LES JEUX DE SOCIETE AU TEMPS DES LOISIRS

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LES JEUX DE SOCIETE AU TEMPS DES LOISIRS
LES JEUX DE SOCIETE
AU TEMPS DES LOISIRS
HISTOIRE DES CARTES ET DU SCRABBLE
LES CARTES
Quelle est l’origine des cartes à jouer ?
Les cartes à jouer sont apparues en Europe à la fin du XIVe siècle.
Très peu de textes et de jeux datent de cette époque ; il est donc difficile de savoir quelle est
l’origine exacte des cartes à jouer. La seule certitude est que les cartes n’ont pas été inventées
en Europe.
Les principales hypothèses :
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La Chine : les Chinois en utilisaient sous une forme embryonnaire dès le VIIe siècle,
mais la parenté de ces « cartes à jouer » avec les cartes européennes, via Marco Polo,
est peu probable.
Le Proche-Orient : c’est très probable. On retrouve des traces remontant au XIIè ou
XIIIè siècle d’un jeu mamelouk dont la forme est très proche du jeu italien. Par
ailleurs, le nom de certaines figures (naib malik et thani naib) rappelle le mot

italien naibbe ainsi que le mot espagnol naipes, qui désignent les cartes à jouer.
D’autre part, un des plus anciens documents évoquant les cartes à jouer, la chronique
de Viterbe (1379) évoque les « Sarrasins ».
La Perse et l’Inde : il est probable que les jeux arabes aient eux-mêmes une origine
plus orientale, mais aucune preuve matérielle, aucun écrit ne peut confirmer cette
thèse.
D’autres hypothèses évoquent les gitans, mais elles ont été abandonnées, faute de preuves.
Les liens entre l’Europe et le Moyen-Orient sont nombreux, que ce soit par l’Espagne, alors
occupée par les arabes, ou par les marchands vénitiens et lombards. On pense que
l’introduction en Europe s’est faite à peu près simultanément par ces deux canaux.
Un succès foudroyant
Fabriquées et peintes à la main par des artistes reconnus, rehaussées d’or fin, les premières
cartes à jouer étaient réservées à une élite fortunée.
Les jeux de cartes vont toutefois se démocratiser rapidement, avec l’utilisation de procédés de
fabrication plus économiques : dans un premier temps, les cartes sont de très mauvaises
qualité, avec des coloriages grossiers au pochoir; plus tard, l’imprimerie permet des progrès
considérables. Dès 1420, des fabricants Suisses et Allemands produisent des jeux par milliers.
L’engouement est tel que l’Eglise s’en inquiète : de nombreux édits interdisent l’usage des
cartes. Dans certaines villes (Bologne en 1423, Nuremberg en 1452), des autodafés de jeux
sont organisés.
Le nombre des cartes et leur répartition (cartes de points, figures) se stabilisent très tôt. Par
contre, les symboles des 4 séries évoluent beaucoup suivant les pays, les époques et les
fabricants : animaux, fleurs, objets, … Ce n’est que vers la fin du XVe siècle que sont adoptés
les symboles encore utilisés de nos jours. Sauf en Italie et en Espagne, dont les cartes utilisent
dès le début les Bâtons, Epées, Coupes et Deniers hérités des arabes.
Les cartes détournées
Jusqu’au début du XIXe, le papier est rare. Comme le dos des cartes est blanc à cette époque,
beaucoup de cartes eurent une seconde vie et finirent en : mots doux, certificats de mariage,
cartes de visite, reconnaissances de dettes, réclames, ordres d’incarcération, … La révolution
française les a même utilisées comme monnaie !
Ces usages ont permis de sauver de nombreuses cartes de cette époque. On a ainsi retrouvé
des notes de Molière, Napoléon ou Rousseau, des listes d’invités de Louis XVI, …
Révolution industrielle
Pendant 4 siècles, les procédés de fabrication des cartes n’évoluent que très peu : les cartes
sont imprimée par xylographie (impression à partir d’une gravure sur bois). L’usure rapide
du bois impose de petites séries; la fabrication des cartes à jouer reste donc très artisanale.
