DROIT DE REPONSE AU DOCTEUR JEAN

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DROIT DE REPONSE AU DOCTEUR JEAN
DROIT DE REPONSE AU DOCTEUR JEAN-JACQUES AULAS
Remarque : Avant de commencer cet article j’aimerais faire un petit point sur l’acupuncture.
En France, seuls les Docteurs en Médecine sont habilités à la pratiquer après avoir passé un
Diplôme Universitaire (D.U.). Cependant il est important de spécifier qu’elle fait partie
intégrante de la médecine chinoise. C’est une de ses thérapeutiques au même titre que la
Pharmacopée qui est elle aussi isolée, petit à petit, de son environnement, philosophique et
médical, théorique et pratique.
Cette tendance Européenne à vouloir scinder la médecine chinoise lui est préjudiciable pour
différentes raisons que je m’efforcerai d’expliquer dans un autre article.
LA CRITIQUE EST AISEE…
Nous pourrions commencer, banalement, cet article par l’expression si commune :
« La critique est aisée, mais l’art est difficile. »
Personnellement je la modifierais un peu :
« La critique est aisée car tout semble converger en sa faveur ».
Cependant comme le soulignait Montesquieu, tout contre-pouvoir est nécessaire et
participe à l’émulation de nombreux talents et découvertes ; et Beaumarchais d’ajouter :
« Sans liberté de blâmer, il n’est pas d’éloges flatteurs ».
Donc comme nous le conseillent ces personnages illustres, prenons connaissance de la
critique et tachons d’y répondre avec « courtoisie ».
Il est important, avant tout, de mesurer à quel point la défense des médecines
complémentaires et/ou alternatives n’est pas sans difficultés. S’y intéresser amène à
remettre en question de nombreux principes de base appris au cours de longues années
d’études universitaires et véhiculés par la majorité du corps médical ; c’est accepter de
regarder les choses sous un autre angle ; c’est garder un esprit ouvert qui croit en la
suprématie de l’observation, de la réflexion et de la recherche scientifiques au dépend de
celle de la démonstration mathématique et statistique qui sévit actuellement dans le milieu
de la santé.
Vouloir prôner les médecines complémentaires et/ou alternatives c’est se « battre » contre
des dogmes, des paradigmes… contre des parents, des amis, des confrères, les médias… ;
c’est se mettre du mauvais côté de la barrière car pour l’instant peu de médecins ou
professionnels de la santé plaident en leur faveur ; c’est aussi douter… parfois.
Cependant lorsqu’on voit la satisfaction, le soulagement et le bien-être de certains patients,
on ne peut que continuer notre combat et tenter de montrer qu’il peut exister d’autres
modes d’appréhension de la santé et de la maladie.
Ayant récemment entendu parler du livre de Jean Jacques AULAS « De granules en aiguilles…
L’homéopathie et l’acupuncture évaluées », je l’ai immédiatement acheté pour le
« dévorer » avec beaucoup de curiosité, d’intérêt et d’humilité connaissant médiatiquement
son auteur. Soit cinquante-deux pages d’évaluation dont environ quatorze réservées à
l’acupuncture, thérapeutique faisant partie d’une médecine séculaire qu’est la médecine
chinoise.
LA MEDECINE CHINOISE, SON HISTOIRE, SA PHILOSOPHIE…
Je découvre avec satisfaction que le Docteur Jean Jacques AULAS a pris le soin de
commencer son approche de l’acupuncture par quelques rappels historiques,
philosophiques et « anatomiques ».
Contrairement à la médecine occidentale qui s’en est totalement détachée dès le XIXème
siècle, la médecine chinoise ne peut être appréciée dans sa totalité sans avoir quelques
notions sur la pensée qui l’a influencée. Cependant, dès les premières lignes et à mon grand
regret, je comprends que la volonté de M. AULAS de s’imprégner, de comprendre la richesse
de cette civilisation si différente de la nôtre, n’est toutefois que superficielle. Il décrit assez
succinctement les fondements de la pensée chinoise et ce avec une forme de désinvolture,
sans chercher à en pénétrer ni même à en apercevoir les trésors. Sa description du Tao, du
yin/yang manque terriblement de discernement et il est dommage de citer ces deux
principes sans évoquer, ni même citer Confucius dont la place dans l’histoire de la Chine
reste prépondérante.
