Le Gnomoniste - La Commission des Cadrans solaires du Québec

Transcription

Le Gnomoniste - La Commission des Cadrans solaires du Québec
Le Gnomonist e
Volume V numéro 1 , mars 1998
Chers amateurs des cadrans solaires,
C'est Gaston Bachelard (1884-1962) qui disait: "
l'esprit a l'âge de ses préjugés". Pour ma part, je
me plais à penser que LE GNOMONISTE reste
jeune! Il est encore dynamique, sans ressources
monétaires, toujours menacé mais combien vivant. Les obstacles, en effet, ne viennent pas de
la complexité des phénomènes à étudier, mais
des préjugés, des habitudes du savoir et des héritages non interrogés.
En ce début de la 5è année de publication du
"Bulletin de liaison" de notre Commission, le feu
sacré et la passion de la gnomonique me dévorent
tout autant. En ma qualité de rédacteur, je me
sens comme un navigateur qui, malgré les vagues, ne détourne pas son regard de la lumière
intermittente du phare. Il y va de son salut.
Mais pour paraphraser Hegel , si c'est seulement
par le risque de sa vie que l'on conserve sa liberté, c'est par l'étude de la gnomonique que l'on ravive le bonheur exquis de sa compréhension des
cadrans solaires. Et en cette fin de siècle, ce n'est
pas un luxe, malgré son apparente inutilité!
André E. Bouchard, Ph.D., Rédacteur
Courriel : [email protected]
Commission des Cadrans Solaires du Québec
Quelques illustrations dans ce numéro...
Partons à la découverte de ces cadrans
et faisons connaître
notre Bulletin!
Dans ce numéro
Mesure de l'inclinaison et de la déclinaison d'un
plan
par
Yvon Massé ............................................................... 2
Un cadran solaire de précision: l'héliochronomètre
par André E. Bouchard ............................................. 4
DOSSIER historique: Un cadranier du XVème
siècle (Jean FUSORIS)
par Mélanie Desmeules ............................................ 6
Correspondance ........................................................ 7
L'année 1997: celle de la visibilité de la CCSQ
par André E. Bouchard .............................................. 8
Un Cadran de hauteur Capucin (suite et fin) par
J. Serge Dion .......................................................... 10
Courrier 2 par André E. Bouchard .......................... 12
Un cadran anglais de
1634 et un héliochronomètre québécois.
En vrac ..................................................................... 12
La Commission des Cadrans solaires du Québec, 42 avenue de la Brunante, Outremont, Québec, Canada H3T 1R4
h t t p : / / c a d r a n s _ s o l a i r e s . s c g . u l a v a l . c a/
Mesure de l'inclinaison et de la déclinaison d'un plan
par Yvon Massé, de Pontoise
membre de la Commission des Cadrans solaires du Québec
Les mesures d'inclinaison et de déclinaison d'un
plan ou d'un mur se font classiquement de façon
indépendante. L'inclinaison se mesure simplement
à l'aide d'un fil à plomb, d'un rapporteur et accessoirement d'une équerre. La mesure de la déclinaison
est plus difficile à effectuer et fait souvent appel à
un plan horizontal, mis en place à l'aide d'un niveau.
Sur ce plan, on peut faire porter l'ombre d'un fil à
plomb à midi vrai afin de relever la méridienne. Il est
alors possible de mesurer la déclinaison à l'aide
d'un rapporteur.
Le principe proposé ici permet d'obtenir en même
temps l'inclinaison et la déclinaison avec un relevé
très simple. Les calculs qui doivent être effectués,
bien que relativement complexes, peuvent être pris
en charge par une calculette programmable, ce qui
est très commode d'utilisation sur le terrain. La calculette CASIO fx-6910G, d'un coût modeste,
convient parfaitement et le programme à utiliser est
présenté ici.
Le principe consiste à relever les coordonnées du
soleil dans un repère propre au plan à mesurer. En
calculant par ailleurs les coordonnées du soleil
dans le repère local, l'orientation du plan se met en
équation. La résolution montre qu'il existe deux couples (inclinaison, déclinaison) solutions. Nous verrons qu'il y a rarement ambiguïté sur le choix du
bon couple. Cependant si un doute existe, une seconde mesure effectuée après quelques instants
pour que le soleil se soit déplacé, indique par comparaison le seul couple inchangé et qui est le bon.
La précision peut également être améliorée en faisant la moyenne de plusieurs mesures.
L'outillage, permettant de relever les coordonnées
du soleil dans le repère associé au plan à mesurer,
est une planchette sur laquelle on fait porter l'ombre
d'un style droit. La matérialisation du repère est
faite par un système de graduations tracées sur la
surface de la planchette. On peut utiliser avantageusement du papier millimétré. Le système d'axe
choisi est le suivant:
ΠOrigine O au pied du style droit.
