Christian Van Geloven
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Christian Van Geloven
RÉGIO N 3 Samedi 22 novembre 2008 TE03- De nouveaux soupçons sur Christian Van Geloven ? RAPPEL ➜ Condamné en 1994 à la réclusion criminelle à perpétuité pour le viol et le meurtre de deux petites filles à Elne (P-O), Christian Van Geloven, 64 ans, a-t-il commis d’autres crimes ? Son cas fait partie des dossiers criminels sur lesquels se penchent depuis plusieurs mois les gendarmes de l’Isère. En début d’année, une cellule, "Mineurs 38" a été créée, afin de tenter d’élucider neuf meurtres ou disparitions d’enfants, survenus autour de Grenoble entre 1983 et 1996. Ce n’est pas la première fois que Van Geloven, aujourd’hui détenu à la prison d’Ensisheim (Haut-Rhin) est ainsi soupçonné. Christian Van Geloven, ici avec son avocat Me Furbury, lors de son procès à Perpignan en 1994. Arch. B. VEDEL R U CŒ Ludovic, Gregory, Anissa, Chara- zed, Nathalie, Fabrice, Rachid, Sarah, Saïda… Neuf prénoms pour neuf enfants mystérieusement disparus ou victimes de crimes, entre 1983 et 1996 dans le département de l’Isère. Un seul, Gregory a survécu à celui qui l’avait laissé pour mort dans une décharge. Tous, aujourd’hui, sont au cœur des dossiers qu’examinent les douze enquêteurs et analystes criminels de la cellule "Mineurs 38", créée en début d’année à Grenoble par la gendarmerie. « Il n’est pas anodin que des enfants aient fait l’objet de violences dans une même région », expliquait en début d’été Martine Valdes-Boulouque, la procureur général de Grenoble, en lançant un appel aux témoins susceptibles d’aider au réexamen de ces dossiers. Depuis, la cellule "Mineurs 38" essaie d’établir des rapprochements entre ces faits anciens et le profil ou le parcours de différents criminels ayant sévi en France. Et parmi eux figure Christian Van Geloven, ce pédophile arrêté après avoir enlevé Muriel et Ingrid, 10 ans, le 19 octobre 1991 à Elne. Leurs corps martyrisés avaient été découverts, sur les indications de leur bourreau, au fond d’un gouffre du cirque de Navacelles (Hérault). « Cette piste figure parmi celles qui sont étudiées », indique Véronique Denisot, substitut général à la cour d’appel Les gendarmes enquêtant sur des meurtres d’enfants en Isère établissent des rapprochements de Grenoble, confirmant ainsi une information publiée hier par le journal Aujourd’hui en France. « Mais elle n’est pas plus privilégiée que les dizaines d’autres qui sont suivies. Pour les enquêteurs, c’est un travail de fourmi. » Parmi les éléments qui, selon le journal, intriguent les enquêteurs, la découverte par deux spéléolo- gues, dans une grotte du Vercors « d’un squelette d’enfant au crâne fracassé avec un objet lourd ». Faut-il y voir la façon dont Van Geloven a opéré ? Pas sûr. « Ce qui a été découvert, ce n’est pas un squelette, mais des ossements humains et animaux », nuance la magistrate grenobloise. « En 1985, une datation au carbone 14 a été faite, qui avait déterminé que pour ces ossements, la datation était supérieure à dix ans. Cela a permis à l’époque d’éliminer tout rapprochement avec ces dossiers ». Reste que le profil et le parcours de Christian Van Geloven font qu’il fait forcément partie, dans l’absolu, des suspects potentiels. « Je suis intimement convaincu qu’il a commis d’autres crimes », estime Johnny Gendre, 58 ans, qui était à la section des recherches de Montpellier le chef d’enquête sur l’affaire Van Geloven. En gagnant sa confiance, il avait obtenu du suspect qu’il conduise les enquêteurs là où étaient les corps. « Van Geloven avait agi méthodiquement, en s’éloignant de son domicile, pour venir chercher ses victimes au bord de la Méditerranée, loin de ses bases », poursuit le gendarme, aujourd’hui retraité à Génolhac (Gard). « Après les faits, il n’a pas paniqué. Il a fait tout ce qu’il fallait pour