Je me permettrai de faire une dernière remarque sur ce sujet. Il est regrettable de parler
« d’amalgame de magie et d’empirisme » de l’acupuncture grâce ou à cause de la
philosophie Taoïste. L’équilibre du yin/yang et la libre circulation du Qi (Energie vitale) dans
notre corps sont les fondements de la médecine chinoise ; ils sont effectivement
d’inspiration Taoïste. Cependant la médecine chinoise constitue un système de pensées et
de pratiques cohérent qui a développé sa propre perception du corps, de la santé et de la
maladie.
LA THEORIE MEDICALE
Dans un second temps, M. AULAS nous dévoile l’histoire de la théorie médicale sur laquelle
s’appuie l’acupuncture en nous décrivant le système qu’elle utilise, celui des méridiens dans
lesquels circule l’énergie Qi et sur lesquels sont situés les points. Cependant, comme il le
souligne, l’existence de ce système est totalement inconnue en médecine occidentale et n’a
jamais été démontrée d’un point de vue scientifique ou anatomique. Sur les trajets des
méridiens il existe un certain nombre de points (leur nombre exact a très peu d’importance)
que l’acupuncteur tonifiera ou dispersera selon les cas. Ces actions permettront d’équilibrer
l’énergie yin ou yang de l’organisme.
Cette approche théorique médicale constituée par la médecine chinoise peut s’avérer, je
l’avoue, très déconcertante pour tout scientifique ou professionnel de santé car elle n’est
basée sur rien de connu ou de reconnu en médecine occidentale. De plus, l’existence des
trois concepts cités précédemment n’a jamais été validée d’un point de vue expérimental.
Toutefois il semble inopportun d’écrire que ces notions sont hermétiques à toute forme de
pensée rationnelle car nous savons que la médecine chinoise s’est développée, au cours des
siècles, grâce à une observation sérieuse guidée par un processus de pensée rigoureux,
logique et transmissible. C’est, je pense, ce qu’il faut retenir.
En médecine occidentale, tous les grands systèmes qui régissent nos fonctions vitales
comme le système respiratoire, digestif, nerveux sont parfaitement connus… Travailler sur
un système « théorique » peut entrainer certains à n’y voir que magie et charlatanisme, là
où n’existe qu’un système de pensée différent mais non moins intéressant et respectable, ne
serait-ce que pour tenter d’en saisir l’apport dans une démarche d’observation et de
recherche.
Cette approche empirique du mode de traitement que propose l’acupuncture constitue un
des points très sensibles et d’imminente fragilité de la médecine chinoise au regard de la
plupart des médecins occidentaux. Jusqu’à ce jour, on pourrait conforter leurs doutes car
aucune méthode expérimentale n’a pu mettre en évidence l’existence des 12 méridiens qui
parcouraient notre corps transportant l’énergie garante de notre santé.
Cependant je voudrais simplement mentionner deux choses qui m’ont toujours
impressionnée en médecine chinoise et qui m’ont incitée à vouloir la connaître davantage.
Premièrement, le fait que les chinois ont su déterminer, sans disséquer le corps, la fonction
et la place exacte de chaque organe dans l’organisme ce qui met, à mon humble avis, en
valeur le sérieux et la véracité de leurs observations… Deuxièmement, le fait qu’ils ont su
interpréter médicalement chaque petit changement de notre corps, ils ont appris à le
« lire ». La couleur de la langue, de la peau, les différentes odeurs, la fluctuation des pouls
ont une signification en médecine chinoise et permettent une évaluation pertinente de
l’état de santé du patient.
Comme toute discipline, la médecine chinoise a subi des changements au cours de son
histoire. Il ne me semble pas important, ni utile, dans une évaluation scientifique telle que
veut nous la présenter le Docteur AULAS, d’en dévoiler tous les retournements dont la
véracité historique reste parfois à démontrer. Cet étalage de notions à la fois philosophie,
historiques et médicales, aujourd’hui pour la plupart abandonnées, n’a pour conséquence
que la perturbation et la confusion du lecteur… qui dans cet environnement complexe peut
avoir du mal à se faire une opinion valable et à participer au débat.
LA PRISE DES POULS ; LE DIAGNOSTIC EN MEDECINE CHINOISE
Le troisième temps abordé dans l’ouvrage est consacré à l’évaluation : « Pouls, points et
méridiens, circulation énergétique existent-ils vraiment ? ».