Œ Axe des x placé sur la ligne de plus grande
pente en dirigé vers le bas.
Œ Axe des y horizontal dirigé vers la droite en regardant la planchette.
La planchette est appliquée sur la surface dont
2
Le Gnomoniste
l'orientation est à mesurer, et l'horizontalité de l'axe
des y est ajustée par un niveau. Le plus simple est
d'utiliser un bord rectiligne parallèle à cet axe,
comme indiqué sur la figure de la page suivante.
On relève alors la position de l'ombre de l'extrémité
du style dans le repère (O,x,y). Pour augmenter la
précision du pointage on peut placer une petite
sphère à la pointe du style, ou encore on peut utiliser la croisée de deux fils parallèles aux axes, dans
ce cas le style n'est plus nécessaire. Pour terminer
le relevé, on note également l'heure précise du
pointage, à la minute près. On peut alors passer à
la partie calcul.
Le programme ci-dessous est déjà dans la mémoire
de la calculette. Sa première ligne a été modifiée
avec le fuseau horaire
en vigueur et la hauteur
du style; elle doit être exprimée dans les mêmes
unités que les coordonnées de l'ombre. La calculette est en mode degré. Il ne reste plus qu'à
Figure 1: La planchette
lancer le programme et à
répondre aux questions
posées:
Œ LONG?: Longitude du lieu, exprimée en degré et
positive à l'ouest du méridien de Greenwich
(pour 73° 38' Ouest, par exemple, on peut entrer:
73 + 38 ÷ 60
Œ LAT?: Latitude, exprimée en degré et positive
pour l'hémisphère nord.
ΠJOUR?, MOIS?, ANNEE? : Jour du mois, mois,
année (seuls les deux derniers chiffres de l'année suffisent).
Œ H. LEGALE?: Heure légale et minute du pointage (pour 14h 23mn on peut entrer: 14 + 23 ÷
60
.
Œ X?: Coordonnée x de l'ombre de la pointe du
style.
Œ Y?: Coordonnée y de l'ombre.
Le programme affiche alors les résultats suivant en
degré:
ΠINC1 puis DEC1: Premier couple (inclinaison,
déclinaison). La déclinaison est positive à l'ouest,
l'inclinaison est nulle pour un plan horizontal et
égale à 90° pour un plan vertical.
Yvon Massé
Volume V numéro 1, mars 1998
ΠINC2 puis DEC2: Second couple.
Si le soleil est situé devant le plan vertical passant
par l'axe des y (ce qui est toujours le cas pour un
mur), c'est le premier couple qui est le bon. Si le soleil est situé derrière, il faut utiliser le second couple.
Enfin le programme demande, par NOUV. MES.
0/1, si on veut refaire une nouvelle mesure. L'entrée
d'une valeur non nulle permet de reprendre les calculs à la saisie de l'heure d'un nouveau pointage.
Terminons en remarquant que ce programme est
valable en tout point du globe, la déclinaison est
toujours donnée par rapport à la direction du sud.
2 tan–1 ( ( X - C ) ÷ ( Y + V ) )
« INC2 »
2 tan–1 ( ( (-) C - U ) ÷ ( Z + W ) )
« DEC2 »
2 tan –1 ( ( X + C ) ÷ ( Y + V ) )
« NOUV. MES .0 / 1 » ? I
I ≠ 0 ⇒ Goto 0
Sous-programme: « RZ »
X cos R + Y sin R C
Y cos R - X sin R Y : C X
Sous-programme: « RY »
X cos R - Z sin R C
X sin R + Z cos R Z : C X
Le programme
Programme principal: « MES I~D »
(-)5 F:80 G
«LONG»? L
«LAT»? P
90-P P
«JOUR»? J
«MOIS»? M
«ANNEE»? A
If M<3
Then M+12 M
A-1
A
Ifend
Lbl 0
«H. LEGALE» ? H
H-F H
.985626 ( 1460 Frac ( A ÷ 4 ) + Int ( 30.61(M + 1))
+ J + H ÷ 24 - 853 ) - 21.385 S
S + 77.045 N
S + 1.915 sin N + .02 sin 2 N N
cos N X
23.439 C
cos C sin N Y
sin C sin N Z
S + 15 H - L - 180
R : Prog « RZ »
P
R : Prog « RY »
sin–1 Z Z
60–1 ÷ tan( Z + 7.31 ÷ ( Z + 4.41 ) ) C
cos C - tan Z sin C I
IX X : IY Y
sin ( Z + C ) Z
« X»? U
« Y»? V
√(U²+V²+G²) C
(-) U ÷ C U
(-) V ÷ C V
G÷ C W
√ ( 1 - Z² - V ² ) C
« INC1 »
2 tan –1 ( ( C - U ) ÷ ( Z + W ) )
« DEC1 »
Volume V numéro 1, mars 1998
Liste des variables utilisées
A: Année
C: Variable intermédiaire
F: Fuseau horaire
G: Hauteur du gnomon
H: Heure légale puis heure UT
I: Variable intermédiaire
J: Jour
L: Longitude
M: Mois
N: Anomalie moyenne du soleil puis longitude vraie
P: Latitude puis distance polaire
S: Longitude moyenne du soleil
U, V, W: Coordonnées du soleil dans le repère cadran
X, Y, Z: Coordonnées locales du soleil
On peut communiquer avec M. Massé:
7, rue des Tilleuls, 95300, PONTOISE, France. Son
adresse électronique est: ( [email protected] ),
et son site web:
http://www.union-fin.fr/user/ymasse/index.html
———————
Pensée d'Albert Willemetz
Au temps heureux des cadrans solaires, il n'y avait
pas l'ombre d'une exactitude.
