la technologie HDR dope la dynamique des capteurs d`image

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la technologie HDR dope la dynamique des capteurs d`image
Dossier vision industrielle
C o n t r ô l e d e scè n e s c o n t r a s t é e s
La technologie HDR dope la dynamique
des capteurs d’images
H
Longtemps réservée à la photographie, la technologie HDR (High Dynamic Range) investit peu à peu les caméras de vision
industrielle. L’intérêt ? Obtenir des capteurs de plus grande dynamique afin de pouvoir observer des scènes qui comprennent
à la fois des zones claires et sombres, sans aucun phénomène d’éblouissement. Les solutions proposées sur le marché utilisent
des technologies souvent différentes. Mais toutes conduisent à simplifier le contrôle des scènes très contrastées. Avec la
technologie HDR, la vision franchit de nouveaux obstacles, et élargit son champ d’application.
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New Imaging Technologies
Q
ui n’a pas déjà pris la photo
d’un objet en contre-jour ? Le
plus souvent, la forte luminosité qui entoure la scène “masque” tous les détails de l’objet
situé au premier plan. Et plus la lumière est
forte, plus l’objet se réduit à une masse sombre dont on ne discerne que le contour…
En vision aussi, le contrôle des scènes très
contrastées peut être problématique. C’est
pour répondre à ce type d’applications que
les capteurs HDR (High Dynamic Range) ont
été conçus. Depuis quelques mois, la tendance est très nette : AVT, IDS, Jai, Omron ou
Matrix Vision, pour ne citer qu’eux, ont tous
ajouté à leur gamme un ou plusieurs modèles dotés de la précieuse technologie HDR.
New Imaging Technologies, concepteur français
de capteurs CMOS, en a même fait l’une de
ses spécialités.
De quoi s’agit-il en réalité ? Pour le comprendre, il faut revenir à quelques notions
­fondamentales. Qu’ils soient basés sur la
technologie CCD ou CMOS, les capteurs
d’images sont tous
formés par un semiL’essentiel
conducteur constitué
P Les caméras HDR
d’une matrice d’élésont utilisées pour observer
ments sensibles, les
des scènes qui présentent
pixels. Ce sont eux qui
une grande dynamique
capturent les photons
lumineuse.
de la lumière perçue
P Il existe sur le marché
par le capteur, et qui
plusieurs technologies
les convertissent en
de capteurs HDR.
électrons (donc en
Chacune d’entre elles offre
charge électrique).
des avantages spécifiques.
Dans un capteur CCD,
P Les capteurs qui offrent
par exemple, les charune réponse logarithmique
ges sont collectées
sont particulièrement
dans le puits de potenprometteurs car ils ne
tiel associé à chaque
nécessitent aucun réglage.
pixel pendant la durée
majeur des fabricants de capteurs. « Pendant
plusieurs années, la résolution et les cadences d’acquisition étaient les facteurs prioritaires. Dans la
“course au mégapixel” que se livraient les fabricants,
la dynamique du capteur passait souvent au second
plan », indique Baptiste Güldner, responsable
du service technique chez Stemmer Imaging.
Pire encore, l’accroissement de la résolution
s’effectuait parfois au détriment de la dynamique, car il se traduisait par une diminution de la taille des pixels… Mais les besoins
sont là, et il fallait bien trouver des solutions
techniques satisfaisantes pour contrôler les
scènes contrastées.
Plusieurs solutions efficaces
Lorsqu’ils ne disposent pas d’une fonction
spécifique pour ce type d’application, les
fournisseurs et les intégrateurs contournent
alors le problème en s’appuyant sur des algorithmes de traitement d’images spécifiques, et sur des dispositifs d’éclairage complexes. Ils ajoutent aussi des filtres, ou
réalisent des contrôles successifs avec différents temps d’exposition, afin de mettre en
évidence tous les éléments utiles de l’image.
Bref, « en l’absence de la technologie HDR, il faut
maîtriser tous les éclairages et préparer correctement
la scène », souligne Baptiste Güldner.
Désormais, plus besoin de multiplier les réglages. L’utilisateur dispose en effet d’un
capteur qui possède déjà une dynamique
suffisante pour l’application envisagée… et
cela même dans les cas les plus complexes.
Lors d’un contrôle de soudure, par exemple,
l’éclairage produit lors de l’opération peut
difficilement être maîtrisé. Dans ce cas, seul
l’emploi de la technologie HDR permet de
résoudre facilement l’application.
