblerait associé à une perte du contrôle tumoral à plus
long terme. Ainsi, le suivi par TEP pourrait également contribuer à l’évaluation pronostique de la
réponse du tissu tumoral à la radiochirurgie. Ces
modifications précoces du métabolisme protéique
induites par le traitement suggèrent l’existence de
modifications vasculaires apparaissant précocement après la radiochirurgie [20].
Ces données vont le même sens que celles rapportées par Seo et al. [31] qui ont étudié par
SPECT les modifications métaboliques des SV
après radiochirurgie par Gamma Knife, à l’aide de
radiotraceurs de la viabilité tissulaire (thallium201 chloride, 201TlCl-SPECT) et de la vascularisation et perméabilité vasculaire (technetium-99mDTPA-human serum albumin, 99mTc-HSA-DSPECT). L’étude de la viabilité tumorale par
201
TlCl-SPECT ne montre aucun changement sur
les contrôles réalisés un an après la radiochirurgie.
Les images précoces de 99mTc-HSA-D-SPECT démontrent l’existence d’une réduction significative
de la vascularisation des VS, à un an et à deux ans
après la radiochirurgie. Enfin, les images tardives
de 99mTc-HSA-D-SPECT sont en faveur d’une
Neurochirurgie
absence de modification de la perméabilité tumorale dans les mêmes délais. Cette étude plaide
donc en faveur d’une réduction de la vascularisation sans modification de la viabilité cellulaire des
SV dans l’année suivant la radiochirurgie.
Bien que les rares données métaboliques in
vivo semblent favoriser le rôle de la réponse vasculaire du tissu tumoral à la radiochirurgie, certaines données histologiques démontrent également
l’existence d’une atteinte cellulaire directe. Tsuzuki
et al. [35] ont démontré l’induction d’apoptose associée au traitement par Gamma Knife dans une
série de tumeurs cérébrales, comprenant des
neurinomes, des méningiomes, des adénomes hypophysaires et des lymphomes malins. Plus spécifiquement, Fukuoka et al. [7] ont rapporté un cas
de SV opéré 13 mois après un traitement par
Gamma Knife et présentant des cellules apoptotiques. La mise en évidence de phénomènes
de fragmentation nucléaire, caractéristique de
l’apoptose, a été étudiée par la méthode TUNEL
sur 9 échantillons de SV opérés. Chez les 7 patients n’ayant pas eu de radiochirurgie préalable,
les échantillons ne présentaient pas de signes
d’apoptose. Bien que l’analyse histologique par
TUNEL ait été positive pour un patient traité par
radiochirurgie, il faut souligner qu’un deuxième
patient opéré 18 mois après radiochirurgie ne présentait pas de signes d’apoptose dans la tumeur.
Ces résultats restent toutefois difficiles à interpréter puisque les échantillons ont été analysés au
moment où la tumeur était à nouveau évolutive.
En conclusion, il existe très peu de données
métaboliques et fonctionnelles sur l’étude in vivo
de la réponse du tissu tumoral à la radiochirurgie,
en particulier en ce qui concerne les SV. Dans
d’autres pathologies, les données de la TEP et de
la spectroscopie par IRM, en particulier, ouvrent
des pistes intéressantes pour le suivi de tumeurs
traitées par radiochirurgie. Compte tenu de l’apport prédictif que constitue l’étude en spectroscopique protonique et en TEP pour les tumeurs
primitives du système nerveux central, il serait
probablement pertinent d’envisager une étude
prospective afin d’évaluer l’apport potentiel de
ces investigations in vivo dans l’évaluation prétraitement et le suivi des SV après radiochirurgie.
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