LE GNOMONISTE
Bulletin de liaison de la Commission des Cadrans
solaires du Québec, est déposé à la Bibliothèque
Nationale du Québec , à Montréal, et est reproduit
en entier sur le site Web de notre Commission, en
utilisant l'adresse suivante:
http://cadrans_solaires.scg.ulaval.ca .
Bonne lecture.
Yvon Massé
Le Gnomoniste
3
Un cadran solaire de précision: l’héliochronomètre *
par André E. Bouchard
La ponctualité n’est pas nécessairement une
grande vertu en cette fin du 20e siècle. En revanche, l’exactitude et la fidélité de sa montre sont valorisées, surtout quand on est pressé. Dans ce
contexte-ci, le cadran solaire ne semble pas être
l’instrument privilégié des gens stressés. Bien plus,
même un public bienveillant à son égard n’affiche
pas une tolérance bien grande quand il constate,
sans trop savoir pourquoi, que le temps solaire
n’est pas celui de la montre. Or il existe un instrument de mesure du temps, capable de satisfaire
aux objections des critiques les plus virulents: c’est
l’héliochronomètre. Il s’agit d’un cadran solaire particulier, synthèse de savoir-faire de diverses époques, et objet capable de nous donner l’heure de
nos montres.
Les composantes du cadran
Un héliochronomètre, comme son nom l’indique, est
un chronomètre solaire. Quelle que soit sa représentation finale, il est un exemple de cadran équatorial . Quatre parties principales composent ce cadran solaire: la base, la table du cadran, l’alidade
ou instrument de vision, et la représentation de l’équation du temps ou forme en huit.
D’abord, la base est fixée
en place, selon l’angle
voulu, c’est-à-dire l’angle
est égal à la co-latitude
du lieu où il est installé
(90 degrés moins la latitude). Cette base est
fixée sur un socle au niveau ou sur un support
Fig.1 Héliochronomètre
fixe.
Si le tout est conved’Albert Côté (1985), de
nablement
ajusté, la base
Drummondville
se situera parallèle à l’équateur, et une perpendiculaire, à partir du centre,
pointera vers le pôle céleste, tandis que la ligne
centrale de la surface du cadran se situera dans le
plan du méridien du lieu.
La table du cadran est fixée à la base, de façon à
ce qu’elle puisse tourner sur son centre. Le cercle
des heures est divisé en segments égaux de 15 degrés pour chacune des heures et le nombre de
sous-divisions de celles-ci dépendra des dimensions du cadran. Avec un rayon de 15 centimètres
ou plus, il permettra des divisions exprimant des minutes. Et la ligne de 12h, si elle était prolongée, de4
Le Gnomoniste
vrait intercepter l’équateur céleste, au vrai point
sud.
L’alidade, qui nous sert d’aiguille pour lire l’heure,
est rattachée à la table du cadran de façon à ce
qu’elle puisse tourner sur son centre, lequel coïncide avec le centre de la table du cadran.
L’un de ses bouts est épointé pour indiquer l’heure.
La ligne centrale de l’alidade est son méridien, qui
coïncide avec le méridien de la table du cadran et
de celui de la base.
L’alidade possède aussi deux bras fixes, perpendiculaires à la table du cadran.
Un des bras contient le style (oeil par lequel passera le rayon de lumière du soleil) et l’autre la courbe
en huit. La largeur des bras est déterminée par la
courbe de l’équation du temps, qui n’excède jamais
plus ou moins 16 minutes de chaque côté de la ligne centrale.