dissimuler les indices. S’il ne nous amène pas à Navacelles, jamais on n’aurait retrouvé Ces rapprochements entre Christian Van Geloven et les meurtres d’enfant en Isère ne sont pas une surprise pour Me Etienne Nicolau, l’avocat perpignanais des familles d’Ingrid et Muriel. « A l’époque du procès, j’avais eu connaissance qu’un rapprochement avait été fait entre la disparition d’un ou deux enfants dans l’Isère et le passage de Van Geloven dans la région. » Et l’avocat poursuit, révélant au passage un élément troublant. Après l’arrestation, « un ADN masculin a été retrouvé sur un objet sexuel qui a servi aux sévices subis par les petites filles d’Elne. Ce n’était pas celui de Van Geloven. Alors, soit l’enlèvement a été effectué en la présence d’un deuxième homme, soit cet objet avait été utilisé sur une autre victime, préalablement. » L’avocat en est convaincu : « Avec les progrès de la science, on peut utiliser des éléments du dossier d’Elne pour confondre un autre assassin, ou identifier une autre victime. » Seul obstacle : qu’est devenu ce scellé judiciaire, dix-sept ans plus tard ? Il aura fallu moins de deux mois à la gendarmerie maritime de Sète pour mettre fin aux agissements de deux hommes, d’origine française, âgés d’une trentaine et d’une cinquantaine d’années. L’enquête a été rapide, grâce à d’importants moyens humains et techniques mis en place. Mais aussi avec le concours de la brigade de recherche de la gendarmerie maritime de Toulon, ainsi que du centre de coopération police et douane basé au Perthus. Les faits : le 3 octobre, une vedette rapide Flyer 570, qui développe 115 CV, est volée dans les canaux de Sète. Sur place, la brigade maritime Le catamaran et les deux malfrats ont été retrouvés en Espagne. D. R. soupçonne immédiatement deux individus déjà connus pour trafiquer des stupéfiants. Deux semaines plus tard, le 17 octobre, un catamaran de 13 m, d’une valeur de 300 000 €, est dérobé à Port-Camargue, dans le Gard. Deux témoignages, qui évo- quent la présence autour du voilier d’un petit bateau, permettent de faire le lien. Cette petite vedette sera retrouvée fin octobre sur une plage de la Costa Brava, en Espagne. Les recherches s’organisent et le catamaran, maquillé, est ensuite localisé. La Me Figuerroa : « Je demande à voir » Me Martine Figuerroa, l’avocat montpelliéraine qui a défendu Christian Van Geloven devant la cour d’assises, aux côtés de Me Furbury, aujourd’hui décédé, reste très sceptique sur l’éventuelle implication de son client dans d’autres crimes. « A l’époque, on s’était déjà posé des questions pour savoir s’il n’y avait pas d’autres dossiers. Cela n’avait rien donné. C’est une vieille technique policière que de ressortir des dossiers similaires quand quelqu’un est arrêté. Pour ma part, je demande à voir. » Et l’avocate poursuit. « C’est un peu la tarte à la crème, chaque fois qu’on a besoin d’un tueur d’enfants, on ressort Van Geloven. » Selon elle, « quoi qu’il ait fait, et sans vouloir minimiser ses actes, le seul réflexe d’humanité qu’il a eu, c’est de révéler où étaient les corps. Sinon, les gendarmes n’avaient aucun élément. Compte tenu de la peine prononcée contre lui, la réclusion criminelle à perpétuité, pourquoi n’aurait-il pas dit ce qu’il avait d’autre à avouer, pour décharger sa conscience ? » Appel à témoins Les enquêteurs de la cellule "Mineurs 38" sont toujours à la recherche de témoignages permettant de faire progresser l’enquête sur ces neufs meurtres et disparitions concernant cinq filles et quatre garçons âgés de 5 à 16 ans entre 1983 et 1996. Pour cela, un numéro vert 0800 002 032, et une adresse mail [email protected] Perpignan 14 ans de réclusion de plaisance ont été arrêtés ➜ En octobre, ils ont dérobé une vedette à Sète puis un catamaran à Port-Camargue François BARRÈRE Le mystérieux ADN de 1991 Sète Les voleurs de bateaux