Sous la dénomination commune de “HDR”
se cachent en réalité des technologies souvent différentes. On distingue notamment
les solutions basées sur des capteurs dont la
réponse est linéaire (comme les capteurs
traditionnels), et celles qui fournissent une
réponse logarithmique, un peu comme l’œil
humain. Dans le premier cas, la tension aux
bornes du capteur varie proportionnellement à la quantité de lumière reçue. Lorsque
la luminosité augmente, la tension subit la
même variation. D’où le risque de saturer le
capteur et d’éblouir l’image. Pour pallier ce
problème, certains fabricants ont trouvé une
parade. AVT, par exemple, utilise dans une
de ses caméras un capteur de Cypress qui distingue en quelque sorte les pixels susceptibles d’être saturés. Lorsque 90 % du temps
d’exposition est passé, la quantité de lumière
qu’ils ont stockée est automatiquement remise à zéro, pendant que la mesure se poursuit. Il ne leur reste alors que 10 % du temps
d’exposition pour recevoir à nouveau des
photons et les convertir en charge électrique.
De cette manière, la réponse du capteur est
“atténuée” dans les fortes luminosités, et il
y a moins de saturation. La méthode est efficace (elle a d’ailleurs fait ses preuves depuis
quelques années), mais elle souffre d’un inconvénient : on ne peut pas savoir quelle
partie de l’image a été “corrigée”. Précisons
toutefois que dans cette approche, le mode
HDR est une fonction que l’on peut choisir
d’activer, ou pas, suivant les besoins.
Deux capteurs au lieu d’un
Plus récemment, Jai a mis en œuvre deux
autres approches dans ses caméras industrielles. La première est disponible sur des
modèles équipés de capteurs CCD standard,
mais dotés d’un mode de déclenchement
spécifique par séquences répétées ­(“sequence
trigger”). Grâce à cette fonction, le capteur
prend automatiquement plusieurs images de
la même scène dans un intervalle de temps
très court. A chaque prise d’image, les paramètres peuvent être différents : il suffit de ➜
Jai
Dossier vision industrielle
L’image obtenue par
un capteur HDR (à droite)
semble plus pâle que les deux
autres. Mais il n’y a presque
plus d’éblouissement, et l’on
peut distinguer beaucoup plus
d’informations utiles.
Au cœur des caméras, les capteurs CCD ou CMOS jouent un rôle majeur. Ce sont eux qui capturent les photons de la lumière incidente
et qui les convertissent en charge électrique. Lorsque la réponse du capteur est logarithmique, il est possible d’observer des scènes
très lumineuses sans arriver trop rapidement à la saturation des pixels.
d’exposition, puis transférées de pixel à pixel
jusqu’à une sortie commune où elles sont
converties en tension (avant d’être numérisées). Chaque pixel peut donc être schématisé comme un puits qui se remplit, petit à
petit, avec une certaine charge, en fonction
de la quantité de lumière qu’il reçoit. C’est
le volume du puits, autrement dit le nombre
de charges par pixel, qui limite la dynamique
des capteurs (on parle alors de capteurs qui
fonctionnent en mode intégration).
La dynamique est l’une des principales caractéristiques d’un capteur d’images. Elle définit
en quelque sorte la “plage de luminosité”
que le capteur peut mesurer. La valeur, exprimée en dB, est basée sur le rapport entre la
plus forte et la plus faible luminosité :
D = 20 lg (i1/i2) dB
Un capteur de 60 dB, par exemple, peut acquérir l’image d’une scène dans laquelle la
luminosité maximale est 1 000 fois plus
forte que la valeur la plus faible (20 x lg
1000 = 60 dB). Plus la valeur en dB est élevée, plus le ratio est important. Un capteur
doté d’une grande dynamique peut donc
acquérir des images contenant des zones très
lumineuses sans arriver à saturation. Et il
peut “voir” les détails présents dans les zones
sombres de la même image, sans être ébloui
par la forte luminosité.
Jusqu’à présent, l’accroissement de la dynamique n’était pas l’axe de développement
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d’entre eux accumule une charge qui est reliée à
l’éclairement reçu par une loi logarithmique », explique Nicolas Baroan, chargé des ventes et
du marketing chez NIT. En cas de forte luminosité, la tension augmente aussi, mais la
variation est moindre. On peut ainsi obtenir
un capteur de grande dynamique sans arriver rapidement à la saturation. Chez NIT, les
capteurs CMOS HDR offrent ainsi une dynamique de 120 dB de manière intrinsèque,
sans aucun paramétrage spécifique (et sans
se soucier du temps d’exposition). Il est
même possible d’aller plus loin. La tension
mesurée provient en effet de la luminosité
globale de la scène et de la luminosité réfléchie par les objets que l’on souhaite contrôler. « En supprimant la composante constante liée
à l’éclairement global (considéré comme une lumière
parasite), on ne garde que la lumière réfléchie par
l’objet. Grâce à ce procédé, on obtient un meilleur
contraste », précise Nicolas Baroan.
Où trouver des capteurs HDR ?
