Daiichi Sankyo France€: Une jeune PME aux

Transcription

Daiichi Sankyo France€: Une jeune PME aux
Un labo au crible Daiichi Sankyo
Daiichi Sankyo France
Une jeune PME aux
fortes ambitions
Christian Deleuze préside aux destinées de la filiale française
du laboratoire japonais Daiichi Sankyo ainsi qu’à celles de
l’association des Laboratoires Japonais Présents en France1.
Il s’explique sur le développement de sa société en France.
A quelle époque votre laboratoire
a-t-il planté son drapeau dans l’Hexagone ? Où en êtes-vous aujourd’hui ?
● Sankyo Pharma France a racheté
en 2002 la société Fornet, avec ses 90
salariés et son portefeuille de produits
en rhumatologie. Nous avons ainsi
acheté une raison sociale ayant statut
de laboratoire pharmaceutique et une
équipe de délégués médicaux bien
implantés, de manière à pouvoir assez
rapidement commercialiser Olmetec® (olmésartan) en septembre 2004,
en co-promotion avec Merck Lipha
Santé, quelques mois seulement après
avoir officiellement lancé Sankyo.
Nous avons ainsi démarré avec une
petite unité en rhumatologie, bien que
notre objectif soit de devenir rapidement un laboratoire incontournable
en cardiologie ; pour ce faire, nous
avons racheté en 2004 des produits à
Novartis (Lopressor®, un bêtabloquant,
Icaz®, un inhibiteur calcique).
Avec le lancement en 2006 de
CoOlmetec® (olmésartan/hydrochlorothiazide), nous réalisons aujourd’hui
environ 36 millions d’euros de chiffre
d’affaires avec la gamme olmésartan,
en croissance de 50 %, et au total près
de 50 millions d’euros en cardiologie.
Enfin, nous avons racheté Evista® en
février dernier à Lilly, un produit ori-
78
PHARMACEUTIQUES - SEPTEMBRE 2008
ginal indiqué dans la prévention et le
traitement de l’ostéoporose, et qui présente également une action très intéressante dans la prévention du cancer
du sein. Un antiagrégant plaquettaire,
le prasugrel, ainsi que de nouvelles
associations avec l’olmésartan, vont
venir prochainement compléter notre
gamme dans le cardio-métabolisme,
qui représente clairement la voie tracée pour l’avenir, avec l’oncologie,
qui, depuis le rachat de Daiichi est un
autre pôle de compétence et de développement du groupe.
Avez-vous intégré ce dernier axe dans
votre propre développement ?
● Pas à ce jour. Notre maison mère japonaise ne met pas tous ses œufs dans
le même panier. Elle sait que nous sommes une « jeune » filiale et que nous
ne pourrons pas nous implanter dans
toutes les spécialités en même temps.
Si le cardio-métabolisme est bien inscrit dans notre démarche et constitue notre priorité, les autres produits
innovants s’inscrivent encore le plus
souvent dans des partenariats et des
licences données à d’autres groupes.
Cette situation sera amenée à changer
dans les années à venir, quand nous
serons ce que notre Président appelle
un « Global Pharma Innovator » ! Un
CHRISTIAN DELEUZE,
PRÉSIDENT DE LA
FILIALE FRANÇAISE DU
LABORATOIRE JAPONAIS
DAIICHI SANKYO.
objectif que notre groupe poursuit à
l’échéance de 2015, et qui explique notre politique de croissance externe dynamique.
Le fait que la France développe des
pôles de cancérologie et des expertises dans ce domaine intéresse-t-il
votre groupe ?
● Je pense qu’il sera intéressé dans
le futur. Mais cela reste un domaine à développer et non pas
un domaine qui se situe au centre de notre axe stratégique actuel.
Nous avons de nombreuses molécules
en développement, mais très peu qui
sont commercialisées dans le monde
entier. La situation est différente au
Japon où notre groupe commercialise
180 molécules, est le 2ème laboratoire
pharmaceutique sur son marché, et
doit avoir une stratégie de leader.
Vous définissez-vous en France
comme une PME de la pharma ?
● Oui ! Nous allons réaliser en France
100 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2008, ce qui va nous placer au
50ème rang du classement hexagonal
environ. Nous employons 250 salariés,
dont 200 en visite médicale. Parmi les
filiales européennes du groupe nous
serons certes n°1 cette année, devant
DR
l’Allemagne. Mais ces chiffres restent ceux d’une PME dynamique…
Allez-vous étoffer votre force de vente
quand d’autres réduisent la voilure ?
● Nous avons encore des besoins.
Nous appartenons à cette catégorie
« sous-dimensionnée » en la matière.
Nous sommes, et pour quelques années encore, présents sur le marché de
ville. On ne peut pas visiter et informer de manière satisfaisante 60 000
médecins de ville avec 200 visiteurs
médicaux ! Nous visitons en effet les
médecins généralistes qui sont amenés à prendre en charge l’hypertension artérielle, et dans les dix prochaines années, nous aurons de nouveaux
produits à promouvoir en ville.