Durant le XIXè siècle, le métier de cartier va se transformer, et les artisans sont remplacés
par des industriels, tels que B.P Grimaud en France. De nouveaux procédés d’impression
permettent de plus grandes séries : lithographie (la pierre remplace le bois), puis offset. Les
coins s’arrondissent grâce à une invention acquise et exploitée par B.P. Grimaud, l’opacité et
le vernissage des cartes sont perfectionnés pour obtenir des cartes toujours plus durables.
Naissance du tarot
Le tarot est né au XVe siècle en Italie, avec l’ajout d’une série de trionfi (atouts) au jeu de
cartes italien « classique » (coupes, épées, bâtons et deniers) et d’une dame entre le Roi et le
Cavalier.
Au XVIe et XVIIe siècles, le terme tarocchi (qui donnera Tarock en allemand et tarot en
français) s’impose. Au XVIIIe siècle, le jeu se répand en Europe, en France, en Allemagne,
mais ce n’est qu’après que les cartiers allemands eurent l’idée de remplacer les enseignes
italiennes par les enseignes françaises que le jeu de tarot y connut sa vraie popularité.
En 1900, l’administration française demande à BP Grimaud de créer un «tarot nouveau» pour
lutter contre le succès des cartes allemandes. Ce jeu est à peu de chose près celui qui est
utilisé de nos jours.
Apparition du tarot divinatoire
Le tarot divinatoire est né en France au milieu du XVIIIè siècle. La première référence
connue provient d’Antoine Court de Gébelin, qui donne une nouvelle histoire du jeu de tarot,
liée au livre égyptien de Toth (Le Monde primitif, 1725-1784). Quelques années plus tard,
Etteilla proposa une méthode de divination par le tarot basée sur les théories de Court de
Gébelin.
HISTOIRE DU SCRABBLE
On doit l'invention du Scrabble® à un architecte américain, Alfred Mosher Butts, né en
1900. Passionné de jeux de lettres et particulièrement d'anagrammes, il se retrouve au
chômage en 1929 lorsque le krach boursier de Wall Street ébranle l'Amérique.
Il profite de son temps libre pour réfléchir à un jeu de société qui mettrait à la portée du grand
public le jeu des anagrammes, jusque-là réservé aux cercles intellectuels. Il envisage
rapidement l'utilisation de 100 jetons, correspondant chacun à une lettre, le nombre
d'exemplaires de chaque lettre étant déterminé par sa fréquence dans la langue anglaise. Pour
cela, il épluche la première page d'un exemplaire du New York Times.
Son premier jeu, "Lexiko" pose ainsi les fondements du futur Scrabble®. Une partie oppose
plusieurs joueurs qui piochent chacun sept lettres parmi les 100 disponibles dans le jeu.
Chaque joueur doit essayer de former un mot de sept lettres, et s'il n'y parvient pas il peut
changer plusieurs lettres. Lorsqu'un joueur parvient à former un mot, il gagne la manche et
tous les joueurs piochent sept nouvelles lettres.
La fabrication du jeu est encore artisanale : Butts conçoit lui-même les 100 jetons sur du
contreplaqué. Jouant régulièrement avec des amis, il envisage diverses améliorations,
notamment l'utilisation d'un sac en toile pour mélanger les lettres, mais cette idée est
abandonnée car les jetons en contreplaqué s'usent trop rapidement lorsqu'on les mélange.
Une autre idée consiste à ne plus arrêter une partie dès que l'un des joueurs a trouvé un mot de
sept lettres : la partie se poursuivrait jusqu'à épuisement des jetons, avec des mots de longueur
progressivement décroissante. Et pourquoi ne pas récompenser un joueur qui arriverait à
former un mot en utilisant des lettres peu usitées dans la langue anglaise ? Il suffirait
d'attribuer une valeur à chaque lettre ! Butts procède à une nouvelle étude statistique du
nombre d'occurrences de chaque lettre dans la langue anglaise, de sorte à leur attribuer une
valeur adéquate.
Vient ensuite l'idée de jouer non pas mot par mot, mais en entrecroisant les mots sur une grille
de type "mots croisés", en s'appuyant sur les lettres déjà posées par les autres joueurs. Butts
conçoit une grille de 15x15 sur laquelle le premier mot doit être posé sur la case du coin
supérieur gauche, et élimine la contrainte de longueur des mots posés. Puis vient l'idée
d'associer une dimension stratégique au jeu, en attribuant des particularités à certaines des 225
cases de la grille, faisant doubler ou tripler la lettre ou le mot posé dessus. La répartition de
ces cases valorisantes est faite de façon très géométrique, selon une parfaite symétrie.
