L`état actuel du droit commercial en Tunisie

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L`état actuel du droit commercial en Tunisie
Programme Euromed Justice
Justice et affaires commerciales
Conférence de Mme AYARI ESSIA
Vice Présidente au Tribunal de 1ère Instance de Tunis
« L’état actuel du droit commercial
en Tunisie »
(Athènes, 12 - 15 Novembre 2007)
L’état actuel du droit commercial en Tunisie
Pays membre de l’OMC, la Tunisie est le premier pays de la rive sud de la
Méditerranée à conclure un accord de partenariat et de coopération avec
l’Union Européenne dont la principale composante est l’instauration d’une zone
de libre échange devant entrer en vigueur à partir de 2008.
Dans cette perspective, la Tunisie a initié un important programme de
réformes qui a touché tous les secteurs d’activités et ce afin d’asseoir les bases
d’une économie solide, diversifiée, compétitive et capable de s’adapter au
nouvel environnement international.
Des réformes importantes dans l’infrastructure législative et réglementaire
économique, ont été mises en place, elles ont touché notamment la situation des
entreprises en difficulté, l’organisation du registre du commerce, les sociétés
commerciales,( dont je donnerais un bref aperçu) l’instauration de juridictions
spécialisées en matière commerciales( thème que J’ai choisi de développer au
cours de cette intervention).
- Concernant les entreprises en difficulté : la loi 95-34 du 17/4/1995 à
été promulguée en vue de créer un nouveau cadre juridique adéquat au
sauvetage des entreprises en difficulté économique, cette loi a été crée dans
le but d’assurer la continuité de l’activité de l’entreprise et de conserver les
emplois ainsi que dans le but du paiement des créanciers et ce par le biais du
règlement amiable et du règlement judiciaire.
* Peut bénéficier du règlement amiable l’entreprise qui n’est pas en
cessation de paiement. Ce type de règlement dépend de la volonté des
parties qui ne sont astreintes à aucune restriction dans la détermination des
clauses de l’accord qui peut porter sur, l’échelonnement des dettes, l’arrêt du
cours des intérêts, Etc… cet accord sera par la suite homologué par le
président du tribunal de 1ere instance.
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* le règlement judiciaire est une procédure qui concerne les entreprises
en état de cessation de paiement qui peut être engagée à la demande, du
dirigeant de l’entreprise, du président du tribunal, du créancier ou du
commissaire aux comptes.
L’ouverture de cette procédure peut selon l’état de l’entreprise en difficulté
aboutir à l’établissement d’un plan de redressement, à sa cession à autrui, à
sa location gérance ou à sa mise en faillite.
- Concernant le registre du commerce : le registre du commerce a été
réorganisé par la loi 95-44 du 2 Mai 1999. Il vise la centralisation des
informations concernant les commerçants, personnes physiques, ou morales
et la mise à la disposition du public de ces informations, qui concernent
généralement l’état financier des dits commerçants,
à savoir les
nantissements, les contrats de leasing, l’état de cessation de paiement
d’ouverture de règlement amiable ou judiciaire, augmentation du capital,
Etc…
Le registre du commerce est tenu dans tous les tribunaux de première
instance en Tunisie, il est géré à travers un réseau informatique national
permettant de délivrer à chaque commerçant un identifiant unique. Un juge
est chargé de veiller à son bon fonctionnement son rôle et prérogatives sont
déterminés par la loi.
- Le code des sociétés : La loi n°93 de l’an 2000 du 3/11/00 a réorganisé le
cadre juridique des sociétés en Tunisie et a introduit plusieurs nouveautés :
* Une nouvelle forme de société à savoir la société unipersonnelle à
responsabilité limitée SUARL ouvrant la voie à la consécration de la
notion d’entreprise par la reconnaissance de la théorie du patrimoine
d’affectation.
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* l’élargissement de l’objet de la société qui ne vise plus nécessairement
les bénéfices, mais également la réalisation d’économies propres aux
groupements d’intérêt économique.
*l’acquisition de la personnalité morale par l’immatriculation au registre
de commerce.
* Réglementation des procédures de transformation de la société par suite
des fusions, absorptions, cession d’actif
* le renforcement de la gouvernance des sociétés de capitaux notamment
par l’adoption de la société anonyme à conseil de surveillance et
directoire, une plus grande responsabilité des commissaires aux comptes.
L’organisation de la justice commerciale en Tunisie
L ‘article 40 du C.P.C.C tel que modifié par la loi n° 95-43 du 02/05/1995
a crée la chambre commerciale et par conséquent la justice commerciale. Il
prévoit dans son Alinéa 4 qu’il peut être crée par décret au tribunal de 1ere
instance des chambres commerciales compétentes pour statuer sur les affaires
commerciales.
Les chambres de 1ére instance précitées ne sont pas généralisées dans tous
les tribunaux du pays puisque la création de chambre commerciale reste
facultative et instituée par décret qui se fait généralement en fonction du
volume des affaires commerciales. Ainsi depuis la promulgation de la loi de
1995 deux décrets datant de 1996 et de 2001 sont venus créer respectivement
des chambres commerciales aux prés d’une dizaine de tribunaux de 1ere
instance.