La hauteur des bras est aussi fonction des dimensions du cadran, en laissant la place nécessaire
afin que les rayons atteignent la courbe en huit aux
solstices d’hiver et d’été ( soit + ou - 23,5 degrés
de chaque côté du point de la courbe rejoint par les
rayons aux équinoxes du printemps et d’automne).
* Recherche pour article in Le Mercure solaire ,
Vol 7 no 3, novembre 1997, revue d'Énergie solaire
Québec.
L’équation du temps ou sa représentation graphique en forme de courbe en 8 est riche en information. Elle comprend les points d’impact des rayons
du soleil aux équinoxes et aux solstices; les signes - et + des déclinaisons nord et sud; et E+ et Epour l’élongation du temps. Il faut se rappeler que
les angles sont égaux en minutes de temps, c’est-àdire 1 degré est égal à 4 minutes, et 2 degrés, à 8
minutes, etc...
La courbe en huit s’inscrit donc facilement sur
une grille. Les lignes verticales sont les minutes
de temps et les lignes
horizontales sont les degrés de déclinaison. Plus
il y a de points inscrits,
Fig.2 Courbe en huit (1985), plus la courbe est douce:
sur le cadran d’A. Côté, de elle
comprendra au
André E. Bouchard
Drummondville
Volume V numéro 1, mars 1998
moins le 1er et le 15 de chaque mois, les points où
l’équation est au plus grand et où elle est à zéro,
ainsi que les équinoxes et les solstices.
L’ u t i l i s a t i o n d u c a d r a n
Lorsqu’elle est convenablement montée, l’alidade
sera à midi en temps moyen local. Mais pour obtenir le temps moyen local à n’importe quelle heure
du jour, il faut simplement tourner l’alidade jusqu’à
ce que la lumière passant à travers le trou soit centrée sur la portion de la courbe en huit correspondant à la date. Dans cette position, le pointeur
indique le temps local moyen.
Pour obtenir le temps civil officiel, il suffit d’ajuster la
table du cadran. Dans ce cas, la ligne de 12h doit
être vis-à-vis le nombre de degrés qui égalent la
différence entre le méridien du lieu et la longitude
du méridien officiel. Pour plus de facilité, les degrés
de longitude inscrits sur la surface de la base, de
chaque côté du méridien à 12h, peuvent être
convertis en minutes de temps. Puisque le méridien
officiel reste toujours le même, la base peut être
bloquée dans cette position. Il ne reste qu’à tourner
l’alidade jusqu’à ce que le point de la lumière solaire soit centré sur la partie de la courbe en 8
correspondant à la date en question.
Le pointeur, c’est-à-dire l’aiguille, indiquera maintenant l’heure officielle. Le cadran sera encore plus
intéressant en marquant les côtés du bras de la
courbe en huit, à chaque cinq jours et en inscrivant
aussi les degrés de déclinaison d’un côté et les degrés d’altitude de l’autre. Ainsi, avec toutes ces
données incorporées, le cadran devient très utile.
Vous pouvez l’utiliser pour montrer la déclinaison et
l’altitude du soleil; le cadran indique aussi la date,
l’année, le temps apparent, le temps moyen, le
temps officiel et l’équation du temps. Enfin, en ajustant vers la gauche la table du cadran, et en rallongeant de 15 degrés (soit une heure), on obtient
l’heure avancée du fuseau horaire correspondant.
On le voit, ce chronomètre du soleil, se trouve à
faire les corrections nécessaires pour obtenir
l’heure de la montre, selon la formule suivante:
l’heure civile = heure solaire à midi, +
ou - la correction de l’équation de
temps, et + ou - la correction de longitude du lieu.
Le Répertoire (en préparation) de la Commission
des Cadrans solaires du Québec, comprend trois
héliochronomètres:
- celui d’Albert CÔTÉ (Fig 1),
Volume V numéro 1, mars 1998
- celui de Serge DION et J.Louis MAILLOUX (Fig.3),
- et un troisième d’un londonien nommé ADAMS
(XIXe s.), conservé au Musée de l’Amérique française de Québec.
Sa justification et sa finalité
Comme par le passé, ce cadran garde le temps
sans effort. On peut le quitter et être sûr de le retrouver, toujours là, toujours à l’heure. Il n’y a
pas de plus fidèle serviteur que lui. Il n’est pas
simplement un objet, il
devient le «lieu», la
«forme» qui traduit la
course de la terre autour
du soleil. Il permet donc
à l’homme un retour aux
sources, une nouvelle
approche du temps,
compté de manière plus
naturelle et de ce fait
plus humaine.
