Philippe L`HERITIER - Ville de Clermont
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Philippe L`HERITIER - Ville de Clermont
Dossier pédagogique réalisé par le service des publics Philippe L’HERITIER SOMMAIRE I- Sa vie, son œuvre, ses collaborations..........................................................................................2 II- La cage à population......................................................................................................................4 III - Théorie synthétique de l’Évolution.........................................................................................5 IV - Transgressions à la génétique mendélienne...........................................................................8 1) Sensibilité héréditaire au dioxyde de carbone. ................................................................10 2) Dysgénésie hybride...................................................................................................................11 Glossaire..................................................................................................................................................12 Références.............................................................................................................................................14 Liens Internet.......................................................................................................................................14 1 I- Sa vie, son œuvre, ses collaborations Né à Ambert dans le Puy de Dôme le 3 janvier 1906, il fait une première partie de ses études chez les Pères, en Auvergne. D’abord à Ambert, puis à l’école des maristes à Riom, il rejoint finalement les jésuites de Sainte-Geneviève (Versailles) où il prépare son entrée aux grandes écoles. Il rejoint l'École Normale Supérieure où il prépare sa thèse de génétique sous la direction de Robert Lévy, directeur du département de zoologie. En 1930, il obtient son agrégation et devient « naturaliste et biologiste ». Avec l’appui d’André Mayer, professeur de physiologie au Collège de France, il est l'un de premiers à obtenir une bourse Rockefeller. Il part alors, après son service militaire, s’initier à la génétique mendélienne aux États-Unis. Il étudie à l’Université d’Iowa, dans le Middlewest, auprès du Professeur Ernest W. Lindström spécialiste de la génétique et de l’hybridation du maïs. Il y reste huit mois et est le témoin des recherches sur la génétique végétale. Puis, il entreprend de faire le tour des laboratoires de génétique du pays. Il rencontre ainsi l’équipe de T. H. Morgan au « Caltech » (Berkeley), notamment T. Dobzhanski et H. Müller. Philippe L’Héritier réalise alors le retard de la pensée scientifique de la France en la matière, notamment en y découvrant la génétique des populations. De retour en octobre 1932 avec un projet de travail et un objet d’étude : la drosophile (la mouche du vinaigre), il obtient un poste d’agrégé préparateur à l’Ecole Normale Supérieure. Il y retrouve George Teissier, lui aussi normalien, mais plutôt orienté vers les mathématiques appliquées à la biologie. Une longue collaboration naît de cette rencontre. Ils décident donc de s’attaquer à la génétique des populations. En 1938, avec l’aide d'Émile Terroine (professeur de physiologie), L’Héritier est nommé Maître de conférences en zoologie à la faculté de Strasbourg. Ce fut non sans mal, car la chaire de biologie générale était occupée par Louis Bounoure, un naturaliste distingué mais un fixiste convaincu. Cette pensée s’oppose donc au courant évolutionniste auquel adhère L’Héritier. Sur le point d’être mobilisé en 1939, L’Héritier part en Ecosse en emportant ses souches de drosophiles pour les confier à H.Müller. Finalement démobilisé et la faculté de Strasbourg étant repliée sur Clermont-Ferrand, il décide de reprendre ses recherches en Auvergne. Müller lui renvoya alors les drosophiles. L'Héritier enseigne également l’évolutionnisme aux étudiants clermontois à la demande de Bounoure. Par conséquent, les étudiants recevaient les enseignements fixistes de Bounoure et évolutionnistes de L’Héritier. Les mots en rouge renvoient au glossaire. 