I compétence et organisation de la justice commerciale
I – Définition de l’affaire commerciale :
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Elle a été définie par l’alinéa 4 de l’art 40 du C.P.C.C modifié par la loi n°
95-43 du 2 Mai 1995 comme étant « toute action relative à un litige entre
commerçants en ce qui concerne leur activité commerciale »
Partant de cette définition deux conditions cumulatives sont requises : à savoir
une condition subjective se rapportant
à la qualité des parties qui doivent
avoir la qualité de commerçant et une condition objective se rapportant à l’objet
de l’affaire qui doit concerner une activité commerciale.
- comment déterminer la qualité de commerçant ?
Le commerçant est celui qui exerce à titre de profession de façon permanente
et régulière l’une des activités énumérées par l’art 2 du code de commerce.
L’inscription au registre de commerce ne constitue qu’une présomption simple
quant à la qualité de commerçant.
- En ce qui concerne l’activité commerciale : le litige entre deux
commerçants dans une affaire commerciales doit se rapporter à leurs activités
sont exclues les affaires qui naissent à l’occasion de transactions civiles
(exemple : l’action en indemnisation suite à un accident de circulation)
Sont considérées aussi comme affaires commerciales selon l’alinéa 5 de
l’art 40 du C.P.C.C les litiges relatifs à la constitution des sociétés, à leur
gestion, dissolution, liquidation ou pour les litiges se rapportant au,
redressement des entreprises en difficultés économiques et à la procédure de
leur mise en faillite
1) composition de la chambre commerciale
L’article 40 du C.P.C.C dispose que dans la composition de la chambre
commerciale les deux assesseurs sont remplacés par deux commerçants ayant
avis consultatif et nommés pour une période de trois ans par arrêté du ministre
de la justice … (ils sont choisis parmi la liste des commerçants proposés par
l’organisme professionnel le plus représentatif).
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L’al.7 de l’art 40 du C.P.C.C prévoit l’adjonction de deux magistrats de carrière
dans les litiges se rapportant aux sociétés ou bien au redressement des
entreprises en difficulté ou encore lorsque la chambre commerciale statue
comme juridiction d’appel sur ce qui relève de sa compétence. Cette adjonction
est justifiée par la complexité des problèmes juridiques soulevés. L’absence de
l’un des commerçant ou même des deux en même temps n’empêche pas de
statuer selon l’alinéa 8 de l’art 40 du C.P.C.C
II Procédures
Les procédures devant les chambres commerciales, sont les mêmes que
celles applicables en matière civile sauf quelques particularités.
1) La conciliation :
L’article 40 Al 11 du C.P.C.C prévoit la procédure de la conciliation qui
suppose la transaction. C’est à dire l’entente entre les parties et l’abandon de
certaines prétentions au bénéfice du compromis qui évite le recours à la justice.
Elle concerne la chambre commerciale aussi bien dans sa composition restreinte
que dans sa composition élargie et elle présente un certain nombre d’avantages :
elle permet de
trancher le litige rapidement, et de maintenir les relations
d’affaires entre les parties, elle réduit les frais et garantit l’exécution volontaire
du jugement.
Il faut signaler que la procédure de conciliation est obligatoire dans les
procédures collectives la loi n°95-34 du 17 Avril 1995 modifiée par la loi du 29
décembre 2003 relative aux entreprises en difficulté économique.
2) le recours facultatif aux règles de l’équité
Le recours facultatif aux règles de l’équité a été prévu par l’alinéa 11 et
12 de l’art 40 du C.P.C.C.
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L ‘application des règles d’équité dans le procès se fait à la demande des
avocats des parties concernées.
Le recours aux règles de l’équité suppose l’exclusion des règles de droit de
fond et de procédure au profit d’une réalisation suprême de la justice en
appliquant les règles de l’équité tout en respectant les droits de la défense et le
principe contradictoire du procès.
3) voies de recours
Ont peut noter que l’appel et l’opposition qui constituent des voies de
recours ordinaire ne présentent aucune originalité en matière commerciales par
rapport au Droit civil sauf que pour le droit d’appel concernant les jugements
rendus en 1ere instance à base d’équité qui sont exclus, l’alinéa 11 de l’article
40 C.P.C.C prévoit que « le jugement sera dans ce cas non susceptible d’appel
mais peut faire l’objet d’un recours en cassation »
Les voies de recours extraordinaires à savoir le requeté civil et le pourvoi
en cassation s’appliquent aux affaires commerciales telles que prévues par les
art 156 et suivant du C.P.C.C et 175 et suivant du même code.
En conclusion vue la spécificité du litige commercial le législateur a crée
une juridiction spécialisée composée de magistrats expérimentés en la matière
et a adopté une procédure caractérisée par la souplesse et l’efficacité.
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