La caméra Marlin 131B de AVT est dotée d’une fonction HDR que l’on peut activer,
ou pas, suivant les besoins. Chez JAI , la technologie est disponible dans le modèle
AD-081 (dispositif bi-CCD), et sur toute caméra GigE Vision équipée de la fonction
“sequence trigger”. On trouve également la fonction HDR dans les capteurs de New
Imaging Technologies, dans la caméra UEye 5120 de IDS , la caméra mvBlueFoxMLC de Matrix Vision  (capteurs d’Aptina), et dans le système de vision Xpectia
d’Omron… pour ne citer qu’eux.

De nombreuses applications

➜ paramétrer auparavant le capteur pour
sélectionner le temps d’exposition, le niveau
du gain ou la région d’intérêt dont on a besoin pour l’application. Lors du contrôle de
scènes très contrastées, on peut ainsi capturer
jusqu’à dix images avec autant de temps
d’exposition différents. Ces résultats sont
ensuite fusionnés pour fournir une seule
image, contenant à elle seule tous les éléments pertinents. La solution est simple, bon
marché, et elle est disponible sur toutes les
caméras standards de Jai. Néanmoins, il faut
régler les différents paramètres d’acquisition
pour être sûr d’obtenir des images informatives. D’autre part, ce type de méthode ne
peut convenir qu’au contrôle de phénomènes lents (car la scène ne doit pas changer
entre les différentes prises d’images).
Pour pallier cette limitation, Jai a développé
une autre approche basée sur deux capteurs
CCD (dont la réponse est linéaire) et un
prisme. Chaque CCD prend simultanément
une image de la même scène avec un temps
d’exposition différent. L’une des deux images
va donc offrir plus de détails dans les zones
sombres, alors que l’autre se limite aux zones
les plus claires. Les deux images sont “recombinées” grâce à un logiciel pour fournir un
seul résultat. Celui-ci contient toutes les in-
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
formations nécessaires au contrôle, à la fois
dans les zones claires et sombres de la scène.
Cette solution est plus coûteuse que la précédente, et elle nécessite des modèles bi-CCD
spécifiques. Mais elle est aussi plus précise, et
elle se prête davantage aux applications de
vision industrielle. Grâce au synchronisme
des deux prises d’images, on peut en effet
contrôler aussi bien des phénomènes lents
que des objets se déplaçant à grande vitesse.
Contrairement à la solution mise en œuvre
dans les caméras de AVT, la fonction HDR est
ici forcément utilisée dans la caméra (il n’est
pas possible de la désactiver).
Comme des panneaux solaires
Par rapport à l’approche de Cypress ou de Jai,
la technologie développée par NIT est relativement jeune, mais elle offre déjà de nombreux avantages. « Grâce à ce procédé, la technologie HDR devient facilement accessible, sans
réglages spécifiques. Chez IDS, par exemple, elle est
disponible dans des caméras d’entrée de gamme très
polyvalentes », souligne Baptiste Güldner.
Grâce à sa simplicité, la solution est aussi
destinée à être utilisée dans les caméras “intelligentes” de vision industrielle.
Quelles que soient les méthodes employées,
la technologie HDR ouvre la voie à de nouvelles applications. C’est le cas en particulier
dans toutes les situations où l’éclairage est
difficilement contrôlable : les applications en
extérieur, en lumière naturelle (sécurité, surveillance, transports, etc.), les systèmes de
contrôle des soudures, etc. Dans les situations plus “classiques”, les capteurs HDR
simplifient les applications existantes.
L’inspection de surfaces très réfléchissantes,
et, de manière générale, de toutes les scènes
très contrastées, s’effectue plus facilement,
sans qu’il soit nécessaire de modifier de
nombreux paramètres ou d’utiliser des dispositifs d’éclairages complexes.
MLZD
Ces différentes méthodes utilisent toutes une
combinaison d’images fournies par des capteurs à réponse linéaire, qui fonctionnent en
mode intégration. Mais on trouve aussi des
solutions basées sur des capteurs CCD ou
CMOS dont la réponse est intrinsèquement Pour en savoir plus
Le site de IDS (www.ids-imaging.fr) propose un livre
logarithmique. C’est le cas par exemple des
blanc sur les différentes technologies de capteurs HDR.
capteurs conçus par New Imaging Technologies
Une autre présentation technique est aussi disponible sur
(NIT). Cette approche, que l’on retrouve
le site de Jai (www.jai.com, rubrique Camera
Solutions \ Support and Downloads \ Technical Notes).
aussi chez IDS, est assimilable au fonctionRetrouvez également sur notre site www.mesures.com
nement des cellules photovoltaïques.
(rubrique Archives) les articles techniques qui ont été
« Comme dans un panneau solaire, on mesure dipubliés sur le principe des capteurs CCD et CMOS.
rectement la tension délivrée par les pixels. Chacun
MESURES 828 - octobre 2010 - www.mesures.com