2 En 1947, l’enseignement de la génétique est officiellement créé en France, à la Sorbonne. En compagnie de George Teissier, fondateur du CNRS, et de Boris Ephrussi, Philippe L’Héritier y tient le poste de Maître de conférences dès 1950. Jusqu’en 1967, il travaille en parallèle pour la Sorbonne et le CNRS, à Gif-sur-Yvette. Il y dirige un des trois laboratoires spécialisés en génétique. D’abord appelé laboratoire de génétique formelle, il devient laboratoire de génétique des virus. À la faculté d’Orsay Sud, il enseigne d’abord la biogenèse puis la biologie générale. Il y prend notamment la chaire de biologie générale de 1959 à 1967 et en profite pour recruter des chercheurs pour le CNRS. En 1967, la réforme Aigrain transfère l’enseignement de la biologie générale dans le premier cycle, ce qui supprime son poste à Orsay. Pierre Aigrain, alors directeur des enseignements supérieurs, accepte la demande de L’Héritier de revenir sur Clermont-Ferrand. En 1967, il lui fallut le soutien de ses collègues physiciens, mathématiciens, chimistes et surtout médecins pour que lui soit créée tout spécialement une chaire de génétique à la faculté des sciences de Clermont-Ferrand. Par la même occasion, il y monte un laboratoire avec l’aide du CNRS. Sur le campus d’Aubière, son bureau était au premier étage du bâtiment de Biologie C, où les recherches sur les drosophiles sont toujours d’actualité. En 1973, il prend sa retraite et se replie sur ses terres à Champétières près d'Ambert avec son épouse. Mais, pendant plusieurs années, il a continué à venir chaque semaine au laboratoire pour participer au travail scientifique. Il décède le 24 janvier 1994. Philippe L’Héritier est l’auteur de nombreuses publications et ouvrages, dont : Traité de génétique, tome 3, génétique des populations, Paris, P.U.F 1954 Génétique, Collection « Maîtrises de Biologie », Masson, 1975. La grande aventure de la génétique (Paris, Flammarion, 1984) Souvenirs d'un généticien, Colloque R.A. Fisher et l'histoire de la génétique des populations, in Revue de synthèse, 1981, 103-104, CII, 331-343. Biologie générale avec Maxime Lamotte :, 3 volumes, Paris, Doin, 1965, 1966, 1969. Dictionnaire de génétique, Paris, Masson, 1979. 3 II- La cage à population Dès son retour des États-Unis en octobre 1932, Philippe L’Héritier décide de se consacrer à l’étude de la génétique des populations sur la drosophile. Aussi, il réalise un isolat artificiel appelé cage à population ou démomètre, avec le Professeur Teissier. C’est dans sa première publication relative à l’étude démographique des drosophiles, en 1933, que L’Héritier décrit le démomètre ou cage à population. Son objectif premier est de quantifier la dynamique des populations. D’ailleurs démomètre signifie « mesure du peuple ». Description Le premier démomètre est une caisse vitrée de 50 cm de longueur sur 25 cm de largeur et 15 cm de profondeur. A l’époque, son fond est percé de 20 orifices disposés sur deux rangées, pouvant chacun être obturé par un gros bouchon de liège. Il est alors possible d’y souder à la cire à cacheter un godet de cristal de 40 cm. Un trou latéral, généralement obturé par un coton, permet d'évacuer les cadavres de mouches ou les détritus. Deux autres ouvertures plus grandes, placées en vis à vis et fermées par une grille métallique fine, servent à l'aération. Jusqu’en 1948, ce principe est conservé. Puis, le dispositif évolue. En effet, la cage possède désormais 21 trous sur 3 rangées. Elle est entièrement en plastique afin d'être nettoyée facilement. Néanmoins, la structure de base reste la même que celle construite par L’Héritier. Cage à population coll. Ville de Clermont-Ferrand / Muséum Henri-Lecoq – Fonds L'Héritier Godet avec milieu nutritif 4 Principe général Quelques mouches des deux sexes sont placées dans la cage, maintenue à température constante. Chaque godet contient de la nourriture en quantité fixée. La population s'accroît jusqu'à atteindre un équilibre (après trente ou quarante jours). Le nombre d'individus est alors variable selon les souches et peut s'élever jusqu'à 3 à 4 000 individus. L'équilibre est régulé et maintenu par la quantité constante d'aliments. À ses débuts, pour suivre l'évolution démographique des populations de drosophiles, L’Héritier compte le nombre total d’individus directement ou après les avoir dispersées sur un papier photographique exposé en lumière rouge, une fois les drosophiles anesthésiées avec du dioxyde de carbone (CO2). Cette méthode est par la suite abandonnée. En effet, il se met à analyser la population d’œufs. Un godet de nourriture supplémentaire, destiné