Fête de la Sainte Famille - Saint Jean

Transcription

Fête de la Sainte Famille - Saint Jean
Homélie de la Sainte Famille Luc, 2, 41-52
En plein milieu de nos fêtes de fin d'année, voici que l'on nous propose de regarder la famille de
Jésus. Entre Noël et le premier de l'an apparaît la fête de la sainte Famille. « Sainte Famille », qu'estce que ces deux mots nous évoquent spontanément ? Quelles images nous remontent en mémoire ? Estce l'image d'une famille modèle... un ou des enfants qui « grandissent en âge et en sagesse », des parents
unis, un papa consciencieux et travailleur, une maman écoutante et disponible... une famille discrète et
pieuse....etc.
On pourrait continuer à parler de la vie quotidienne de la famille de Jésus sur le mode de la
famille réussie. Mais, d'abord, ce serait parler de ce qu'on ne connaît pas bien, tenter de combler avec
des mots à nous ce que les évangélistes ont pratiquement passé sous silence. Et puis certains d'entre
vous quitteraient cette église le cœur lourd, plein d'amertume et de nostalgie !...
Je pense à vous parents qui n'avez pas eu la joie de passer Noël avec l'un de vos enfants parce
que la maison ne l'intéresse plus et que votre amour le laisse indifférent. À quoi bon parler d'une famille
réussie ?
Je pense à vous qui, pour la première fois, n’avez pas été accompagnés par votre fils ou votre
fille adolescent à la messe de Noël.
Je pense à vous qui vivez douloureusement la séparation dans votre couple, avec toutes les
difficultés non résolues. À quoi bon vous parler d'une famille sainte ?
Je pense à vous, jeunes ou moins jeunes, qui vivez seuls comme les 44% d'habitants de notre
secteur paroissial, comme cela nous a été révélé à l'Assemblée Paroissiale du 22 novembre. Certains,
parce qu'ils n'ont pas eu la joie de fonder une famille et d'autres, seuls, parce que le conjoint n'est plus
là ! À quoi bon vous parler d'une famille réussie ?
Oui, prenons bien garde d'inventer des paroles trop simples sur la sainte famille. Laissons-nous
gagner plutôt, aujourd'hui, par le silence qui entoure la famille de Jésus, c'est dans le silence que nous
entendons l'essentiel.
Ceci dit, regardons d'un peu plus près ce qui nous touche, en tant que parents, mais aussi enfants et
pourquoi pas grand parents.
Tout d’abord, la famille est le lieu de l’apprentissage de l’amour en actes et en vérité, le lieu où sont
transmises les valeurs essentielles pour que chaque être humain puisse devenir adulte.
Mais aussi le lieu des désaccords et des conflits qui forgent les caractères. Ainsi, comme l’illustre
l’aventure arrivée à la Sainte Famille, dans l’Évangile de ce jour, chaque membre de nos familles
apprend à découvrir l’autre, à se laisser surprendre et quelquefois dérouter par celui que l’on croyait
connaître. « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme nous avons souffert en te
cherchant, ton père et moi ! »
La vie commune nous permet d’apprendre à nous connaître mutuellement au sein de la famille. Mais,
même si l’on apprend à se connaître, l’autre demeure toujours insaisissable et mystérieux.
Aimer, ce sera donc accepter cette part d’inconnu, permettre cette liberté de nous surprendre
toujours et encore. Dans les paroles et les silences de Marie et de Joseph, qui accompagnent Jésus
dans sa vocation, nous découvrons la profondeur d’un amour qui sait être présent pour l’éducation, qui
prend sa part de responsabilité envers l’enfant, et qui sait aussi s’effacer devant le mystère de Jésus
pour qu’il puisse accomplir sa vocation personnelle.
Donner naissance à un enfant, le mettre au monde, ce n’est pas le fait d’un seul jour, le jour de sa
naissance proprement dite, mais c’est aussi à chaque instant où on lui donne ce qu’il faut pour vivre et
le laisser libre de nous échapper le temps venu...
Il y a là, pour les parents, une formidable occasion d'éprouver leur amour. Un amour qui accompagne,
conseille, met en garde, fait confiance, rend libre. C’est pourquoi, si l’amour parental arrive à ce niveau
de qualité, il peut nous servir à comprendre quel est l’amour de Dieu pour nous tous. Dans son amour
créateur et sauveur pour l’humanité, notre Dieu est bien celui que nous pouvons appeler de ce beau
nom de ''Père''.
À côté de cet apprentissage de l’amour à l’image même de la paternité de Dieu, la famille est aussi le
lieu de l’apprentissage de la miséricorde. Et notre Pape François nous demande, en cette année
nouvelle, d'être pleins d'attention et d'amour pour ceux qui nous déroutent parfois et ne pensent pas
comme nous, qui n'ont pas les mêmes valeurs que nous. Car, s’il nous faut apprendre à aimer comme
Dieu nous aime, nous ne le pouvons pas encore vraiment très bien. Pas autant que nous le désirons.
En effet, les parents comme les enfants, chacun de nous, nous sommes bien imparfaits, nous ne savons
pas aimer comme nous le voudrions. Nous sommes continuellement dans un travail de conversion et de
réconciliation pour apprendre à donner le meilleur de nous-mêmes.
Conversion pour mieux comprendre en quoi consiste l’amour véritable, et se connaître soi-même,
réconciliation pour accueillir les limites et les faiblesses de chacun. Car, en définitive, ce qui compte,
c'est de dire à l’autre qu’on l’aime pour lui-même, et non d’abord pour ce qu’il a fait et peut-être mal
fait, que l’amour est un chemin à parcourir et à réaliser dès aujourd’hui.
Cette miséricorde, qui peut être l'acceptation, par amour, de l'autre différent de nous, loin de ce que
nous avions espéré ou souhaité. En cela, la famille est constamment confrontée, parfois
douloureusement dans les épreuves de ruptures et d'incompréhension. Alors se fait sentir le besoin de
s’appuyer sur l’Amour du couple et l'amour de Dieu pour y puiser la force nécessaire.
Nous constatons qu'il y a bien des manières de vivre en couple aujourd'hui, mais permettez-moi
d’insister sur la grâce du sacrement du mariage ; en effet, le sacrement de mariage, dans le quotidien,
nous donne la force nécessaire et la capacité à développer toujours plus un amour qui résiste au temps
qui passe. Ceci par la qualité de l’amour développé dans la famille, par la confiance instaurée, par le
pardon mutuel : nos relations humaines sont les matériaux dont Dieu se sert pour révéler sa miséricorde.
Ainsi, selon le dessein de Dieu, la famille devient réellement une communauté de vie sociale et une
communauté d’amour comme une petite « Eglise domestique » resplendissante de la lumière offerte par
Jésus à tous les hommes.
En cela, elle est indispensable à la santé physique et morale ainsi qu’au bonheur de chacun d'entre nous.
Et, au nom de notre foi, au sein de nos relations familiales, nous désirons plus que jamais vivre pleinement
la bonne nouvelle du message de l'évangile, qui peut se résumer ainsi : Rien n'est plus important que
d'aimer et de donner sa vie pour ceux qu'on aime, dans la sérénité, la joie, la justice et la paix que le
Christ, par sa naissance, a apportées comme dons faits à l’humanité.
Daniel Lacourt, diacre

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