Florence sous Cosme 1er de Médicis, grand duc de Toscane par

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Florence sous Cosme 1er de Médicis, grand duc de Toscane par
Florence sous Cosme 1er de Médicis, grand duc de Toscane par Vincent Droguet
Cette dynastie a utilisé l’art pour assurer une mise en scène du pouvoir et la renommée de la famille à un
point très élevé et bien éloigné de ce que sous-entend la notion actuelle de mécénat. Les Médicis s’impose à
Florence au cours du XVè et règne sur le duché de Toscane jusqu’au XVIII°. L’impact est très fort du XVè au XVIIè,
début XVIIIè siècle. La famille des Médicis n’impose sa souveraineté sur Florence et la Toscane qu’à partir de 1530, or
depuis le début du XVè et même avant elle joue un rôle important. Au XVè et durant les trente premières années du
XVIè, elle essaie d’avoir le « leadership » mais ce n’est qu’une famille de banquiers comme les autres grandes familles.
Ce sont des seigneurs de la ville qui ont beaucoup de concurrents et connaissent de nombreux revers et drames assez
sanglants. Vers 1530, le pouvoir des Médicis est reconnu par l’empereur du saint empire romain et germanique qui
leur accorde le titre de duc puis de grand duc de Toscane. Alors ils exerceront leur souveraineté avec un mécénat
proche des ceux des autres princes héréditaires européens.
Durant les XV° et XVI° s; il y utilisation de l’art et de la culture pour se hisser à un rang nouveau puis avec Cosme 1er
on assiste à un mécénat à valeur politique durant les XVIè, XVIIè et début XVIIIè siècles.
Cosme I de Médicis, grand duc de Toscane (Cosme 1er par Bronzino)
Il légitime le pouvoir du souverain non comme banquier mais comme prince
héréditaire mettant en place une imagerie princière dans cette ville, qui essaiera de
remettre en place la république. Il sera nommé grand duc de Toscane en février 1570.
Ses grands prédécesseurs sont Cosme l'ancien (relief de marbre de Berlin), Laurent le
magnifique (par Vasari). A sa mort en 1492, son fils Piero n'assure pas le pouvoir, chassé
en 1494 par les Florentins sous l'emprise de l'agitation religieuse de Savonarole et
l'arrivée des troupes françaises de Charles VIII.
Les Médicis ne se réinstallent que par le biais des papes. 2 papes sont des Médicis:
Léon X, 1541-1522, le fils de Laurent le Magnifique et Clément VII, 1523 - 1534, le fils
naturel de Julien, frère de Laurent (Clément VII peint par Cristofano di Papi dell' Altissimo). Les
armées de Charles Quint mettent à sac Rome en 1527 dans des conditions effroyables. Clément VII doit une rançon et
s’exile à Orvieto. En 1527, Hippolyte, fils illégitime de Julien est chassé de Florence. Le vieux gonfalonier Soderini
reprend les rennes dans un dernier sursaut républicain. En 1530 Charles Quint entre dans Florence et impose
Alexandre de Médicis, probablement le fils naturel de Clément VII. Il le fait duc « de la république de Florence ».
Alexandre devient duc de Toscane en 1531, Hippolyte étant cardinal depuis 1529 (Portrait of Alessandro de Medici, 1534, Giorgio
Vasari). Brutal, inculte, débauché, il gouverne en despote. Une conspiration tendant à lui substituer Hippolyte avorte
avec la mort de celui-ci (1535) ; en outre, son pouvoir est affermi par son mariage avec une fille naturelle de
l'empereur. Son cousin Lorenzino (le Lorenzaccio d'Alfred de Musset) l'assassine, mais Florence n'en profitera pas
pour secouer le joug. C’est alors que Cosme, fils de Jean des Bandes noires est nommé duc de Toscane. A partir de
Cosme I, le mécénat prend un tour différent.
Administrateur talentueux, homme sans scrupule, et violent quand il le faut, sachant manier les alliances familiales, il
s'impose. Il épouse Eléonore de Tolède, fille du vice-roi de Naples, sous domination de Charles Quint. (Eléonore de Tolède et
son fils Giovanni par Bronzino – 1544- Offices). La villa de Poggio à Caiano (Villa médicéenne de Poggio a Caiano de Giovanni Stradano) accueille la suite
en 1539. Puis s'installe dan le palais Médicis de la via Larga.
Dans un geste hautement politique, Cosme décide alors de s'installer dans le palazzo Vecchio ou palais de la
Signoria, siège historique du pouvoir bâti d'après un projet d'Arnolfo di Cambio à la fin du XII°s. Le palais est
construit sur un noyau initial : le cortile, la salle des 200 et la grande salle des 500, édifiée après 1494 qui deviendra
salle des audiences. De nouveaux bâtiments sont édifiés à l'arrière : les appartements princiers et de la cour.