à la collecte de ces derniers, est alors placé dans les cages à population. Après quelques heures, le godet est retiré de la cage. Les œufs recueillis sont placés sur un milieu permettant à toutes les larves de se développer. On obtient ainsi une estimation de la concurrence larvaire dans la cage. Remarque : cette invention est une innovation technique primordiale pour le développement de la recherche. III - Théorie synthétique de l’Évolution En 1932, L’Héritier rencontre Teissier, mathématicien de formation mais surtout biométricien. Ce dernier mesurait à l’époque la taille des individus et tentait de trouver des lois mathématiques pour expliquer leur croissance (théorie de la croissance allométrique). Tous deux décident alors de faire de la génétique des populations en travaillant sur la drosophile. Teissier étudie essentiellement les lois de la sélection naturelle grâce aux cages à population. Il se pencha sur deux souches de drosophiles mutées : 1- souche 'Bar' à œil réduit 2 – souche 'ebony' à corps noir. Il s'agit de confronter, dans chaque cas, deux allèles : 1- œil réduit versus œil rouge normal 2- corps noir versus corps clair normal La possibilité d'étudier au laboratoire la sélection naturelle au niveau génétique est alors démontrée. L’Héritier lui se penche en particulier sur les capacités des différentes souches de mouche à peupler un milieu. Toujours en collaboration avec Teissier mais aussi avec 5 Yvette Neefs, il publie une expérience en 1937 très originale sur l'absence d'ailes chez les drosophiles. Elle consiste à confronter une hypothèse émise par Darwin, dans L’Origine des espèces, à la réalité de l’expérience. Darwin y explique la présence de certains aptères sur différentes îles. Selon lui, leur incapacité à voler les empêche d’être emportés par le vent contrairement aux insectes doués de vol. Une partie de ces expériences a été réalisée sur les toits du laboratoire de biologie marine de Roscoff. Expérience 1 Expérience 2 Elle est réalisée à l'abri du vent. On place On réalise la même expérience, en enlevant dans une cage, en proportions égales des le couvercle de la cage dans la journée, mouches mutées pour le gène vestigial pendant trois générations. En présence de (ailes très réduites) et des mouches non- vent, la proportion de mouches aptères mutées pour ce gène (à ailes normales). La diminue très peu. proportion des mouches aptères diminue Ce sont les mouches ailées normales qui très vite au cours des générations ; elles sont préférentiellement emportées par le sont défavorisées par rapport aux mouches vent. normales dans la concurrence larvaire. Le caractère mutant, dans ces conditions, Le caractère mutant est défavorable dans est devenu avantageux. les conditions normales. Conclusions L’Héritier et Teissier ont donc démontré que l'hypothèse de Darwin est vérifiée par l'expérience. Cette expérience montre d'autre part que la sélection naturelle n'a pas nécessairement un rôle éliminateur. Elle peut également favoriser certaines anomalies que des circonstances particulières rendent avantageuses ; ainsi l'aptérisme des insectes que leur habitat expose au vent marin est une « infirmité » utile. Le hasard des mutations l'a fait apparaître dans certaines espèces mais le jeu de la sélection l'y a maintenu, sur les îles. En 1930, le darwinisme, bien qu’il ait ses limites, était le fondement des travaux des Anglo-Saxons. La pensée française avait du retard : fixistes, lamarckistes, darwinistes s’opposaient encore. La longue collaboration entre L’Héritier et Teissier les mena à vérifier expérimentalement la pensée de Darwin sur l’évolution et le principe de sélection naturelle en lui faisant bénéficier des acquis de la génétique des populations. La théorie synthétique de l’Évolution est la réunion de la théorie de Darwin et des données de la génétique. Dans cette théorie, la sélection naturelle permet au plus 6 apte dans des conditions définies de disposer d’une plus grande probabilité à transmettre ses caractères. La sélection naturelle de Darwin repose sur le succès reproductif différentiel, favorisant les allèles permettant une meilleure adaptation au milieu. La variabilité génétique des populations contribue donc à leur évolution. Lamarck (1744-1829) face à Darwin (1809-1882) Ils sont tous deux des précurseurs de théories sur l’Évolution, mais elles s’opposent… Lamarck propose le premier