La première phrase de M. AULAS est simple, sans équivoque et nous conforte dans l’idée
que la médecine chinoise est autre : « Bon nombre d’acupuncteurs soulignent d’emblée que
ces notions ne sont absolument pas transposables en termes d’anatomie et de physiologie
de la médecine occidentale ». Que l’énergie dont il est question ne se mesure pas en Joules
et que jusqu’à présent, ce concept reste totalement abstrait. La médecine chinoise comme
son nom l’indique est une médecine à part entière. Elle a une approche incomparable du
corps humain, ses propres moyens de diagnostic et ses traitements qui sont au nombre de
cinq, à savoir, la Pharmacopée, l’acupuncture, le massage, la diététique et le Qiqong.
On ne peut en aucun cas la comparer à la médecine occidentale ce qui est pourtant le
premier réflexe, tout à fait compréhensible, de toutes les personnes ayant un esprit
cartésien comme, cela est très certainement le cas, pour le Docteur AULAS.
Comme nous l’avons dit précédemment, l’examen médical, en médecine chinoise, se
compose de l’observation de la langue, du teint, de l’attitude générale, d’un long
interrogatoire … et surtout de la palpation des pouls, méthode de diagnostic essentielle.
Elle permet le recueil d’informations sur la nature et la localisation des maladies. Les
médecins chinois prennent les pouls à trois emplacements situés à chaque poignets soit six
pouls radiaux, chaque pouls correspondant à un viscère (cœur, poumons, foie…). Cependant
comme le souligne, à juste titre M. AULAS, la prise des pouls nécessite un savoir-faire
incontestable car chaque pouls doit être évalué superficiellement et en profondeur.
La médecine chinoise prône une relation entre l’homme et la nature basée sur le respect et
l’échange ; ils s’influencent mutuellement. Des chercheurs de l’Université de Médecine de
Shagong ont réalisé une étude systématique. Ils ont enregistré 1131 tracés shygmoélectrocardiographiques au cours de l’année et ont mis en évidence des variations
saisonnières totalement conformes à la description qu’en fait la médecine chinoise. En
occident, c’est ce qu’on appellerait la chronobiologie ; science à laquelle nous accordons
encore peu d’importance dans le domaine de la santé.
Le rythme des pouls donne des indications sur l’état dans lequel se trouve l’organisme. Il
peut être modifié par la stimulation ou la dispersion de certains points d’acupuncture.
Le Docteur AULAS spécifie avec raison que la modification des pouls ne correspond pas à
une pathologie spécifique connue en médecine occidentale. Précisons, pour ne pas spéculer
en vain, que le diagnostic en médecine chinoise n’est pas une maladie au sens occidental du
terme. Les études expérimentales ne peuvent et ne doivent, donc, pas être comparatives
mais intrinsèques.
L’EXISTENCE DES MERIDIENS, DES POINTS, DE L’ENERGIE… EVALUATION SCIENTIFIQUE
La recherche expérimentale sur l’existence des méridiens et des points d’acupuncture a
toujours été abondante ; elle est toujours d’actualité. L’intérêt que suscite la médecine
chinoise montre qu’elle ne laisse personne indifférent du médecin au scientifique le plus
chevronné ce qui tendrait à avancer l’hypothèse que son efficacité dérange, perturbe l’ordre
établi et que certains chercheurs audacieux travaillent pour comprendre comment
l’acupuncture opère et quels seraient ses mécanismes d’action.
M. AULAS nous décrit plusieurs expériences. La première consistait à mesurer la résistivité
de la peau grâce à des ohmmètres ; elle devait être moindre à l’endroit des points.
Finalement ces études n’ont pas été concluantes. La deuxième, datant de 1985, consistait à
enregistrer l’émission radioactive d’un isotope injecté au niveau d’un point d’acupuncture.
Certains médecins prétendirent que le Technétium empruntait le trajet d’un méridien.
Cependant des chercheurs prouvèrent rapidement que la voie empruntée n’était autre que
la circulation lymphatique et veineuse.
Il est vrai qu’en l’état actuel des connaissances scientifiques, l’existence des points
d’acupuncture et des méridiens n’est qu’hypothèse. Il est très important de souligner « en
l’état actuel des connaissances scientifiques » car c’est encore le cas de plusieurs grandes
énigmes de notre temps. Nous sommes bien loin d’avoir tout découvert et tout compris du
monde qui nous entoure. Fort heureusement !