Et pourtant, ce cadran
est précurseur scientifique, car il est en quelque sorte la démonstration évidente et poétique
de temps devenu espace et de l’espace devenu
temps.
Fig.3 Héliochronomètre de
J.S. Dion et J.L. Mailloux
(1996), de Baie-Saint-Paul
Le cadran, l’héliochronomètre, participe enfin au renouveau du solaire, à cette redécouverte des bienfaits de notre étoile, source de chaleur, de lumière,
de santé, d’énergie et grande ordonnatrice de l’univers.
Comme la girouette ou l’éolienne, il est une grande
mécanique de la nature. Dans un jardin, sa présence est parfaite. Il est le symbole de l’éternité parmi les fleurs éphémères. On ne peut réunir meilleure alliance: un sentiment d’équilibre et un
contraste plus marqué.
Conclusion
C’est René R.J. ROHR, (dans son livre, Les cadrans solaires, Ed. Gauthier-Villars, 1963, 207 pages) qui indique la note suivante: « Peu de gens savent que l’héliochronomètre a servi jusque vers
1900 à régler l’heure des gares de certains réseaux
des chemins de fer français. La lecture exigeait la
correction de la longitude et de l’équation du temps.
L’heure pouvait être obtenue à moins d’une minute
André E. Bouchard
Le Gnomoniste
5
près». Même si cette affirmation est contestée par
plusieurs gnomonistes français, attribuant plutôt à
des ouï-dire cette utilisation supposée de l’héliochronomètre, cela n’a pas empêché ROHR de reprendre la même note, sans correction, dans son
édition américaine de 1996:SUNDIALS, History,
Theory and Practice, Dover Publications, Inc. N.Y.,
11501. Enfin, un artisan qui veut faire son chronomètre pourra aussi consulter un livre qui fait autorité
chez les cadraniers et les gnomonistes québécois:
Mayal, R. Newton, Mayal, Margaret W., SUNDIALS,
How to Know, Use, and Make Them , Sky Publishing Corporation, Cambridge Corporation, Cambridge, Mass., 1973, 250 pages. Les étapes de
construction y sont explicites. Il semble bien que le
renouveau du cadran solaire ne soit pas un phénomème éphémère, mais au contraire un mouvement
qui s’inscrit dans la longue durée. La présence
concrète du soleil pour régler la vie de manière plus
naturelle est une revendication de l’homme d’aujourd’hui et de demain...
DOSSIER HISTOIRE: Un cadranier du XVème siècle
par Mélanie Desmeules , Herstmonceux Castle, East Sussex, UK
Dans les années soixante, l'historien Emmanuel
Poulle, spécialisé dans l'histoire de l'astronomie au
Moyen Age, s'intéressa à Jean Fusoris , un constructeur actif d'instruments astronomiques entre
1380 et 1430.
La vie de Jean Fusoris est bien connue car en 1415
un procès lui fut intenté. Il naît à Giraumont, en
France, vers 1365 (rappelons que les dates de
naissance au Moyen Age sont incertaines, car on
n'avait pas l'habitude de faire des registres dans
toutes les paroisses). Il fit ses études à la faculté
des arts de Paris, l'une des quatre facultés universitaires de l'époque, avec la médecine, le droit et la
théologie. Il obtint le titre de maître-ès-arts et de
médecine. Mais ce n'était pas suffisant pour faire de
lui un astrolabiste . Son père était un artisan du potier d'étain, et ainsi la tradition familiale influença les
travaux et la carrière de Jean Fusoris.
Rapidement ses instruments scientifiques, faits en
laiton, sont connus et achetés par des personnages
célèbres, ducs, rois, et même le pape. La plupart de
ces instruments étaient des astrolabes, des sphères
armillaires, des horloges et des "quadrans" ( cadrans solaires d'après E. Poulle ). Fusoris voyageait
donc beaucoup pour rendre visite à ses acheteurs
illustres. Comme ses affaires fonctionnaient bien, il
forma des compagnons, i.e. des artisans qui l'aidaient dans la construction de ses nombreux instruments.
Ses constructions le rendent célèbre. Il devient chanoine de Reims en 1404, puis chanoine de Paris en
1411... Cela n'était pas étonnant, car les études, à
la faculté des arts comprenaient aussi une partie de
théologie.
