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TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS – 3E CHAMBRE, 2E SECTION, JUGEMENT DU 09 AVRIL 2010,
RYANAIR / OPODO
Mots clefs : Responsabilité contractuelle – intermédiaire – marques – producteur de bases
de données – concurrence déloyale – contrefaçon
Faits : La compagnie aérienne irlandaise Ryanair Ltd, qui vend ses vols sans intermédiaire via son
propre site Internet, a poursuivi en justice l’agence de voyages en ligne, Opodo, étant donné que
cette dernière offre la possibilité d’acheter en ligne des vols Ryanair, malgré l’obligation
contractuelle établie sur le site de Ryanair qui prévoit que : « Ryanair n’autorise aucun autre site
internet a vendre ses vols ». D’autre part, Opodo a réclamé reconventionnellement des dommages
et intérêts pour préjudices moraux et commerciaux causés par une note publié par Ryanair le 24
janvier 2008, indiquant que « Ryanair bloque Opodo et conseille aux passagers d’éviter les agents
de voyage en ligne qui les arnaquent ; seul Ryanair garantit les tarifs les plus bas ».
Procédure : Ryanair, le 25 juin 2008, a assigné la société Opodo au titre de la violation des droits
du producteur de bases de données, en contrefaçon de marques ainsi qu’en concurrence déloyale
et parasitisme, á cause de la possibilité de réserver et acheter les vols de Ryanair sur les sites
opodo.fr, opodo.be et vivacances.fr. Le 8 décembre 2009, Opodo a contesté la totalité des
demandes de Ryanair et a sollicité sa condamnation, notamment sur la base des actes de
concurrence déloyale et de parasitisme. Le Tribunal a rejeté l’intégralité des demandes de Ryanair
et l’a condamné à payer à la société Opodo la somme de 30 000 € en réparation du préjudice, plus
7500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Problème de droit : En l’espèce, le tribunal a dû traiter différents problèmes. Tout d’abord, celui
de l’acceptation d’Opodo aux conditions générales du site de Ryanair, et par conséquent la
possible violation des obligations contractuelles qu’a fait Opodo en offrant des vols au public, sans
l’autorisation de Ryanair. Ensuite, celui de la distinction entre « faire un extrait d’une partie
substantielle du contenu d’une base de données» et « faire une simple consultation des données
accessibles au public », par rapport au caractère de producteur de base de données. Puis, celui
de l’utilisation de la marque « Ryanair » à des fins commerciales violant les dispositions de l’article
R.322-4 du Code de l’aviation civile qui impose aux agences de voyage de communiquer l’identité
du transporteur aérien. Enfin, le Tribunal a étudié l’existence des préjudices moraux et
commerciaux subis par Opodo suite à la diffusion de la note publiée par Ryanair le 24 janvier
2008.
Considérant de principe : « […] il apparaît que les vols qui sont réservés à partir du site d’Opodo
sont finalement concrétisés sur le site de la société Ryanair, ce qui a pour conséquence que, de
surcroît, les dispositions contractuelles dont il s’agit ne sont nullement violées. […] Ryanair a
exposé des frais pour développer son site et en assurer la maintenance, […], la société
demanderesse a consenti des investissements substantiels pour la constitution de la base de
données en cause […]. En application des dispositions du code de l’aviation civile , la société
Opodo avait donc l’obligation de communiquer au consommateur l’identité de la compagnie
aérienne Ryanair, les deux signes étant reproduits à titre d’information sur le nom de la compagnie
et non à titre de marques […]. Le fait que la société Ryanair vende ses propres billets n’interdit pas
à une agence de voyage de les vendre également.»
Cette création par UPCAM-IREDIC est mise à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation
Commerciale - Pas de Modification 2.0 France.
Note :
Les relations commerciales sur Internet
sont soumises á l’article 1369-1 du code
civil.
En l’espèce, Ryanair a prévu pour tous les
utilisateurs de son site Internet, une
obligation composée de la restriction à des
tierces personnes de vendre ses vols.
Opodo ayant accédé régulièrement au site
Internet de Ryanair a tacitement exprimé
sa volonté d’adhérer aux conditions
d’utilisation, demandées par Ryanair.
Malheureusement, le tribunal dans sa
décision, n’a pas retenu le principe de
vente parfaite signalé par l’article 1583 du
code civil. Et par conséquent, il n’a pas
retenu
l’existence
d’une
relation
contractuelle entre Ryanair et Opodo.
Le tribunal a rejeté la demande de
Ryanair, argumentant que les conditions
générales du site Internet sont applicables
uniquement à celui qui achète pour son
propre compte les billets d’avion, et que
lesdites conditions ne s’appliquent pas aux
intermédiaires. Aussi, le tribunal a
constaté que, comme les vols sont
réservés à partir du site d’Opodo, mais
qu’ils sont concrétisés sur le site de la
société Ryanair, il n’y a pas d’obligations
contractuelles violées.
De plus, le tribunal n’a pas qualifié la
relation juridique de fait existante entre la
société Ryanair et Opodo, car cette
dernière est un utilisateur fréquent du site
Internet de Ryanair.
Concernant l’atteinte aux droits du
producteur de bases de données, en
l’espèce Ryanair a donné au tribunal les
factures correspondantes aux services
pour le développement de la base de
données du site Internet.
Le tribunal a rejeté la demande, car il
considère que malgré le fait que Ryanair
avait engagé des frais pour développer
son site, il ne s’agissait
que d’une
compagnie
aérienne
fonctionnant
seulement en ligne. Donc, il ne pouvait
pas
vérifier
les
investissements
substantiels pour la constitution de la base
de données en cause, ni pour la
vérification ou la présentation de cette
base, éléments rendus nécessaires par
l’article L341-1 du code de la propriété
intellectuelle.
Ensuite, à propos de la contrefaçon des
marques communautaires de Ryanair, le
tribunal n’a pas retenu la responsabilité
d’Opodo. Ce dernier a constaté que
l’article R 322-4 du code de l’aviation civile
oblige les commerçants des titres de
transport
aérien
à
informer
le
consommateur, notamment de l’identité du
transporteur, parmi d’autres données. Le
tribunal a expliqué que les deux signes ont
été reproduits à titre d’information sur le
nom de la compagnie et non à titre de
marques, raison pour laquelle, la demande
a été rejetée.
En l’espèce, le tribunal a donnée une large
interprétation à la disposition du code de
l’aviation civile, étant entendu qu’il a
permis l’utilisation d’images et de signes
normalement protégés par le droit de la
propriété intellectuelle pour l’information et
la protection du consommateur.
Enfin, le tribunal a estimé que la
publication effectuée par Ryanair le 24
janvier 2008, a entraîné pour l’agence de
voyages Opodo un préjudice constitué tant
par l’atteinte qui a été ainsi portée à sa
réputation, que par le détournement d’une
clientèle effrayée par les pratiques
éventuelles qui étaient prétendument
dénoncées.
Par conséquent, le tribunal a qualifié de
fautif le comportement de la société
Ryanair, au sens de l’article 1382 de code
civil, et donc il a fait droit à la demande
reconventionnelle de la société Opodo.
Susana Flores
Master 2 Droit des médias et des télécommunications
UPCAM-IREDIC 2010
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