Ne citons, comme grande interrogation scientifique, que l’Origine de la Vie. Combien de
biologistes, astrophysiciens… à travers le monde, travaillent et se heurtent à de nombreuses
suppositions concernant ce sujet. Pourtant nous pouvons dire avec humour qu’aucun
d’entre eux ne s’aventurera, jamais, à remettre en question son existence.
Ce serait bien qu’il en soit de même pour la médecine chinoise en considérant qu’elle est
efficace dans bien des cas mais que pour l’instant personne, en l’état actuel des
connaissances scientifiques, n’arrive à démontrer, ni à expliquer ses mécanismes d’action.
Je finirai ce paragraphe par la phrase de l’astrophysicien Carl Sagan :
« L’absence d’évidence n’est pas l’évidence d’absence ».
Et comme le souligne le Professeur Luc Montagnier, Prix Nobel de Médecine :
« Beaucoup de scientifiques font cette erreur qui consiste à refuser ce qu’ils ne
comprennent pas ».
EVALUATION CLINIQUE
En médecine, l’évaluation comporte toujours, deux phases : une évaluation de l’explication
et de la compréhension des mécanismes d’action grâce à la recherche scientifique, c’est ce
que nous avons vu précédemment, mais aussi une évaluation de l’efficacité thérapeutique
du traitement grâce à des études cliniques, c’est ce que nous allons voir maintenant.
M. AULAS commence ce paragraphe en comparant le nombre d’études cliniques réalisées en
homéopathie et en acupuncture soit 10 fois plus pour la deuxième. J’avoue ne pas avoir
compris ce que cela signifie, que doit-on en déduire ? Que l’acupuncture semble plus
pertinente puisqu’on s’y intéresse davantage ou que malgré les 1500 à 2000 études réalisées
on n’a toujours rien trouvé.
Puis il nous dévoile que la problématique des études cliniques en acupuncture est le choix du
placebo. Cette analyse me semble quelque peu simpliste.
Des études cliniques ont été réalisées dans différents domaines dont plusieurs dans celui de
la douleur (conduction de la douleur, épicondylite, fibromyalgie, migraines, céphalées). Nous
savons que dans l’antalgie, l’effet placebo est prépondérant. Dernièrement, une émission
sur Arte nous dévoilait les résultats d’études récentes réalisées dans ce domaine. L’effet
d’un placebo est largement comparable à celui d’un médicament antalgique ; ils ont même
démontré que cet effet était amplifié quand le médecin rassure le patient et le met en
confiance. On comprend certes que la sensation ressentie vis à vis de la douleur est très
subjective et varie d’un sujet à l’autre. Au vu de l’ensemble de ces éléments, il ne me semble
pas indiqué de vouloir évaluer l’efficacité de l’acupuncture dans ce domaine.
Par contre une étude réalisée dans le traitement des vomissements produits par certaines
opérations chirurgicales, certaines chimiothérapies ou encore durant la grossesse met en
évidence une efficacité de l’acupuncture supérieure à celle du placebo.
Sans être une experte, je reste très sceptique vis-à-vis de toutes ces études cliniques, pour
plusieurs raisons que je vais tenter d’expliquer le plus simplement possible.
La médecine chinoise est une médecine holistique qui appréhende l’être humain dans son
ensemble. Comme nous l’avons vu précédemment le diagnostic est réalisé après un examen
médical minutieux. Le diagnostic n’est pas comparable à celui réalisé en médecine
occidentale. Il ne désigne, en aucun cas, une pathologie connue comme l’asthme, la grippe…
Il décrit, par exemple, un vide de yin, un feu dans le foie, une plénitude de Qi au niveau des
reins… ce langage imagé fait partie intégrante du diagnostic en médecine chinoise. Il est le
diagnostic. Après évaluation de l’état du patient, un traitement est mis en place par
acupuncture, moxibustion, phytothérapie… Il sera adapté au fur et à mesure de l’évolution
des « paramètres » du patient comme le rythme des pouls, la couleur de la langue…
Pour illustrer encore davantage ce que je viens d’énoncer et surtout le comprendre
j’aimerais que le Professeur Giovanni MACIOCIA nous explique comment il traite
l’endométriose. J’en dévoile ici quelques principes. Dans cette pathologie la médecine
chinoise est une alternative très intéressante. En Occident, les traitements proposés sont
hormonaux ou chirurgicaux. Les hormones ont pour but de bloquer l’ovulation et les règles
ce qui est un gros inconvénient pour les femmes en âge de procréer. La médecine chinoise
va adapter ses traitements, en autres par acupuncture, en fonction des symptômes (stase de
sang, masses abdominales, couleur de la langue, déficience du yang du rein, humidité…) et
des 4 phases du cycle menstruel de la patiente (tonification du rein après les règles…). Après
le traitement (1 à 2 ans), une très nette amélioration de la stérilité et des lésions est
observée.
