358JKMAGAZINE_07-12 JIMI HENDRIX

Transcription

358JKMAGAZINE_07-12 JIMI HENDRIX
JIMI
HENDRIX
Le terme génie de la guitare
s’applique totalement à Jimi
Hendrix. Bien que régulièrement
répétée, la phrase il y a un avant et
un après Jimi Hendrix est toujours
largement justifiée. Tony Marlow
nous explique ici pourquoi.
Guitar Genius
Monterey, juin 1967.
S
eattle, plus grande ville de l’Etat de
Washington, surnommée la porte de
l’Alaska, est un important port de
commerce sur le Pacifique. Situé sur la Côte
Ouest, à 150 km du Canada, les tensions
raciales y sont moins oppressantes que dans
d’autres régions en raison de la quasi-absence
de ghetto. La scène blues y est donc peu
développée et les adolescents noirs cèdent
aux joies des musiques dansantes, swing,
rhythm’n’blues puis rock’n’roll. Lorsque Johnny
Allen Hendrix, renommé James Marshall, y naît
le 27 novembre 1942, le R&B de Louis Jordan
est à son zénith et les solos fluides de son
guitariste Carl Hogan bercent son enfance.
ROCK’N’ROLL
En 1955 il se prend de plein fouet la déflagration
rock’n’roll, notamment Chuck Berry dont il
essaie de reproduire le moindre plan sur sa
première guitare, et Elvis Presley qu’il va voir en
concert le 1er septembre 1957 au Sick’s Stadium
de Seattle. L’usage phallique de la guitare d’Elvis
The Pelvis et le jeu de Scotty Moore qui fusionne
sans états d’âme blues, country et jazz, le
marquent fortement. Le fait qu’un teenager noir
voit un rocker blanc montre bien le changement
que le rock’n’roll provoque sur les mentalités.
Au R&B, avec solos de saxo et textes adultes,
beaucoup préfèrent la déflagration électrique de
la nouvelle musique qui mêle les deux cultures.
A onze ans, Jimi imite le King dans toutes les
pièces de la maison, prétendant être Elvis. C’est
cependant « Memories Are Made Of This » de
Dean Martin qui est le premier titre qu’il apprend
sur sa guitare ne comportant qu’une seule
corde ! A seize ans, son père, Al, lui achète sa
première guitare électrique, une Supro Ozark
pour droitier dont il inverse les cordes pour la
jouer en gaucher. Il apprend « Tall Cool One »
des Wailers, groupe rock blanc de Tacoma qui
joue au Spanish Castle de Seattle. En février
1958, la mort de sa mère Lucille, à l’âge de 32
ans, va le hanter jusqu’à la fin de ses jours. Son
frère Leon raconte : Maman devint un ange pour
lui, une figure éthérée qui se retrouvera dans
« Little Wing », « Angel », etc.
En 1959, il se fait voler sa guitare et les Rocking
Kings, qu’il vient d’intégrer, se cotisent pour
lui en acheter une autre chez Sears-Roebuck
pour 49,95 $, une Danelectro Silvertone. Leur
répertoire mêle reprises de Little Richard, Fats
Domino, Chubby Checker avec « Louie Louie »
des Kingsmen et « Peter Gun » de Duane Eddy,
le premier guitar hero de Jimi. Il développe une
obsession pour la six-cordes, la pratiquant
toute la journée. Il ne manque pas une occasion
de se perfectionner comme lorsque Bill Doggett
joue à Seattle. Jimi harcèle pendant plusieurs
heures son guitariste Billy Butler jusqu’à ce qu’il
lui montre comment jouer leur succès « Honky
Tonk ». « Come On » de Earl King est une autre
reprise incontournable ainsi que « Everyday I
Have The Blues », « Driving Wheel » (B.B. King),
« The Twist » (Hank Ballard), « Rockin’ Robin »
(Bobby Day), « Do You Wanna Dance » (Bobby
Freeman). Lester Excano, batteur des Rocking
Kings, se souvient : Nous mixions blues, jazz et
rock’n’roll, en fait tout ce que les gens pouvaient
danser. Le groupe lui accorde un spot de dix
minutes où il montre au public ses trouvailles
guitaristiques et son jeu de scène naissant avec
guitare jouée dans le dos. Le Spanish Castle
accueille des milliers d’adolescents blancs et
noirs et on trouve le fondement de la démarche
de Jimi qui toute sa vie jouera pour tous les
publics à la tête d’un trio mixte, sans distinction
de races ou de croyances, rendant hommage
à ses années de formation dans le magnifique
« Spanish Castle Magic ».
en parachute, il hante les clubs de blues,
provoquant la stupéfaction des Afro-Américains
lorsqu’il joue du Duane Eddy. Il apprend que la
ségrégation est une réalité dans les deux sens
et fait la connaissance du bassiste noir Billy Cox
avec qui il forme les King Kasuals. Celui-ci lui
fait découvrir la musique de sa communauté,
le blues. Démobilisé, il absorbe les plans de
Freddie King, T-Bone Walker, Robert Lockwood
Jr. comme une éponge, avant de voir sur scène
et de rencontrer B.B. King et Albert King à qui il
demande de lui montrer quelques procédés. Du
troisième King, gaucher comme lui, il reprendra
« Born Under A Bad Sign », de même que
« Bleeding Heart » (Elmore James), « Killing
Floor » (Howlin’ Wolf). En février 1968, Albert
King passera en première partie de Jimi Hendrix
au Fillmore de San Francisco, devenant une
vedette pour le public blanc.
Muddy Waters fait aussi partie de ses influences
par la force évocatrice de ses disques. Il
reprend « Mannish Boy », « Catfish Blues » et
« Hoochie Coochie Man » dont le côté habité
se retrouve dans « Voodoo Chile » qui projette
Avec Curtis Knight, 1966.
BLUES
En 1961, il rejoint la 101e aéroportée à Fort
Campbell, Kentucky. En dehors de sauts
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