Ainsi, au fil des années, le Lexiko se rapproche progressivement du Scrabble®. En 1933,
Alfred Butts décide de proposer son jeu à un fabricant de jouets. Il contacte la société
Selchow & Righter, qui s'avère peu convaincue par ce jeu apparemment trop complexe. Il
essuie également un refus de Parker Brothers et de Milton Bradley.
En 1935, Alfred Butts retrouve enfin du travail comme architecte et abandonne toute idée de
commercialiser son invention. Mais celle-ci continue à se faire connaître au fil de parties
organisées entre amis et, au gré d'un bouche à oreille favorable, un homme d'affaires, James
Brunot, apprend l'existence du jeu en 1939. Conquis, il contacte Butts afin de lui proposer la
commercialisation du jeu moyennant quelques adaptations, notamment l'ajout d'une case
étoilée centrale sur laquelle serait posé le premier mot joué.
Bientôt, la guerre éclate et les deux hommes se perdent de vue. En 1946, Brunot réapparaît et
obtient en 1948 les droits de fabrication et de diffusion du jeu. Il faut lui trouver un nouveau
nom : celui de Lexiko n'étant plus utilisé en raison de sa ressemblance avec le Lexicon, un jeu
de cartes également basé sur des lettres, le jeu a été entre-temps renommé "It" ("ça") puis
"Criss Cross Words". Butts et Brunot rédigent une liste de noms potentiels puis l'envoient à
un cabinet d'avocats afin que l'un d'eux soit retenu et déposé comme marque. Sur la liste
figurait le mot "scrabble"... Le brevet est déposé en novembre 1948, et le nouveau nom le 16
décembre.
Une société est créée en 1949 pour l'occasion, la Production & Marketing Company
(PMC), où travaillent Brunot, sa femme et un ouvrier. Les ventes du Scrabble® sont d'abord
confidentielles, mais progressent : 2251 exemplaires en 1949, 4800 en 1950, 8500 en 1951.
L'entreprise n'est guère florissante, et même déficitaire, mais chacun croit en l'avenir du
produit.
Un extraordinaire coup de pouce du destin survient en 1952 lorsque Jack Strauss, le président
du Macy's, le plus grand magasin de New York (et même du monde !) découvre le jeu durant
ses vacances et s'étonne, à son retour, de ne pas le trouver en stock dans ses rayons. Une
énorme commande est passée à PMC, et le Scrabble® devient rapidement le jeu à la mode
dans tous les Etats-Unis ! La vague s'étend même à l'Australie et la Grande-Bretagne, sous
l'impulsion de la société J.W. Spear & Sons.
La PMC doit s'agrandir pour répondre à la demande. Mais même avec 34 employés
désormais, la société à du mal à faire face à l'afflux des commandes, il faut donc trouver des
partenaires commerciaux et industriels. Ce sera d'abord la Cadaco-Ellis Company pour une
version économique du Scrabble® nommée le "Skip-a-Cross", puis Selchow & Righter
(S&R) pour la fabrication du jeu standard dans ses usines, la PMC se cantonnant à l'édition
d'une version "de luxe".
Malgré les moyens industriels de S&R (6000 jeux produits chaque semaine), la demande est
encore trop forte et les magasins doivent commander leurs exemplaires en quantités limitées.
A la fin 1954, les ventes totales dépassent les 4,5 millions d'exemplaires aux Etats-Unis ! Le
succès est réel.
James Brunot, débarrassé des contraintes de production, se consacre ensuite à des versions
étrangères du jeu. Il vise d'abord l'Amérique latine avec une version en espagnol, puis le
Canada et la France avec une version en français (1955). Des articles dérivés font également
leur apparition : plateaux tournants, jeux en Braille, version pour enfants, listes de mots...
Mais pas encore de dictionnaire officiel, malgré la demande pressante (il faudra attendre
1978 !)
Quant à Alfred Butts, ayant cédé ses droits en 1948, il continue à empocher les royalties et
n'apparaît qu'épisodiquement auprès des médias. Il décède le 4 avril 1993.
BONNES PARTIES !
ET ON NE TRICHE PAS !