Les études cliniques mises en place pour valider l’efficacité d’un médicament, dans une
pathologie déterminée asthme, grippe…, sont réalisées en double aveugle versus placebo. Le
docteur en médecine chinoise ne peut pas être « aveugle » vis-à-vis de son patient. Son
diagnostic, puis son traitement doivent être en perpétuelle évolution pour atteindre la
guérison espérée. Il essayera de trouver puis de soigner la cause profonde des maux. Il ne
se contentera pas d’un traitement symptomatique.
C’est pour toutes ces raisons que les études cliniques que mentionne le Docteur AULAS ne
donnent pas les résultats escomptés en acupuncture.
Un autre point, si je peux m’exprimer ainsi, m’interpelle. Pour rétablir l’équilibre
énergétique du corps, l’acupuncteur stimule ou disperse, dans la plupart des cas, de
nombreux points. Toutes les études, présentées par le Dr AULAS, décrivent la « piqure »
d’un seul point et ce pour faciliter l’étude et régler le problème du choix du placebo.
Dans ces cas précis, nous réalisons que la médecine chinoise a dû s’adapter aux paramètres
des études « occidentales » jusqu’à en oublier son propre mode de fonctionnement.
Pourtant le Dr AULAS souligne la rigueur méthodologique des études réalisées par des
praticiens expérimentés et sa conclusion est sans équivoque : « Planter des aiguilles partout
est tout aussi efficace. Et dans tous les cas beaucoup plus que si l’on ne fait rien ». Que
signifient ces deux phrases qui clôturent son plaidoyer ? Tout simplement, avec subtilité et
ironie, que les résultats des études menées laissent à penser que l’acupuncture n’a pas plus
d’effet que celui d’un placebo.
Je donnerai une simple image pour conclure ce chapitre. C’est un peu comme si l’on mettait
sur la ligne de départ du Grand Prix d’Espagne, un cheval en compétition avec une formule 1
et qu’à l’arrivée on déclarait, avec aplomb, que la voiture est la panacée et la bête bonne à
être jetée. Qui pourrait contredire l’évidence qu’un cheval ne peut pas dépasser une
formule 1 sur un circuit créé pour elle. Pourtant cet animal, ami fidèle du genre humain, aide
l’homme, en toutes circonstances, depuis la nuit des temps. Il est certes moins sophistiqué,
moins technique mais il est robuste, polyvalent, peu couteux… écologique. Ces deux
« véhicules » n’ont rien de comparable, ils n’ont pas à être en compétition ; chacun a ses
avantages et ses inconvénients. Il en est de même pour la médecine occidentale et la
médecine chinoise.
L’ACUPUNCTURE EST-ELLE DANGEREUSE ?
Après avoir tenté de dénigrer, scientifiquement, l’acupuncture, on arrive au coup de grâce
que veut asséner le Docteur Jean Jacques AULAS à la médecine chinoise : « l’acupuncture
serait dangereuse ».
Pourtant à ma connaissance très peu d’effets indésirables ont été recensés contrairement
aux médicaments…
Mais il y aurait, semble-t-il, possibilité d’un risque infectieux… ce qui est tout à fait probable.
Toutefois, ce risque est désormais évité par l’utilisation d’aiguilles stériles à usage unique ou
stérilisables. Même les thérapeutes d’« Acupuncture sans frontières » présents dans
plusieurs pays en voie de développement, à travers le monde, utilisent des aiguilles
stérilisables.
Il y aurait aussi, semble-t-il, des risques de tamponnade cardiaque, de pneumothorax, de
lésions neurologiques, de perturbation d’un stimulateur cardiaque par éléctroacupuncture,
de lésion de la peau…
Je ne peux imaginer un médecin chinois qui après 10 années d’études théoriques et
pratiques en Chine, provoque ce genre d’accidents. Ou alors, comme en médecine
occidentale, il peut y avoir de bons et de mauvais médecins.