Vous considérez-vous comme un
laboratoire de « soins primaires » ?
● Aujourd’hui, c’est clairement le
cas. J’espère que nous serons demain
« primaires » et « secondaires », puisque
l’oncologie devrait entrer, à partir de
2013, dans nos préoccupations directes. Sans compter nos autres produits
en développement dans les maladies
inflammatoires.
Daiichi Sankyo France est-il un acteur de la recherche fondamentale ou
clinique en France ? Investissez-vous
dans ces registres ?
● Je vous rappelle que nous n’avons
que cinq ans d’existence. Nous allons réaliser 100 millions d’euros de
chiffre d’affaires, mais nous avons démarré à 21 millions, avec des marges
basses sur des produits anciens, génériqués ou dont les prix ont été régulièrement réduits par les autorités.
Notre capacité d’investissement a donc
été compliquée à gérer. Nous sommes
aujourd’hui un acteur modeste qui
a, cependant, quelques produits en
phase III en développement clinique
en France.
Nous allons pouvoir commencer à nous
pencher sur d’autres dossiers comme
l’oncologie, ou le traitement des complications diabétiques, où nous serons
forcément dans une approche différente
et pour laquelle la recherche clinique est
plus encore incontournable si l’on veut
que le produit s’implante. Ce sera donc
un défi de nos cinq prochaines années.
En ce qui concerne la recherche fondamentale, pour l’heure, elle se fait aux
Etats-Unis et au Japon, et c’est l’un
de nos objectifs ambitieux, que d’être
aussi un acteur dans ce domaine dans
les années à venir.
Avez-vous par ailleurs une unité de production pharmaceutique en France ?
● Nous sommes présents en Alsace,
à Altkirch, avec une unité qui emploie 50 personnes et qui produit essentiellement des spécialités à base de
crème pour le marché allemand, héritage de la société Luitpold, rachetée
en Allemagne par Sankyo en 1990.
En ce qui concerne les produits issus
de la recherche du groupe, c’est une
unité de production basée en Allemagne, à côté de Munich, qui produit
pour la France et pour l’ensemble des
pays européens. Pour les produits plus
anciens issus de nos rachats successifs,
nous faisons appel à des façonniers
français. Enfin, dans le futur nous
aurons également des productions au
Maghreb pour les pays du Maghreb et
de l’Afrique francophone, marchés que
nous pilotons depuis la France.
Avez-vous transposé ou diffusé une
certaine culture japonaise dans votre
société ? Comment vos actionnaires
vous jugent-ils ?
● Nous partageons les valeurs du
groupe, dont la fierté du nom Daiichi
Sankyo et de son Histoire, ainsi que
l’exigence d’éthique vis-à-vis du comportement des collaborateurs qui représentent l’entreprise. Notre code
de valeurs est extrêmement clair. Par
contre, notre CEO se refuse à associer
notre marque aux valeurs traditionnelles du Japon et nous encourage plutôt
à nous associer aux nouvelles technologies et à l’image qu’elles véhiculent.
Quant à nos actionnaires japonais, ils
nous manifestent une grande confiance, puisqu’à ce jour ils ont décidé
d’investir en France sans réclamer de
profit à court terme, en acceptant que
nous réinvestissions dans le développement de Daiichi Sankyo France le
chiffre d’affaires généré en France, et
ce, bien que la lisibilité de la politique
du médicament ne soit pas toujours
très claire.
Justement, comment analysez-vous
les conditions faites au développement de la pharma en France par nos
autorités de santé ?
● Une des spécificités de la France
– qui réduit potentiellement son attractivité pour les investissements – est le
fait qu’il existe une douzaine de taxes
spécifiques à l’industrie pharmaceutique, ce qui rend difficile la compréhension pour des investisseurs étrangers de
ce que nous pouvons être amenés à verser ou reverser de notre chiffre d’affaires
au cours de notre développement.
J’ajoute que certaines taxes ne sont pas
du tout adaptées à des entreprises qui
s’implantent. Je pense en particulier à
la taxe sur la promotion qui les pénalise
puisqu’elles investissent en promotion
avant de générer du chiffre d’affaires !
Nous sommes par ailleurs probablement le seul secteur de pointe où il n’y a
pas d’aides structurées à l’implantation
et à la création d’emplois (hors la récente possibilité de défiscalisation pour
promouvoir les activités de recherche).
Enfin, les investisseurs étrangers ont
beaucoup de mal à comprendre et à
accepter les mesures fiscales imprévues
qui peuvent frapper nos sociétés, comme les variations de la taxe sur le chiffre
d’affaires d’un PLFSS à l’autre…. n
Propos recueillis par
Jean-Jacques Cristofari
(1) LAJAPF avec Astellas, Chugai, Daiichi
Sankyo, Eisai, Otsuka et Takeda
79
SEPTEMBRE 2008 - PHARMACEUTIQUES

Documents pareils