une théorie de l’Évolution des espèces. Il énonce que les caractères acquis au cours de l’existence d’un individu se transmettent à la descendance en fonction de l’usage des (de l')organe(s). Il pense également que les espèces évoluent de manière linéaire vers des formes de vie plus perfectionnées (ne donnant pas naissance à de multiples espèces). Darwin, lui, postule que de nouvelles espèces apparaissent à partir d'une forme ancestrale, suite à l'accumulation graduelle d'adaptations à l'environnement, selon un mécanisme de sélection naturelle. D’après lui, une espèce peut donner naissance à plusieurs espèces si plusieurs groupes, isolés géographiquement, évoluent dans des conditions différentes. Exemple de l'allongement du cou des girafes. Théorie de Lamarck Théorie de Darwin Le besoin crée l’organe. Le cou des girafes Dans une population de girafes, les s’est allongé afin d’atteindre les feuilles individus ont des cous de différentes les plus hautes. Cette adaptation au milieu, longueurs. Les girafes au cou plus long ont ce caractère acquis est alors transmis à la un meilleur accès à la nourriture. Par génération suivante. conséquent, leur survie est favorisée. Elles laissent un plus grand nombre de descendants à qui elles transmettent cette caractéristique. La fréquence de celle-ci va donc augmenter dans la population. 7 IV - Transgressions à la génétique mendélienne D’après Mendel (1822-1884), père fondateur de la génétique suite à ses expériences sur les pois en 1860, « les parents transmettent des unités héréditaires distinctes , qui restent distinctes chez les descendants ». En fait, ces unités héréditaires sont les gènes. Un gène est un élément correspondant à un segment d’ADN contrôlant un caractère particulier, situé à un endroit précis (appelé locus) sur un chromosome. Dans une cellule, chaque chromosome se présente par paire, ce sont des chromosomes homologues. Ils possèdent les mêmes gènes mais pas forcément les mêmes allèles. Par exemple : Il existe un gène « couleur des yeux » qui possède plusieurs allèles (bleu, marron, vert …). Explication de la transmission des gènes Les gamètes (ovule et spermatozoïde) sont dits haploïdes car ils ne possèdent qu’un seul exemplaire de chaque chromosome. En effet, ils sont issus d’une cellule qui a divisé son stock de chromosomes homologues par deux. La fusion des deux gamètes (fécondation) forme un zygote (œuf) qui possède le double de chromosomes. Il est dit diploïde. Les chromosomes homologues sont à nouveau présents sous d'une forme paire. Le zygote peut recevoir pour un même gène soit deux allèles identiques (c’est l’homozygotie, exemple A) soit deux allèles différents (c’est l’hétérozygotie, exemple B). 8 Hérédité d'un caractère dû à la mutation d'un seul gène C’est le croisement entre deux parents qui ne diffèrent que par un seul caractère et qui portent respectivement les mêmes allèles sur chacun de leurs chromosomes homologues. Ils ne peuvent donc donner qu’un seul type de gamètes. Prenons l’exemple d’un croisement entre deux pois. Le caractère observable (ou le phénotype) de l’un est jaune, l’autre vert. Leur composition allélique (ou leur génotype) est respectivement AA et aa. Le pois jaune ne peut donner que des gamètes de génotype A. Le pois vert ne peut donner que des gamètes de génotype a. On croise un gamète d'un pois jaune (A) avec celui d'un pois vert (a). On observe que : * La première génération F1 de descendants est caractérisée par : - Phénotype : 100% [jaunes] - Génotype : 100% Aa, hétérozygotes * La deuxième génération F2 de descendants est caractérisée par : - Phénotype : 75% [jaunes] et 25% [verts] - Génotype : 25% AA, 25%aa, 50%Aa On observe que les proportions entre génotype et phénotype sont différentes dans la F2. Il y a 3 génotypes pour deux phénotypes. Il existe donc des allèles dominants sur d’autres qui sont alors appelés récessifs. Dans cet exemple, l’allèle A domine l’allèle a. Aussi quand le génotype est Aa ou AA, le phénotype est [jaune]. Cet exemple de croisement est un exemple parmi bien d’autres (2 gènes différents, allèles codominants…). Pour chaque type de croisement, des proportions bien particulières sont attendues en génération F1 comme en génération F2. Toute transgression à ces règles mendéliennes traduit des modifications génétiques ou d’autres processus particuliers. Philippe l’Héritier a participé à la découverte de deux transgressions à ces règles. Il met en évidence, en 1937, la transmission d’un caractère de sensibilité des drosophiles au dioxyde de carbone, qui ne répond pas aux lois de Mendel. Puis en 1970, son équipe découvre à nouveau des mécanismes génétiques qui semblent les transgresser (dysgénésie hybride). 