Fusoris créa une sphère permettant de déterminer
la position et le mouvement des sept planètes
6
Le Gnomoniste
connues à l'époque. En 1414, il vendit sa sphère à
un Anglais, évêque de Norwich. Mais cette même
année, la France et l'Angleterre s'opposaient dans
les batailles de la guerre de Cent Ans. Fusoris, en
commerçant avec le camp adverse, pouvait laisser
supposer qu'il donnait des informations sur la défense française. Le 14 juillet 1416, il fut donc
condamné à l'exil de Paris et fut confiné à la résidence obligatoire à Mezières-sur-Meuse.. Pourtant,
en 1424, il continuait son commerce, en construisant une horloge astronomique, pour la cathédrale
de Bourges, et en 1432, on lui commanda un traité
de cosmographie et des tables astronomiques,
mais il ne peut pas tout accomplir, car il meurt en
1436.
On voit que la construction d'instruments astronomiques et gnomoniques, occupa une place prédominante dans la vie de Jean Fusoris. Mais cet astrolabiste a également rédigé des livres techniques (en
latin et en langue vulgaire) sur la confection de ses
instruments, les cadrans solaires et sur l'usage de
l'astrolabe. Comme cadranier, il construisit des
"quadrans" et chercha à corriger les défauts des cadrans utilisés alors, ainsi qu'à perfectionner les calculs sur la latitude et les styles des cadrans.
Plusieurs de ses manuscrits traitent de la construction et de l'utilisation des "cylindres", i.e. des horloges ou des cadrans de voyageurs. Fusoris était
bien conscient que ce cadran ne marquait que les
heures égales pour un lieu donné. Il amena des
améliorations en mettant la graduation des mois
dans le haut du cylindre et non dans le bas, ce qui
permettait un déplacement plus précis du gnomon.
Et pour rendre le cadran du voyageur plus universel, il traça des lignes des heures égales pour plusieurs latitudes. Enfin, il détermina la longueur minimale requise pour que le gnomon soit précis.
Mélanie Desmeules
Volume V numéro 1, mars 1998
Un autre manuscrit contient des tables pour un quadrant à curseur. Avec ce type de cadran, nous obtenons l'heure inégale, soit la douzième de la durée
du jour, durée qui varie dans l'année. Ce cadran
peut être utilisé universellement.
L'activité de Fusoris était de type commercial. À lui
seul, revenait la tâche de vérifier, d'améliorer les tables, les calculs, le matériel et les outils utilisés
dans la construction des instruments de son atelier.
Ainsi, les artisans fabriquaient les cadrans, et Fusoris, en homme d'affaires, contrôlait l'atelier et la qualité des produits.
À Chicago, on trouve des astrolabes de Fusoris, au
Planétarium Adler (aussi le Musée d'astronomie de
cette ville américaine).
——————–
Correspondance 1:
Merci pour ce site particulièrement intéressant....
J'attends avec impatience le chapitre: comment
créer son cadran solaire.
Sera-t-il possible de me le dire lorsqu'il sera consultable? D'avance merci et à bientôt sur votre site.
Laurent BOISSEUIL < LaurentBl @ aol.com > , le
20 décembre 1997
Tours, FRANCE.
———–
Cher Monsieur Bouchard
Mr André Bouchard
Revue Le Gnomoniste
Commission des cadrans solaires du Québec
J'ai trouvé votre article sur Internet. Veuillez recevoir mes félicitations, je suis content de trouver du
monde avec la
même sensibilité,
si loin de chez
moi!
Je ne peux pas
résister à la tentation de vous
envoyer une photo de mon cadran
solaire.
C'est
quelque
chose
de très primitif et
simple, mais que
j'apprécie beaucoup, parce qu'il
m'a servi à étudier et comprendre un peu cette
science. J'ai aussi fait une application informatique
(sur Excel) pour le dessin de cadrans verticaux déclinants, avec courbes analemmatiques. On utilise
comme données, les coordonnées solaires extraites d'un annuaire pour la navigation, les coordonnées géographiques et l'orientation du mur. J'ai toujours travaillé d'une manière isolé, et j'aimerais bien
trouver des autres amateurs pour partager des expériences. À Barcelona, je sais qu'il y a du monde
qui travaille sérieusement dans ce sujet, mais je n'ai
Volume V numéro 1, mars 1998
pas réussi à les contacter. Salutations.
Josep SERRATS < jserrats @ mail.cinet.es >, 14
décembre 1997,
Lepant, 254, 3e, 08013, Barcelona, Espagne
——
Cher Monsieur
Bonne année 1998! Réussite de la CCSQ! À la réunion de Paris, j'avais prévu la présentation du Document "cadrans solaires peints à fresque"...Il y a
projet d'édition, mais l'éditeur se faisant beaucoup
attendre, je distribue quelques exemplaires, pour
les principaux intéressés. J'en joins un, en cadeau
de nouvel an à la CCSQ. Très amicalement.
Pierre DALLET le 4 janvier 1998
4, rue des Fougères, 19200, USSEL, France.