La salle d'audience : le décor de la salla dell'Udienza est confié à Francesco Salviati formé à Rome, puis Venise
et présent à Florence en 1542-1545. Ces fresques mettent en scène quelques épisodes de la vie du consul romain Furius
Camillus. Elles symbolisent l'accession au pouvoir du duc de Médicis et les premiers fastes de son règne. (Camillus avec la
statue de Junon)
Les appartements privés sont refaits et notamment ceux d’Eléonore avec la chapelle de la souveraine qui subsiste
encore par Bronzino. Bronzino réalise en 1540-45, les murs du fond avec une Déposition du Christ et une Annonciation.
C’est un des hauts lieux du maniérisme. La 1ère version de la Déposition, offerte au cardinal de Granvelle est conservée
à Besançon est proche de celle de Pontormo à san Felicita. Les fresques reprennent différents épisodes de la bible (Passage de la
mer rouge par les juifs, l'armée de Pharaon se noyant ). La voûte est décorée de 4 figures de saints (st Michel/ temps anciens, St Jean à
Patmos/ contemporain du Christ, st Jérôme/antiquité tardive et St François/contemporain)
Giorgio Vasari, est le peintre, artiste et théoricien qui dirige ce programme complexe. ( Autoportrait à l'espagnol).
La transformation de la salle des 500 en une salle d'audience. Surélevée de 7 m, sur les conseils de Michel Ange,
elle mesure 53 m de long sur 22 m de large. Elle sera transformée en théâtre en 1565 pour le mariage de Francesco
(maquette). Le programme sculpté revient à B Bandinelli. Sur le côté opposé (rehaussé) dit de l'Audience, la statue de
située dans la grande niche centrale Leon X et le couronnement de Charles Quint montre l'empereur agenouillé devant un
Médicis… Au plafond des peintures allégoriques glorifiant Retour triomphal du Grand-duc Cosme ler à Florence, les
Histoires de la conquête de Pise et de Sienne et illustrent les possessions du Duché des Médicis. Le plafond est
accroché à la charpente, un programme colossal. Les murs reprennent la glorification de Cosme Cosme étudiant le siège de la
ville de Sienne seul avec la Prudence, la Force et le Silence , le triomphe de Florence après la prise de Sienne, l'apothéose de Cosme. Le message est
clair. L'assaut de la Porta Camollia dans un effet nocturne montre également la supériorité de la monarchie sur la République.
Omniprésente dans le palais, la glorification de Cosme est mise en scène. Le palais comporte différentes salles
consacrées à Cosme l'ancien, Laurent le Magnifique, Léon X, Jean des bandes noires, Clément VII, Cosme 1er.
Salle de Cosme l'ancien : entièrement décorée de marbre fin et de grottesques, le décor figuratif s'étend sur la
partie haute des murs et la voute (dessin modello) Cosme l'ancien revenant d'exil et acclamé par les florentins reprend l'idée de l'entrée
du Christ à Jérusalem. Cosme décidant de la construction de san Lorenzo , c'est le protecteur des arts.
Salle de Laurent le Magnifique est dans le même esprit; A la voûte Laurent trônant entouré par les ambassadeurs Il était déjà
donc souverain. Le prince médicéen au milieu des hommes de lettres et des philosophes : on connaît et reconnaît sa grande culture.
Le grand salon de Léon X le dessin du plafond de Vasari est explicite Léon X créant les cardinaux au sein de st Pierre de
Rome, au centre la prise de Milan contre les Français en 1521 et dans un coin Entrevue de Léon X et de François Ier à
Bologne. C'est la victoire contre les envahisseurs, permise par les Médicis. Dans un caisson, François 1er agenouillé devant le
pape, à Bologne Tous les puissants rendent hommage à cette famille. Au mur, l'entrée du pape Léon X à Florence en 1515 signifie la
reprise en main de la ville par les Médicis.
La salle de Cosme 1er le décor est repris en parallèle. Partie basse des murs en marbre fin, bataille et prise de ville,
avec des grottesques et voûte allégorique. Cosme victorieux en 1537, à la bataille de Montemurlo qui scella la domination des Médicis
sur la Toscane. En empereur romain, il ne les graciera pas… au contraire.
Cosme au milieu des artistes avec le modèle de la fontaine de Tribolo; il est lui aussi protecteur des arts et des lettres.
Les appartements des éléments se situent au dessus. Les 4 éléments rejoignent les divinités de l'olympe. Vasari a
ainsi mis en relations les dieux du ciel et les dieux médicéens. (La forge de vulcain sur la cheminée)
La loggia de saturne offre une vision totale de Florence.
Les appartements d'Eléonore de Tolède. Elle meurt avec deux de ses fils de la malaria. Vasari met en scène les
femmes vertueuses bibliques ou mythologiques; Dans la salle de Pénélope le thème est celui de l'intelligence (contre la
lascivité) Ulysse et Circée.
La salle des cartes géographiques Stanza del Guardarobe ou Sala delle mappe geografiche ; Cette salle doit son
nom aux cartes du XVIe siècle siècle peintes à l'huile sur les 53 portes des armoires par le frère dominicain Ignazio
Danti ; ces cartes, dont le relevé est relativement exact, permettent de se faire une idée des connaissances
géographiques de l'époque. Au centre un globe terrestre (et un céleste) descendaient du plafond.