9 1) Sensibilité héréditaire au dioxyde de carbone. Un jour de 1937, L’Héritier endort une population de drosophiles avec du dioxyde de carbone pour les compter. Or, le lendemain et à sa grande surprise, un grand nombre de mouches sont mortes. Il découvre ainsi qu'une souche particulière 'ebony' a une sensibilité létale au dioxyde de carbone. L’étude de ce caractère montre qu’il se transmet héréditairement mais en suivant des règles non-mendéliennes et indépendantes des chromosomes. Ce n’est que dans les années 1950, grâce aux développements d’outils comme les centrifugeuses et aux travaux d’André Berkaloff en microscopie électronique, que Philippe L’Héritier et son équipe, installés au CNRS à Gif-sur-Yvette, mettent en évidence le rôle d’un virus dans la sensibilité héréditaire de la drosophile : le Rhabdovirus Sigma. Dès lors, ils se penchent sur ce virus, pour comprendre ses mécanismes de développement et de sa transmission génétique. Le Rhabdovirus sigma Il appartient à la famille des virus enveloppés. Ce virus à enveloppe possède comme unique matériel génétique un ARN. Son génome code pour cinq ou six protéines virales. Il entre dans la cellule hôte par endocytose, facilité par sa protéine G. Il pénètre par endocytose dans le cytoplasme de la cellule infectée, en attachant sa membrane virale à celle de la cellule grâce aux récepteurs cellulaires. Il effectue un cycle viral dans le cytoplasme en prenant le contrôle du métabolisme cellulaire pour lui faire fabriquer de nouveaux virions. Ces derniers sortent de la cellule infectée par exocytose. Ils vont ensuite infecter d'autres cellules. Schéma d'un Rhabdovirus source : http://www.perrin33.com/virologie/cycles/rhabdovirus_0.html 10 2) Dysgénésie hybride Au début des années 1970, la fille du professeur L’Héritier, enseignante en sciences naturelles dans le secondaire, demande à son père de lui donner des mouches pour démontrer les lois de Mendel à ses élèves. L’Héritier lui donne deux souches homozygotes : l'une à œil normal (rouge) et l'autre à œil sépia (marron). Mais après deux croisements successifs, les œufs obtenus n'éclosent pas. Les femelles issues du premier croisement étaient toutes stériles. C'est le point de départ d’une nouvelle recherche pour Philippe L’Héritier et son équipe à Clermont-Ferrand. Ils découvrent que, lorsque l’on croise une souche qui porte le segment d'ADN responsable de cette stérilité avec une souche qui ne le porte pas, on obtient une stérilité (la dysgénésie hybride) aux règles de transmission aberrantes pour l'époque. D'autres équipes, en France et aux USA, travaillaient aussi à cette époque sur des phénomènes analogues. Ceux-ci ont pu être expliqués par la présence sur des chromosomes d'éléments mobiles capables de se déplacer, à la différence des gènes dont l'emplacement sur les chromosomes est fixe. Il s'agissait de mécanismes complètement nouveaux, inconnus jusqu'alors. Jetons un bref coup d’œil sur la dysgénésie hybride actuelle… L’ADN baladeur est nommé désormais transposon. C’est un élément d’ADN capable de se déplacer d’un endroit à un autre sur un même chromosome ou sur un autre chromosome. Il existe deux types de transposition. Quand le transposon est transféré d’un site à un autre, entre un site donneur et un site receveur, c’est de la transposition conservatrice (même nombre de copies). Si l’élément transposable est transféré d’un site à un autre, tout en restant au site original, il y a augmentation du nombre de copies de l’élément transposable. C’est de la transposition réplicative. Les transposons sont responsables, au moins en partie, de l’augmentation de la taille des génomes. L’expression de certains gènes peut être altérée suite à l’intégration d’un transposon dans un gène ou à proximité : effet délétère de la transposition. 