——–
Cher Monsieur Bouchard
Midi à Sarthe…
Je vous souhaite
bonne année...
une
La plus ensoleillée possible
à vous et à tous les membres de votre société...
Merci encore pour l'exemplaire de Québec-Science
sur les cadrans du Québec.
Cordialement vôtre.
Jean-Michel ANSEL , le 6
janvier 1998
L'ATELIER D'HELIOS
La Provosté, 72590, St-Georges Le Gaultier,
FRANCE.
Correspondance
Le Gnomoniste
7
L'année 1997: celle de la visibilité pour la CCSQ
par André E. Bouchard
Correspondance L'année 1997 aura été l'une des
plus actives et des plus prolifiques pour la Commission des Cadrans solaires du Québec et pour
son secrétaire général. La visibilité qui en résulte
donne des ailes et, en même temps, essouffle votre
rédacteur en chef. Pourtant, tout s'est déroulé sans
préméditation de ma part. Voici ma philosophie
dans ces circonstances. La meilleure planification
réside toujours dans une attention particulière au
hasard et dans des réponses spontanées aux occasions qui se présentent. En voici les résultats.
(Société d'astronomie du Planétarium de
Montréal). Remis à André E. Bouchard Ph.D.,
pour sa contribution exceptionnelle à la promotion de l'astronomie, dans la revue HYPERESPACE , Bulletin-liaison de la SAPM, Vol VIII, No
1, printemps 1997.
ΠLe 1er mars 1997: publication du Bulletin LE
GNOMONISTE , Vol 4 No 1, printemps 1997.
Œ Au printemps 1997: je prépare les corrections de
notre Site Web, en prévision de la rencontre annuelle de la CCSQ. Notre Site est très connu en
dehors du Québec.
ΠLe 1er juin 1997: publication du Bulletin LE
GNOMONISTE , Vol 4 No 2, été 1997.
Œ Le 5 juin 1997: Édition et publication des écrits
de la Commission par les Éditions Communications ABC inc. d'Outremont, et dépôt légal de
ces publications à la Bibliothèque nationale du
Québec :
"Le Site Web de la Commission des Cadrans
solaires du Québec", ISBN 2-922333-00-0;
"LE GNOMONISTE", Vol 1, 1994-1995, ISBN
2-922333-01-9 ,
"LE GNOMONISTE", Vol 2, 1995, ISBN 2922333-02-7 ,
"LE GNOMONISTE", Vol 3, 1996, ISBN 2922333-03-5 .
ΠLe 9 juin 1997: dans le journal LE DEVOIR de
Montréal, présentation par Isabelle Quentin de
notre rencontre annuelle de la CCSQ à Chicoutimi.
ΠLe 14 juin 1997: rencontre annuelle de la Com-
mission dans les locaux de l'Université du Québec à Chicoutimi .
Œ En février 1997: je publie un article "Les cadra-
niers: ces fabricants de cadrans solaires au Québec", dans la revue Paroles, Gestes et Mémoires , Vol 3 No 3, p.20, du Patrimoine vivant.
Œ Le 28 février 1997: je reçois le Prix de la SAPM
8
Le Gnomoniste
ΠLe 19 juillet 1997: dans le journal LA PRESSE
de Montréal, deux pages sur les cadrans solaires: "Une autre façon de lire le temps", plusieurs
articles par André Duchesne. Ce cahier du samedi eut de très grandes retombées.
André E. Bouchard
Volume V numéro 1, mars 1998
Œ Le 5 août 1997: je par-
ticipe à une entrevue à la
Télévision Outremont ,
avec trois diffusions sur le
câble de la télévision
communautaire, dans la
semaine du 11 au 17
août 1997.
Œ Le 15 août 1997: je
publie une étude "Un cadran solaire démaquillé", Propos d'un gnomoniste au sujet d'un cadran de Sainte-Adèle
(1634) , (photo ci-dessus) par les Éditions Communications ABC inc.
"La route des cadrans solaires du Québec" et
"Comment fabriquer un cadran solaire".
ΠLes 18-19 octobre 1997: je donne une communi-
cation à Paris: "Présentation et travaux de la
Commission des Cadrans solaires du Québec",
dans le cadre du 25e anniversaire de la Commission des cadrans solaires (de la Société astronomique de France). La conférence fut donnée
au Palais de la Découverte, avenue Franklin D.
Roosevelt. M. Yvon Massé en donne une aussi
sur "les cadrans de type analemmatique à projection centrale avec le centre au-dessus ou audessous de la table".