Par contre, le Docteur AULAS nous fait toucher du doigt un autre problème très important,
celui de la formation en Occident. La formation s’organise petit à petit en France cependant
elle n’est ni encadrée, ni validée, ni reconnue par les autorités compétentes. Cette grave
lacune peut engendrer la présence, sur le marché, de thérapeutes qui se disent praticiens en
médecine chinoise mais qui n’en n’ont pas les compétences ; les fameux charlatans si
nombreux dans le milieu des médecines complémentaires et/ou alternatives que nous
redoutons tant et que nous nous efforçons de combattre aux « Entretiens Internationaux de
Monaco ». Dans ce cas précis les patients courent, effectivement, un risque qui peut s’avérer
grave. Il serait grand temps que les pouvoirs publics s’attaquent au problème ; leur tâche
pourrait être facilitée grâce à la mise en place récente, par la CFMTC, d’un examen national
validant une formation.
CONCLUSION
Après avoir critiqué l’acupuncture pendant environ quatorze pages, le Docteur Jean-Jacques
AULAS conclut, avec condescendance, en disant que l’homéopathie et la médecine chinoise
ont une place en thérapeutique pour des affections légères ou plus exactement « pour des
troubles peu sévères pour lesquels il n’existe aucun traitement classique à efficacité
démontrée… il est incontestable qu’homéopathie et acupuncture puissent satisfaire certains
patients ».
Pendant son plaidoyer le Docteur AULAS nous a dévoilé pourquoi, selon lui, l’acupuncture
n’était pas une méthode thérapeutique fiable ; jusqu’à ce jour, personne n’a trouvé
d’explications scientifiques de son mécanisme d’action et les résultats des études cliniques
réalisées montrent, dans la plupart des cas, un effet comparable à celui du placebo. Je
regrette que ses recherches en la matière n’aient pas été plus approfondies.
Effectivement la médecine chinoise ne rentre pas dans les dogmes de la médecine
occidentale. Mais ça nous le savions. J’aurais simplement une question à poser à M. AULAS :
le Médiator dont le mécanisme d’action a dû être explicité et les études cliniques validées, at-il une place en thérapeutique ?
Je pense, par avance, connaître sa réponse. Si cette affaire ne remet pas en question la
pertinence et la validité de toutes les études réalisées sur un médicament avant sa
commercialisation, elle montre que nous sommes loin d’avoir atteint un degré de sécurité et
connaissance maximal. C’est, d’ailleurs, pour palier à ce genre de lacune que la
pharmacovigilance a été mise en place. Encore faut-il qu’elle fonctionne convenablement et
qu’elle soit efficace.
Tout ceci pour faire comprendre à nos lecteurs que le domaine de la santé n’est pas fait de
constantes. Le sujet principal reste l’homme avec toutes ses variabilités. C’est donc avec
beaucoup d’humilité et de respect qu’il nous faut l’aborder.
La médecine chinoise est une médecine – séculaire - à part entière. Son efficacité vis-à-vis de
certains maux n’est plus à démontrer. Si elle n’était qu’illusion existerait-elle encore de nos
jours, aurait-elle traversé le temps, les époques et les continents ?
Toutefois je peux comprendre qu’elle dérange, perturbe. Mais doit-on la supprimer sous
prétexte qu’elle ne nous a pas encore dévoilé tous ses secrets ?
Dans une interview accordée aux « Carnets de Santé » datant de mai 2009, le Docteur Jean
Jacques AULAS déclarait : « L’effet placebo désigne des phénomènes d’ordre psychologique
ou psychophysiologique, consubstantiels à toute thérapeutique (médicamenteuse ou non),
phénomènes en fait mal connus, qui concourent à soulager un patient ».
Dans ce cas précis, il admet que les phénomènes de l’effet placebo qui sont encore mal
connus sont efficaces. Donc que quelque chose d’inexpliqué peut avoir aussi un effet
thérapeutique.
La position très tranchée du Docteur AULAS, vis-à-vis des médecines complémentaires, me
surprend donc beaucoup. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour l’acupuncture ou
l’homéopathie ? Pourquoi ces thérapies dont les effets sont patents, n’auraient-elles pas un
effet curatif et préventif même si pour le moment l’on en est qu’aux balbutiements quant à
leur mode d’action dans lequel l’effet placebo a, ni plus, ni moins, aussi sa place comme
dans toute approche thérapeutique, allopathique y compris ? …
La médecine chinoise est avant tout une médecine qui fait beaucoup de bien et pas de mal
contrairement à la médecine occidentale qui peut faire beaucoup de bien mais parfois, un
peu ou beaucoup de mal…
Dr Pascale IMBERT