11 Glossaire Allèles : différentes versions d’un même gène. Aptère : dépourvu d'aile ADN : acide désoxyribonucléique. Cette molécule est composée de 4 nucléotides : adénine (A), guanine (G), cytosine (C) et thymine (T). Elle est structurée en forme de double hélice droite, composée de deux brins complémentaires. Il porte donc l'information génétique et constitue le génome des êtres vivants. ARN : acide ribonucléique. Cette molécule est en général synthétisée dans les cellules à partir d'une matrice d'ADN dont il est une copie. Les cellules vivantes utilisent en particulier l'ARN comme un support intermédiaire des gènes pour fabriquer les protéines dont elles ont besoin. L'ARN peut remplir de nombreuses autres fonctions. Chimiquement, l'ARN est un polymère linéaire constitué d'un enchaînement de nucléotides. Il possède quatre nucléotides : adénine (A), guanine (G), cytosine (C) et uracile (U). Biogénèse : théorie selon laquelle une cellule vivante ne peut provenir que d'une autre cellule vivante. Elle qualifie également l'apparition de la vie sur Terre, ou encore les premières étapes de l'évolution de la vie, jusqu'à l'apparition de la cellule eucaryote. Caractère vestigial : c'est un caractère anatomique de l'organisme d'une espèce dont la fonction initiale a été perdue tout ou en partie au cours de l'évolution. Croissance allométrique : qui désigne un mode de croissance selon lequel certains organes grandissent plus vite ou moins vite que d'autres organes. Cytoplasme : totalité du matériel, à l'exclusion du noyau, contenu dans une cellule vivante et délimitée par l'enveloppe cellulaire. Darwinisme : Au sens strict, la théorie explicative de l'évolution des espèces formulée en 1859 par Charles Darwin dans son ouvrage : De l'origine des espèces , mettant notamment en avant le mécanisme de la sélection naturelle. En un sens plus large, la théorie synthétique de l'évolution, intégrant les acquis de la génétique. Le darwinisme étendu est l'application de la théorie darwinienne à d'autres entités que des organismes biologiques (par exemple : l'économie). Darwiniste : partisan du darwinisme. 12 Drosophile : appelée aussi mouche du vinaigre, cet insecte est très utilisé en laboratoire et plus spécialement en génétique. Petit insecte diptère, il s'agit des petites mouches marron présentes sur les fruits en été. Évolutionnisme : théorie selon laquelle tous les êtres vivants ont évolué à partir d'un ancêtre commun. S'oppose au fixisme. Endocytose : mécanisme de transport de molécules, de virus ou de bactéries vers l'intérieur de la cellule. Exocytose : mécanisme de transport de molécules, de virus ou de bactéries vers l'extérieur de la cellule. Fixisme : théorie selon laquelle il n'y a ni transformation ni évolution des espèces végétales ou animales. Chaque espèce serait apparue telle quelle au cours des temps géologiques. Fixiste : partisan du fixisme. Génétique des populations : branche de la génétique qui étudie les populations. Il s'agit d'étudier la fréquence et la distribution des allèles dans les populations, sous l'influence de différents facteurs (comme par exemple, les mutations ...) Lamarckisme : théorie de Jean-Baptiste Lamarck, établissant la transformation des espèces végétales ou animales au cours du temps, par la transmission des caractères acquis et sous l'effet des habitudes. Cette théorie repose sur plusieurs lois complémentaires établies par Lamarck. Lamarckiste : partisan du lamarckisme. Mutation : modification de l'information génétique (ADN ou ARN) d'une cellule ou d'un virus. C'est la source de l'évolution des espèces. Virion : particule virale avec sa molécule d'acide nucléique (de type ADN ou ARN) à l'intérieur et une capside de protéines. Virus enveloppés : virus entourés d'une enveloppe qui prend naissance au cours de la traversée des membranes cellulaires. Sa constitution est complexe et présente un mélange d'éléments cellulaires et d'éléments d'origine virale. On y trouve des protéines, des glucides et des lipides. Les virus ne possédant pas d'enveloppe sont les virus nus (ils possèdent une capside uniquement). 13 Références Fonds L'Héritier – Bibliothèque du Muséum Henri-Lecoq – Ville de ClermontFerrand. Les artisans de l’hérédité, Philippe Kourilsky, Edition Odile Jacob Dossier : les mouches, superstars de la science, Wapiti (ed. Milan), n°307, octobre 2012. Liens Internet http://www.chups.jussieu.fr/polys/viro/poly/POLY.Chp.1.2.html http://www.histcnrs.fr/histoire-genetique/teissier.html http://www.fao.org/docrep/004/y2775f/y2775f0a.htm http://www.edu.upmc.fr/sdv/masselot_05001/biodiversite/transposons.html http://www.universalis.fr/encyclopedie/philippe-l-heritier/ 14