LES FAITS les corps. » Il est vrai que cet homme, qui passait pour un brillant directeur commercial, a passé l’essentiel de sa vie à agresser sexuellement des enfants. Sa demi-sœur était venue témoigner devant la cour d’assises de Perpignan, en 1994, des viols qu’elle avait eu à endurer depuis sa petite enfance. En 1983, l’année où ont lieu les deux premiers crimes de l’Isère, Van Geloven vit à Orléans, où il écope, en novembre, de deux ans de prison ferme, après avoir agressé deux fillettes. Il sort en janvier 1985, après avoir passé treize mois en détention, s’installe à Saint-Diziers (Haute-Marne). Il sera à nouveau condamné à deux mois de prison avec sursis en décembre 1990, là encore pour des agressions sexuelles sur mineur. Entretemps ont eu lieu cinq des meurtres ou disparition d’enfants étudiées par "Mineurs 38". Un seul cas, celui de Nathalie, est incompatible avec la vie de Van Geloven : en août 1988, lorsque la fillette est tuée, il est en voyage d’affaires aux Etats-Unis. Enfin, deux meurtres sont survenus en 1996, alors qu’il était déjà en prison. Quoi qu’il en soit, les gendarmes veulent rester prudents : « Ce n’est pas étonnant qu’on soit amené à s’intéresser à Van Geloven, comme à tous les tueurs d’enfants », explique le général David Galtier, patron de la police judiciaire à la gendarmerie. « Mais là, on anticipe beaucoup… » ● guardia civil arrête un des deux hommes (l’autre prend la fuite) mais le relâche faute de preuves évidentes. De retour en France, les deux individus sont interpellés pour vol en réunion sur commission rogatoire du Procureur de Montpellier. Ils nient d’abord les faits mais ne tardent pas à être confondus et avouent. Ils sont, depuis, placés sous contrôle judiciaire strict en attendant leur jugement. Les deux bateaux - le petit, que les voleurs avaient mis en vente, a subi quelques dégâts - ont été restitués à leur propriétaire. La raison des vols reste indéterminée mais les gendarmes n’écartent aucune piste. Des gendarmes dont la connaissance du milieu et les moyens mis à disposition leur ont permis d’être efficaces face à ce type de délit, plutôt rare dans la région. ● Y. D. pour le meurtrier de Fabien RAPPEL ➜ En février 2007, Fabien Forniès, 19 ans, a été égorgé à Salses après une bagarre Agé de 17 ans au moment des faits, l’accusé a été condamné, hier, par la cour d’assises des mineurs à 14 ans de réclusion. Après les faits au premier jour du procès, jeudi, hier, la famille de la victime est venue raconter à la barre sa douleur déchirant. Parce que Fabien Forniès n’a pas eu le temps de prononcer un mot, ce 21 février 2007 où il a eu la gorge tranchée à 19 ans sur la place de Salses. Parce qu’il n’est plus là. Aurélie, la petite amie de Fabien, s’est avancée la première pour simplement dire combien elle l’aime. Jacques, son père, les mains tremblantes accrochées à un bout de papier où il a jeté quelques notes, a raconté pêle-mêle les 19 ans de bonheur passés avec ce fils dont il ne peut plus regarder les photos, « le gamin que c’était » et « le sang ». « Regarde-moi dans les yeux ! » Fatima, la maman de Fabien, s’adressant à l’accusé, a, elle, crié son agonie. « Fabien, c’était l’homme de ma vie », a-t-elle lancé. L’accusé ne lève pas les yeux, alors que la salle retient mal ses larmes face à cette mère qui pleure son enfant mort pour rien. L’avocate générale a demandé la requalification des faits en « assassinat », requérant une peine comprise entre 13 et 15 ans de réclusion criminelle assortie d’un suivi socio-judicaire pendant 10 ans. Au terme de 2 heures de délibérations, la cour d’assises n’a finalement pas retenu la préméditation et a condamné l’accusé à 14 ans de réclusion criminelle, assortis d’un suivi socio-judciaire pendant 5 ans. 14 ans de prison. Et toujours aucune réaction dans les yeux de l’accusé… ● Laure MOYSSET L’Indépendant