ΠLe 1er novembre 1997: publication d'un de mes
Œ Le 27 août 1997, je donne une conférence "Les
cadrans solaires au Québec de A à Z " à la Tour
Martello 2, des Plaines d'Abraham de Québec,
pour la Commission des champs de batailles
nationaux .
textes "Un cadran solaire de précision: l'héliochronomètre", in Le Mercure Solaire , Vol 7, no.
3, automne 1997, p. IX-XI. C'est la revue d'Énergie Solaire Québec .
Œ Le 14 novembre 1997: je donne une conférence
ΠLe 1er septembre 1997: publication du Bulletin
LE GNOMONISTE , Vol 4 No 3, automne 1997.
à la Société d'astronomie du Planétarium de
Montréal: "Comment fabriquer un cadran solaire".
Œ Le 1er septembre 1997: l'éditorial du Gnomo-
niste, Vol 4 no 3, est traduit et diffusé dans The
Compendium , the
journal of The North
American
Sundial
Society , Volume 4
Number 3, Sept.
1997, p.30.
ΠLes 11-14 septembre
1997: je participe à la
rencontre annuelle de
la North American
Sundial
Society
(NASS), à Chicago, USA, au Planétarium
Adler. J'y présente une communication: "The
Québec Sundial Society: A Follow-UP of The Activities, 1996-1997".
ΠLe 21 septembre 1997: article de Jocelyn Bour-
bonnais, "La Visitation «retrouve» son cadran solaire", dans le COURRIER AHUNTSIC, page 6.
On y fait état de la restauration de Monsieur André Beaulieu.
Œ Le 1er décembre 1997: publication du Bulletin
LE GNOMONISTE, Vol 4 No 4, hiver 1997.
Une année bien remplie. Ne croyez-vous pas? Une
année aussi d'utilisation consciente des médias
écrits et électroniques.
Certes, la Commission y gagne en visibilité et en
influence. Un souhait accompagne cet exposé: que
les membres de la CCSQ en retirent aussi une fierté toute légitime.
Il convient en même temps de garder l'enthousiasme du début, en continuant la "chasse aux cadrans" et en envoyant l'information pertinente
(textes et photos) au secrétariat de la Commission.
Pour ma part, je compte bien publier le Vol 4 du
GNOMONISTE, et ajouter des pages de contenu au
Site Web de la Commission.
Œ Le 1er octobre 1997: dans la revue Québec-
Science , octobre 1997, Vol 36, No. 2, dans le
supplément de ASTRONOMIE QUÉBEC , (pp.29): je publie le dossier sur les cadrans solaires:
Volume V numéro 1, mars 1998
André E. Bouchard
Le Gnomoniste
9
Un cadran de hauteur Capucin (suite et fin)
par J. Serge Dion Baie-Saint-Paul, (serged @ cite.net)
(Note de la direction: dans LE GNOMONISTE, Vol 4 No 4, de décembre 1997, p. 11-12, vous trouverez la
présentation du cadran de hauteur Capucin.)
Voici les 5 étapes pour le réaliser en utilisant la façon géométrique.
De A, élever AE en faisant un angle égal avec
votre latitude du lieu (ici 45 degrés) avec AB.
De A, tracer aussi AD et AJ, donnant un angle
de 23,5 degrés de chaque côté de AE.
En E, tracer DEJ perpendiculaire à AE, 6E
étant sur la ligne XY).
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Le Gnomoniste
J. Serge Dion
Volume V numéro 1, mars 1998
Volume V numéro 1, mars 1998
J. Serge Dion
Le Gnomoniste
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Et voilà le cadran Capucin.
Courrier 2:
Nouvelles en vrac
Monsieur
Merci pour votre site
Je n'ai pas cependant trouvé la méthode de fabrication (ou les grands principes) de cadrans solaires
verticaux. Peut-être n'ai-je pas été suffisamment patient. Pourriez-vous m'informer à ce sujet? Merci
encore. Jean Careau St-André d'Argenteuil, < rivrouge @ montrealnet.net >, le 28 décembre 1997.
Nouveaux cadrans du répertoire: cadran double,
vertical est et vertical ouest. Recueilli à Baie-SaintPaul par Mélanie Desmeules et Gérald Savard
———
Monsieur Bouchard
C'est avec grand intérêt que j'ai parcouru votre site
Internet, d'ailleurs très passionnant, puisque j'envisage la construction d'un cadran solaire.
Pourriez-vous m'indiquer quelques sites internautes
où je pourrais trouver des plans de construction à
cet effet?
Je vous remercie d'avance et je vous souhaite une
excellente journée.
Claude Lavoie , urbaniste, ouq, < lavoiurb @ total.
net >, le 19 janvier 1998.
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Le Gnomoniste
Courrier
À la prochaine. André E. Bouchard.
Volume V numéro 1, mars 1998

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