La stuffetta du duc et la chambre du trésor, le tresoretto, destiné à conserver les objets les plus précieux et l'or pour
les négociations.
Vers 1560, Vasari augmente encore l'ensemble avec les Offices (Uffizi). Cosme est un souverain qui agit comme un
urbaniste. Il fait construire le grand ensemble des Offices, comme un forum antique avec les bureaux de
l’administration des Médicis et des ateliers de cour pour les pierres dures et les tapisseries. Ces ateliers sont liés au
prestige de cette cour. Il y installe aussi la collection de peinture de la famille. Comme un empereur romain, Cosme
disposait d'une sorte de forum avec toutes les administrations et ateliers. Il construit le Corridor Vasari, qui relie les
appartements au palis Pitti; C’est un curieux bâtiment en forme de couloir qui part depuis cet arc de triomphe, passe
au dessus du Ponte Vecchio et débouche au palais Pitti, au niveau de la grotte de Buontalenti. Il permet au duc de
traverser le fleuve et une partie de la ville sans être vu et en toute sécurité, loin des regards de la population.
Palais Pitti (Justus Utens – fin XV –musée historique et topographique Firenze com’era ) Le palais a été acheté par Eléonore pour en faire
une résidence de campagne avec des jardins. Le palais Pitti commencé par un élève de Brunelleschi pour Luca Pitti,
famille rivale des Médicis, dans les années 1450 fut acheté par Eléonore de Tolède qui confia les travaux
d’agrandissement et la réalisation de la cour en U à Ammannati (1511-1592). Le parc fut dessiné par Niccolo Pericoli
dit Tribolo (1500-1550) (l'amphithéâtre) Ce sera la résidence du XVIIè.
Le mécénat de Cosme en sculpture
Son sculpteur de prédilection est B Bandinelli. On lui doit Orphée en 1520, pour la cour Médicis. En 1530, on lui
commande Hercule et Cacus en pendant du David de Michel Ange. C'est le pouvoir médicéen triomphant de la rébellion.
Très critiqué, on dira que sa musculature est comme un sac de melons…
Cosme fait travailler Benvenuto Cellini. Cellini réalise ce buste dès son retour de France en 1545. (Buste de Cosme en br
1545-47 –Bargello et en marbre à san Francisco)
Persée de Cellini – loggia dei lanzi - 1445 est comme
la Judith de Donatello pour la République, l’image du pouvoir des Médicis
coupant la tête aux tentatives républicaines. L’intention politique est claire. Cosme se fait représenté comme un
mécène des arts.
Vincenzo de Rossi travaille aux douze travaux d'Hercule pour la salle des 500
Ammannati réalise la fontaine de Neptune dit le "gros blanc".
Cosme est un collectionneur de pierres dures; Comme le fut Laurent (vase en porphyre roue et camé au palais Pitti). Il fait réaliser
le camée de la famille de Cosme qui reprend l'idée des camées d'Auguste avec en partie centrale la ville de Florence.
Cosme veut promouvoir des ateliers de cour pour fabriquer des œuvres d’art, ce qui lui octroie un prestige
supplémentaire. Posséder des ateliers de tapisserie, avec des lissiers flamands pour les mettre en œuvre est le nec plus
ultra (sous le pontificat des Médicis, Raphaël a créé les cartons de la tenture des actes des Apôtres, tissée dans un
atelier flamand). Ceci se fait déjà à Ferrare et Milan. Il débauchera pour cela différents lissiers.
La tenture de l'histoire de Joseph – tapisserie de la femme de Putiphar
A la suite du décès de sa femme et ses 2 fils, il se retire à Castello (Utens) Tribolo réalise la fontaine d'Hercule avec
Pierino da Vinci.
Francesco (1541-1587) (portrait enfant et adulte)est le fils de Cosme, le grand duc Francesco a une personnalité bien
différente de celle de son père solaire. Plutôt saturnien, introverti, il aime à vivre dans son studiolo crée en 1570 à son
intention dans le Palazzo Vecchio. Il y renferme ses objets précieux, il est passionné d’alchimie. Il crée le studiolo.
Marié à Bianca Capella, il meurt peut-être assassiné.
Ferdinand de Médicis prend la relève, après avoir abandonné la pourpre. Il fait réaliser une très grande statue de
Cosme 1er en bronze à Florence( Piazza della Signoria statue équestre de Cosimo I de Medici par Gianbologna . C'est une manière
d'insister sur la personnalité de Cosme, son pouvoir et son mécénat. Une célébration rétrospective comme l'avait fait
Cosme 1er avec Cosme l'ancien. Ce mécénat est extrêmement important, il fut mis en œuvre pour glorifier un prince,
une dynastie naissante par l'art et ainsi se mettre au même niveau que les autres princes dynastiques de l'Europe.